alt

Effet Pangloss, ou les dangers des raisonnements à rebours

Dans la Traverse N°2, revue des Renseignements Généreux parue en mars 2011, a été publié un article de Richard Monvoisin initulé L’effet Pangloss, ou les dangers des raisonnements à rebours..En voici le pdf ! Merci aux Renseignements Généreux et à la graphiste Clara Chambon.
Et pour s’entraîner, on pourra aller vite fait ici.
Note : en 2010, des doctorants-moniteurs ont réalisé un excellent Zétéclip sur le raisonnement panglossien. Voir ici.

Effet Pangloss : les dangers des raisonnements à rebours

Aujourd’hui je vous propose de regarder de près un raisonnement qui a l’air tout à fait anodin mais qui peut se révéler terrifiant. Ce raisonnement consiste à penser à rebours. À la manière de ces poils qui poussent à l’envers et s’enkystent dans la peau, il est agaçant et difficile à éliminer, quelle que soit la dose de crème dont on l’enduit. Il est bien plus répandu qu’on ne le pense, et nous allons essayer de le débusquer au travers de quelques exemples.

Le Loto

Je vais partir de la loterie nationale française, ledit Loto. Ayant pour objectif de nous soutirer jusqu’à nos derniers sous en nous faisant miroiter une lointaine et peu probable carotte, ce jeu, nous allons le voir, ressemble à une forme élaborée de soumission librement consentie. Si nous avons un élève de terminale scientifique à portée de main, demandons-lui d’évaluer nos chances de nous faire détrousser, c’est à son programme de maths. Sinon, nous allons le faire ensemble, ce n’est pas très compliqué.

alt

« Le loto, c’est facile, c’est pas cher, et ça peut rapporter gros ». Slogan de 1984.

Depuis 2008, le nouveau Loto (qui est plus difficile à remporter que l’ancien si l’on compare) demande d’obtenir 5 numéros parmi 49, ainsi que le numéro « chance » tiré parmi 10. Le nombre de tirages possibles se calcule ainsi : frac{ 49 times 48 times 47 times 46 times 45 }{ 1 times 2 times 3 times 4 times 5} times frac{10}{1}= 19068840

Sachant qu’il y a trois tirages par semaine (le lundi, le mercredi et le samedi), une personne dotée d’une espérance de vie à la naissance de 2010 en France (moyenne Femmes-Hommes : environ 82 ans) et qui, chose invraisemblable, jouerait dès le berceau à tous les tirages aura rempli le jour de sa mort 82 (ans) x 52 (semaines) x 3 (tirages) soit quelque chose comme 13000 grilles, en voyant large. Ça lui donne un peu moins d’une chance sur mille de gagner une fois la cagnotte. C’est peu.

Pour avoir un autre ordre d’idée, nous pouvons prendre le taux annuel moyen de mortalité d’un individu garçon de 33 ans vivant en France comme moi, qui est de 119 sur 100 000 (soit 1 sur 840) – qui signifie qu’un type en France a une chance sur 840 de mourir dans l’année de ses 34 ans. Partons du principe que la probabilité de mourir est uniforme tout le long de l’année. Lorsque j’achète un billet de loto j’ai autant de « chances » de mourir dans les 24 minutes qui suivent que de gagner le gros lot. Si j’avais 90 ans, j’aurais autant de chance de gagner le gros lot que de ne pas survivre 9 secondes à l’achat du billet1.

En clair, un individu guidé par sa seule raison refuserait de claquer ses étrennes comme ça. Mais l’humain n’est pas toujours rationnel, loin de là. Et à l’orée du bois, les tire-laine guettent.

altMonique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon, deux sociologues ont décrypté le comportement des vainqueurs du Loto dans Les millionnaires de la chance (Payot, Paris, 2010). Ils expliquent que certains individus jouent au Loto en sachant bien que les chances de gagner sont minces, mais… moins minces que celles de changer de classe sociale. En d’autre terme, il serait plus probable pour les classes pauvres de devenir riche en cochant les cases qu’en travaillant d’arrache-pied – ce qui fait réflechir sur le  « mérite » et les encouragements à travailler plus.

Où est le raisonnement à rebours ? Il arrive.

Et les 100% de perdants ?

L’argument massue qui a été employé pour nous faire jouer pendant des années était, rappelons-nous : « 100% des gagnants auront tenté leur chance ».

Ce slogan, à bien y regarder, ne veut pas dire autre chose que ceci : « tous ceux qui ont gagné ont joué », ce qui ne nous apprend rien : on ne gagne pas au loto, au football ou au poker à l’insu de son plein gré – quoi que, lors des matchs nationaux de football, on en voie certains hurler en ville « on a ga-gné » alors qu’ils n’ont pas joué, que voulez-vous, c’est le charme chauvin du sport.

Le séduisant de l’affaire est qu’on nous édicte une règle sur les gagnants. Et comme vous et moi voudrions tous gagner, on se dit tiens, comment ont-ils fait ? Ont-il trituré un trèfle, un fer à cheval ? Eh bien non, ils se sont contenté de jouer. Ils ont tenté leur chance. Voilà. Mais si on y pense, la même chose est valable pour les perdants. Car, c’est ce que la Française des jeux ne nous dit pas : « 100% des perdants ont eu aussi tenté leur chance ! ». Et comble des choses, le 100% des perdants est vachement plus nombreux que le 100% des gagnants. Il n’y a pas beaucoup de gagnants, alors qu’il y a plein de perdants. Mathématiquement, ça se calcule, on a une chance de gagner le gros lot sur 19 millions et quelques (voir le tout premier calcul).

Chercher des raisons

Examinons maintenant ce qui se passe dans la tête d’un joueur lambda.

Quand il perd, il a une forte tendance à se dire quelque chose comme « la chance n’était pas là », puis à shooter dans une boîte de conserve qui traîne. C’était la normalité, qu’il ne gagne pas, il n’était pas dupe, il conclut parfois d’un l’air las « je ne gagne jamais, de toute façon » ou « de toutes les manières je n’ai jamais eu de chance au jeu ». Mais là où le perdant a somme toute un côté assez pragmatique, le gagnant lui, pas du tout ! Il en est même agaçant : il commence déjà par être content de lui, ce qui est une réelle faute de goût. Puis il se trouve plein de bonnes « raisons », comme « je le méritais », ou alors « j’ai joué les bons numéros », « je le sentais », etc.

C’est là que commence le raisonnement à rebours.

Les psychologues sociaux mettent des mots à cela, et c’est bien pratique : le perdant aura un « locus de contrôle » externe (la cause de son échec est le manque de chance, extérieur à lui), tandis que le gagnant aura un « locus de contrôle » interne (il attribue sa réussite à ses qualités propres, ce qui est horripilant). Depuis les travaux de Miller & Ross en 1975, on parle de biais d’autocomplaisance.

