Entrevue avec le sociologue Gérald Bronner.
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Partie 4 | à venir |
Pour tout savoir sur le projet Lazarus Mirages, cliquez là.
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Les dates
12h-13h30
au DLST amphi E2, Campus de St Martin d’Hères
Ouvert à tous.
Avec la participation de Pierre-Louis Aublin, Chloé Dubois, Alexandre Lenoir et Julie Schutz, moniteurs du Centre d’Initiation à l’Enseignement Supérieur (nouvellement DFI).
Pour ne pas se perdre :
Le cycle se déroule sur les mois de mars et avril 2012 et propose des projections, exposés et débats sur le campus universitaire de Grenoble-Saint Martin d’Hères. Pour le programme complet du cycle en pdf, cliquez là.
Mercredi 7 mars 18h-20h – EVENEMENT 2 – La démocratie selon Cornélius Castoriadis, conférence discussion de Samuel Foutoyet – ARSH 1
Mardi 13 mars 18h-21h – EVENEMENT 3 – Projection du documentaire Bové et le cirque médiatique / EVE / Débat avec Richard Monvoisin et F-X. Chaise, du CSE.
Merc 14 mars 17h30-19h– EVENEMENT 4 – Utilisation et distorsion des chiffres : méfiance !, avec Guillemette REVIRON, mathématicienne (CorteX) – cours ouvert de l’UE Zététique & autodéfense intellectuelle de Richard Monvoisin. Au DLST, amphi E2.
Mardi 20 mars 18h-20h – EVENEMENT 5 – Exposé-débat Douter/redouter, par François-Xavier Chaise – ARSH 1.
Mardi 27 mars 18h-20h – EVENEMENT 6 – Conférence Les affaires expliquées à ma grand-mère, par Samuel Foutoyet – ARSH 1
Mercredi 4 avril 17h30-19h – EVENEMENT 7 – Argumentocs et escroqueries rhétoriques, avec Nicolas Gaillard – cours ouvert de l’UE Zététique & autodéfense intellectuelle de Richard Monvoisin. Au DLST Amphi E2.
Jeudi 5 avril de 18h à 21h – EVENEMENT 8 – Projection de Des hommes d’influence (Barry Levison, 1997), à EVE. Débat avec F-X. Chaise.
Entrée libre
[1] Le CSE-SHS est une association tenue majoritairement par des étudiant-e-s dans la salle 15 du BSHM (Bâtiment des sciences de l’homme et des mathématiques) depuis la rentrée 2009. A volonté alternative (auto-gestionnaire, économiquement autre, etc.) et utile au plus grand nombre, le collectif essaye de toucher un peu à tout dans le cadre des besoins et des idées qu’il peut rencontrer autour de lui. Son public est de fait, mais pas de volonté, globalement universitaire. On compte dans ses activités : une zone de gratuité, un café/snack avec bénéfices minimum pour l’assurance de fin d’année, une bibliothèque, des distributions alimentaires régulièrement organisées.
Contact ► salle 15 du BSHM, cse.shs@gmail.com
Et de 3 ! 3 cycles de conférences-débats, rien que sur le campus de Grenoble. Les Midis Critiques se poursuivent, intégrant des collègues ou futurs collègues. Des questions éthiques sont soulevées, et des ateliers viennent agrémenter la Bibliothèque Universitaire des sciences.
Entrée libre, bien entendu. Car l’esprit critique ne s’use que si l’on ne s’en sert pas.
Au DLST, amphi E2. Animés par Richard Monvoisin
N°1 mercredi 13 février : drogues, dopage, GPA, cannibalisme : peut-on faire ce qu’on veut avec son corps ?
N°2 mercredi 13 mars : faut-il restreindre la liberté d’expression ?
N°3 mardi 26 mars : et si Pièces et Main d’Oeuvre avait raison ?
N°4 mercredi 3 avril : racisme, sexisme, spécisme
N°5 mercredi 17 avril : malaise de la publication scientifique (avec Nicolas Pinsault)
Au DLST, 480 avenue centrale, Campus de Grenoble. Amphi E2,avec Richard Monvoisin, les doctorants du DFI, service Doctoral pour la Formation de l’université de Grenoble
L’objectif de ces midis critiques est de partir du matériel TV, films, séries sur un sujet pour complexifier la discussion, sous la forme d’un débat. En 2012, un cycle consacré aux rapports psychologie et fictions eut lieu. Cette année, c’est le thème des neurosciences qui a été gardé.
N°1 mardi 5 février : Super-héros, handicap & Humain augmenté : que dit la fiction sur nos débats moraux ? Avec Brice Canada (laboratoire Sport et environnement social)
N°2 mardi 12 février : Super-héros et capacités cérébrales extraordinaires. État des sciences et impact sociétal, avec Amandine Thomas (Laboratoire HP2 – Hypoxie Physiopathologies cardiovasculaires et respiratoires)
N°3mardi 19 mars : « Je vois ce que tu penses »: les techniques de neuroimagerie permettent-elles de voir les pensées ? avec Fanny Caravec (Grenoble Institut des Neurosciences, dynamique des réseaux synchrones épileptiques)
N°4 mardi 5 mars : Les neurosciences au service de la prévention/détection de la « déviance », avec Mélanie Cerles (Laboratoire de Psychologie et Neurocognition)
N°5 mercredi 6 mars (suite) : Les neurosciences comme traitement/éradication de la « déviance », avec Damien Benis (Grenoble Institut des Neurosciences, fonctions cérébrales et neuromodulation)
Auditorium, Bibliothèques des sciences, 40 avenue des mathématiques, St Martin d’Hères. Programme complet ici http://sicd1.ujf-grenoble.fr/-Les-ateliers-de-l-information-N°1 mercredi30 janvier : Choisir un thérapeute – des outils pour nous aider (N.Pinsault)
Ostéopathie, kinésithérapie, chiropractie, kinésiologie, micro-kinésithérapie… l’offre de thérapies disponible pour prendre en charge nos maux quotidiens est pléthorique. Comment choisir ? Sur quels critères ?
