Corrigé – Analyse du texte "Le panda est une création tout à fait étrange", de R. Meinnachbach

Analyse du texte « le panda est une création tout à fait étrange »
(Pour l’énoncé, voir ici).

« Le panda

Catégorie imprécise. Rappelons-nous que la notion d’espèce est une catégorie créée par le cerveau humain. En gardant cette catégorisation, il faut être précis : il y a deux grands genres de panda, les Ailuropodes et les Ailurides (de ailos, en grec : le chat). Ils sont tous les deux du sous-ordre des caniformes, mais les premiers appartiennent à la famille des ours, les Ursidés. Chez les Ailuropodes, il y a deux sous-espèces, le panda géant, Ailuropoda melanoleuca, auquel il est fait référence ici dans ce texte, et le panda de Qinling, Ailuropoda melanoleuca qinlingensis. Quant aux Ailurides, qui n’ont qu’un seul représentant vivant, le panda roux, ou panda fuligineux, Ailurus fulgens, ils sont de la famille des ratons-laveurs, les procyonides. Pour les embranchements phylogénétiques, voir plus loin.

est une création

Terme téléologique. « Création » implique un créateur, et instille l’idée d’une espèce créée telle quelle, ce qui nous ramène au fixisme.

 tout à fait étrange

Norme. Étrange par rapport à quelle norme ? Cette « étrangeté » relative fait le jeu de la lecture téléologique

 et inadaptée à son milieu

Erreur d’analyse évolutive. Aucune espèce n’est « inadaptée » à son « milieu » (sauf éventuellement lors d’un bouleversement colossal de celui-ci). Elles sont toutes au contraire fortement adaptées à leur niche. Le panda géant, avec ses spécificités, a justement une niche écologique « très sensible », au point qu’une simple variation de ladite niche peut le mettre en péril.

 : il ne sait manger que des feuilles de bambou, alors que son estomac est fait pour manger de la viande

Terme téléologique. Un organe n’est pas « fait pour » quelque-chose. Il n’est pas « fait », et pas « pour » (dans le but de). Il est le fruit d’un ensemble de caractéristiques héritées d’individus les ayant possédés et leur ayant conféré un avantage par rapport aux autres individus pandas. De ce fait, ces caractéristiques se sont propagées à toute la population car augmentant le succès reproducteur de leurs porteurs.

  ; cela ne lui donne que très peu d’énergie pour se déplacer ou même copuler. Certains disent que ce fossile vivant

Notion désuète et fausse. Un fossile vivant, ou espèce panchronique est une espèce actuelle présentant des ressemblances morphologiques avec des espèces éteintes, identifiées sous la forme de fossiles. Ces appellations, abandonnées, suggéraient, à tort, que ces espèces n’ont plus évolué depuis les temps fossilifères. Or l’apparente stabilité morphologique des espèces panchroniques ne concerne que la morphologie externe globale de ces groupes d’espèces, l’anatomie interne et a fortiori le patrimoine génétique de ces espèces varient et évoluent au cours du temps (cf. ouvrages de Lecointre et Le Guyader). En clair, comme l’écrit le Maître de conférences parisien Patrick Laurenti, un bon fossile vivant est un fossile mort 🙂

 est le chaînon manquant

Notion désuète et fausse. Le chaînon manquant, ou forme transitionnelle serait une espèce vivante ou fossile qui présenterait une mosaïque de caractères de deux autres espèces ou groupes d’espèces actuelles, laissant penser qu’il est une forme intermédiaire entre ces dernières, dans une logique de classification linéaire que l’on sait illusoire. Cette expression est à bannir, à l’instar de « chaînon manquant » ou « maillon », car l’identification d’une forme transitionnelle n’est possible qu’a posteriori et en négligeant l’aspect continu, buissonnant et non directement orienté du processus évolutif. En gros, on lit à rebours le processus, en un beau raisonnement panglossien. En outre, une forme transitionnelle entre espèces actuelles ne peut pas exister, au contraire d’ancêtres communs ou d’ « intermédiaires structuraux ».

 des ours

→ « chaînon manquant des ours »  ne veut rien dire : même si chaînon manquant avait du sens, il faudrait dire « entre les ours et …. quelque chose d’autre ».

Problème de filiation. Si on raisonne sur le panda roux, de récentes recherches en phylogénie moléculaire le situent dans un genre indépendant, les Ailures, de laquelle il serait la seule espèce encore vivante. Ce genre fait lui-même partie de la super-famille des Musteloidea qui inclut aussi les Mephitidae (mouffette) d’une part, les Procyonidae (raton laveur) et les Mustelidae (belette) d’autre part. Selon cette nouvelle classification, il n’appartient donc pas à la famille des Ursidae. Il serait plus proche des ratons-laveurs, en raison des grandes affinités du squelette, de la dentition, des organes génitaux et du pelage.