Rebours, rebours et ratatam

À chercher une raison pour avoir gagné, la tendance est forte à aller la trouver dans son mérite personnel, comme si le Hasard personnalisé se souciait d’évaluer nos mérites respectifs. Ou dans un coup du sort, comme une espèce d’ange gardien qui veille sur nous. Cela rejoint, vous vous rappelez peut être, le biais du monde juste (cf. Traverse N°1).

C’est effectivement le hasard (sans H majuscule) qui fait la différence entre le gagnant et le perdant. Si les 19 millions et quelques combinaisons possibles sont jouées, la probabilité que quelqu’un gagne est de 1 (on dit 1, mais ça veut dire 100%, tout comme une proba de 0,5 veut dire 50%).

Qu’il y ait un gagnant dans ces cas-là n’est pas une surprise. C’était même quasi-certain. L’incertain, c’est sur qui ça va tomber. Que ça tombe sur moi ou un inconnu, au fond, ce n’est qu’un aléa : il n’y a logiquement aucune conclusion à tirer, ni sur la beauté du monde, ni sur les numéros joués. Pourtant, c’est trop dur : devant la rareté statistique, on cherche une raison à rebours. Alors on se dit au choix

  • qu’on a de la veine,
  • qu’on s’est levé du pied droit,
  • qu’on avait touché sa patte de lapin,
  • que Dieu est bon,
  • que malheureux en amour, heureux au jeu,
  • que le hasard est gentil,

On se dit que quelque part (où ?) quelque chose (immatériel ?) comme la Chance lui a souri (avec quelles dents ?).

Mais le hasard n’est pas gentil. Ni méchant. En tant que volonté, il n’ « est » pas. Il n’obéit à rien, il se contrefout royalement de vous et de moi. Il ne se « contrefout » même pas.

Le sentiment d’avoir déjoué la volonté du Destin est d’ailleurs telle que bien peu veulent rejouer la semaine suivante la combinaison qui a déjà gagné, comme si elle était usée – ce qui n’a pas de sens, les tirages étant indépendants les uns des autres (on appelle ça le sophisme du joueur, je le dis pour l’anecdote).

alt

Raisonnement à rebours sur la bière, selon frère Joseph (extrait de Jean Van Hamme, Francis Vallès, Les maîtres de l’orge, vol. 1 1854, Charles).

Un balcon sur la tête de Tante Olga

Ce raisonnement à rebours nous arrive aussi en cas de coup dur. On a tous une histoire tragique en stock, comme un balcon qui se décroche juste au dessus de la tête d’une Tante Olga. Alors que la « normalité » est de ne pas se prendre le balcon sur la face (tout comme perdre au Loto), là, on se dit qu’il a « manqué » quelque chose à Tante Olga, du pot, de la veine, de la baraka, du cul bordé de nouilles. On se hasarde même à penser que les desseins du Seigneur sont impénétrables, ou que rien n’arrive par hasard, ou que c’était son karma, et qu’elle paye des vies antérieures plutôt fautives. Il se trouvera bien un vieux voisin un peu aigri, une vieille voisine grincheuse pour dire qu’au fond, entre nous, elle ne l’a pas volé2. Mais l’erreur est toujours la même : on se retrouve à raisonner à rebours sur ce cas seulement, et on oublie de replacer le cas dans la statistique de toutes les tantes (ou oncles) du monde qui se sont promenées un jour en passant sous un balcon et à qui il n’est rien arrivé, surtout pas un balcon.

Le TSD (tri sélectif des données)

Allons plus loin. Imaginons qu’à la terrasse d’une taverne, seul-e comme un menhir, vous jouez à pile ou face. Quelle est la probabilité d’obtenir cinq fois pile d’affilée ? Facile. 1 chance sur 2 au premier lancer (soit 0,5), pareil pour le deuxième, etc. Ça donne : 0,5×0,5×0,5×0,5×0,5 = 0,0312 environ, ça veut dire environ 3 chances sur 100.

Imaginons maintenant que dans 64 autres tavernes, 64 autres comme vous s’emmerdent à mourir et fassent la même chose. Là, la probabilité que vous fassiez 5 fois pile est toujours la même, mais la probabilité que l’un d’entre vous fasse 5 fois pile est, quant à elle, immense : il est quasiment certain que l’un des joueurs fera ce résultat. Et s’il est tout seul et ne regarde que sa lorgnette, il va conclure qu’il est quand même sacrément doué.

alt

On a envie de sourire, tellement c’est simple, et pourtant, cette erreur qui consiste à extraire le résultat extraordinaire de sa souche statistique et de le brandir comme un étendard est à la base de tout un tas de « miracles ». En voici quelques-uns.

Ötzi la momie

alt

Prenons la malédiction de la momie Ötzi : ce chasseur vieux de cinq milles ans retrouvé congelé en 1991 dans les alpes italo-autrichiennes aurait causé la mort de six personnages l’ayant approché de près, trois scientifiques, un journaliste, un guide de haute montagne, etc. Sachant le nombre conséquent de gens qui ont gravité autour du corps, depuis les expertises lors de sa découverte jusqu’aux visiteurs du musée italien de Bozen-Bolzano où il réside désormais, est-il si extraordinaire que six d’entre elles meurent, surtout lorsqu’elles sont soit pas spécialement jeunes (cinq sur six avaient plus de 50 ans) soit une profession à risque (guide de haute montagne, tué par une avalanche) ? Si l’on compare le nombre de morts rapporté au nombre de personnes qui ont approché Ötzi et sont restées vivantes, l’hypothèse de la malédiction, tout comme les dents de la momie, se déchausse.

Paul le poulpe

Il était une fois une pieuvre qui, durant la coupe d’Europe 2008 et la coupe du Monde 2010 de football masculin, a su déterminer douze des quatorze résultats d’épreuve qui lui ont été demandés. Certaines mauvaises langues disent que la pieuvre aurait actuellement moins d’un an (fin 2010), ce qui implique soit que le poulpe remonte le temps, soit qu’il y a eu deux poulpes, mais enfin peu importe.

alt 

Ce poulpe mâle, appelé Paul a mérité son surnom d’oracle d’Oberhausen en choisissant, soit disant avec une chance sur deux l’une des deux boîtes affublées des couleurs de chaque équipe (voir l’illustration) En évaluant ce que représentent 12 bonnes réponses sur 14, et en partant du principe qu’il ne pronostique pas les matchs nuls, la probabilité de réussite du poulpe par hasard était de 0,56 %, en gros une chance sur 200. A priori balèze, donc, l’octopode ! Mais bien peu ont enquêté sur le nombre de céphalopodes, de poissons, oiseaux ou autres bestioles de part le monde à qui on s’amuse à poser la question. Si un allemand sur 400 000 fait le coup avec un animal quelconque, on est assuré d’avoir au moins un labrador, un iguane ou un canard cendré qui aura un tel résultat par pur hasard. Suffit de placer ensuite le projecteur des médias sur l’œil humide du vainqueur, en évinçant tous ceux qui ont échoué, et le scénario de l’animal extraordinaire au tentacule malicieux peut se dérouler dans notre vitreux petit écran.