N°2 mercredi 6 février Dérives sectaires & esprit critique (R. Monvoisin)
Les dérives sectaires font sourire, jusqu’à ce qu’un de nos proches se retrouve engoncé dans une de ces mécaniques aliénantes. Nous verrons comment fonctionnent ces aliénations mentales, quels sont les terrains les plus propices à leurs développement et quelques outils de préventions simples.
N°3 mercredi 20 février : analyse scientifique de l’homéopathie (R. Monvoisin)
Homéopathie, pour ? Contre ? Pour ou contre quoi, au fait ? Pour ou contre son enseignement, son remboursement, sa théorie sous-jacente, le retrait de certains produits ? Aborder ce sujet en 30 minutes est un sacré pari.
N°4 mercredi 6 mars : critique du système de publication scientifique (N. Pinsault)
Le processus de publication scientifique par le biais d’une validation par les pairs est construit pour s’assurer de la qualité des informations publiées. Qu’en est-il vraiment ? Où sont les failles du processus ?
N°6 mercredi 10 avril : la psychogénéalogie et ses dérives (N. Gaillard)
Cette méthode de psychothérapie consiste à rechercher dans le vécu de nos ancêtres les sources de nos troubles psychologiques et maladies. Avec ses calculs mathématiques, son vocabulaire psychologique et ses « succès » thérapeutiques, elle se pare de scientificité. Pourtant, derrière cette apparence, une analyse critique s’impose.
Nombreux(ses) sont les enseignant(e)s de physique-chimie qui tentent d’aiguiser le sens critique de leurs élèves en saupoudrant quelques graines de zététique dans leurs cours. C’est Marie Pierrot qui a décidé de se lancer cette année dans l’aventure. Pas facile au début de faire le tri, de chosir les documents, le ton, etc. mais voici ce qu’elle a réussi à faire avec des élèves de seconde et ce n’est pas rien ! Si vous aussi vous avez réalisé des séquences, des cours, des TP, etc. écrivez-nous !
Quatre séances de zététique en classe de seconde, avec 14 élèves par séance de 2h. Cet enseignement a été réalisé dans le cadre de l’option d’exploration « Sciences et laboratoire«
Lire la suite…
Télécharger les documents utilisés par Marie :
– diaporama
– pétition contre le MODH/contre l’eau
– questionnaire MODH
Cette forme de faux dilemme consiste à poser que puisque l’inexistence d’une chose n’est pas prouvée, on peut déclarer qu’elle est vraie. Ceci est non seulement en contradiction avec un scepticisme raisonnable, mais est par ailleurs un cas flagrant de renversement du poids de la preuve : alors que c’est à celui qui affirme de démontrer son propos, l’interlocuteur, en affirmant qu’elle est vraie, sous-entend « et prouvez-moi que c’est faux ». On retrouve ce sophisme dans les phrases type : « Prouvez-moi que l’homéopathie ne marche pas ».
En cours, nous utilisons plusieurs stratagèmes faciles pour montrer l’inanité d’une telle posture. En voici un, que nous appelons le coup des claquements de doigts :
« Si je vous déclare qu’entre ces deux claquements de doigts (clac, clac) je me suis mis nu et ai fait trois fois le tour de l’amphithéâtre à cloche-pied, puis me suis rhabillé mais vous n’avez rien vu puisque j’étais dans l’hyperespace ; si j’ajoute « prouvez-moi le contraire », vous comprenez bien que vous êtes (faussement) coincés dans votre argumentaire. Car c’est à moi de faire la preuve de ce que j’avance. ».
Anaïs Goffre a découpé cet extrait d’une interview de Simone de Beauvoir faite par un québécois, Wilfrid Lemoine, en 1959 à Paris. Emission censurée puis diffusée en entier seulement 40 ans après, en 2009. Plus d’informations ici. Merci à Anaïs pour cette trouvaille.
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=yZ-9g9xCkt8]
N’hésitez pas à nous proposer des compléments ou du matériel illustrant ce sophisme.
Denis Caroti
Tiré de la thèse de Richard Monvoisin
Alain Le Métayer nous fait part de cette séquence pédagogique avec laquelle il illustre la charge de la preuve… à l’aide du Père Noël !
Comment faire en sorte que des collégiens comprennent bien que la charge de la preuve revient à celui qui affirme quelque chose ?
1. Une situation très motivante :
Lors du dernier cours avant les vacances de Noël, je parle du Père Noël aux élèves de sixième. Bien sûr, ils me disent avec force qu’il n’existe pas. « Comment ça il n’existe pas ! Prouvez-moi que c’est faux ! Dix mille euros à celui ou à celle qui me prouvera par écrit que le Père Noël n’existe pas. » Cette proposition remporte un succès massif et de nombreux élèves rédigent à la hâte, sur un bout de papier, leur « preuve » qu’ils me tendent frénétiquement …
Remarque : si je me permets d’affirmer que cette situation est « très motivante » c’est que les élèves en parlent entre eux, aux autres professeurs du collège et à leur parents. Ces derniers participent parfois à la rédaction des preuves et attendent avec impatience les résultats du « concours » !