Si on raisonne vraiment sur les deux sous-espèces de pandas géants (Ailuropoda melanoleuca), alors effectivement il est classé dans la catégorie Ursidae, bien que longtemps considéré comme une sorte de « raton laveur aberrant ».

Précisons que Dwight Davis, de Chicago, a montré en 1964 que s’il y a une forte ressemblance entre les deux familles de panda, cela résulte davantage d’une évolution vers des fonctions semblables que d’une ascendance commune. Cela fut confirmé dans les années 80 par l’équipe de généticiens de Stephen J. O’Brien. Anecdote : le contre-argument contre le classement des pandas géants dans les Ursidés reposait sur le nombre de chromosomes : les ours possèdent 74 chromosomes et les grands pandas seulement 42, ce qui semblait contredire une étroite parenté. Mais on découvrit que les chromosomes plus courts de l’ours avaient fusionné, et formé les chromosomes moins nombreux et plus longs du panda géant. Remonter le buisson phylogénétique nous fait remonter dans le temps. On sait désormais que les familles de l’ours et du raton laveur se séparèrent sur l’arbre de l’évolution; il y a plus de 40 millions d’années, tandis que les pandas géants se différencièrent des ours il y a seulement 22 à 25 millions d’années.

 CorteX_Phylogenetique_panda

 , mais aucun fossile n’a jamais été découvert.

Erreur de raisonnement, et biais d’échantillonnage. Primo, nombre de fossiles n’ont pas été découvert ; secundo, un ancêtre commun à deux espèces peut avoir existé sans, hélas, se voir figé dans la roche ; tertio, fin 2012 ont été découverts deux jeux de dents fossiles d’un ancêtre commun entre l’ours et le panda géant… au nord de l’Espagne. Ce fossile, daté de 11,6 millions d’années, appartiendrait à un genre disparu, Kretzoiarctos beatrix, ou ours de Kretzoi, nommé ainsi en l’honneur du paléontologiste Miklos Kretzoi et de sa collègue Beatriz Azanza.

 Les évolutionnistes disent que sa seule stratégie

Terme téléologique. « Stratégie » impliquerait que l’acquisition d’un caractère se ferait par la volonté, la perspicacité ou le choix propre de l’espèce. Or primo il n’y a pas de « conscience » d’espèce. Secundo, il n’y a aucune part à la volonté des individus dans l’adaptation au milieu.

 fut de développer sa couleur pour mieux plaire à son partenaire sexuel,

Terme téléologique. « Pour » signifierait qu’il y a un but, séduire son partenaire. L’évolution se lit à rebours : ceux qui ont développé cette couleur ont été avantagé par rapport aux autres dans la compétition sexuelle.

 mais cette lecture est glaciale, comme l’est l’évolutionnisme

Double erreur épistémologique : primo, glacial s’interprète comme « froid, inhumain, immoral ». Or l’évolution n’est ni morale ni immorale, mais amorale, comme toutes les descriptions scientifiques. Secundo, le terme « évolutionnisme », avec son suffixe -isme, instille l’idée d’une école de pensée, ou une école de morale. On ne parle pas de gravitationnisme, ou de quanticisme, fort heureusement.

 qui est une sorte de religion ayant pour prophète Charles Darwin.

Métaphore de la religiosité de la science, très fréquente depuis Paul Feyerabend, et en vogue dans les courants relativistes. Or, quel que soit le sens que l’on donne au mot science la métaphore de la religion ne fonctionne pas vraiment : il n’y a pas de morale immanente, pas d’entité sur-naturelle, pas de rédemption, pas de texte sacré ni de prophète. Bien sûr, sous certains aspects, certains scientifiques ont prôné des courants à l’exclusion d’autres (ce qui n’était d’ailleurs pas du tout le cas de Darwin) mais on parlera plutôt de paradigmes, au sens de Kuhn. Et la notion de prophète (une personne qui tient, d’une inspiration que l’on croit être divine, la connaissance d’événements à venir et qui les annonce par ses paroles ou ses écrits) s’évapore.