Est-ce risqué d’aller à Lourdes ?

C’est sensiblement le même processus pour les miracles de guérison de Lourdes. On ne peut que s’extasier des 67 miracles revendiqués par l’Église catholique sur le lieu saint depuis les visions de Bernadette Soubirous en 1858, mais posons-nous la question : y-a-t-il réellement plus de guérisons extraordinaires là-bas qu’ailleurs ?

Comme les chiffres sont assez imprécis, nous allons faire une simple estimation.

La principale étude de guérisons considérées comme miraculeuses en milieu hospitalier, là où on trouve un grand nombre de malades, a été réalisée dans le titanesque travail d’archives de O’Regan et Hirshberg3. Leurs résultats sur 128 ans indiquent que, le « taux de miracle » en hôpital est d’environ un cas sur 100 000. Comme la Commission médicale internationale de Lourdes ne prend pas en compte les 70 % de rémissions liées au cancer (car elles sont généralement précédées d’une thérapie, ce qui dilue la part du miracle), il nous reste quelque chose comme un cas de rémission pour 333 000 personnes dans les hôpitaux. Autrement dit, il y a dans les hôpitaux un cas « comme à Lourdes » sur 333 000.

Puisqu’une bonne partie des miracles eut lieu avant de véritables expertises scientifiques, et sont peu fiables même de l’avis de médecins de la Commission d’expertise, nous allons raisonner sur les cinquante dernières années, lors desquelles 5 miracles eurent lieu. Pour se donner une idée, pensons que le dernier en date, reconnu en 2005, porte sur une dame appelée Anna Santaniello, miraculeusement guérie en … 1952. Gardons tout de même ces 5 derniers cas.

Le secrétariat général des sanctuaires estime à plus de 6 millions le nombre de visiteurs de Lourdes par an – dont 1% sont malades. Sur les 50 dernières années, cela donne 300 000 000 visiteurs. Parmi eux, 1%, donc 3 millions de malades plein d’espoir. Retirons comme le fait la Commission de Lourdes les non-atteints de cancer, cela fait 30% des 3 millions, soit environ un million de personnes malades sans cancer, donc susceptibles de vivre un miracle pouvant être homologué.

Cinq miracles sur un million, c’est à peine supérieur à la moyenne des miracles en hôpitaux. La moyenne des hôpitaux étant une moyenne, on comprend bien qu’il y en a affichant des scores meilleurs, d’autres des scores moins bons, et que cela forme une sorte de résultat en cloche autour de la moyenne. Le résultat de Lourdes tombe dans les résultats de cette cloche, et les matheux avec leur langage diraient que son résultat n’est pas significatif. Il semble donc que Lourdes ne soit pas un endroit plus propice aux miracles que l’hôpital près de chez nous, et que si nous en avons l’impression, c’est parce que chaque cas Lourdais est fortement médiatisé.

Certaines mauvaises langues ajoutent que si l’on compte le nombre de gens qui se sont tués sur la route pour aller à Lourdes, alors il semble en fin de compte plutôt risqué d’y faire pèlerinage.

Une pente panglossienne

Quel est le lien entre le « chanceux » au Loto et les frères Bogdanoff ?

Quel est le trait commun entre Paul le poulpe et les créationnistes « scientifiques » ?

Quel est le fil conducteur entre le « miraculé » de Lourdes et la fameuse main invisible du marché ?

Il s’appelle Pangloss. C’est, peut être vous rappelez-vous, le precepteur de Candide, dans le conte de Voltaire. Il enseigne la métaphysico-théologo-cosmolonigologie, et répète à qui mieux-mieux qu’ admirablement qu’il n’y a point d’effet sans cause, et que, dans ce monde qui est le meilleur des mondes possibles, le château de monseigneur le baron était le plus beau des châteaux et madame la meilleure des baronnes possibles.

Pangloss dit surtout :

« Il est démontré (…) que les choses ne peuvent être autrement : car, tout étant fait pour une fin, tout est nécessairement pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes, aussi avons-nous des lunettes. Les jambes sont visiblement instituées pour être chaussées, et nous avons des chausses. Les pierres ont été formées pour être taillées, et pour en faire des châteaux, aussi monseigneur a un très beau château ; le plus grand baron de la province doit être le mieux logé ; et, les cochons étant faits pour être mangés, nous mangeons du porc toute l’année : par conséquent, ceux qui ont avancé que tout est bien ont dit une sottise ; il fallait dire que tout est au mieux. »….4.

Il s’agit d’une resucée de ce que le XIXe siècle a appelé la métaphore de l’horloger, que l’on doit au philosophe William Paley, et qui dit ceci

  1. Si l’on regarde une montre, on comprend très vite que la finesse de cette fabrication a nécessité quelqu’un pour la penser, — en l’occurrence un horloger.
  2. Si l’on regarde un phénomène naturel incroyablement fin / complexe / beau / rare / étrange / miraculeux on est contraint (au nom de l’horloger) de penser que la finesse / complexité / beauté / rareté / étrangeté de ce phénomène a nécessité quelque-chose pour la penser, pour la vouloir, c’est-à-dire un créateur intelligent ou un dessein cosmique.
  3. Donc un créateur ou un dessein existe.

Le melon, le schtroumpf, les Bogdanoff

Les exemples de cette dérive panglossienne se comptent par centaines. Cela démarre par des trucs rigolos, comme le melon, qui, selon Jacques-Henri Bernardin de Saint Pierre « a été divisé en tranches par la nature afin d’être mangé en famille. La citrouille étant plus grosse peut-être mangée avec les voisins.» 5

alt

Cela fait tout de suite moins rire quand des créationnistes chrétiens, juifs, ou plus récemment musulmans comme Harun Yayah viennent expliquer dans certaines écoles que l’œil humain, la synthèse des protéines, ou l’apparition de la conscience ne sont pas le produit d’une évolution mais d’un créateur et que l’Humanité a été créée par la volonté de Dieu. Cela fait vite frémir quand, de la même manière que le gagnant du Loto croit qu’il est élu par la Chance, Igor et Grishka Bogdanoff, ou Trinh Xuan Thuan le physicien bouddhiste croient l’univers trop finement réglé pour être le fruit du hasard physique (ce qu’ils appellent le fine-tuning, ce que d’autres appellent l’irréductible complexité).