2. Un constat embarrassant :
Après les vacances, je ramasse les « preuves » qui sont ensuite examinées (débats parfois animés avec la classe) puis… écartées une à une. Les élèves se retrouvent donc dans la situation suivante : ils sont incapables de prouver quelque chose qui leur apparaît faux de façon claire et évidente. Certains en sont furieux. Je constate devant la classe que cette situation est embarrassante : il ne serait donc pas possible non plus de prouver que les licornes roses invisibles n’existent pas, que les Bobelets (sorte de lutins que mes élèves connaissent bien) n’existent pas, que le pégase furtif marron non plus, que je n’ai pas de super pouvoir, bref, qu’il est impossible de prouver que quelque chose n’existe pas.
3. Une solution toute bête et toute simple :
Certes on ne peut pas prouver qu’une affirmation est fausse mais, après tout, tant pis, rien ne nous oblige à y croire. La solution est (presque) toujours proposée par un élève : « Donnez-nous des preuves et on y croira ! ». Je reformule : c’est à celui qui affirme quelque chose d’en apporter la preuve.
4. Bilan :
Le seul élément qui me permet d’affirmer que cette séquence sur le Père Noël est au moins « un peu efficace », c’est que les élèves l’évoquent par la suite, jusqu’en classe de troisième. Confrontés à des situations équivalentes (affirmations non étayées, argument « prouvez-moi moi que c’est faux »), certains élèves disent « Ah oui, c’est comme pour le Père Noël ! ».
Le document de travail fourni par Alain à ses élèves : à télécharger ici.
Dans les années 1580, un certain Lodewiejk Elzevir (1542–1617), typographe de Louvain, monta à Leyde une entreprise de publication et de vente de livres, en particulier des classiques latins mais aussi des livres plus engagés, dont ceux d’Erasme ou Galilée. La boîte ferma en 1712, mais c’est en hommage à cette vieille maison qu’en 1880, à Amsterdam, naquit Elsevier sous sa forme moderne… et tentaculaire. L’entreprise a tellement grandi en un siècle que la marque couvre désormais une importante part de la publication scientifique dans le monde. Propriétaire de la revue Cell, du Lancet, de collections de livres comme Gray’s anatomy, elle publie 250 000 articles par an, dans 2000 journaux. En 1993, Reed International PLC et Elsevier PLC fusionnent et forment ce qui est actuellement le deuxième diplodocus de l’édition au monde. Les profits, eux aussi, sont colossaux (plus précisément, l’EBITDA [0] est de l’ordre de 36% sur un chiffre d’affaire de 4,3 milliards de dollars en 2010, ce qui représente plus de 1,5 milliards de dollars), avec une pratique de prix d’accès à leur catalogue agressive et, pour tout dire, assez choquante. Pour avoir un ordre d’idée, certaines bibliothèques payent pour l’abonnement aux revues d’Elsevier près de 40 000 dollars [1].
La situation se résume grosso modo ainsi :
Une personne produisant un savoir, généralement avec de l’argent public, doit publier coûte que coûte pour survivre dans son métier. Or publier signifie apporter son travail à une revue. Vend-elle son travail ? Non, elle l’offre. Et pour être précis elle paye même pour soumettre son article (sans assurance d’être acceptée). Qu’a-t-elle en échange ? Du capital symbolique sur le marché du travail, car la publication est intégrée dans le Curriculum Vitae du chercheur. Qui va accepter ou non l’article ? Des collègues plus ou moins lointains de la personne, spécialistes du sujet, que la maison recrute mais ne paye pas (car là encore, être relecteur se vend bien sur un CV). Que fait ensuite la revue ? Elle revend les articles aux universités, à un prix exorbitant [2].
Comme on ne manquera pas de le remarquer, il s’agit, dans cette marchandisation du savoir, d’un quintuple effet kiss cool, ou d’une quintuple tonte gratis :
– le contribuable paye par ses impôts une recherche (bruit de machine à sous)
– que le chercheur publiera en payant [3] (bruit de machine à sous),
– que d’autres chercheurs devront relire gratuitement (bruit de machine à sous,
– car c’est sur du temps de travail du chercheur payé par le contribuable)
– que les universités doivent racheter à prix d’or un couteau sous la gorge, (bruit de machine à sous) perdant à peu près la moitié du budget fonctionnement des bibliothèques universitaires, et excluant d’office les universités les moins riches
Tout ceci a des répercussions sur les frais de scolarité des étudiants, voués probablement à devenir chercheurs, qui devront publier, etc.
Arrive soudain que souffle le vent de la contestation.
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Logo d’ElsevierUn vieux sage, près d’un orme servant de tuteur à une vigne, allégorie du rôle symbiotique « éditeur/chercheur ». Non solus signifie « pas seul » | Logo Boycott Elsevier (parmi d’autres créé par Michael Leisen)Le vieux sage se tourne cette fois vers la planète de PLoS, Public Library of Science, pour un accès libre, et laisse l’arbre mort seul. |
De fait, des chercheurs se sont fâchés. Des mathématiciens, d’abord, souvent il faut bien le dire, à l’avant-garde contestataire en science.