 En regardant les caractéristiques du panda, il est impossible que cette créature

Terme téléologique. Même remarque que plus haut.

 soit le fruit du hasard,

Argument téléologique classique de l’Intelligent design dit « argument de l’impossibilité ».C’est un raisonnement panglossien. Notez que la théorie de l’évolution ne décrit pas l’apparition des espèces comme le fruit du hasard. C’est un mélange de hasard (comme par exemple les mutations) et de nécessité (contraintes du milieu). La rhétorique dont procède cette phrase relève de l’Homme de paille (argument du strawman).

 car s’il avait fallu évaluer la probabilité de son apparition par hasard, celle-ci aurait été immensément faible.

Raisonnement panglossien. Voir point précédent.

De même qu’une montre trouvée dans le désert ne s’explique pas par hasard et implique un horloger qui l’a fabriquée,

Argument téléologique classique de l’Intelligent design dit « Métaphore de l’horloger du Révérend William Paley ». Raisonnement panglossien.

de même

Analogie fausse entre la montre et le panda : le fait de comparer une production humaine à une espèce est injustifié, sauf à prendre ce qu’on veut montrer comme prémisse (ce qui deviendrait un raisonnement circulaire).

il est certain que, Dieu ou pas, une volonté immanente a créé cet être improbable.

Termes téléologiques. Création : terme téléologique, impliquant un créateur ; « être improbable » n’a pas de sens, car en soi tous les êtres sont improbables (mais possibles ! Avec des degrés de possibilité différents).

Défaut de rasoir d’Occam : postulat d’une volonté immanente, entité sans preuve ni nécessité pour expliquer le phénomène, donc surnuméraire.

Cela démontre

Erreur de démonstration : la métaphore (fausse qui plus est) ne démontre rien.

qu’il y a une essence, une nature de chaque espèce,

Biais d’essentialisme, ou de naturalisme : postuler une nature inaliénable de l’espèce. Cela nous ramène au fixisme primitif, propre aux créationnismes.

de même qu’il y a des natures délinquantes et d’autres non chez les Humains,

Biais d’essentialisme, ou de naturalisme : postuler une nature inaliénable des groupes sociaux (comme dans l’anthropologie du XIXe).

Effet paillasson : délinquant est un terme bien trop flou et composite

Effet cigogne + défaut de rasoir d’Occam : prêter à la « nature » d’un individu son caractère délinquant est coûteux sur le plan des connaissances. Rien ne permet de penser que la « délinquance » soit la nature de quelqu’un. Par contre on a maintes données sur le lien entre « délinquance » (hors délinquance en col blanc) et situation socio-économique. Cette seconde hypothèse est donc bien moins « coûteuse » selon le principe de parcimonie du rasoir d’Occam.

ainsi qu’une nature féminine et une nature masculine, comme le montre l’instinct guerrier chez les Hommes et l’instinct maternel chez les Femmes ».

Biais d’essentialisme, ou de naturalisme, variante sexiste

dichotomie entre deux sexes, là où il y a pourtant un continuum inter-sexe.

Effet cigogne + défaut de rasoir d’Occam. Prêt d’un instinct guerrier propre aux Hommes, d’un instinct maternel propre aux femmes, là où une explication socioéconomique des tâches est bien plus pertinente et étayée : la guerre est une activité politique, domaine réservé aux Hommes pendant longtemps ; la maternité une activité dévolue aux femmes. Sur ce point, il ne semble pas qu’il existe un instinct maternel dissociable du paternel, et qui ne soit pas le fruit d’un apprentissage très tôt chez la jeune fille, couplé à un temps accru passé avec les enfants, par la grossesse d’abord, par le partage des tâches ensuite.

R Meinnachbach, Für eine erfolgreiche intellektuellen Betrug in der Frage der panda, Oxbridge Ed. 1974, pp. 274-275

Canular. Version allemande de R. Monvoisin, Pour une imposture intellectuelle réussie sur la question du panda, livre qui n’existe pas. Oxbridge, contraction de Oxford et de Cambridge.


Cette correction est le fruit d’une étroite et glutineuse collaboration entre Richard Monvoisin et Julien Peccoud
.
CorteX_Monvoisin_casque_barbe_pipe

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Exercice – Analyse du texte "Le panda est une création tout à fait étrange", de R. Meinnachbach

Cet exercice faisait partie de l’examen de l’UE Zététique & autodéfense intellectuelle,  posé par Richard Monvoisin en mai 2014 aux étudiants de  niveau Licence de l’Université de Grenoble.

