Naturel_chimique_complet

Chimie – Naturel, chimique, artificiel, synthétique

Le but de ce cours est de clarifier des notions complexes, le plus souvent mal maîtrisées et liées à des idées reçues sur le concept de nature ou naturel.
Ce cours a été présenté en classe de 3ème (physique-chimie), dans la partie A du programme : La chimie, science de la transformation de la matière. Sous-partie A2 : Synthèse d’espèces chimiques. Pré requis : notion d’atome, ion, molécule.

1.     Quelques rappels

Définitions :

– Un ensemble d’entités moléculaires, ioniques ou atomiques identiques constitue une espèce chimique.

– L’entité de base de l’espèce chimique est elle-même constituée à partir de la centaine d’éléments chimiques décrits dans la classification périodique de Mendeleïev.

– Toute espèce chimique possède un nom et peut être représentée par une formule ou un symbole.

– Une espèce chimique possède des propriétés physiques et chimiques intrinsèques comme la température de changement d’état, la densité ou la solubilité.

– Une espèce chimique peut être reconnue en utilisant (à bon escient) les cinq sens ou en effectuant des tests de caractérisation.

  • Exemple 1 : l’eau est une espèce chimique constituée de molécules identiques appelée molécule d’eau H2O
  • Exemple 2 : le chlorure de sodium (sel de cuisine) est une espèce chimique.
    Il n’a pas une structure moléculaire mais une structure ionique. On le représente aussi par une formule chimique NaCl qui n’a pas la même signification que celle de la molécule d’eau. Le chlorure de sodium est un cristal. Il est formé d’un assemblage compact et ordonné d’ions chlorure et d’ions sodium. La formule du chlorure de sodium est une formule statistique. Elle traduit le fait que dans le cristal, il y a autant d’ions chlorure que d’ions sodium (1Na+ pour 1 Cl).
  • Exemple 3 : le fer est une espèce chimique atomique constituée d’atome de Fer de formule Fe.

2.     Démarrer le cours

On peut démarrer ce chapitre par une sorte de jeu qui consiste à écrire un (ou plusieurs) mot au tableau puis à demander aux élèves, sans parler, de venir écrire le premier mot qui leur est venu à l’esprit. Les manières de procéder sont multiples mais de façon générale et simple, on fait passer le feutre entre les élèves et chacun peut écrire ce qu’il veut (pourquoi pas deux ou trois fois).

Le but de cette introduction est de mettre sur la table les idées des élèves liées aux mots introduits.

En principe, j’écris les mots naturel et chimique. Les résultats sont toujours à peu près les mêmes : il ressort bien souvent qu’on associe chimique à dangereux, artificiel, produits toxiques, etc. alors que naturel se voit gratifier de bon, bien, normal, bio, sauvage, végétal, terre, etc. On engage alors la réflexion sur la signification de ces termes, dans le langage de la vie quotidienne et dans langage scientifique.

Mais pour entrer dans le débat, il faut faire attention et bien maîtriser les concepts. En effet, il m’est arrivé, les premières fois où je proposais ce cours, de me planter assez lourdement : autant la définition de chimique est aisée, autant celle de naturel peut poser problème. Par exemple, si l’on définit naturel comme « ce qui existe dans la nature sans intervention de l’espèce humaine », on se retrouve vite devant des questionnements du type : « mais alors, si un chimpanzé construit un abri avec des morceaux de bois, c’est naturel mais pas si c’est un bûcheron canadien ? » ou « L’abeille qui fabrique du miel dans une ruche (placée là par l’apiculteur), ce n’est pas naturel alors ? »

Devant ces difficultés, il est important de préciser les expressions employées en ayant en tête quelques pistes pour discuter : il faut par exemple éviter de parler de « ce qui est naturel » ou de « la Nature » au sens large car cette notion ne signifie pas grand-chose (voir TP Nature). Je préfère alors utiliser le terme de « réalité » pour désigner tout ce qui existe, nous y compris. En effet, pour beaucoup la Nature est synonyme de ce qui est extérieur à l’être humain, non altéré. Ne revenons pas sur l’étrange chose qui ferait de l’Homme un être hors nature : nous faisons partie de la réalité et ce fait est difficilement discutable.

Mais ce concept du « naturel » renvoie à nombre de dérives, tels le racisme ou toute forme d’extrémisme idéologique, et c’est là que résident les écueils majeurs. Le problème n’est pas de vouloir définir une réalité non modifiée par l’Homme mais plutôt de vouloir lui donner des vertus particulières : il serait « normal », et donc « bon », d’être en accord avec « La Nature », donc pas de mariage ou d’enfants adoptés pour les homosexuels, pas de fécondation in vitro, pas d’avortement, pas de préservatif, pas de clonage, pas d’OGM et si l’on va plus loin, pas de substances artificielles, donc pas de plastique, pas d’ordinateur, pas vêtement synthétique, pas de papier, pas de ruches, pas d’agriculture, pas de feu, bref, retour à l’homo primitus naturalis (oui, j’invente) qui cueillait des plantes et mangeait du mammouth cru (oui, bon, j’exagère un peu). Attention, le but ici n’est pas de dire que toutes ces pratiques sont équivalentes et sont forcément à promouvoir ou à utiliser sans vigilence, réflexions, ou contrôle : ceci relève d’un autre débat. Non, le but est de mettre le doigt sur la confusion largement acceptée et qui assimile automatiquement tout produit qualifié de naturel en sacré, authentique, traditionnel, immuable, dans l’ordre des choses, etc. Tout débat sur ces thèmes devrait dès lors se détacher des idées reçues concernant cette fameuse Nature bonne et bienveillante.

Voilà pourquoi les définitions mentionnées ci-dessus deviennent primordiales pour la suite. En effet, on pourra définir que toute espèce chimique non créée/inventée par l’être humain est une espèce chimique naturelle (sans pour autant supposer qu’elle ait des qualités supérieures à d’autres, ou qu’elle soit dans un certain « ordre des choses »). Plus précisément, c’est l’entité de base de cette espèce (atome, molécule, ion) qui est naturelle si elle existe indépendamment de toute création/invention humaine. Évidemment, on peut objecter à cela le coup du chimpanzé : et si un jour un de ces primates arrive délibérément à fabriquer une espèce chimique inconnue ? Eh bien la définition changera !

Parler d’espèces chimiques permet d’éviter de confondre avec des termes comme objet, matière, substance, mélange, etc. En effet, une substance contient plusieurs espèces chimiques. Du coup, la question « Une épée en fer est-elle naturelle ? » n’a pas de sens car il faudrait alors préciser quelles sont les espèces chimiques qui la constituent. « Du jus d’oranges pressées est-il naturel ? » Oui, si les espèces chimiques le constituant sont naturelles (et pourtant il y a eu pressage par une main humaine !)