Leur vase déborda lorsqu’en décembre 2011 fut présenté au Congrès états-unien un projet de loi sur les travaux de recherche interdisant aux agences fédérales d’exiger le libre accès à des résultats scientifiques, et ce même lorsque ces recherches sont financées par l’Etat fédéral états-unien. C’en était trop. Le 21 janvier 2012, le matheux Timothy Gowers, médaille Fields en 1998, annonça publiquement son boycott d’Elsevier. Un article du Guardian [4] puis du New York Times [5] relatèrent la chose, et trente-quatre autres mathématiciens suivirent. Une pétition naquit, intitulée The Cost of knowledge (« le coût de la connaissance ») enjoignant à ne pas soumettre d’articles à des revues de l’entreprise, ne pas se réferer à des articles d’Elsevier et ne participer d’aucune manière à ses éditions.
The Cost of knowledge a été signée par désormais plus de 10 000 chercheurs académiques. L’Université française P. & M. Curie a relayé le boycott, elle qui dépense 1,02 millions d’euros pour ces abonnements. Puis l’Université de Harvard a suivi car bien qu’elle soit la deuxième institution à but non lucratif la plus riche dans le monde, ses comptes sont gravement amputés par les abonnements aux revues académiques : il semble que le prix des abonnements lui coûte chaque année en moyenne 3,75 millions de dollars. Le directeur de la bibliothèque, Robert Darnton, a déclaré dans le Guardian :
« J’espère que d’autres universités vont faire des actions similaires. On est tous confrontés au même paradoxe. Nous faisons les recherches, écrivons les articles, œuvrons au référencement des articles par d’autres chercheurs, le tout gratuitement… Et ensuite nous rachetons le résultat de notre travail à des prix scandaleux. »
S’il était des étudiants Québecois en lutte qui se demandaient encore à quoi pouvaient servir des frais d’inscription croissants à l’université, ils ont là un élément de réponse.
A Grenoble ? Le laboratoire de mathématiques de l’Institut Fourier a, selon Le Monde, renégocié son contrat en février 2012 pour une durée de trois ans avec l’éditeur Springler. Chaque année, il dépense en moyenne 135 000 euros pour l’achat de ses revues, pour un budget total de fonctionnement d’environ 400 000 euros.
Au cours des négociations, l’Institut a lancé un appel pour tenter d’être en position de force face à l’éditeur. « Ce n’était pas un boycott », explique Benoît Kloeckner, de l’Institut Fourier de Grenoble (…) :
« Les contrats sont pluriannuels donc il est impossible de se désabonner d’une revue et l’éditeur prévoit des augmentations des prix supérieurs au coût de la vie, de l’ordre de 3 à 4% à chaque négociation. » Son Institut a réussi à limiter la hausse à 2% mais « sur l’essentiel, le désabonnement, on n’a pas eu gain de cause ». (…) « les éditeurs sont en position de force car paraître dans ces revues participent à la réputation d’un chercheur. » [6]
Publicisation des coûts, privatisation des profits, mise en concurrence, cela nous rappelle d’autres modèles économiques.
Alors ? Les solutions sont « pirates ». La publication libre et gratuite s’impose lentement, sous forme de revues électroniques gratuites, de plates-formes d’archives ouvertes, arXiv ou Hal. Reste encore le problème de relecture par les pairs, qui n’est pas encore réglé. Une note publiée sur le site de Harvard et envoyée aux 2 100 professeurs et chercheurs les encourage à mettre à disposition, librement, en ligne leurs recherches.
Le corteX, dont les ressources pédagogiques sont libres, s’inscrit complètement dans cette démarche, depuis le début, et ne peut qu’encourager ses membres, son réseau et tous les chercheurs à publier librement, à construire le nouveau système de relecture de la publication libre, et à boycotter les poulpes comme Elsevier.
La charte se trouve ici.
Le choix de cette déclaration ne va pas sans douleur pour nous. Deux exemples : Nicolas Pinsault et moi-même avons un ouvrage sur le feu (un manuel critique pour kinésithérapeutes) que nous pensions éditer chez Masson. Or Masson, c’est Elsevier. Nous n’irons donc pas proposer notre manuscrit chez Masson. Quant aux revues d’Elsevier qui nous publiaient, nous allons devoir nous en éloigner un peu, souvent à regret. Certains de nos articles sont dans les tuyaux de Kiné la revue, hélas propriété d’Elsevier aussi. Il va être coûteux de ne plus écrire là-bas. Ceci étant, les revues auront tout loisir de citer nos publications une fois mises en ligne gracieusement par nos soins.
Richard Monvoisin
[0] L’EBITDA (Earnings before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization) est un indicateur classiquement utilisé pour mesurer la rentabilité d’une activité économique. Il est différent du résultat net de l’entreprise puisqu’il ne prend en compte ni les amortissements, ni les charges financières (comme le coût de la dette, par exemple), ni l’impôt sur les sociétés. Il permet notamment d’évaluer la marge générée par l’activité de l’entreprise indépendamment de sa structure de financement. Merci à Léonore et Baptiste pour ces renseignements généreux.
[1] A titre indicatif, les 127 établissements français dont les achats d’abonnements électroniques sont gérés par la structure centrale ABES (Agence Bibliographique de l’Enseignement Supérieur), le montant 2010 des abonnements Elsevier s’est élevé à 13,6 millions d’Euros (soit 69% du total des abonnements électroniques gérés). On lira les rapports d’activité annuels ici.