 

Analyse de texte

AB26958

Faites une analyse critique zététique du texte suivant :

« Le panda est une création tout à fait étrange, et inadaptée à son milieu : il ne sait manger que des feuilles de bambou, alors que son estomac est fait pour manger de la viande ; cela ne lui donne que très peu d’énergie pour se déplacer ou même copuler. Certains disent que ce fossile vivant est le chaînon manquant des ours, mais aucun fossile n’a jamais été découvert. Les évolutionnistes disent que sa seule stratégie fut de développer sa couleur pour mieux plaire à son partenaire sexuel, mais cette lecture est glaciale, comme l’est l’évolutionnisme qui est une sorte de religion ayant pour prophète Charles Darwin. En regardant les caractéristiques du panda, il est impossible que cette créature soit le fruit du hasard, car s’il avait fallu évaluer la probabilité de son apparition par hasard, celle-ci aurait été immensément faible. De même qu’une montre trouvée dans le désert ne s’explique pas par hasard et implique un horloger qui l’a fabriquée, de même il est certain que, Dieu ou pas, une volonté immanente a créé cet être improbable. Cela démontre qu’il y a une essence, une nature de chaque espèce, de même qu’il y a des natures délinquantes et d’autres non chez les Humains, ainsi qu’une nature féminine et une nature masculine, comme le montre l’instinct guerrier chez les Hommes et l’instinct maternel chez les Femmes ».

R Meinnachbach, Für eine erfolgreiche intellektuellen Betrug in der Frage der panda, Oxbridge Ed. 1974, pp. 274-275.

Le corrigé est ici.

Précis de réfutation – The debunking handbook

Fin 2011, deux Australiens, John Cook, chargé de communication au Global Change Institute de l’Université du Queensland1, et Stephan Lewandowsky, professeur de sciences cognitives à l’Université Australie-Occidentale2 ont publié gratuitement The Debunking Handbook (« Précis de réfutation »), un livret de huit pages qui vise à faire comprendre aux scientifiques et aux enseignants critiques que l’important n’est pas tant de s’attaquer aux fausses croyances et à leurs démythifications (debunking) que d’y mettre… une certaine forme. Les apports de la psychologie scientifique nous confirme en effet que ce n’est pas ce que savent ou pensent les gens qui prime, mais « comment » et avec quelle intensité ils le pensent. Car aussi étrange que cela puisse paraître, démythifier peut parfois renforcer le mythe.
Bien sûr, c’est succinct, et parfois très raccourci. C’est en revanche aussi utile que pratique pour faire circuler une information qu’il n’est pas évident d’aller chercher par soi-même.
Il y a plusieurs traductions disponibles de ce manuel. Celle en français, produite par Alexandre Hanin, est téléchargeable ici ou .

Richard Monvoisin

Examen de zététique 2014

Remis le 22 avril 2014 aux étudiants de l’UET Zététique & Autodéfense intellectuelle (Grenoble), ce devoir à rendre le 6 mai 2014 réinvestit les connaissances acquises en cours. Vous voulez essayer ? Un corrigé sera disponible fin mai. 
Les consignes reçues par les étudiant-tes sont données à la fin.

I. Enquête

La colothérapie, la nouvelle thérapie qui STOPPE plus de 114 maladies en détoxifiant votre COLON (publicité réelle, composée de 10 pages scannées – Disponibles ici)

En vous appuyant sur votre outillage zététique, il vous est demandé de :

  • faire l’analyse des concepts centraux de la thérapie

  • évaluer la pertinence ou non de cette thérapie

  • rechercher s’il existe de vraies études scientifiques publiées dans des revues à referees

  • (la médecine n’étant pas votre spécialité) demander à un spécialiste de votre choix son avis.

  • pointer tous les biais argumentatifs, sophismes et effets possibles dans la plaquette ci-jointe

La démarche scientifique impose que vous donniez des références précises quand vous vous appuyez sur d’autres travaux.

 (5 points)

II. Décorticage d’un extrait du journal télévisé

Igor et Grishka Bogdanov au CERN, 11 juin 2010, France 2

(vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=A-w-Z_PR33o)

Faites l’analyse la plus approfondie possible SVP :

  • de la mise en scène

  • de la rhétorique

  • des biais de raisonnement.

(3 points)

III. Montage d’un protocole expérimental

Élaborez et réalisez une expérience rigoureuse sur le plan scientifique qui permet de comparer la sensibilité de l’un-e ou de plusieurs de vos amis à la différence entre deux produits – en précisant la puissance statistique de vos résultats.

Exemples de produits : Coca et Pepsi / Vache qui rit et Kiri / Deux vins de différente couleur / Bière blonde et bière brune / etc.

 (4 points)

IV. Recoupement de presse

Choisissez un sujet relevant des sciences politiques (conflit, affaire, géopolitique, discrimination…) dans un quotidien*, et comparez les variations de traitement dans au moins cinq autres journaux du même type (Ex : Libération, Le Monde, le Figaro, Herald Tribune, New York Times, Washington Post, El Pais, Frankfurter Zeitung, Corriere della Sera, Al Sahafa الصحافة, Komsomolskaïa Pravda Комсомо́льская пра́вда, dans la limite des langues que vous maîtrisez.