3.     Le cours

Ces précisions étant faites, il est temps de clarifier le plan du cours. Je n’ajoute pas de numérotation, chacun étant libre de procéder comme il le souhaite. Cette façon de faire est celle que j’utilise, mais n’est pas figée :

– Tout d’abord, définir le terme chimique : il est connoté péjorativement dans le langage quotidien, associé à danger, pas naturel, toxique. Mais en réalité, chimique signifie l’ensemble des éléments qui constituent la matière : les atomes, molécules, ions, etc. Comme je dis aux élèves : tout est chimique ! J’aime beaucoup ce passage car les élèves se prennent au jeu et me proposent toutes sortes d’objets, matières, substances : « Mais monsieur, donc l’air/l’eau/les fruits/etc., c’est chimique ??? » Je pose alors toujours la même question : de quoi sont-ils/elles constitué(e)s ? D’atomes ? De molécules ? D’ions ? Oui ! Donc… ils/elles sont chimiques ! C’est un moment important car il permet aux élèves de revenir sur ce qu’est la matière, et de quoi elle est constituée, conception qui a parfois du mal à être bien digérée.

– Ensuite, il faut préciser ce que l’on entend par espèce chimique : un ensemble d’entités moléculaires, ioniques ou atomiques identiques constitue une espèce chimique. Par exemple, la substance que l’on nomme « eau » désigne un ensemble de molécules identiques appelées  molécules d’eau et a pour formule H2O. C’est une espèce chimique. Parfois je rappelle aux élèves  que l’eau provenant de n’importe quel endroit sur Terre, du pôle Nord à la Méditerranée, n’est jamais pure : c’est toujours un mélange de plusieurs espèces chimiques. On peut également parler du fer qui est une espèce chimique atomique constituée d’atomes de Fer de symbole Fe.

– Puis on définit une espèce chimique naturelle : toute entité – morceau de base – (molécule, atome, ion) de l’espèce chimique ou bien l’espèce chimique elle-même non créée/inventée par l’être humain est une espèce chimique naturelle. Avec les élèves, on peut se passer de tous les détails (entité ou espèce) et se contenter de « toute espèce chimique non créée par l’être humain ». On utilisera le terme de substance naturelle dans le cas d’un mélange d’espèces chimiques naturelles. Je donne cet exemple en général : si un extraterrestre débarque avec de l’eau pure de la planète Melmac (gloire à Alf) et qu’il la pose dans un verre à côté d’une carafe d’eau pure provenant de la Terre, les deux sont identiques et naturelles. Autre exemple : si j’ajoute du jus d’oranges pressées avec du jus de citrons pressés, j’obtiens une substance naturelle, même s’il y a intervention humaine.

– On peut alors revenir sur les idées reçues évoquées dans le jeu au tableau. Par exemple, tout ce qui est naturel est-il forcément bon ? Les exemples sont fournis en pagaille grâce à toutes les substances naturelles présentent dans les poisons, venins et autres acide sulfurique, chlorhydrique, fluorhydrique que la « Nature » nous fournit. Le pétrole est typiquement un moyen de faire comprendre qu’une substance naturelle n’en est pas pour autant « bonne » à rejeter n’importe où.

– Un dernier écueil : il faut en outre éviter de définir naturel par  « présent dans la Nature », le concept de Nature étant lui-même flou : on trouve du plastique dans la « Nature ». Est-ce pour autant naturel ? (voir ci-desus)

Ces étapes franchies, on peut passer aux suivantes. Il nous reste en effet à introduire et définir les termes artificiel et synthétique.

– Des paragraphes précédents, on déduit qu’à l’opposé des espèces chimiques naturelles, il existe des espèces chimiques qui sont créées, inventées par l’être humain (à l’aide de transformations chimiques). On les nomme espèces chimiques artificielles. On peut alors les mélanger entre elles (ou avec des substances naturelles) et obtenir des substances artificielles. Eh oui, du moment qu’une substance contient des espèces chimiques artificielles, elle sera considérée comme artificielle. Des exemples peuvent être donnés : tous les polymères (plastiques, nylon) dérivés du pétrole, des arômes (éthylvanilline), des médicaments (aspirine), des atomes (einsteinium), etc. Attention là aussi aux termes utilisés : au départ, je ne faisais pas vraiment de nuances et j’employais des verbes comme « créer », « fabriquer », « inventer », « produire », « préparer » indifféremment. Or c’est très important de faire la distinction entre créer/inventer et fabriquer/produire/préparer. Les premiers s’appliquent aux espèces artificielles spécifiquement (notion de donner existence à) alors que les seconds s’appliquent aux espèces synthétiques (notion de mise en œuvre technique, voir paragraphe suivant).

– On introduit donc enfin la notion d’espèces chimiques de synthèse (ou synthétiques). Celles-ci proviennent tout simplement d’une transformation chimique opérée par l’être humain. Elles peuvent donc être artificielles ou naturelles.  Les premières sont crées/inventées, les autres copiées. J’aime bien donner l’exemple de l’eau, que l’on peut synthétiser (au sens de copier dans ce cas) de diverses manières, comme en faisant réagir du dioxygène avec du dihydrogène (2H2+O2 = 2H2O). L’eau obtenue est une espèce chimique de synthèse naturelle (= copie) mais totalement identique et indiscernable d’une molécule d’eau sortie d’une rivière au Canada. On peut multiplier les exemples en présentant quelques molécules aux propriétés diverses que l’être humain a reproduit à l’identique, notamment tous les arômes des fruits : la vanilline peut être utilisée à ce moment du cours ; c’est une molécule présente dans les gousses du vanillier mais que l’on synthétise aussi à partir du clou de girofle, de la lignine du bois ou de la pulpe de betterave.

Pour résumer, voici un schéma que je trouve intéressant et que les élèves comprennent plutôt bien. Je le construis avec les élèves (voir ci-dessous) et, à mon avis, c’est indispensable pour qu’il soit bien assimilé :
Naturel_chimique_complet
Voici les commentaires associés et l’ordre dans lequel je bâtis ce schéma :
1. Il existe des espèces chimiques (pointillés) :
chimique
2. Parmi celles-ci, certaines sont naturelles (bleu) et d’autres artificielles (rouge) :
naturel
3. Les espèces chimiques artificielles sont forcément inventées/crées par l’être humain, mais on sait également copier des espèces chimiques naturelles : elles forment l’ensemble des espèces chimiques de synthèse (vert hachuré) : toute espèce chimique fabriquée (obtenue par transformations chimiques) par l’être humain est alors nommée synthétique:
naturel_chimique_mini
On peut également résumer sous forme de phrases :

– Il existe des espèces chimiques naturelles que l’on sait copier : ce sont des espèces chimiques de synthèse.

– Il existe des espèces chimiques qui sont crées par l’être humain : ce sont des espèces chimiques de synthèse artificielles.