[2] Pour donner un ordre d’idée : si vous ou moi voulons obtenir par exemple, au hasard, l’article The DRESS syndrom : litterature review, de Cacoub & al, dans The American Journal of Medicine Volume 124, Issue 7, juillet 2011, pages 588–597, il nous en coutera la bagatelle de 31,50 dollars US.
[3] Pour avoir un ordre d’idée, Nicolas Pinsault m’indique que par exemple pour Nanomedicine: Nanotechnology, Biology and Medicine, revue prise parmi les titres Elsevier, le coût de soumission (submission fee), non remboursable est de 100 US$ (voir ici). Mais les sommes peuvent grimper un peu, comme dans le domaine de la science économique. 175 US$ pour soumettre au Journal of Monetary Economics (Elsevier), 5 US$ de plus pour le Journal of Banking and Finance (Elsevier), et jusqu’à 400US$ pour le Journal of Financial Economics. Toujours Elsevier. (Source Laurent Linnemer).
[4] Alison Flood, Scientists sign petition to boycott academic publisher Elsevier, The Guardian, 2 février 2012.
[4] Thomas Lin, Mathematicians Organize Boycott of a Publisher, New York Times, 13 février 2012.
[5] Anne Benjamin, Harvard rejoint les universitaires pour un boycott des éditeurs, Le Monde, 25 avril 2012.
Le blog Rédaction Médicale et Scientifique réagit à notre article ici.
Nous avons pris note des remarques et souhaitons user d’un droit de réponse.
– L’article nous fait un procès d’intention en affirmant que nous sommes des « donneurs de leçon ». A moins d’en apporter la preuve, nous n’avons jamais prétendu donner des leçons, plutôt apporter des informations critiques sur un sujet complexe.
– Ecrire que « Se battre pour l’Open Access va dans le sens de l’histoire, mais se battre pour la qualité est tout aussi important » est un argument fallacieux (un homme de paille pour être précis) puisque l’auteur travestit notre propos (qui n’a jamais été de baisser la qualité des publications scientifiques, bien au contraire).
– L’auteur instille que « Cortex semble se rapprocher d’un groupuscule militant en médecine, le Formindep » : cette scénarisation rappelle plus une nébuleuse terroriste qu’un réseau intellectuel. Formindep et CorteX collaborent effectivement et en toute transparence. Il nous semble étrange que cela inquiète.
– Enfin, l’article fait état que « La pseudo sagesse des donneurs de leçons ne tient pas toujours avec l’expérience et le temps« . Sauf incompréhension de notre part, cette phrase n’a aucune portée autre que de prêter des intentions, saper les rares énergies vivaces, et entretenir le calme plat et la bonace sur des processus délétères.
L’équipe du CorteX
Recherche publique, revues privées
Aux lourds rayonnages des bibliothèques universitaires s’ajoutent désormais une pléthore de revues spécialisées en ligne, qui offrent sans délai et souvent sans barrière de paiement les derniers résultats des laboratoires de recherche. Cette transformation pousse les scientifiques à s’interroger sur leurs modèles de publication, afin de les remettre au service de la connaissance et du public.
« Publier ou périr » (citation du zoologiste Harold J. Coolidge) résume aujourd’hui la vie de n’importe quel chercheur. Peu importe la qualité de son enseignement ou du suivi de ses étudiants : pour son prestige universitaire, l’évaluation ne repose que sur la quantité et la qualité des articles publiés dans des revues scientifiques avec comité de relecture — par des experts du domaine, c’est ce qu’on appelle le peer review. La revue doit être choisie avec soin, en conjuguant prétention personnelle et facteur d’impact, cette dernière valeur étant fondée sur le nombre moyen de citations des articles de ladite revue dans d’autres articles scientifiques. Et il faut viser juste : trop bas (une revue peu connue), et l’article ne sera pas apprécié à sa juste valeur ; trop haut (les meilleures publications), et il peut être bloqué des mois durant par les relecteurs, pour finalement se voir refusé.
C’est dans les aspects pécuniaires que le bât blesse. Non seulement l’auteur de l’article n’est pas rémunéré, mais son laboratoire doit très souvent participer aux frais de secrétariat et d’impression, quand bien même nombre de revues s’orientent vers la publication électronique exclusive. Il reçoit en échange un capital non pas financier, mais symbolique : reconnaissance, prestige, ou plus précisément le droit d’indiquer le titre de son article sur son CV… Les lecteurs-évaluateurs de l’article sont quant à eux des chercheurs sollicités par les revues, eux aussi rémunérés en capital symbolique. La concurrence entre chercheurs du monde entier peut induire certains effets pervers, à la croisée de la collusion et du conflit d’intérêts, même si l’honnêteté et la bonne foi demeurent prédominantes. De plus, ce système est loin de garantir la véridicité et l’exactitude de toutes les publications : des résultats frauduleux, maquillés ou parfois complètement bidonnés passent régulièrement entre les mailles du filet.
Autre souci : l’évaluation des chercheurs, qui entraîne via la quête de citations une forme de trafic d’influences, amenant par exemple à citer des amis. Il n’est pas rare de voir des articles signés d’une dizaine de noms, ceux de jeunes chercheurs ayant réalisé l’essentiel du travail et ceux de directeurs de laboratoire, nettement moins impliqués. Il s’agit là du dévoiement d’un procédé qui peut s’avérer légitime dans de nombreux cas.