 CorteX_Horlogerie

On vient par cette occasion implanter une lecture finaliste des choses, l’idée qu’avant que toute chose démarre il y a comme un plan, une idée préconçue, une main invisible qui guide le processus et qui, implacablement, place chaque élément à sa juste place. C’est beau, c’est frais, c’est rassurant… mais c’est la fin de la connaissance, et c’est l’entrée des explications simples. Car finalement, dans quelque univers que l’on vive, même différent, on pourrait conclure la même chose : que tout est bien dans le meilleur des mondes, et que madame la baronne est la meilleure des baronnes possibles. Tout être vivant, qu’il soit Paul le poulpe, une bactérie ou un martien, pourrait conclure lui-aussi qu’il est le but ultime du Dessein Intelligent, d’une volonté cosmique. C’est irréfutable.

Dans un épisode des Schtroumpfs, on voit un des personnages décocher une flèche avec son arc les yeux fermés, puis chercher sa flèche. Une fois trouvée, il s’applique à peindre une cible autour du lieu de l’impact et… repart tout fier.

Pangloss et la fin des « possibles »

On trouve également Pangloss caché derrière l’idée que si le capitalisme s’est imposé, c’est qu’il le fallait, inexorablement, et que la main invisible du marché veille au grain. Pangloss passe par la porte quand les anciens rapports coloniaux affirmaient que puisque les Noirs étaient corvéables un peu partout, c’est qu’il devait y avoir un ordre naturel des choses. Pangloss se glisse dans la cuisine en instillant que si les femmes s’occupent des enfants et font le ménage, c’est qu’elles sont « faites » pour ça. Pangloss revient par la fenêtre quand il nous murmure à l’oreille que c’est dans l’ordre des choses que nous torturions d’autres animaux. Pangloss se tortille dans nos postes de télévision quand, on conclue parmi tous les possibles que tout est de la faute de la CIA, de la maffia russe, du lobby gay et lesbien, de la Mondialisation, des Francs-Maçons, des Sages de Sion… Éloge du scénario simple pré-écrit par des groupes supérieurs inaccessibles.

Le raisonnement des Bogdanoff des défenseurs du fine-tuning, des créationnistes, d’une bonne part des scénarios capitalistes, des théories racistes, sexistes et spécistes6 est le même : il vient essentialiser l’état actuel du monde comme une nécessité, comme une sorte de destin. Pangloss, que ce soit en jouant sur un tri des données ou sur un tri des « possibles », vient troquer la connaissance contre une croyance. C’est en cela qu’il est trompeur et séduisant : en faisant miroiter un finalisme facile, il évince notre capacité à repenser notre vie, nos actes et nos préjugés. Il nous gèle intellectuellement et nous nourrit de scénarios implacables, de karma, de mektoub, autant de chapes de plomb contre lesquelles on nous fait croire qu’on ne peut pas se révolter.

Richard Monvoisin

1 Statistiques disponibles ici.

2 Eh oui, vous l’aviez reconnu, c’est encore le biais du monde juste ! (cf Traverse N°1).

3 Ils ont recensé 1574 cas dans le laps 1864 – 1992. O’Regan, Hirshberg, Spontaneous Remission: An Annotated Bibliography (1993).

4 Voltaire, Candide et autres contes V (1758).

5 J-H. Bernardin de Saint-Pierre, Etude de la nature XI (1784).

6 Spéciste : qui vise à poser que l’humain est fondamentalement différent de l’animal, avec un ordre moral.

alt

Les éditions Matériologiques ont vu le jour !

altLorsqu’on enseigne ou promeut l’esprit critique en science, il est nécessaire de bâtir un cadre philosophique solide à ses propos. L’équipe de Matériologiques fournit ces outils en posant les fondements du matérialisme méthodologique et « naturaliste »*. Collection Essais, collection Science & Philosophie, mais aussi la revue Matière première qui porte bien son nom.

L’éditeur est un ami, Marc Silberstein, et son équipe éditoriale est tout à fait stimulante – certains noms reviennent déjà régulièrement dans les pages du site Cortecs (Lecointre, Deleporte, Brosseau, et d’autres à venir). De quoi évincer lentement mais sûrement les trames des pensées « spiritualistes » et proto-religieuses qui tentent de pénetrer le monde de la connaissance objective. En clair, une oeuvre de salubrité publique. Abonnons-nous à leur newsletter, et nourrissons-nous intellectuellement, en dehors des sentiers battus et rebattus du relativisme cognitif et du postmodernisme à la mode.

Pour les fins connaisseurs et connaisseuses, les personnes qui contribuent sont dans le droit fil des désormais célèbres publications Intrusions spiritualistes et impostures intellectuelles en sciences (2001), Les Matérialismes (et leurs détracteurs) (2004), et Histoire des philosophies matérialistes (2007), et sont en grande partie groupées dans l’Assomat, l’association pour les études matérialistes.

Longue vie, et forte collaboration !

RM

 
*au sens de non-surnaturaliste.

28 mars au 2 avril 2011 – Stage CIES Zététique & esprit critique à La Rochelle

Du 28 mars au 2 avril 2011 – Stage CIES Zététique & esprit critique à La Rochelle, pour le CIES Centre, par Richard Monvoisin

Avec six groupes de doctorants moniteurs et sur six jours, ont été étudiées la zététique et ses vertus pédagogiques au travers de l’analyse des phénomènes réputés paranormaux, des pseudosciences et des interactions science-idéologie.

Pour en savoir plus, c’est ici.

alt

Dérives sectaires – Lectures conseillées par Roger Gonnet

    [dailymotion id=xhq8oh]

    alt

    Russell Miller, Ron Hubbard le gourou démasqué, par Russel Miller, Plon, 1994.

    Nicolas Jacquette, 25 ans, Ma vie chez les Témoins de altJéhovah, Balland, 2007.

    altEmmanuel Fansten, Scientologie: autopsie d’une secte d’État, Robert Laffont, 2010.

    Et son propre livre sur la Scientologie, La secte, secte armée pour la altguerre – chronique d’une « religion » commerciale avec irréponsabilité illimitée, Alban, 2004.


    Hoax – L’arrêt programmé de la vente des plantes médicinales

    Depuis quelques jours, les boîtes mail de certains membres du CorteX sont envahies par un message annonçant  l’interdiction imminente des plantes médicinales en Europe : « C’est quasiment fait. Nous allons voir disparaître les préparations à base de plantes, ainsi que la possibilité pour les herboristes de les prescrire ».
    Une petite enquête nous a révélé que cette information était fausse.