4.     Une vidéo à décortiquer

En fonction du temps dont vous disposez, je trouve intéressant de diffuser un document vidéo tiré de l’émission Envoyé Spécial (France 2) intitulé : Vanille, aux sources du goût (si le téléchargement s’arrête, le relancer pour obtenir la vidéo en entier). On peut y décortiquer les propos des journalistes et des personnes interrogées et les comparer aux informations données dans le cours.
La vidéo ci-dessous commence à la dix-huitième minute :

Voici un « décorticage » possible :

– Le début du documentaire présente la culture de la vanille à Madagascar.

18’ (0′) Le journaliste parle de vanilline naturelle comme principal composant de la vanille. Il ajoute ensuite qu’il existe de la vanilline synthétique fabriquée par l’industrie chimique. Les industriels feraient passer cette dernière pour de la vraie vanille. On peut s’étonner ici qu’il ne soit à aucun moment précisé que les deux molécules sont parfaitement identiques et que seul le mode de fabrication est différent. On note également l’amalgame fait entre synthétique et industrie chimique, pas que cette relation soit fausse, mais simplement parce qu’elle est connotée péjorativement dans le langage de la vie quotidienne. Enfin, dire que les industriels font passer la vanilline pour de la « vraie vanille » ne veut rien dire. Il faudrait dire que les industriels utilisent les étiquettes (images de gousses ou fleurs de vanilles et appellations) et peuvent ainsi induire le consommateur inattentif en erreur, persuadé qu’il va trouver de la vanille (inutile de dire vraie, personne de sait faire de la fausse vanille) dans son yaourt. Par contre, on peut faire réfléchir les élèves sur la suite du reportage qui pointe la législation sur les appellations (saveur vanille, goût vaille, arôme vanille = vanilline synthétique). A ce moment, je précise aux élèves que si la vanilline présente dans ces yaourts était issue de l’extraction des gousses de vanille (ce qui serait idiot car inutile : on sait faire la même chose pour beaucoup moins cher !), il n’y aurait aucune différence, ni sur le goût, ni sur la composition. C’est assez difficile à comprendre pour les élèves car pour eux, les deux ne doivent pas être identiques : elles ne sont pas obtenues de la même façon ! N’oublions pas qu’en procédant à l’extraction sur des gousses de vanilles, on obtient plusieurs centaines d’arômes ce qui ferait une grande différence dans nos yaourts ! Mais là n’est pas la question, et j’insiste vraiment sur la parfaite copie obtenue par synthèse.

19’50 (1’50) Le journaliste évoque le prix de revient de la vanilline chimique et naturelle. On peut, là aussi, faire réagir les élèves qui savent dorénavant que l’expression « vanilline chimique » ne veut rien dire puisque « tout est chimique ». Qu’aurait-on dû dire ? Vanilline synthétique et vanilline naturelle pardi !

20’15 (2’15) On entend parler « d’arôme naturel ». J’arrête alors la vidéo et je pose la question aux élèves : qu’est-ce que cela peut être ? En général, ils répondent que c’est de l’extrait de vanille. Eh bien non ! C’est une catégorie d’ingrédients aromatisants d’origine biotechnologique… ! L’explication suit : ce serait une technologie utilisant « des produits naturels qui n’ont rien à voir avec la gousse de vanille ». On peut déjà discuter des termes « produits naturels », le journaliste précisant que la vanilline est obtenue à partir de pois, betterave, riz, bref, « plus rien de chimique ». Il faut là aussi rebondir sur ce terme connoté : on sous-entend que la vanilline obtenue par les industriels « classiques » serait faite à partir de produits chimiques, donc mauvais, dangereux, polluants, etc.

21’08 (3’08) Le journaliste pose la question à l’exploitant : « c’est quoi la différence entre la vanilline d’origine biotechnologique et la vanilline de synthèse » Avant de commenter la réponse, le journaliste utilise encore des termes inadéquats car les deux vanillines sont synthétiques. Le patron répond : « la différence réside dans le mode de fabrication. » Il parle de « catalyseurs chimiques » opposés aux « catalyseurs biologiques ». Le journaliste ajoute « en clair, l’une vient de la chimie, l’autre de la biologie ». Si la différence de forme justifie ce genre de précisions, il est vraiment important de faire comprendre que dans chaque cas, ce sont des transformations chimiques qui sont responsables de la synthèse ! Sauf que dans le cas des biotechnologies, cela passe par l’intermédiaire d’enzymes. Heureusement, le journaliste précise : « au bout, aucune différence », ce qui est exact. La question est alors posée « mais alors, pourquoi payer plus cher pour la fabriquer ? » Simplement car elle bénéficie de l’étiquetage « arôme naturel », ce qui, d’après l’exploitant, est très demandé par les consommateurs qui « veulent du naturel ». On doit alors vraiment insister sur la non différence entre les deux formes de vanilline.

22’10 (4’10) Sans trop de rapport avec le débat naturel-chimique, on entend parler de l’importance de la vanille auprès des enfants prématurés pour lesquels on diffuse des effluves de vanille pour les soulager ou les aider à mieux respirer. Un chercheur au CNRS précise que les enfants présentent les signes d’un état amélioré grâce à la vanille. Le problème vient du commentaire du journaliste qui pose les questions : « Sommes-nous prédisposés à aimer ce parfum ? Possédons une attirance inscrite dans nos mémoires collectives, au plus profond de nous même ? » Si la première partie peut être comprise comme un lien avec la génétique, la seconde a des allures de pensée magique aux relents ‘newageux’ : qu’est-ce donc que la mémoire collective d’un nouveau-né ? Nous n’aurons pas de réponse du journaliste. Mais le meilleur est pour la suite : on s’attend à ce que le journaliste enquête au sein d’instituts de recherche en génétique ou apparentés. Eh bien, non. C’est auprès d’un parfumeur que les réponses sont cherchées, un certain Jean-Paul Guerlain…(voir : http://www.dailymotion.com/video/xf9uc7_jean-paul-guerlain-ses-propos-racis_news

DC

3 décembre 2010 – Jean Bricmont à Grenoble

Le CorteX ne peut qu’encourager le public à accourir exercer son esprit critique avec Jean Bricmont, physicien bien connu tant pour son canular avec Alan Sokal en 1996 que pour ses analyses politiques.

L’esprit post-moderne et le relativisme : la science raconte-t-elle des histoires ? 
Vendredi 3 décembre à 17h, dans l’amphithéâtre du LPSC, 53 avenue des Martyrs à Grenoble
 
 

Résumé

La science n’a plus, dans le public cultivé, l’image favorable qu’elle a pu avoir dans le passé. Cela est sans doute dû à toute une série de facteurs historiques, sociaux, politiques etc., qui sont trop complexes pour être abordés ici. Néanmoins, en parallèle à cette évolution, on constate également une méfiance croissante envers l’idée que la science est objective ou que le discours qu’elle tient est plus solide que celui des religions et des pseudo-sciences. L’exposé se concentrera sur ce dernier type de critiques, en passant en revue les différentes étapes de la philosophie, de l’histoire et de la sociologie des sciences au XXème siècle.