Ce système s’avère en outre très coûteux pour la communauté scientifique. Le contribuable finance une recherche que le scientifique publiera, parfois à ses frais, dans une revue adossée à une entreprise privée, que d’autres chercheurs devront relire gratuitement et que les universités devront ensuite racheter à prix d’or. La moitié du budget de fonctionnement des bibliothèques universitaires passe en effet dans les abonnements, ce qui désavantage d’emblée les établissements les moins riches et a des répercussions inévitables sur les frais de scolarité des étudiants. Cette année, l’éditeur Elsevier a été au cœur d’une polémique dans le milieu universitaire, quand un projet de loi visant à interdire le libre accès des travaux financés par le public a été présenté aux États-Unis. De nombreux scientifiques se sont révoltés, parmi lesquels Timothy Gowers, médaille Fields 1998, qui annonça qu’il boycottait désormais les revues liées à Elsevier. Pour certaines bibliothèques, l’abonnement aux journaux de cet éditeur représente jusqu’à près de 40 000 dollars, générant des profits qui avoisinent le milliard d’euros en 2011. De prestigieuses universités comme celle de Harvard, qui se déleste chaque année de 3,75 millions de dollars pour acheter des revues, ne peuvent qu’approuver et se joindre à cette fronde universitaire.
Il existe d’ores et déjà des solutions alternatives à ce mécanisme très commercial, en particulier du côté de la publication libre et ouverte (avec les sites PLoS, HAL, arXiv, etc.). À long terme, la communauté des chercheurs n’aura sans doute guère d’autre choix que de les développer afin de gripper le système actuel.
PDF avec les notes de bas de page : télécharger ici
Soutenons la presse d’enquète et d’analyse.
Ce cours s’adresse aux étudiants de L2 et L3 de toutes les spécialités de l’université Lyon I. Il s’intègre dans les enseignements intitulés « Transversales : Sciences Humaines et Sociales ». Les contraintes administratives nous obligent à organiser ce cours sous la forme d’un stage intensif de 15h réparties sur une semaine.
Depuis 2010, Denis Machon, Maître de conférences au département de Physique, anime ce cours en présence d’une cinquantaine d’étudiants en moyenne. Depuis cette année Maïlys Faraut, doctorante en neurobiologie, intervient également, et nous donne son analyse plus bas.
Table of Contents
Les objectifs de ce cours sont :
1 – De sensibiliser les étudiants à l’autodéfense intellectuelle : problématique des pseudo-sciences, importance de la démarche d’investigation, méthodes de manipulation, medias, etc.
2 – D’informer les étudiants de la possibilité d’accéder à une information contradictoire (bibliographie et sites web) en présentant les acteurs de la zététique.
3 – De traiter des cas précis afin de fournir un argumentaire et de clarifier des situations floues.
4 – L’objectif primordial est la présentation d’une méthode, de pièges à éviter et d’outils pour pouvoir se faire une opinion « éclairée ».
Le stage se répartit en 5 séances de 3h.
Séance 1 : une introduction qui pose une problématique. Il s’agit de montrer le fait que d’avoir accès aux études supérieures n’est en rien la garantie d’être à l’abri de confusion entre sciences et pseudo-sciences (même pour des étudiants scientifiques qui constituent le public de ce cours), que cette confusion est très répandue et ouvre la possibilité à de nombreuses dérives, que les pseudo-sciences occupent une part non-négligeable de notre vie.
Points forts : les étudiants sont sensibles à ces informations qui les concernent et leur font sentir qu’ils ne sont pas à l’abri de dérapages pseudo-scientifiques.
Points faibles : les études et les données présentées datent un peu. Des sources plus récentes à nous communiquer ?
Points à modifier/améliorer : il pourrait être intéressant de sonder les étudiants sur leurs « croyances » : qui se soigne par « médecines douces » ? La relativité est-elle une élucubration théorique ? Cela afin que les étudiants se rendent compte qu’ils entrent eux-mêmes dans les statistiques citées en cours. Toutefois, il existe un biais important : connaissant le thème de l’enseignement, ils risquent de fournir des réponses plus « raisonnables ».
Séance 2 : pour bien identifier ce que l’on peut appeler science, nous revenons sur la démarche scientifique. Cette qualification de « scientifique » est néanmoins problématique. En effet, pour un public scientifique, elle est acceptée mais pour d’autres publics elle peut-être rejetée car elle semble exclusive (confusion entre « démarche scientifique » et « démarche des scientifiques »). Le terme de « démarche d’investigation » est alors privilégié. Ensuite, nous insistons sur la notion de « affirmation testable » qui définit la barrière entre science et pseudo-sciences. Dès lors que l’on peu tester une affirmation (c’est-à-dire mettre en place une démarche d’investigation expérimentale), il faut surtout ne pas se gêner puisque cela permet de sortir de la discussion de comptoir et juger sur du factuel. Néanmoins, une expérience discriminante (entre deux hypothèses) reste délicate à établir à cause de possibles écueils. Avec la participation des étudiants, on construit alors une « bonne » expérience à partir de l’affirmation « je sais détecter la présence d’une balle sous un gobelet à l’aide de mon pendule ». On définit alors les points essentiels d’un protocole expérimental le plus complet possible.
Points forts : participation des étudiants ; présentation de la démarche scientifique (démarche d’investigation) que certains découvrent malgré leur cursus scientifique.