    Tous les mails nous renvoient vers ce site, où l’on peut visionner cette vidéo :

    [dailymotion id=xhpjqs]

    Notre position vis-à-vis du débat

    D’une manière générale, il nous paraît important de savoir d’où les gens parlent. Alors commençons par nous appliquer cette règle.

    • Nous n’avons aucun intérêt dans l’industrie pharmaceutique, ni dans l’industrie des compléments alimentaires, ni dans la fabrication de plantes médicinales.
    • Nous souhaitons que chacun puisse effectuer ses choix en connaissance de cause, en particulier dans le domaine de la santé, et nous nous battons pour que les intérêts de chacun dans ce domaine passent avant les intérêts de l’industrie pharmaceutique.
    • Cependant, nous pensons que le débat présenté ici est mal posé : s’agit-il de défendre des pratiques uniquement parce qu’elles sont naturelles ? Il nous semble qu’en matière de santé, il serait préférable de défendre des pratiques efficaces. Je ne prétends certainement pas que naturelle signifie inefficace, mais je préfère savoir que le citron n’est pas efficace  contre le cancer de l’estomac – on pourra lire sur ce sujet cet article sur le site de Hoaxbuster – que de conseiller aux gens que j’aime de remplacer leur chimiothérapie par une cure de jus de citrons. Le fait que le citron est « naturel » n’est pas un gage de son efficacité.Et rappelons-nous une facette Z indispensable : un témoignage, mille témoignages ne font pas une preuve.  Cela permet tout au plus de formuler l’hypothèse que « ça marche ». Il faut ensuite vérifier que cette hypothèse est valide. Le processus coûte cher ? Alors battons-nous pour qu’il soit financé  par le public.
      Certes, les laboratoires pharmaceutiques n’ont pas intérêt à ce que tout le monde se soigne naturellement, mais la question importante pour nous est :  » avons-nous intérêt à nous soigner naturellement ? ».
      S’opposer aux pratiques de laboratoires pharmaceutiques ne devrait pas nous faire renoncer à la seule méthode efficace pour décider ce qui est bon ou mauvais pour nous : la démarche scientifique (comparaison à un échantillon test, tests en double aveugle…) 

    Validité de l’information

    Nous avons trouvé un texte intitulé Démenti de Thierry Thévenin relatif à la rumeur d’interdiction des plantes médicinales au sein de l’Union Européenne qui répond aux informations données dans la vidéo. D’où parle cette personne ? Il produit des herbes et plantes aromates médicinales et est membre du syndicat des Simples. Vous pouvez le vérifier sur son site.
    Si nous ne sommes pas en total accord sur l’intégralité de ses propos, nous le remercions pour le travail d’enquête qu’il a réalisé sur la fameuse directive européenne et pour avoir pris le temps de l’expliquer. Nous reproduisons ici la seconde moitié de son texte, vous pouvez télécharger l’intégralité ici

    TEXTE ORIGINAL – 2ème partie : T. Thévenin répond à l’auteur du texte à l’origine de la vidéo. Heidi Stevenson, samedi 25 septembre 2010. Les commentaires de Thierry Thévenin à la suite.

    « Grande victoire pour l’industrie pharmaceutique : Les plantes médicinales bientôt interdites dans L’UE »

    C’est faux ! C’est la vente d’une plante en tant que médicinale (c’est à dire délivrée avec des indications thérapeutiques) qui sera interdite tant qu’on aura pas obtenu une AMM (autorisation de commercialisation) auprès de The Committee on Herbal Medicinal Products (HMPC). Il s’agit d’ailleurs de l’aboutissement effectif de la Directive N° 2004/24/CE du 31 mars 2004 relative aux savoirs traditionnels (plantes médicinales traditionnelles), directive citée plus bas par Mme Stevenson.

    « C’est quasiment fait. Nous allons voir disparaître les préparations à base de plantes, ainsi que la possibilité pour les herboristes de les prescrire. »

    Pure désinformation. Il me semble que cela est juste destiné à susciter de l’émotion chez le lecteur.

    « L’industrie pharmaceutique, qui depuis quelques décennies tente d’éliminer toute concurrence, a presque atteint son but. Le 1er avril 2011 – dans moins de huit mois – pratiquement toutes les plantes médicinales seront illégales dans l’Union Européenne. »

    Non et non ! C’est un raccourci. Cette directive est censée permettre une procédure d’autorisation de mise sur le marché « simplifiée » pour l’enregistrement des médicaments traditionnels à base de plantes sans exiger les renseignements et les documents classiques des tests et essais sur la sécurité et l’efficacité, à condition qu’il existe suffisamment de preuves d’une l’utilisation médicinale du produit – éléments bibliographiques ou rapports d’experts – pendant une période d’au moins 30 ans, dont au moins 15 ans dans la Communauté Européenne.

    Toutefois, cette procédure même « simplifiée » par rapport à celle qui est prévue pour les médicaments classiques, reste trop lourde et coûteuse pour des petites structures artisanales, surtout si elles ont une grande gamme de remèdes à faire valider. Ce sont donc les petits acteurs de la filière qui seront poussés vers l’illégalité le 1er avril 2011.

    « L’approche adoptée aux Etats-Unis est un peu différente, mais a le même effet dévastateur. Les gens sont devenus des réceptacles pour toutes les cochonneries que l’industrie pharmaceutique et l’agrobusiness choisit de déposer, et nous n’avons d’autre choix que de payer le prix qu’ils demandent. L’industrie pharmaceutique et l’agrobusinesss sont presque arrivés à contrôler chaque aspect de notre santé, depuis la nourriture que nous mangeons jusqu’à la façon dont nous nous soignons quand nous sommes malades. Soyez-en sûrs : cette prise de contrôle prendra tout ce qu’il reste de notre santé. Dès le 1er avril prochain Dans l’un des pires poissons d’avril de tous les temps, la directive européenne pour les produits à base de plantes médicinales traditionnelles (THMPD) a été décrétée le 31 mars 2004. Elle réglemente l’usage des produits à base de plantes qui étaient auparavant librement échangés. »

    Librement échangés!? Certainement pas : en France, en tout cas, le libre échange des plantes n’existe plus légalement depuis le début du XIIIè siècle, époque de l’institution des corporations des professions de santé (apothicaires, herboristes, médecins, épiciers…).

    De même, dans le plus grand nombre – la totalité ? – des autres pays de l’Union, des dispositions réglementaires légifèrent depuis très longtemps sur la question de l’échange des plantes médicinales.

    A mon avis, dans ce texte, ce sont les gros distributeurs de compléments alimentaires qui « crient au loup » car ils sont en guerre médiatique contre leur « ennemi naturel »: les gros distributeurs de l’industrie pharmaceutique.