Il vous sera nécessaire de reproduire les articles, en les photocopiant / capturant et en les scannant, dans votre dossier final)

 * Version papier ou version numérique mais tous les journaux doivent tous relever du même support.

** à la même date, bien entendu.

(3 points)

V. Exposition sélective

Masaru Emoto est un japonais qui affirme que l’eau stocke les pensées positives ou négatives, par des processus quantiques. Ses affirmations font l’objet d’une grande promotion, bien que jamais n’ait été montré le début d’une preuve.

Dans le moteur de recherche Google, tapez Masaru Emoto et analysez les 8 premières pages, en classant ces pages selon la teneur : partisan de la « théorie » d’Emoto / critique de la « théorie » d’Emoto.

À quelle page parvient-on aux premières critiques en français ? Dans une autre langue ?

Obtient-on les mêmes résultats sur des ordinateurs différents ?

Choisissez un autre sujet pseudo-scientifique de votre choix (astrologie, crop circles, homéopathie…) et faites SVP le même travail.

(2 points)

VI. Analyse de texte

Faites une analyse zététique du texte suivant :

 « Le panda est une création tout à fait étrange, et inadaptée à son milieu : il ne sait manger que des feuilles de bambou, alors que son estomac est fait pour manger de la viande ; cela ne lui donne que très peu d’énergie pour se déplacer ou même copuler. Certains disent que ce fossile vivant est le chaînon manquant des ours, mais aucun fossile n’a jamais été découvert. Les évolutionnistes disent que sa seule stratégie fut de développer sa couleur pour mieux plaire à son partenaire sexuel, mais cette lecture est glaciale, comme l’est l’évolutionnisme qui est une sorte de religion ayant pour prophète Charles Darwin. En regardant les caractéristiques du panda, il est impossible que cette créature soit le fruit du hasard, car s’il avait fallu évaluer la probabilité de son apparition par hasard, celle-ci aurait été immensément faible. De même qu’une montre trouvée dans le désert ne s’explique pas par hasard et implique un horloger qui l’a fabriquée, de même il est certain que, Dieu ou pas, une volonté immanente a crée cet être improbable. Cela démontre qu’il y a une essence, une nature de chaque espèce, de même qu’il y a des natures délinquantes et d’autres non chez les Humains, ainsi qu’une nature féminine et une nature masculine, comme le montre l’instinct guerrier chez les Hommes et l’instinct maternel chez les Femmes ». .R Meinnachbach, Für eine erfolgreiche intellektuellen Betrug in der Frage der panda, Oxbridge Ed. 1974, pp. 274-275

(3 points)

Consignes

Ce travail peut être réalisé seul-e, à deux, trois ou quatre, moyennant que les noms (+ cursus + université) soient indiqués sur la copie.

Les critères d’évaluation sont les mêmes que vous soyez 1 ou 4, ceci afin de vous encourager à collaborer.

Il est attendu de vous :

– que vous soyez précis et rigoureux dans vos références, dans vos arguments, dans vos sources

– que vous réinvestissiez les outils méthodologiques du cours

– que vous justifiiez chacun des arguments que vous employez

– que vous fassiez appel à des spécialistes si vos compétences sont dépassées

– que vous rendiez le 6 mai une version papier reliée ou agrafée + une version informatique par mail.

Normalement, la copie type pour avoir tous les points fait environ 10 pages police Times New Roman 12.

Bon courage.

Richard Monvoisin

Renversement de sociologie – Quand les étudiants du 9.3. enquêtent sur le 8ème arrondissement

Il nous faut rendre hommage à ce spectaculaire renversement qu’a opéré Nicolas Jounin dans ses travaux pratiques de sociologie : envoyer non plus des « bourgeois » enquêter sur des « primitifs » ou des « défavorisés », mais l’inverse, envoyer des étudiants de Seine-Saint-Denis enquêter chez les indigènes des beaux quartiers. Dépaysement garanti !

