Je sors de la lecture de Purulence de Amoreena Winckler, que j’ai lu sur les conseils de Franck Villard, de l’Observatoire Zététique (cf. Qui sommes-nous ?). Je l’ai lu d’une traite, en manquant tomber de ma chaise. C’est dur. On y comprend comment se forge un cadre conceptuel qui peut permettre à une petite fille d’à peine cinq ans d’intégrer l’art de faire des fellations à des inconnus. Voici la fiche qu’en fit Franck le 13 novembre 2010 dans la POZ, et qu’il m’autorise à reproduire ici.
Ne vous laissez pas rebuter par le titre, parce que ce livre vaut vraiment le détour. Purulence est l’histoire authentique d’Amoreena Winkler, le témoignage de son enfance passée dans la secte Les Enfants de Dieu.
Les Enfants de Dieu (rebaptisés plus tard La Famille) est un mouvement sectaire fondé en 1968 en Californie, par un ancien pasteur évangéliste David Brandt Berg, alias Moïse David ou Mo pour les adeptes. Ils débarquent au début des années 70 en France, où ils sont alors plutôt bien accueillis. On peut même à l’époque les voir, en pattes d’eph’ et robes à fleurs, pousser la chansonnette le samedi soir chez Guy Lux. Ça, c’est pour le côté cour, mais ce qui se joue en coulisses est nettement moins sympathique : inceste, violences, prostitution, pédophilie. Des pratiques dictées par le gourou, pour qui le sexe sous toutes ses formes constitue l’expression ultime de l’amour de Dieu : « Ton corps est l’amour de Dieu, ton sexe est l’amour de Dieu. »[1] Tout est donc permis chez Les Enfants de Dieu, tout sauf… l’homosexualité masculine. Et cette sexualité débridée n’épargne hélas pas les enfants. David Berg instaure aussi le flirty-fisching, ou « pêche par le flirt », autrement dit la prostitution à des fins de prosélytisme. « Es-tu prête à devenir un appât ? À sacrifier ta vie sur mon hameçon […] ? » [2] Ainsi, les femmes et filles de la secte sont-elles exhortées à « ferrer » des hommes (riches ou influents si possible) susceptibles de grossir les rangs du mouvement, et de lui apporter protection et aide financière.
Amoreena Winkler a connu tout cela. Elle a vécu tout cela. Elle nous livre ce récit poignant « à hauteur d’enfant » qui réussit le tour de force de ne jamais tomber dans la sensiblerie ou le pathos.
Franck Villard
Note : une entrevue d’A. Winckler est disponible ici.
Amoreena Winkler Éditeur : Ego comme X 248 pages – 20 euros