On appelle effet cerceau l’erreur logique qui consiste à admettre au début du raisonnement ce que l’on entend prouver par la démonstration que l’on va faire. Le point de départ est quelquefois sous-entendu et l’effet devient ainsi un type de raisonnement circulaire difficile à détecter. Sont présentés ici quelques exemples.
La reconstitution tridimensionnelle du « saint-suaire »
Broch dans son livre le paranormal déconstruit l’un des plus beaux effets cerceau qu’il ait été donné de voir dans le champ zététique. Il est dû à Jackson et Jumper sur le « suaire » dit de Turin :
« Jackson & Jumper ont recouvert d’un drap un volontaire choisi pour sa ressemblance avec l’image du « linceul », puis ils ont mesuré les distances corps-tissu en de nombreux points ; ces données ont ensuite été mises en relation avec les différences de densité relevées sur l’image du « saint-suaire ». Les premiers essais pour reconstituer une représentation en volume de l’ « homme du suaire » montraient une figure humaine assez distordue. Pour en améliorer l’aspect, la disposition de drap sur le volontaire a été changée de manière à affiner le résultat (l’argument était sans doute : après tout, personne ne sait comment ce suaire a été drapé sur un corps dans une tombe en Palestine, il y a presque 2000 ans !). On modifia également, de façon ad hoc, d’autres paramètres de cette fameuse analyse, jusqu’à obtenir une figure offrant un aspect humain, excepté pour une chose : si le visage est ajusté pour un relief normal, le corps apparaît en bas-relief. Ce que Jackson et Jumper ont démontré, c’est qu’ils peuvent obtenir une bonne corrélation entre la densité de l’image sur le suaire et la distance linge-corps correspondante qu’ils obtiennent quand un modèle humain de la taille appropriée est recouvert d’un linge drapé de manière à optimiser le résultat. » (Mueller MM., 1982, The shroud of turin : a critical appraisal, Skept Inq. 6 (3) p. 92). (…) la « démonstration » de J & J pèche par un côté : elle exige que l’on admette au départ ce qu’elle entend prouver ».
(H. Broch, Le paranormal, 1989, Seuil, pp. 57-58).
La torsion de barres
« Les sempiternelles déclarations, dans toute expérience sur un « sujet psi », visant à faire prendre en compte le fait que le sujet ait échoué lors de tests destinés à déterminer si l’habileté ou la force nécessaire au trucage étaient présentes chez lui. Pour tout bon tordeur (de petites cuillères ou autres ustensiles) dont on veut démontrer l’honnêteté, on trouve des tests de ce type :
a. on admet que M. Tordant ne triche pas (cette « hypothèse » est très souvent sous-entendue !)
b. le pauvre « sujet psi » n’a pas réussi à tordre par sa seule force physique les barres de métal qu’on lui présentait à cet effet,
c. ces barres, par contre, « se » sont tordues lorsqu’il s’est simplement concentré dessus,
d. conclusion : ces barres n’ont donc pu être tordues que par son pouvoir « psi ».
e. re-conclusion : M. Tordant n’est pas un tricheur. »
(P-E. Blanrue, in H. Broch, Au coeur de l’extraordinaire, Book-e-book.com 2001, ouv.cité, pp. 196-197).
L’argument de Dieu
Prémisse 1 : La Bible est la parole de Dieu
Prémisse 2 : La parole de Dieu ne peut pas mentir
Prémisse 3 : La parole de Dieu dit que Dieu existe
Conclusion : Donc Dieu existe
L’argument du Colonel Wilford
Le colonel Derek Wilford revient ici sur le rôle de ses hommes dans le massacre du Bogside, appelé aussi Bloody Sunday (Domhnach na Fola en irlandais) le 30 janvier 1972 en à Derry Irlande du Nord, lors duquel l’Armée britannique a réprimé sévèrement une marche pacifiste pour les droits civiques, faisant 14 morts et des dizaines de blessés. Extrait de l’émission du 25 janvier 2016 Affaires sensibles, sur France Inter.
(tiré de R. Monvoisin, Pour une didactique de l’esprit critique, 2007, téléchargeable ici).