22 et 23 novembre 2010, université de Rennes 1 – cours de méthode critique, M2R nutraceutique

Lundi 22 et mardi 23 novembre 2010, le corteX dépèche R. Monvoisin pour une série de trois cours pour des Master 1 et 2 de Nutraceutique, sous la direction de M. Bureau.

Lundi 22 novembre
14h-16h Zététique, science & pseudoscience

Mardi 23 novembre
8h-11h pseudo-médecines

  • étude de l’homéopathie
  • étude des élixirs floraux
  • Débat

13h-15h Nutraceutique et autodéfense intellectuelle

  • Études de cas (selon le temps, aspartame, sel, lait, béta-carotène…)
  • Démarche scientifique : que garder à l’esprit ?

Novembre 2010 Le CorteX dans le Journal Diari de Sabadell (Richard Monvoisin)

Richard Monvoisin, zetètica : «Només demano a les teràpies alternatives una estadística d´èxit o fracàs»

Va omplir l’auditori de l’Alliance Française en una xerrada que desmuntava teràpies alternatives, tècniques endivinatòries, bruixeries, ovnis i fenòmens sobrenaturals.

L’escèptic Richard Monvoisin, amb estudis de Física i Química, Filosofia i Didàctica de les Ciències, és co-fundador de l’Observatori de Zetètica de Grenoble i un dels màxim representants a França del moviment zetètic que aplica l’esperit crític a les suposades ciències paranormals.

De debò oferiu 200.000 euros al mag, bruixot o sanador que passi el filtre d’exigència científica del vostre Laboratori de Zetètica?
Ja no, però ho vem fer fins el 2005. Vem tenir un 200 candidats però ho vem deixar córrer perquè la majoria només venien pels diners.

Quin tipus de personatges es presentaven?

Gent que suposadament movia objectes sense tocar-los, que trobaven aigua o petroli sota terra, que veien àurees i energies…
Els va desemmascarar a tots?
La nostra intenció no és anar en contra de ningú. Nosaltres no acusem. Totes les investigacions es van fer en un bon ambient de col·laboració mútua.

A Estats Units ofereixen un milió de dòlars, diuen.

Sí James Randi ofereix un milió de dòlars a qui demostri que té poders sobrenaturals. Per ara no els ha pogut donar a ningú.

Somnis premonitoris, aparicions, fantasmes, curacions… tot és mentida?
Jo no dic això. Cal examinar cada cas amb una ment oberta i a la llum de la ciència. El meu somni és poder trobar algun dia un fenomen d’aquest tipus que funcioni de veritat.

Com investiga, per exemple, l’aparició d’un fantasma?
Els fantasmes són complicats perquè mai saps quant de temps has d’esperar. Jo he passat nits senceres a un cementiri sota la pluja esperant veure un fantasma i només he agafat un gran refredat. Però potser no he esperat el temps suficient. Científicament no puc concloure que no hi ha fantasma.
Gaires fantasmes per Grenoble?
 
Rumors molts. Però quan remontes els rumors fins a la font original tot s’esvaeix. Quan arribes al castell fantasmagòric resulta que va desaparèixer fa 500 anys o que el propietari cobra per fer visites de fantasmes.
Si els esperits no existeixen per què en parlen des dels aborígens australians fins a les llegendes centroeuropees, passant pels sioux de Nordamèrica i les tribus africanes?
Que la creença estigui molt estesa en la humanitat no vol dir que els esperits existeixen. Jo interpreto aquesta universalitat com la ignorància de coneixements científics.
Aplicar el mètode científic a fenòmens que no són científics no és com intentar mesurar amb wats el volum d’aigua d’una piscina?
Efectivament, per la meva àvia era molt evident que Déu intervenia en la seva vida i això no es cap fet científic.

I si no és científic no és cert?

Jo no dic això. Nosaltres, des del Laboratori de Zetètica només intervenim en els casos en què el mag o endevinador diu que la seva pràctica és científica.

Posi’m un exemple d’un guariment investigat per vostè.

La meva tieta tenia càncer, va fer sis mesos de quimioteràpia sense resultat. Va anar a un magnetitzador i li va anar bé. Per ella el magnetitzador era millor que la quimio. Però no ho va provar, per tant potser va ser la quimio que la va curar.

Tampoc es pot provar.

El cas es que la meva tieta va recaure, va refusar la quimio i ha acabat molt malament.

Per què no exigeix a la medicina el mateix grau de cientificisme?

Efectivament la quimio no és infalible, només té un 63% d’èxit, però ho sabem i aquesta informació és pública. Jo només vull que la gent estigui informada perquè pugui triar. Però les teràpies alternatives no tenen una estadística d’èxit o fracàs.

Passaria l’església catòlica el filtre del seu laboratori?

Només entrem en els cassos que ells diuen ser científics com en el Llençol Sant o el degoteig de sang de crucifixes. I cap del dos està provat.

Quin fenomen li agradaria demostrar?
Posats a triar… els extraterrestres.
Qüestió de temps
MILLENIUM

Juntament amb el director de l’Alliance Française que el va convidar, Sébastien Bauer, el «zetetista» Richard Monvoisin va arribar a Sabadell després d’enregistrar un debat del programa Mil·lenium que presenta Ramon Colom al Canal 33.
Tots dos van ser escollits entre altres experts per debatre sobre «La zetètica i l’esperit crític».

S’emetrà properament.

alt

Le CorteX dans le journal Avanguardia « porque la razón es revolucionaria » (Richard Monvoisin)

altENTREVISTA Richard Monvoisin, que enseña zetética: explicación racional de fenómenos paranormales


 
Télécharger le Pdf ici

“La homeopatía y las flores de Bach son eficaces… placebos”

Tengo 33 años. Nací en Toulon. Enseño Didáctica de la Ciencia en la Universidad de Grenoble. Puedo verificar un milagro, pero no la fe. Soy escéptico en ciencia como Pirrón y en política como Chomsky. Verifique sus creencias: no hace falta ser un científico, sólo un ser racional

Eso de zetética suena a paraciencia…
Pero es lo opuesto: viene del griego zetein (examinar). La zetética aplica el método científico para dar explicaciones racionales a fenómenos paranormales y verificar creencias empíricamente, con experimentos. Por ejemplo. Hemos probado que la homeopatía no tiene efectos terapéuticos clínicamente demostrables, ni tampoco las flores de Bach ni otras muchas terapias alternativas…

¿Cómo lo han probado?
Con estudios clínicos, por supuesto.

¿O sea, que no sirven para nada?
Sirven, pero no más allá del efecto placebo.

¿Qué quiere decir?
que a muchos de quienes las toman, les hacen bien, pero no por su efecto clínico, sino sólo por el psicológico.