    Les producteurs du syndicat Simples ainsi que tous les petits acteurs indépendants de l’herboristerie européenne se trouvent quelque part dans un espèce de no-man’s land au beau milieu du front de la bataille et dans l’ombre de ces deux géants.

    « Cette directive demande à ce que toutes les préparations à base de plante soit soumises au même type de procédure que les médicaments. Peu importe si une plante est d’un usage courant depuis des milliers d’années. »

    Cette affirmation est encore fausse. En fait les exigences pour ces plantes sont réduites par rapport à celles d’un médicament classique. Une étude bibliographique scientifique détaillée et des rapports argumentés d’experts doivent apporter des éléments sur le recul d’usage traditionnel pour faire apparaître plausible l’efficacité du produit et réduire la nécessité de réaliser des essais précliniques et cliniques si l’usage traditionnel montre l’innocuité de ce produit dans des conditions spécifiées. Alors, l’autorité pourra conclure à un niveau satisfaisant de sécurité et d’efficacité du produit. En l’absence de données suffisamment documentées pour pouvoir bénéficier d’un classement en usage médical bien établi (dix années de recul), le recul d’utilisation est, pour relever d’un classement en usage traditionnel, d’au moins trente années, dont au moins quinze dans la communauté.

    Ce dernier point génère de fait une discrimination culturelle injuste en faveur de la culture européenne et plus généralement bibliographique.

    « Peu importe si une plante utilisée depuis des milliers d’années est sans danger et efficace. Elle sera considérée comme un médicament. »

    Même raccourci que précédemment.

    « Bien sûr, les plantes sont loin d’être des médicaments. »

    Je ne suis pas forcément d’accord avec cette affirmation. Cela dépend de la définition entendue pour le terme médicament. Si médicament signifie produit pharmaceutique standardisé, je suis d’accord : les plantes ne sont pas des médicaments ; mais si « médicament » signifie remède alors je ne suis pas d’accord. Il est indéniable que les plantes médicinales peuvent être des remèdes thérapeutiques même si elles ont le plus souvent d’autres usages.

    C’est d’ailleurs pourquoi je plaide depuis plusieurs années pour le retour officiel d’herboristes formés et reconnus qui puissent aider le public à utiliser sereinement les plantes médicinales pour le bien de leur santé au quotidien.

    « Ce sont des préparations faites à partir de sources biologiques. Elles ne sont pas nécessairement purifiées, car cela peut modifier leur nature et leur efficacité, comme pour tout aliment. C’est une distorsion de leur nature et de la nature de l’herboriste de les prendre pour des médicaments. »

    Pas pour moi : les plantes médicinales peuvent soigner ou soulager des maladies et sont donc des médicaments. Il est toutefois évident que leur variabilité et leur recul d’usage souvent extrêmement important doit permettre de les différencier des médicaments de synthèse et de ne pas leur faire subir les mêmes obligations de contrôle et d’évaluation que ces derniers ; obligations qui seraient en l’occurrence abusives et inadaptées.

    « Cela, bien sûr, ne compte pas pour le monde pharmaceutique européen contrôlé par Big Pharma, qui a gravé le corporatisme dans le marbre de sa constitution. Le Dr. Robert Verkerk de l’Alliance for Natural Health, International (ANH) décrit le problème qui se pose si l’on demande à ce que les préparations à base de plantes répondent aux mêmes normes de conformité que les médicaments : Faire passer un remède classique à base de plante provenant d’une culture médicale traditionnelle non-européenne au travers du système d’Autorisation de Mise sur le Marché de l’UE s’apparente à faire passer une cheville carrée dans un trou rond. Le système de régulation ignore les traditions spécifiques et n’est donc pas adapté. Une adaptation est requise de toute urgence si la directive est discriminatoire à l’égard des cultures non-européennes et viole par conséquent les droits de l’homme.»

    C’est vrai, ce système est discriminatoire ; il favorise les remèdes issus des cultures dominantes. Il relègue à terme en dehors du circuit légal les cultures minoritaires et/ou orales.Cela relance d’ailleurs l’idée souvent abordée dans les réunions du syndicat de créer des ponts et de la solidarité entre les producteurs Simples et d’autres producteurs et herboristes du monde.

    « Droit commercial. Pour mieux comprendre comment cela peut se produire, il faut savoir que les lois du commerce ont été au centre des initiatives visant à mettre tous les aspects de l’alimentation et la médecine sous le contrôle de l’industrie pharmaceutique et de l’agrobusiness. C’est le modèle hypocrite, hégémonique et faussement libéral des multinationales qui gagne du terrain dans toutes les institutions politiques. Si vous avez suivi ce qu’il s’est passé aux Etats-Unis concernant le lait cru et la Food and Drug Administration (FDA) qui déclare que les aliments se transforment par magie en médicaments quand on affirme qu’ils sont bons pour la santé, vous avez pu remarquer que la Federal Trade Commission (FTC) a pris part au processus. »

    Dans notre pays, ce principe de l’allégation thérapeutique qui « fait » le médicament est inscrit depuis longtemps dans le Code de la santé publique. A ce sujet, en France, La définition du médicament s’est considérablement étendue au cours du XXème siècle. A l’origine, pour simplifier, c’est une substance qui prévient ou traite les maladies, ainsi que l’avait d’ailleurs établi l’ordonnance du 4 février 1959 (JORF du 8/02/1959). Ensuite elle va également s’appliquer à toutes les substances qui peuvent restaurer, corriger ou modifier les fonctions organiques selon l’ordonnance n°827-67 parue au JORF du 28 septembre 1967, (ceci pour principalement répondre à l’apparition de la pilule contraceptive). En fait cette nouvelle définition, beaucoup plus floue, va permettre de justifier l’extension du monopole de la pharmacie à de très nombreux produits hygiéniques ou diététiques.

    « Les aliments et les médecines traditionnelles sont considérés comme des questions commerciales plutôt que comme une question de droits de l’homme. Cela place les désirs des grandes corporations, plutôt que les besoins et désirs des gens, au centre des lois sur les aliments et les plantes. C’est cette distorsion qui transparaît dans les déclarations outrageusement absurdes de la FDA, affirmant par exemple que les Cheerios (des céréales de petit-déjeuner) et les noix sont presque des médicaments simplement parce qu’on dit que c’est bon pour la santé. »

    En France, à ce jour, il faut que la plante (ou plutôt la drogue) n’ait pas d’autres usage que thérapeutique pour être considérée comme une plante médicinale. (« Une plante médicinale est une plante présentant des propriétés médicamenteuses, sans avoir ni ne pouvant avoir aucune utilisation alimentaire, condimentaire et hygiénique » article L. 512, CODE DE LA SANTE PUBLIQUE). La directive N° 2004/24/CE ne semble pas remettre ce principe en cause.