Quelques stations de métro séparent les quartiers parmi les plus pauvres de France de ses zones les plus riches. Partis de Saint-Denis (93), dans la banlieue nord de Paris, une centaine d’étudiants ont fondu sur trois quartiers bourgeois du VIIIe arrondissement de la capitale pour enquêter. Afin de s’initier à la démarche sociologique, ils ont dû se familiariser avec un monde nouveau et étrange, dont les indigènes présentent des coutumes et préoccupations insolites. Nicolas Jounin, leur enseignant, sociologue qui enseigne à l’Université Paris-8 à Saint-Denis, décrit leur appropriation des méthodes et outils de la sociologie, les formes de discrimination sociale à leur égard et leur exploration des rapports de classe.CorteX_Nicolas_Jounin

Autant donner la parole à l’auteur lui-même, qui a été invité dans Comme un bruit qui court sur France Inter le 27 septembre 2014, et dans La suite dans les idées, sur France Culture le 6 décembre 2014.

 L’ouvrage relatant cette expérience vient de paraîtreCorteX_Jounin_Voyage_de_classe : Voyage de classes : des étudiants de Seine-Saint-Denis enquêtent dans les beaux quartiers (éditions La Découverte, octobre 2014).

Ce livre est un guide précieux pour tous ceux qui souhaitent s’engager dans une démarche ethnographique. Tout est passé en revue avec rigueur et méthode : des premiers contacts avec les « indigènes » du terrain, aux dépassements des préjugés par la confrontation aux données statistiques, en passant par les ficelles pour mener un entretien. On ne peut regretter d’ailleurs que le livre laisse peu la parole aux étudiants, convoqués seulement en filigrane par le recours à des citations parfois croustillantes, et toujours très pertinentes. Au final, le défi d’inverser la charge de la domination sociologique est relevé avec un brio doublé d’un humour piquant. Terminons en mentionnant les autres travaux que Nicolas Jounin a réalisé sur d’autres travaux réputés difficiles en sociologie, en particulier l’ouvrage tiré de sa thèse de doctorat : Chantier interdit au public. Enquête parmi les travailleurs du bâtiment, La Découverte, Collection « Textes à l’appui », 2008.

Richard Monvoisin et Clara Egger

 

 

 

« L'art de rouler rationnellement avec du caca », par Jean-Philippe Valla

Il s’appelle Jean-Philippe Valla, ancien ingénieur, électronicien de haut vol reconverti en agriculteur dans le Trièves près de Grenoble. Son leitmotiv : l’autonomie énergétique et alimentaire, mais avec tout le folklore mystico-écologique en moins. La tête dans les étoiles, mais les pieds sur terre et les mains dans le cambouis. Nous lui devons des éléments de critique des moteurs « magiques » qui fleurissent sur Internet.

 

Cette fois-ci, il met à disposition sur notre site un gros travail pédagogique élaboré pour l’ADABIO (association pour le développement de l’agriculture biologique) :

  • comment installer une unité de méthanisation, à prix très modique.
  • comment élaborer un épurateur à biogaz pour rouler en voiture avec son propre gaz : le tout à moins de 2000e de prix de revient.

C’est en libre téléchargement ici, mais aussi dans le lien ci-dessous :

Installation biogaz autoconstruite ou Comment rouler avec du caca : télécharger

C’est un travail magistral de pédagogie de science appliquée et d’autonomie en matière d’énergie.

CorteX_vacheGare ! Il ne s’agit pas de vanter ici des « alternatives » pour le simple plaisir. C’est le fruit d’une analyse critique, rationnelle et pragmatique, tant des moyens de production d’énergie existants actuellement, que des dégâts écologiques qu’ils occasionnent qui conduit le CORTECS à penser, de manière balbutiante, cette volonté d’autonomie énergétique. Et puisque la répartition des ressources énergétiques orchestre une grande partie de la répartition des puissances politiques, il est logique de penser des solutions pour lesquelles alternative, pour une fois, rime avec gain de quelques degrés de liberté (comme celui de moins contribuer au marché du gaz, par exemple). Pour penser ce type de « décroissance » rationnelle, nous n’avons pas beaucoup de lectures à recommander pour l’instant, hormis de manière générale, des œuvres de gens comme André Gorz.

Richard Monvoisin

Bonne nouvelle ! le 22 février 2016 a paru la version brochée et agrémentée de ce travail, aux éditions Terran. Vous pouvez l’acquérir ici, pour 18 euros.

 

Les nouvelles têtes

CorteX_Club_des_5Enseigner la pensée critique est tellement jouissif que c’en est presque indécent.  Alors le collectif croît lentement, mais sûrement.

Vous avez probablement déjà rencontré l’éminent et grenoblois Julien « glutinous »CorteX_Julien_Peccoud_loupe Peccoud, notre professeur de Science de la Vie et de la Terre, féru des questions d’intelligent design, mais aussi féru des questions d’intelligent design, d’écologie/évolution ainsi que de réseaux et logiciels « libre ». Depuis juillet 2013, Il consacre près de la moitié de son temps de travail au collectif. Il corrige nos erreurs en phylogénétique.