No es eso lo que dicen los homeópatas.
Nosotros no afirmamos nada sin probarlo. Hacemos experimentos o divulgamos otros ya conocidos, pero sin juzgar a nadie, y en eso me diferencio de un pionero de la zetética, el Nobel de Física Georges Charpak…

Fue huésped de La Contra.
Y gran científico, pero trataba con paternalismo a quienes creían en esas terapias.

Supongo que algunos pacientes seguirán usándolas, pese a la zetética.
Sí, y están encantados con su efecto placebo, pero la zetética les muestra que es el único que tiene. Después, ya sabiéndolo, podrán elegir entre los hechos y sus creencias.

Parece justo y necesario.
Es imprescindible, pero incómodo. En Francia, la homeopatía es un lobby protegido por varios ministros que tienen intereses en una gran multinacional de productos homeopáticos y ningún interés en difundir los resultados de los ensayos clínicos.

¿Por qué la gente cree en su eficacia?
Porque es más cómodo creer que verificar, ergo tomamos más decisiones irracionales que racionales. Muchos creen que si creen se curan y en parte es cierto por el efecto placebo. Lo mismo nos pasa con otras creencias, no sólo terapéuticas, sino políticas y económicas. Yo les animo a que las pongan a prueba con sus propios experimentos.

Díganos cómo.
Para verificar cualquier creencia, empiece por deconstruirla: remóntese a sus orígenes para localizar sus fuentes y aclare después su cui prodest (a quién beneficia).

Si un estudio dice que el tabaco rejuvenece, comprobar si lo paga la tabaquera.
Eso no invalidaría necesariamente sus conclusiones, pero si al final resultara falso, explicaría a quién beneficia su falsedad. Si verifica, por ejemplo, la eficacia clínica de la terapia de las flores de Bach, verá que en sus orígenes sólo está la pura intuición de un señor inglés, Edward Bach, que clasificó a los humanos en siete categorías…

Eso ya lo hacía Hipócrates.
… Y asoció sus bacilos intestinales con ciertas propiedades de 36 categorías de flores. Y hoy aún no tienen más que esa intuición para fundar esa creencia terapéutica.

Pues no son terapias baratas.
Cuanto más pagas por un placebo, más efectivo es. El dinero, el tiempo y el esfuerzo que cuesta una terapia dudosa la refuerza.

Miel sobre hojuelas para el terapeuta.
Insisto en que la zetética debe verificar, experimentar, mostrar y difundir resultados, pero no juzgar ni condenar a nadie: las falsas creencias son como muletas irracionales para muchos humanos, por eso no hay que quitárselas de golpe, sino demostrarles que pueden andar sin ellas… Si quieren.

En algo hemos de creer.
A menudo el propio terapeuta cree sinceramente en sí mismo. En mi universidad hicimos un experimento para demostrar la eficacia de un terapeuta por magnetismo.

¿Curaba con las manos?
Él y sus pacientes juraban que sí. Y es muy difícil verificarlo con un test clínico serio, porque necesitas voluntarios enfermos de la misma dolencia en el mismo grado; un test doble ciego y… En fin, es muy complejo.

¿Entonces…?
Cuando alberguemos dudas sobre creencias, podemos recurrir a experimentos no tan sofisticados: “Si usted cura con el magnetismo de sus manos – le dijimos al magnetista-,podrá detectar también si una persona está o no en la misma habitación con usted aun sin verla: sentirá su energía, aunque no vea a la persona”.

¿Aceptó?

Le propusimos experimentarlo con cien personas y aseguró que acertaría el ciento por ciento de las ocasiones. Y… El tipo era fantástico: sudaba, temblaba, se retorcía… Si hubiera elegido meramente al azar, habría acertado el 50 por ciento de las pruebas: esto es 48, 49 o 51, 52… Si hubiera acertado 63 veces, hubiera sido paranormalmente bueno; y si sólo hubiera adivinado 37 ensayos, sería paranormalmente malo. Y… Acertó 52.

Paranormalmente normal.
Y lo publicamos. Fue pedagógico: si desafiáramos con experimentos sencillos nuestras creencias económicas, políticas y personales, cambiaríamos nuestras vidas.

Debe usted de tener muchos ejemplos.
¿Por qué compra determinadas marcas? ¿A quién vota? Teste sus creencias: apunte, mida, compare y verá que muchas de sus creencias carecen de razones.

Conférences "Esprit critique & Zététique", par Richard Monvoisin – Barcelone (Esp) – Novembre 2010

Le corteX s’est offert une petite balade en Espagne, début novembre.
Mandaté par le laboratoire Zététique, le CorteX a dépêché Richard Monvoisin pour un petit cycle de conférences et d’inteviews avec les médias, pour parler d’Esprit critique et de zététique.


Mardi 9 novembre 

  • Emission catalane Millenium, sur TV3 présentée par Ramon Colom : les thèmes centraux sont la zététique et de l’esprit critique. Hélas, le format TV privilégie toujours les beaux-parleurs, même quand ils ne connaissent pas le sujet, et handicape ceux qui ont une oreillette de traduction.
  • Interview avec le journal central de Barcelone, l’Avanguardia (édition du 16 novembre 2010).

Comme d’habitude, le journaliste scénarise un propos d’une heure à coups de slogans, et met en scène le personnage sans aborder le réseau derrière.

  • rencontre avec les joviaux sceptiques catalans, qui publient la revue El esceptico.

Mercredi 10 novembre 

  • Interview pour le journal de Sabadell Diari de Sabadell dans la rubrique cara a cara (édition du 13 novembre 2010). Mêmes remarques que pour l’Avanguardia.
  • Conférence généraliste Zététique & éducation à l’esprit critique (en français) à l’Alliance Française de Sabadell, invité par le directeur, par ailleurs professeur de philosophie Sébastien Bauer.

Jeudi 11 novembre 

  • Deux ateliers-débats d’1h30 avec des lycéens du lycée français de Barcelone, sur invitation du professeur de Physique Keran Le Foll et d’une équipe d’enseignants très stimulants.

Le responsable de la culture scientifique de l’Institut Français, Guy Molénat, fut non seulement un organisateur hors-pair, mais un partenaire de réflexion doublé d’un guide touristique sans égal. Merci également à Anne-Laure Fize, son assistante.

Géraldine Fabre

Conférence "Géologie & géologie-fiction", par Géraldine Fabre – Grenoble, 1er décembre 2010

altDans le cours Zététique & autodéfense intellectuelle destiné aux L1 et L2 de sciences, nous avons la chance de programmer la conférence de Géraldine Fabre Géologie & géologie-fiction le 1er décembre 2010 : seront abordées sous l’angle critique les formations géologiques faisant penser à des civilisations perdues, des traces de civilisations outre-espace, mais aussi toutes les fantasmagories autour des pierres, que ce soit la kryptonite de Superman ou la théorie de la litothérapie.

Ouvert à tous.

Mercredi 1er décembre à 17h, Direction des Licences Sciences & Techniques, Université Joseph Fourier.


