Nous savons que le choix d’une information parmi les millions d’informations possibles disponibles chaque jour dans le monde se fait selon des critères subjectifs. Ainsi, regarder un journal TV ou un journal quotidien n’est pas, contrairement à ce qu’on veut nous faire comprendre, un véritable scan de l’actualité, mais bien au contraire une reconstruction de la réalité telle que le média souhaite qu’on la voie. Certains étudiants se désespèrent lorsqu’ils comprennent qu’aucun média ne peut être objectif en soi, qu’aucun média ne peut présenter de faits « bruts », car le simple fait que ce fait brut soit choisi et non un autre est déjà un tri subjectif en soi.
Parmi ces critères, il y en a certains plus évidents que d’autres : choisir les informations spectaculaires, ou qui choquent, qui heurtent le sens commun, ou qui flattent des idées reçues. Ils ont ce point commun d’être vendeurs, et il faut nous rappeler qu’un média a pour objectif premier non de nous informer, mais de se vendre.
Et pour augmenter l’accroche, le recours à l’image est vieux comme la presse, et se vérifie tous les jours la maxime de Paris Match : le poids des mots, le choc des photos.
Alors voici une question qui n’attend pas de réelle réponse, mais qui ne sert qu’à susciter le doute sur la fabrication de nos représentations du monde.
Le séisme qui a frappé le Japon le 11 mars 2011 est dramatique, et les risques nucléaires qu’il suscite sont terrifiants. Tous les médias importants ont dépêché des journalistes et des photographes sur place.
Voici quelques premières pages de journaux*, et étrangement, une photo de jeune femme prise par Yomiuri Shimbun (Agence France Presse) dans les décombres d’Ishinomaki a été particulièrement prisée.
Voici des questions que l’on peut poser à des élèves, des étudiants, du grand public.
Question 1 : comment expliquez-vous que des médias si divers aient tous choisi en photo de couverture la même image ?
Question 2 : quels sont les « ingrédients » de cette image qui lui ont assuré un tel succès ?
Question 3 : votre appréciation de la photo changerait-elle si on apprenait que la jeune femme posait pour la photo, sur demande du photographe ?
Merci à Eric Bévillard de m’avoir montré ce petit phénomène médiatique !
Richard Monvoisin
* Tirées de www.zigonet.com/japon/.