Points faibles : il y en a sûrement …
Points à modifier/améliorer : il serait formateur de faire la « démonstration » d’un pouvoir qui les surprenne vraiment par un bon tour de prestidigitation afin qu’ils mettent en place une expérimentation rigoureuse.
Séance 3 : en utilisant les notions vues en séance 2, on montre les pièges à éviter lors de l’étude d’un phénomène et également on donne des outils pour conduire son esprit critique. Il s’agit principalement de présenter et d’illustrer, par divers exemples classiques (sang de Saint Janvier, Cosmonaute Maya, etc.), les facettes et effets de la zététique illustrés, entre autres, par Henri Broch, et le CorteX.
Points forts : on donne une boîte à outils critiques à l’usage des citoyens.
Points faibles : le caractère « catalogue » de cette partie du cours tend à endormir les étudiants (et les enseignants également).
Points à modifier/améliorer : une des pistes d’amélioration est de passer de notre approche d’apprentissage par explication (de la théorie vers l’expérience où l’on propose d’abord des outils que l’on utilisera ensuite aux séances 4 et 5) à l’approche d’apprentissage par induction privilégiant la séquence expérience puis théorie.
Séance 4 : il s’agit ici de mettre en œuvre les pièges et outils vus à la séance précédente à l’aide d’études de cas. Sont abordés : les médias, l’astrologie, le sarcophage d’Arles-sur-Tech, la manipulation et l’homéopathie. Nous présentons ainsi la démarche d’investigation face à ces phénomènes étonnants : d’abord, de quoi parle-t-on ? La première étape est donc une étape de documentation la plus étayée, indépendante et recoupée possible. Ensuite, quels sont les pièges identifiés qui peuvent nous induire en erreur. Quels outils permettent de disséquer le phénomène et son contexte ? Eventuellement, est-il possible de tester soit même, par des expériences, certaines assertions ?
Points forts : beaucoup plus parlant que la séance précédente. Beaucoup d’étonnement de la part des étudiants en face d’informations qu’ils n’ont jamais eues (mais qu’ils n’ont jamais pensées aller chercher).
Points faibles : parfois, des considérations un peu techniques font perdre le fil.
Séance 5 : Bien qu’étonnés des informations obtenues lors de l’étude des cas, beaucoup d’étudiants se pensent à l’abri de dérapage « d’esprit critique », protégés par leur carapace « scientifique ». Dans cette dernière séance, il convient donc de montrer que cela n’est pas le cas. L’esprit critique est un travail de tous les jours et les scientifiques sont avant tout des hommes et des femmes avec leurs convictions, leurs croyances et leurs failles. Après avoir insistés sur le bienfait de l’erreur en science, son côté indispensable et sain, nous présentons les bavures scientifiques, c’est-à-dire non les erreurs scientifiques mais les erreurs de scientifiques : les expériences d’Yves Rocard sur le biomagnétisme, celles d’Eddington pour prouver la relativité, les rayons N et la mémoire de l’eau pour clore l’ensemble.
Points forts : cette partie originale touche les étudiants scientifiques en leur montrant qu’une bavure est vite arrivée.
Points faibles : tout comme la partie précédente, des aspects un peu techniques coupent parfois l’attention.
Denis Machon
Dans le cadre du stage de zététique donné à Lyon 1 par Denis Machon, je suis intervenue avec deux cours d’environ une heure chacun. J’ai également présenté ces deux cours lors de « Student club » dans mon laboratoire (Institut Cellule Souche et Cerveau à Bron), qui sont des réunions où les étudiants présentent leur travail aux autres et parlent de sujets scientifiques qui les intéressent.
Le premier cours concernait le traitement de l’information (scientifique mais aussi non scientifique) par les médias (médias de vulgarisation scientifique ou généralistes).
Pour construire ce cours, je me suis appuyée sur la thèse de Richard Monvoisin ainsi que sur les exercices pédagogiques et exemples proposés sur cortecs.org. Ce cours avait pour but d’illustrer de façon concrète les effets zététiques présentés par Denis Machon lors des enseignements précédents.
Le cours était divisé en 4 points :
1 ) « Les mots » : où j’ai insisté sur l’importance du choix des mots et des images par les médias (effet Paillasson, effet Impact, effet Puits)
2) « Les arguments » : où j’ai présenté comment on pouvait donner plus de valeur à une information qu’elle ne le mérite réellement selon la façon dont elle était défendue (arguments d’autorité, effet Cigogne, effet Bipède)
3) « Les registres » : où j’ai montré des exemples de scénarisation de l’information (tous les carpaccios)
4) « Autres effets » pour rester vigilant : la technique de la « peau de chagrin » (rebaptisée « ballon de baudruche » pour ce cours pour l’image du scoop qui se dégonfle au fur et à mesure de la lecture de l’article. Je l’ai rebaptisée car je ne trouve pas le concept de « peau de chagrin » très parlant) ; la « vente de la peau de l’ours » pour l’importance de la vérification des sources de l’information et enfin, un dernier point sur les chiffres.
Les personnes qui sont venues me parler du cours l’ont trouvé intéressant notamment parce que je montre que les médias de vulgarisation scientifique les plus connus utilisent souvent les mêmes procédés que les autres médias pour vendre leur information alors qu’ils bénéficient en général d’une « aura de rigueur » de par leur lien avec la science.