CorteX_Dr_Monvois

Thèse de Richard Monvoisin – Pour une didactique de l’esprit critique

Libre service ! On trouvera ici Pour une didactique de l’esprit critique – Zététique & utilisation des interstices pseudoscientifques dans les médias, la thèse de didactique des sciences de Richard Monvoisin, soutenue à L’Université Joseph Fourier de Grenoble le 25 octobre 2007.

La thèse à télécharger :
Télécharger

Sujet – Le développement et l’enseignement d’outils zététiques à partir des défauts de la vulgarisation et de la médiatisation des sciences.
Pour les étudiants / journalistes / enseignants, elle contient un certain nombre d’effets et de biais de raisonnement, de mises en scènes médiatiques de la science, et présente quelques fiches pédagogiques.

Cette thèse a été soutenue devant un jury composé de :
CorteX_H.BrochHenri Broch, professeur de physique et directeur du laboratoire de zététique à l’Université de Nice-Sophia Antipolis (co-directeur de thèse).
Patrick Lévy, professeur de médecine, directeur de recherche à l´Institut du Sommeil etCorteX_Patrick_Levy de la Vigilance et directeur du laboratoire Hypoxie-Physiopathologie (HP2) de l’Université Joseph Fourier, Grenoble 1 (co-directeur de thèse).
CorteX_Claudine_KahaneClaudine Kahane, professeur d’astrophysique moléculaire à l’Observatoire de Grenoble de l’Université Joseph Fourier, Grenoble 1.
Jean Bricmont, professeur de physique théorique de l’Unité de physique théorique et deCorteX_Bricmont physique mathématique à l’Université Catholique de Louvain (rapporteur).
CorteX_guillaume_lecointreGuillaume Lecointre, professeur du département « Systématique et Evolution » au Muséum national d’Histoire Naturelle, Paris (rapporteur).

Pour toute question, suggestion, correction, correspondance avec l’auteur : Richard.Monvoisin@univ-grenoble-alpes.fr

CorrteX_Annonce_these_Monvoisin
Crédits photos
– Dr Monvois : Eric Bevillard
– Annonce de thèse : François B

Le sophisme

Le sophisme est un raisonnement qui n’est logiquement correct qu’en apparence. Il se distingue des paralogismes dans le sens où il est volontairement fallacieux, conçu avec l’intention d’induire en erreur. Voici quelques sophismes terriblement efficaces et très répandus…

Le Non sequitur

« qui ne suit pas les prémisses »
Ce raisonnement est un syllogisme, où deux prémisses composent une logique pour aboutir sur une conclusion valide. C’est le principe d’énoncés très connus tel que :

  • Tous les hommes sont mortels
  • Socrate est un homme
  • Donc Socrate est mortel

Méthode : tronquer un raisonnement logique du type :

  • Si A est vrai, alors B est vrai
  • Or B est vrai,
  • Donc A est vrai.

Ou l’inverse :

  • Si A est vrai, alors B est vrai
  • Or A est faux,
  • Donc B est faux.

Dans le sophisme Non sequitur, la conclusion est tirée de deux prémisses qui ne sont pas logiquement reliées, même si elles peuvent êtres vraies indépendamment l’une de l’autre. On crée alors l’illusion d’un raisonnement valide.

Exemples :

– Le monde est d’une prodigieuse perfection, à l’image de l’œil humain.

– Il est fort probable qu’une intelligence supérieure soit en jeu dans l’élaboration de l’univers. Le hasard ou une quelconque théorie de l’évolution des espèces ne peuvent donc être les seuls responsables de cette perfection.

– Tous les consommateurs d’héroïne ont commencé par le haschisch. Tu fumes du haschisch, donc tu vas finir héroïnomane.

– Française des Jeux : 100% des gagnants auront tenté leur chance. décomposé en non sequitur: tous ceux qui ont gagné ont joué. Donc si tu joues, tu gagnes

– On m’a dit « Si tu ne manges pas ta soupe, tu finiras au bagne », or je mange ma soupe, donc je n’irai pas au bagne.

Exemple amusant dans Sacré Graal des Monty Python :

– Les sorcières brûlent ; On brûle également le bois: Donc les sorcières sont faites en bois.
– Les sorcières sont faites en bois ; Le bois flotte, comme les canards : Donc si une personne pèse le même poids qu’un canard, c’est bien une sorcière !

Exemple dans la BD de Bourgeon Les passagers du vent, T3 – le comptoir de Juda.

alt

Exemple plus compliqué:

Freud déclarant dans son auto-présentation que la psychanalyse est le contenu de sa vie, et d’autre part que son travail s’inscrit dans l’esprit du nouveau judaïsme, on est alors tenté de faire un amalgame entre le personnage de Freud, le Freudisme, la psychanalyse et le judaïsme. Il y a donc un suspicion permanente d’un antisémitisme dissimulé dans la critique du freudisme :

– Vous critiquez la psychanalyse freudienne. Freud était juif, vous êtes donc antisémite.

En avril 2010, Élisabeth Roudinesco, historienne de la psychanalyse, tient un propos similaire dans une interview au Nouvel Observateur. « Il y a bien souvent en France une jonction inconsciente entre antifreudisme, racisme, chauvinisme et antisémitisme, fondée sur la haine des élites et le populisme […] Les éternels complots et affabulations attribués aux psychanalystes sont douteux : on voit l’œil, la main et le nez de Freud partout… »

Un extrait du developement de Michel Onfray sur ce sophisme (2mn15′)

Développement entier (17mn12′)

Le faux dilemme

Méthode : consiste à n’offrir que deux alternatives déséquilibrées en omettant toute autre alternative pourtant possible. Il peut s’agir de réduire le choix à deux alternatives qui ne sont pas réellement contradictoires. Au final, le choix est confisqué et la décision étriquée.

Exemples :

L’argument Bush : Ceux qui ne seront pas avec nous seront contre nous

Si tu n’es pas ceci, alors tu es comme ça, si tu n’es pas contre, tu es pour, si tu n’es pas pour le complot du 11/9 tu es pro-Bush… nous avons là un mode de pensée assez primitif où il n’y a pas de troisième, de quatrième ou cinquième voie, non, c’est le yin yang, le noir et le blanc, le lumière-ténèbres du manichéisme perse du IIIe… En fermant les yeux, on entendrait résonner la voix de Michel Fugain : Qui c’est qui est très gentil (les gentils) Qui c’est qui est très méchant (les méchants).[1]

C’est un sophisme très rependu, souvent utilisé pour opposer le moins pire au pire :

– Marcher pieds nus ou acheter des chaussures fabriquées par des enfants en Chine ?

– La guerre en Irak ou laisser le champ libre au totalitarisme ?

– L’interdiction du voile ou l’extrémisme religieux ?

– Le Pen ou Chirac ?

– L’axe du bien ou celui du mal ?