    « Le but de tout cela est de sécuriser le monde pour le libre-échange des méga-corporations. Les besoins et la santé des gens ne rentrent tout simplement pas en considération.

    Comment combattre cette intrusion sur notre santé et notre bien-être Ce n’est pas chose faite, du moins, pas tout à fait. Si vous tenez aux plantes, et si vous vous souciez des vitamines et autres suppléments, agissez s’il vous plait. Même si ces questions vous semblent sans importance, pensez aux gens pour qui ça l’est. Doit-on leur interdire le droit au traitement médical et aux soins de santé de leur choix ?

    L’ANH lutte activement contre ces intrusions. Ils vont actuellement devant les tribunaux pour tenter de stopper la mise en application de la THMPD. Nous ne pouvons qu’espérer qu’ils réussiront, mais l’histoire récente montre qu’aucune manoeuvre légale ne peut s’opposer à ce rouleau compresseur. Nous ne pouvons pas nous asseoir et attendre les résultats de leurs efforts. Nous devons voir leurs efforts comme faisant partie d’un tout, dans lequel chacun de nous joue un rôle.

    C’est à nous -à chacun d’entre nous- d’agir. Si vous vivez en Europe, envoyez s’il vous plait une lettre ou un message à votre Membre du Parlement Européen. Consultez cette page pour trouver qui c’est et comment le contacter. Puis, envoyez une lettre déclarant, en termes non équivoques, que vous soutenez fortement l’action de l’ANH pour stopper la mise en application de la THMPD et que vous espérez qu’ils vont aussi prendre position pour les droits des gens à choisir les remèdes médicinaux.

    Imaginez-vous devant vos enfants ou petits-enfants vous demandant pourquoi vous ne l’avez pas fait. Comment allez-vous leur dire que leur bien-être ne vous intéressait pas ? Comment allez-vous leur dire que regarder la dernière émission de téléréalité importait plus que de consacrer quelques instants à écrire une simple lettre ?

    C’est seulement en luttant activement que cette farce contre notre bien-être peut être stoppée. Si nous restons dans l’apathie, alors ça arrivera. Notre droit à protéger notre santé et celle de nos enfants est dans la balance. Si vous vous souciez du bien-être de vos enfants et petits-enfants, vous devez agir. Exprimez-vous, car maintenant, c’est le moment de vérité. Vous pouvez rester assis et ne rien faire, ou vous pouvez vous exprimer.

    Et après l’avoir fait, parlez-en à toutes les personnes que vous connaissez. Dites-leur qu’il est temps d’agir. Il n’y a vraiment pas de temps à perdre. »

    Je le redis, je ne souscrirai pas à l’appel de Mme Stevenson car il est erroné, subjectif et présente, à mon avis, un ton manipulateur qui dessert la cause qu’il veut soutenir.

    Il existe en France et dans bien d’autres pays d’Europe des herboristes, des usagers, des producteurs, des enseignants, des scientifiques, universitaires, thérapeutes, médecins et même des politiques qui croient à l’avenir de la médecine traditionnelle des plantes et oeuvrent pour sa reconnaissance objective et indépendante à l’échelle européenne. Puissent-ils se rencontrer et se fédérer pour aboutir le plus rapidement possible.

    Thierry Thevenin, 18 octobre 2010

    Guillemette Reviron          

    CorteX_Charbonnat_sciences

    Philosophie, épistémologie – La neutralité métaphysique, par Pascal Charbonnat

    Un présupposé méthodologique fondamental traverse l’ensemble des sciences contemporaines : la connaissance scientifique doit être neutre sur le plan métaphysique, c’est-à-dire s’abstenir de recourir à des entités invérifiables et transcendantes. Mais comment en faire l’économie à propos de questions comme celles de la création, de l’origine, des premiers commencements, qu’il s’agisse du monde ou des espèces ?
    De la transcendance de l’origine à l’immanence des commencements, cet ouvrage expose la façon dont cette idée d’ « abstinence métaphysique » est apparue en histoire naturelle au milieu du XVIIIe siècle.
    Aujourd’hui la résistance des arguments créationnistes nous montre combien il est utile de faire l’histoire de cette idée. Si les sciences ne se débarrassent jamais de la question de l’idéologie, elles n’ont pas pour autant à se mêler aux théologies. Comment l’abstinence métaphysique fonde-t-elle l’indépendance des sciences, alors même qu’elle autorise ou bien un Dieu détaché de la nature, ou bien son inexistence ?

    C’est à cette réflexion que nous invite Pascal Charbonnat.

    Pascal Charbonnat, Quand les sciences dialoguent avec la métaphysique, préface de Francine Markovits-Pessel, Vuibert, 2011, 224 pages.

    On pourra lire des extraits ici.
    Note : Pascal C. n’en est pas à son coup d’essai. Il a à son actif l’excellente Histoire des philosophies CorteX_Charbonnat_materialistesmatérialistes, Editions Syllepse, collection Matériologiques, 650 pages, 2007. La préface, intitulée Comprendre le matérialisme par son histoire, est de Guillaume Lecointre et peut être lue ici.
    En guise d’introduction, AssoMat, l’association pour des études matérialistes a publié une lecture de « l’Histoire des philosophies matérialistes » de Pascal Charbonnat, par Jean-Marc del Percio-Vergnaud. 

    Richard Monvoisin

    alt

    Outils d’autodéfense intellectuelle de la Traverse – équipons-nous en rigolant

    La Traverse, revue du collectif Les Renseignements Généreux, publie une rubrique « Outils d’autodéfense intellectuelle – équipons-nous en rigolant » écrite par Richard Monvoisin.

    alt

    Dans le n°1 (août 2010) que l’on peut télécharger ici, on trouve entre autres choses Le culbuto, l’effet bof et autres ni-ni. L’article lui-même est accessible dans notre Outillage critique.

    alt Dans le n°2 (mars 2011), que l’on peut télécharger là, on peut lire entre plein d’autres choses Effet Pangloss, les dangers du raisonnement à rebours.
    alt                                                       .  . .

    En ce début octobre 2012 paraît la revue La Traverse N°3, éditée par les  Renseignements Généreux. Vous aviez probablement déjà consulté les numéros précédents et leur stimulant contenu (mis en page par  Clara Chambon).