Par contre, ce cours dresse un tableau assez pessimiste sur les médias, ce qui a un peu déprimé les étudiants. Un étudiant a par exemple demandé : « Mais alors, si on ne peut rien croire, comment peut-on faire pour avoir de l’information valable ? » ; peut-être parce que je n’ai pas assez proposé de solutions (comme la multiplication des sources d’information par exemple) ?
Lorsque j’ai présenté ce cours en Student club (avant de donner le cours aux étudiants), on m’a reproché d’avoir trop d’exemples tirés de Science & Vie, ce qui faisait un peu comme si j’avais une dent particulièrement contre ce magazine. Au début, j’avais aussi beaucoup d’exemples de médias de vulgarisation scientifique, et peu de médias généralistes ce qui empêchait un peu de réaliser que les deux types de médias fonctionnent de la même façon. Du coup, j’ai essayé de mettre des exemples d’autres magazines que Science & Vie ainsi que de magazines plus généralistes pour permettre de faire le lien.
On m’a également fait remarquer que je parlais des « médias » en général mais que concrètement, je tirais essentiellement mes exemples des médias écrits, et pas tellement de la télévision, ou de la radio ou d’Internet. Il faudra que j’essaie d’élargir mes exemples pour le prochain cours ou que je cantonne mes conclusions aux médias écrits.
Pour ce cours, je n’ai pas du tout traité du monde du journalisme et de son fonctionnement, ce qui pourrait être très intéressant. Je pense notamment aux réflexions de P. Bourdieu (en particulier celles résumées dans son livre « Sur la télévision »). Il faudra que j’essaie d’introduire un peu ces idées pour l’an prochain.
A la fin du cours, j’ai mentionné le film « Les nouveaux chiens de garde » qui venait de sortir en salle. Des extraits de ce film pourraient être montrés pour illustrer les liens douteux entre politiques et médias (à disctuer).
Mon deuxième cours était une petite présentation d’expériences de psychologie sociale sur la manipulation. Pour réaliser ce cours, je me suis appuyée sur le livre « Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens » de Joule et Beauvois. Le but de ce cours était de montrer comment la façon dont on prend les décisions, qui est plutôt bien adaptée à la vie de tous les jours, peut, dans certaines situations, nous être défavorable. Les expériences de psychologie sociale que j’ai présentées montrent comment on peut changer de manière significative le comportement ou les opinions des gens en jouant sur les concepts d’engagement et d’effet de gel.
Ce cours est bien passé dans le sens où les expériences présentées sont assez amusantes. Cependant, je ne suis pas sûre d’être arrivée à faire passer clairement ce qu’elles montraient réellement, la théorie derrière étant finalement assez complexe.
Je n’ai pas eu trop d’interventions de la part des étudiants lors du cours mais j’en ai eu beaucoup lors du Student club. De manière assez récurrente, les personnes à qui je présente ces expériences se bloquent sur les diverses interprétations possibles de l’expérience, ce qui est intéressant en soi mais qui nuit un peu à la compréhension du fond. Pour chaque expérience présentée, il existe plusieurs interprétations possibles et une expérience, seule, ne permet pas de trancher (ce qui est le principe de construction de la science). Sauf que j’ai eu du mal à faire passer l’idée que l’interprétation proposée n’était pas le résultat de ces expériences seules mais de tout un tas d’expériences, qui, en faisant varier les conditions, sont parvenues à ces conclusions, les meilleures du moment. C’est un point sur lequel il est peut-être nécessaire de bien insister au début du cours, lors de l’introduction par exemple.
Maïlys Faraut, Université Lyon 1
– Cours sur la manipulation
– Cours sur le traitement de l’information par les médias
A paru en 2011, aux éditions Racine, Les jeux de l’amour, du hasard et de la mort. Comprement animal et évolution sous la plume alerte de Paul Galand de l’Université Libre de Bruxelles, docteur en sciences zoologiques et agrégé d’université.
Je viens de le lire, que dis-je, de le dévorer. Farci d’exemples aussi truculents que roucoulants, avec des anecdotes qui font exploser de rire toutes les dix pages, Paul Galand introduit avec finesse les processus évolutifs, circonscrits les erreurs classiques, illustre les mécanismes de tamis des comportements du vivant avec les exemples les plus invraisemblables qui soient, certains sordides à souhait.
Partant des gamètes, de la semence, des ovulations, P. Galand explore les différentes « manières » que les espèces ont « développées » pour « assurer » leur descendance – ou que leur génome respectif, pourrait-on dire, a « emprunté » pour « assurer » sa propre reproduction.
Version sans guillemets (et sans téléologisme) : P. Galand explore les différents résultats des processus évolutifs qui ont donné lieu à des espèces relativement stables et encore en vie.
Avec prudence, il balise les termes de « leurre », « ruse », « stratégie » ou « intention », évitant ainsi la chausse-trappe d’un dessein « intelligent » dans des mécanismes qui n’en ont pas du tout besoin. Hormis le rôle du sourire du bébé, il n’y a par contre pas d’introduction vers les mécanismes purement humains, ou vers de la mémétique (1) introductive, et ça m’a un peu manqué.
17 x 24 cm
320 pages € 22,50
Éditions Racine : écrire à sandrine.thys@racine.be ou au 02/646 44 44.
(1) La mémétique est une discipline qui se propose d’utiliser le concept d’objet culturel, le mème, pour faire une lecture évolutive darwinienne de la culture