Acoquiné à lui sur le plan informatique, mais spécialisé en physique statistique, voiciIsmael Benslimane celui qui a sauvé notre site piraté début 2013. Il s’appelle Ismaël Benslimane, et a fait vœu de matérialisme méthodologique. Il aime se creuser la tête sur les enjeux de liberté d’expression, et on le laisse s’exprimer.

Plus récemment encore, l’automne a vu le CORTECS s’enrichir d’un historien, Guillaume GuidonGuillaume Guidon, dit « père Castor ». Ce spécialiste de la critique de la notion de terrorisme est particulièrement pointu sur la périodes des 70’s en Europe, notamment sur les Brigades Rouges et les mouvements d’action directe. Dès son premier article, critique de la réécriture de l’histoire par Lorànt Deutsch, il a scoré N°1 des lectures du site.

Tourne autour du collectif notre internationale, Clara Egger, spécialiste de sciencesCorteX_Clara_Egger politiques, travaillant surtout sur les conflits armés et leurs résolutions internationales, les processus de propagande de guerre, etc. Nous lui devons notre premier cours sur le sujet. Nous l’introniserons vraisemblablement cet été.

CorteX_Lucas_CourgeonDurant l’année écoulée, un sympathique stagiaire a trainé ses groles régulièrement au bureau grenoblois : embauché en service civique dans l’association Entropie, il a orchestré une riche critique de la notion de permaculture, chère à beaucoup de mouvements écologistes et/ou agricoles. Il s’appelle Lucas Courgeon.

Enfin, depuis février 2014 au bureau grenoblois, deux stagiaires ont été embauchés, jusqu’en mai. Ils sont nos Penn & Teller, nos Adam Savage et Jamie Hyneman, nos Stanley et Livingstone, nos Bart et Ernest. Ernest_bart Il s’agit de Timothée Guilhermet, alias Chuckmalus, et de Thomas Tatlian, alias Shadowbeaver. Ils travaillent sur la distribution des adhésions pseudoscientifiques parmi les étudiants, et sur l’évaluation des compétences critiques. Gloire à eux ! CorteX_Thomas_Tatlian

CorteX_Timothee_Guilhermet

Nous ne sommes pas si seuls – même un prix Nobel boycotte les grands journaux

Vous vous souvenez de nos déclarations diverses ? Nous avions déjà écrit « Le coût de la connaissance – boycott d’Elsevier » et publié « Main basse sur la science publique : le «coût de génie» de l’édition scientifique privée » de Bruno Moulia et ses amis. Cette fois, ce n’est plus du menu fretin comme nous, mais des scientifiques de haut rang qui secouent le cocotier et encouragent à boycotter Nature, Cell et Science.


Nobel winner declares boycott of top science journals

Randy Schekman says his lab will no longer send papers to Nature, Cell and Science as they distort scientific process

Ian Sample, science correspondent
The Guardian, Monday 9 December 2013

Leading academic journals are distorting the scientific process and represent a « tyranny » that must be broken, according to a Nobel prize winner who has declared a boycott on the publications.

Randy Schekman, a US biologist who won the Nobel prize in physiology or medicine this year and receives his prize in Stockholm on Tuesday, said his lab would no longer send research papers to the top-tier journals, Nature, Cell and Science.

Schekman said pressure to publish in « luxury » journals encouraged researchers to cut corners and pursue trendy fields of science instead of doing more important work. The problem was exacerbated, he said, by editors who were not active scientists but professionals who favoured studies that were likely to make a splash.

The prestige of appearing in the major journals has led the Chinese Academy of Sciences to pay successful authors the equivalent of $30,000 (£18,000). Some researchers made half of their income through such « bribes », Schekman said in an interview.

Writing in the Guardian, Schekman raises serious concerns over the journals’ practices and calls on others in the scientific community to take action.

« I have published in the big brands, including papers that won me a Nobel prize. But no longer, » he writes. « Just as Wall Street needs to break the hold of bonus culture, so science must break the tyranny of the luxury journals. »

Schekman is the editor of eLife, an online journal set up by the Wellcome Trust. Articles submitted to the journal – a competitor to Nature, Cell and Science – are discussed by reviewers who are working scientists and accepted if all agree. The papers are free for anyone to read.

Schekman criticises Nature, Cell and Science for artificially restricting the number of papers they accept, a policy he says stokes demand « like fashion designers who create limited-edition handbags. » He also attacks a widespread metric called an « impact factor », used by many top-tier journals in their marketing.