Le faux dilemme fonctionne également avec deux propositions négatives, qui, de la même façon réduisent les choix. On appelle ce faux dilemme le « ni-ni ». « Ni pute ni soumise » en est le meilleur exemple. Le ni-ni sent parfois le brun. Il se cache par exemple dans « La France, aimez-la ou quittez-la ! » du Front National, transformé en « La France, tu l’aimes ou tu la quittes » par De Villiers.

Cette stratégie est redoutable car elle oriente sournoisement le débat en le simplifiant en un unique antagonisme. Mais celui-ci n’est qu’apparent : le fait que deux propositions soient compétitives ne signifie pas forcément qu’elles soient contradictoires. Le faux dilemme crée l’illusion d’une « compétitivité contradictoire ». Dans l’affirmation « soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre nous », on peut trouver des arguments acceptables pour ne pas être « avec eux » sans pour autant « être contre eux » : il n’y a pas contradiction.

Enfin, les deux hypothèses compétitives peuvent se révéler toutes les deux fausses !
Exemple dans les médias:
– Le Figaro du 28/01/10 présente en une un titre évocateur : « 9 Français sur 10 pour une réduction des dépenses publiques »
CorteX_Sophisme_FigaroCorteX_Sophisme_Figaro2

L’article fait référence à un sondage de l’IFOP et indique que « pour faire face à la situation actuelle (crise économique, déficits publics élevés) 92% des enquêtés privilégient de réduire les dépenses de l’État et celles des collectivités locales (villes, départements, régions) ». Passons ici sur l’origine de la commande de ce sondage et son utilisation très orientée [2] pour nous intéresser à la formulation de cette question sous forme de faux dilemme :

Question 2 : « pour faire face à la situation actuelle (crise économique, déficits publics élevés) quelle solution faut-il selon-vous privilégier ?

1/ « Réduire les dépenses de l’État et celles des collectivités locales (villes, départements, régions) » ou la seule autre option proposée :

2/ « Augmenter les prélèvements obligatoires (impôts locaux, impôts sur le revenu) »

Ce faux dilemme oriente soigneusement la réponse en interdisant toute autre solution, comme par exemple : la suppression des niches fiscales et des exonérations de cotisations sociales des entreprises, l’augmentation de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, le rétablissement de l’impôt sur les successions, l’augmentation de l’ISF, etc. On évite également de préciser les domaines de réduction de dépenses publiques comme la défense et l’armée plutôt que les aides sociales. Ainsi présenté ce faux dilemme permet d’affirmer l’écrasante majorité de réponses 1, et appuyer fallacieusement le propos de fond de l’article, du journal, du propriétaire du journal, etc.

– Un exemple rigolo de faux dilemme dans le dernier « Pirates des Caraïbes : la Fontaine de Jouvence » de Rob Marshall, 2011.

[dailymotion id=xmmgr4]


Reductio ad hitlerum

« déshonneur par association »
Méthode : disqualifier un adversaire en le comparant à un personnage honni du passé comme Hitler, Mussolini, Pol Pot…

Par extension, le déshonneur par association peut s’immiscer lorsqu’on opère une catégorisation fallacieuse des arguments présentés : iI s’agit de rattacher l’argumentaire à un concept, un courant, une doctrine qui est connue pour être en elle-même négative, réfutée, inadmissible, immorale.

Si le sophisme reductio ad hitlerum apparaît rarement sous la forme « vous avez le même argument qu’Hitler », il est plutôt présent aujourd’hui comme une tactique de déshonneur par association en faisant un rapprochement avec la politique de ces personnages. L’évocation subtile d’une période historique, fasciste ou nazie par exemple, discrédite l’interlocuteur et l’exclut de la discussion, évidement sans développer une argumentation valide. On suppose alors que l’argument est identique à un concept et que ce dernier est largement réfuté.

Exemple : 

– Voyons, si tu adhères à la théorie de Darwin, alors tu cautionnes la « sélection » des espèces, donc le darwinisme social et l’eugénisme, ce qui rappelle certaines heures sombres…

– Vous ne pouvez pas être aussi manichéen/rationaliste/spiritualiste…

– Cette position est pour ainsi dire du bolchevisme/fascisme/nationalisme/totalitarisme, avec ce que l’on connaît de ses conséquences dramatiques…

– Vous critiquez [xxx] exactement comme Jean-Marie Le Pen.

Exemple dans les médias :

alt  

 – Interview de Carla Bruni dans l’Expresse du 13 février 2008. Elle fait référence au site du Nouvel Observateur et déclare : « si ce site avait existé pendant la guerre, qu’en aurait-il été des dénonciations de juifs »

– Jean-François Copé accuse Martin Hirsch de se livrer à un « exercice de délation » à propos de son dernier ouvrage consacré aux conflits d’intérêts dans le gouvernement. Dimanche Soir politique sur Itélé /France Inter, le 26 septembre 2010:

{avi}CorteX_Sophismes_Cope_Hirsch_dimanche_politique{/avi}

– Discours du 26 novembre 2009, Christian Estrosi, Ministre de l’Industrie et maire de Nice, estime qu’un débat sur l’identité nationale en Allemagne durant les années 30 aurait pu permettre d’éviter « l’atroce et douloureux naufrage de la civilisation européenne ». Difficile ensuite de refuser le débat sans être assimilé au régime nazi :

[dailymotion id=xgs88o]

– Roschdy Zem, invité à s’exprimer sur la loi HADOPI sur le téléchargement, au 13h de France2 le 26 avril 2009 : « Les seuls cas où la culture a été gratuite, c’est les cas où il y avait une politique de dictature, sous le IIIe Reich, sous la Roumanie de Ceausescu : la culture gratuite n’existe pas » :

[dailymotion id=xgs899] 

Le déshonneur par association peut se glisser parfois dans des endroits inattendu, comme dans cette interview de Périco Légasse, critique gastronomique de Marianne, dans l’émission Service Public sur France Inter, le 11 novembre 2010. « [la cuisine moléculaire] c’est le fascisme ! […] c’est une dictature de la pensée. »


La pétition de principe

«petitio principii »
Méthode : consiste à faire une démonstration qui contient déjà l’acceptation de la conclusion, ou qui n’a de sens que lorsque l’on accepte déjà cette conclusion.
Exemples :

– La psychogénéalogie est une thérapie efficace puisque cette méthode aide les gens à aller mieux.

Il y en a de nombreuses formes :

Par insinuation : Nous ouvrons aujourd’hui le procès d’un ignoble meurtrier.

Par insinuation interrogative : Vous allez me dire que les lois physiques existent indépendamment de la volonté de Dieu?

Par analogies : Au même titre qu’une maison a besoin d’un architecte, il est évident que l’univers a besoin d’un Créateur.

Par raisonnements en boucle : Jésus est né d’une vierge. Comment cela serait-il possible sans l’intervention divine ? Que la réponse soit oui ou non, l’interlocuteur a déjà affirmé explicitement l’existence d’une volonté divine.