    Directement en lien avec des problématiques science & critique, on retrouvera

    et bien d’autres choses encore à voir ici


    15 mars – 12 avril 2011 – Cycle d'autodéfense intellectuelle – campus Grenoble

    Un cycle d’autodéfense intellectuelle sur le campus de Grenoble ! Si si ! Ca démarre le mardi 15 mars 2011, et jusqu’au 12 avril, et c’est organisé par le Collectif de Solidarité Étudiante Sciences Humaines et Sociales (CSE-SHS)* et par les célèbres Renseignements Généreux.
    Programme téléchargeable ici.

    • Mardi 15 mars 2011 – 17h30 – amphi ARSH 1

    Bourdieu expliqué à ma grand-mère, exposé sur la sociologie critique,

    par les Renseignements Généreux.
    La  »reproduction sociale », la  »distinction »,  »l’habitus », le  »capital culturel »… Peut-on expliquer simplement la sociologie développée par Pierre Bourdieu ? Quelles leçons pratiques et politiques en tirer ?

    • Mardi 22 mars -17h – amphi BSHM

    Et si on empêchait les riches de s’instruire plus vite que les pauvres ?
    Projection d’Incultures 2, une  »conférence gesticulée » de Franck Lepage sur l’école

    Comment est née l’éducation nationale ? Qui a imaginé l’école, avec quels objectifs politiques ? À travers l’histoire de France et son propre vécu, Franck Lepage nous propose un regard décapant sur l’école et ses logiques actuelles.

    • Mardi 29 mars – 18h – amphi BSHM

    Que faire après ? Exposé sur les alternatives en France
    Que faire après les études ? Comment ne pas subir un travail éreintant, des pressions hiérarchiques, le métro-boulot-dodo ? Les Renseignements Généreux vous présentent un panorama de pistes concrètes : Longo Maï, les entreprises autogérées du réseau REPAS, les Bas-Côtés, Silence et bien d’autres expériences alternatives en France et ailleurs. De quoi alimenter nos boites à idées !

    • Mardi 5 avril – 17h – amphi BSHM

    En France, on n’a pas de pétrole… mais a-t-on des idées ?

    Projection d’Incultures 4, une  »conférence gesticulée » d’Anthony Brault sur l’énergie
    La fin du pétrole : on nous en parle souvent, mais de quoi s’agit-il exactement ? Quelles en seront les conséquences probables ? Pour combien de temps pouvons-nous encore nous permettre l’insouciance
    énergétique ? Quelles solutions imaginer ?

    • Mardi 12 avril – 18h – amphi BSHM

    Internet : les impacts politiques et sociétaux. Projection d’une conférence filmée de Benjamin Bayart, président de French Data Network
    Quels sont les impacts politiques et sociétaux d’Internet ? Des réponses par Benjamin Bayart, président de French Data Network, association favorisant un usage d’Internet dans le respect de son éthique et en particulier des utilisations sans volonté commerciale.

    A ne rater sous aucun prétexte !

    Richard Monvoisin

    *Association tenue majoritairement par des étudiant-e-s dans la salle 15 du BSHM (Bâtiment des sciences de
    l’homme et des mathématiques) depuis la rentrée 2009. A volonté alternative (auto-gestionnaire, économiquement autre, etc.) et utile au plus grand nombre, le collectif essaye de toucher un peu à tout dans le cadre des besoins et des idées qu’il peut rencontrer autour de lui. Son public est de fait, mais pas de volonté, globalement universitaire. On compte dans ses activités : une zone de gratuité, un café/snack avec bénéfices minimum pour l’assurance de fin d’année, une bibliothèque, des distributions alimentaires régulièrement organisées. Contact.

    ** À travers des brochures, une revue, la libre-diffusion de films/ documentaires et de nombreuses autres  ressources, Les Renseignements Généreux s’efforcent de forger des outils d’autodéfense intellectuelle, d’imaginer, de construire et de faire découvrir des actions politiques ou des alternatives à Grenoble et ailleurs.

     

    alt

    23 mars – Midi Critique N°3 – Sexe & Genre, avec Guillemette Reviron

    Midi critique n°3 le mercredi 23 mars. Thème : sexe & genre, comment se fabrique l’oppression féminine ? Avec la guest-star Guillemette Reviron

     
    Etrange, en France, de voir la moitié de la population discriminée dans un certain nombre d’emplois, et rémunérée de plus d’un quart de salaire en moins par rapport à l’autre moitié. Une discrimination raciale de ce genre ne passerait pas inaperçue, mais lorsqu’il s’agit d’une discrimination sexuelle, il y a peu de remouds.
    alt
    Y a-t-il quelque-chose qui « justifie » cette différence ? Quels sont les arguments qui viennent différencier Femmes et Hommes ? La distinction est-elle bien claire ? Quelle est la différence entre sexe et genre ? Existe-t-il une nature féminine et une nature masculine ?
     
    Projection-débat, avec une invitée, la mathématicienne Guillemette Reviron, membre du CorteX, spécialiste des questions de genre et des enjeux politiques de ces notions de nature.
    Espace Vie Etudiante (EVE), campus de Grenoble, 12h-13h30. Public, et gratos.
     
    Pour connaîtres les autres thèmes des midis critiques, voir ici.

    alt

    13 avril 2011 Univ. Grenoble – Midi critique N°4 – La démocratie participative, une arnaque ?

    Midi critique n°4  – le mercredi 13 avril 2011.  Thème chaud : la démocratie participative est-elle une arnaque ?

     
    Le mot démocratie est dans toutes les bouches. Mot magique brandi dans les débats, mot utilisé par les pires dictaturesalt comme les pays les plus progressistes, que désigne-t-il exactement ?
    Y a-t-il plusieurs sens à ce terme ?
    Est-ce que le pouvoir au peuple est une «bonne» chose ?
    Est-ce juste que la majorité l’emporte sur les minorités ?
    Pourquoi y a-t-il des gens qui n’ont pas le droit de vote en France (personnes handicapées sous tutelle, mineurs, certains condamnés, étrangers) ?
    Pourquoi les élus sont peu représentatifs de la population ? Pourquoi y a-t-il des pouvoirs non soumis au vote démocratique (ministres, préfet, conseil constitutionnel ?)
    Pourquoi les grèves, les blocages, les oppositions aux guerres, les «sabotages» de débats sont-ils considérés comme anti-démocratiques ?
    Venez vous creuser le chou au Midi Critique N°4 saison 4. Projection/débat animée par Richard Monvoisin, avec une invitée : Amélie Audibert, master 2 de recherche en politiques publiques à l’IEP de Grenoble. Amélie fait un mémoire sur la question : « qu’est ce que l’instrumentation de la participation modifie au processus démocratique ? »
    Entrée archi-libre.

    Espace Vie Etudiante (EVE), campus de Grenoble, 12h-13h30.
    Vous souhaitez faire le même type d’atelier/débat ? Le matériel utilisé est disponible ici.
     

    Richard Monvoisin