La pente savonneuse

«Développement abusif des conséquences ou La pente glissante, La porte ouverte…»

Méthode : développer les conséquences négatives d’un argument de façon excessive. Le but est de réfuter cet argument en démontrant que si on l’accepte, alors on accepte également ses possibles conséquences négatives. Les conséquences risquées sont ainsi envisagées et présentées comme dramatiques, catastrophiques, écœurantes, immorales, etc. C’est une scénarisation focalisée sur des conséquences inadmissibles, de la sorte on ne peut pas y souscrire.

Exemple :

– Si l’humain descend du singe où va-t-on ? C’en est fini de la morale !

– Si les distributeurs de préservatifs sont autorisés au lycée, on cautionne alors les rapports sexuels des jeunes. C’est l’incitation à la débauche, l’avènement de la bestialité !

– Les thérapies cognitives, c’est la porte ouverte au Prozac et à la Ritaline pour les enfants.

– Si les aides sociales sont étendues, cela va inciter les gens à ne plus rien faire et l’économie sera fragilisée. Les inégalités seront alors de plus en plus marquées. C’est risquer l’effondrement de notre système économique.

– Mettre en doute le fonctionnement démocratique d’une société est la porte ouverte à l’anarchie et au chaos le plus total.

– Régulariser les sans-papiers ouvrira inévitablement un appel d’air qui renforcera l’immigration irrégulière vers notre pays.

Exemple dans la BD de Bourgeon Les passagers du vent, T4 – L’heure du serpent.
alt
Trouvaille de Christophe Michel, alias Chrismich, de Chambéry

  • « Si on commence a vouloir dépénaliser le cannabis, bientôt on légalisera le mariage homosexuel. A quand la CorteX_Jacques_Alain_Benistidépénalisation du viol, voire la légalisation du viol ?« 

Signé Jacques-Alain Bénisti, député UMP, pendant un débat politique sur la chaine LCP le 23 juin 2011
en audio:

[dailymotion id=xjhcbj]

L’épouvantail

«L’Homme de paille, strawman »

Méthode : travestir d’abord la position de son interlocuteur de façon volontairement erronée et facile à réfuter puis détruire cet épouvantail en prétendant ensuite avoir réfuté la position de l’interlocuteur.

Exemple : 

– Les évolutionnistes affirment que la vie sur Terre est apparue par hasard. Mais comment une être humain ou un éléphant pourraient apparaître de rien, de nul part ?

– Les adversaires de l’astrologie prétendent que les astres n’ont pas d’influence sur nous. Allez donc demander aux marins si la Lune n’a pas d’influence sur les marées !

– En critiquant l’efficacité de l’acupuncture vous balayez dédaigneusement d’un revers de la main la culture asiatique.

On peut utiliser d’autres mécanisme sophistiques pour créér cet épouvantail, de sorte qu’il soit facilement réfutable.

Avec une reductio ad hitlerum, par exemple : Vous adhérez en somme à des théories eugénistes.

Une attaque ad hominem par association : Vous invoquez Voltaire et ses écrits sur l’égalité des Homme en oubliant soigneusement sa participation au commerce d’esclave.

NG

[2] Voir le brillant article sur ce sondage de l’Observatoire des médias, sur le site ACRIMED action-critique-médias : http://www.acrimed.org/article3304.html.
Cette ébauche du monde de sophisme est basée, entre autre, sur la fiche « Petit recueil de 18 moisissures argumentatives« . 
alt

Non sequitur

Le sophisme est un raisonnement qui n’est logiquement correct qu’en apparence. Il se distingue des paralogismes dans le sens où il est volontairement fallacieux, conçu avec l’intention d’induire en erreur.

Non sequitur

« qui ne suit pas les prémisses »

Ce raisonnement est un syllogisme, où deux prémisses composent une logique pour aboutir sur une conclusion valide. C’est le principe d’énoncés très connus tel que :

  • Tous les hommes sont mortels
  • Socrate est un homme
  • Donc Socrate est mortel

Méthode : tronquer un raisonnement logique du type :

  • Si A est vrai, alors B est vrai
  • Or B est vrai,
  • Donc A est vrai.

Ou l’inverse :

  • Si A est vrai, alors B est vrai
  • Or A est faux,
  • Donc B est faux.

Dans le sophisme Non sequitur, la conclusion est tirée de deux prémisses qui ne sont pas logiquement reliées, même si elles peuvent êtres vraies indépendamment l’une de l’autre. On crée alors l’illusion d’un raisonnement valide.

Exemples :

– Le monde est d’une prodigieuse perfection, à l’image de l’œil humain.

– Il est fort probable qu’une intelligence supérieure soit en jeu dans l’élaboration de l’univers. Le hasard ou une quelconque théorie de l’évolution des espèces ne peuvent donc être les seuls responsables de cette perfection.

– Tous les consommateurs d’héroïne ont commencé par le haschisch. Tu fumes du haschisch, donc tu vas finir héroïnomane.

– Française des Jeux : 100% des gagnants auront tenté leur chance. décomposé en non sequitur: tous ceux qui ont gagné ont joué. Donc si tu joues, tu gagnes

– On m’a dit « Si tu ne manges pas ta soupe, tu finiras au bagne », or je mange ma soupe, donc je n’irai pas au bagne.

Exemple amusant dans Sacré Graal des Monty Python :

   

– Les sorcières brûlent ; On brûle également le bois: Donc les sorcières sont faites en bois.
– Les sorcières sont faites en bois ; Le bois flotte, comme les canards : Donc si une personne pèse le même poids qu’un canard, c’est bien une sorcière !

Exemple dans la BD de Bourgeon Les passagers du vent, T3 – le comptoir de Juda.

alt

Exemple plus compliqué:

Freud déclarant dans son auto-présentation que la psychanalyse est le contenu de sa vie, et d’autre part que son travail s’inscrit dans l’esprit du nouveau judaïsme, on est alors tenté de faire un amalgame entre le personnage de Freud, le Freudisme, la psychanalyse et le judaïsme. Il y a donc un suspicion permanente d’un antisémitisme dissimulé dans la critique du freudisme :

– Vous critiquez la psychanalyse freudienne. Freud était juif, vous êtes donc antisémite.

En avril 2010, Élisabeth Roudinesco, historienne de la psychanalyse, tient un propos similaire dans une interview au Nouvel Observateur. « Il y a bien souvent en France une jonction inconsciente entre antifreudisme, racisme, chauvinisme et antisémitisme, fondée sur la haine des élites et le populisme […] Les éternels complots et affabulations attribués aux psychanalystes sont douteux : on voit l’œil, la main et le nez de Freud partout… »

Un extrait du developement de Michel Onfray sur ce sophisme (2mn15′)

Développement entier (17mn12′) 
N’hésitez pas à nous proposer des compléments ou du matériel illustrant ce sophisme. 

NG