A journal’s impact factor is a measure of how often its papers are cited, and is used as a proxy for quality. But Schekman said it was « toxic influence » on science that « introduced a distortion ». He writes: « A paper can become highly cited because it is good science – or because it is eye-catching, provocative, or wrong. »

Daniel Sirkis, a postdoc in Schekman’s lab, said many scientists wasted a lot of time trying to get their work into Cell, Science and Nature. « It’s true I could have a harder time getting my foot in the door of certain elite institutions without papers in these journals during my postdoc, but I don’t think I’d want to do science at a place that had this as one of their most important criteria for hiring anyway, » he told the Guardian.

Sebastian Springer, a biochemist at Jacobs University in Bremen, who worked with Schekman at the University of California, Berkeley, said he agreed there were major problems in scientific publishing, but no better model yet existed. « The system is not meritocratic. You don’t necessarily see the best papers published in those journals. The editors are not professional scientists, they are journalists which isn’t necessarily the greatest problem, but they emphasise novelty over solid work, » he said.

Springer said it was not enough for individual scientists to take a stand. Scientists are hired and awarded grants and fellowships on the basis of which journals they publish in. « The hiring committees all around the world need to acknowledge this issue, » he said.

Philip Campbell, editor-in-chief at Nature, said the journal had worked with the scientific community for more than 140 years and the support it had from authors and reviewers was validation that it served their needs.

« We select research for publication in Nature on the basis of scientific significance. That in turn may lead to citation impact and media coverage, but Nature editors aren’t driven by those considerations, and couldn’t predict them even if they wished to do so, » he said.

« The research community tends towards an over-reliance in assessing research by the journal in which it appears, or the impact factor of that journal. In a survey Nature Publishing Group conducted this year of over 20,000 scientists, the three most important factors in choosing a journal to submit to were: the reputation of the journal; the relevance of the journal content to their discipline; and the journal’s impact factor. My colleagues and I have expressed concerns about over-reliance on impact factors many times over the years, both in the pages of Nature and elsewhere. »

Monica Bradford, executive editor at Science, said: « We have a large circulation and printing additional papers has a real economic cost … Our editorial staff is dedicated to ensuring a thorough and professional peer review upon which they determine which papers to select for inclusion in our journal. There is nothing artificial about the acceptance rate. It reflects the scope and mission of our journal. »

Emilie Marcus, editor of Cell, said: « Since its launch nearly 40 years ago, Cell has focused on providing strong editorial vision, best-in-class author service with informed and responsive professional editors, rapid and rigorous peer-review from leading academic researchers, and sophisticated production quality. Cell’s raison d’etre is to serve science and scientists and if we fail to offer value for both our authors and readers, the journal will not flourish; for us doing so is a founding principle, not a luxury. »

• This article was amended on 10 December 2013 to include a response from Cell editor Emilie Marcus, which arrived after the initial publication deadline.

Médias un 4ème pouvoir ? Deux cycles de projections documentaires

Main dans la main, le CorteX Grenoble et son antenne lyonnaise, Maïlys Faraut organisent un double cycle de projections débats durant ce mois de novembre 2013.  En voici les grandes lignes. Les détails sont à retrouver dans notre agenda.

Grenoble Lyon

Mercredi 6 novembre, 18h30 : Fin de concession, de Pierre Carles + débat avec Pierre Carles himself

Jeudi 7 novembre, 17h30 : Fin de concession, de Pierre Carles + débat avec Pierre Carles himself


Mercredi 20 novembre, 18h30 : Les nouveaux chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yann Kergoat + débat

Jeudi 21 novembre, 17h30 : Les nouveaux chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yann Kergoat + débat avec M. Florea et P. Chasson, d’ACRIMED

Mercredi 27 novembre, 18h30 : Chomsky & Compagnie, de Olivier Azam et Daniel Mermet + débat

Jeudi 28 novembre, 19h : Les nouveaux chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yann Kergoat + débat avec M. Florea et P. Chasson, d’ACRIMED

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Tout ça se passe amphi F, au DLST. Entrée libre, vous pouvez amener vos tantes, cousins, grands-parents, beaux-frères.

Bouveresse et Chomsky : ça se déguste comme une friandise.

Sur le banc, un philosophe bien trop méconnu en France, Jacques Bouveresse (1940-), l’un des rares philosophes à manier l’outil rationnel comme un fleurettiste, et connu pour avoir refusé en 2010 la légion d’honneur qu’un gouvernement auquel il ne donnait aucune légitimité lui avait décerné (nous vous en avions causé lors de la sortie de son dernier bouquin, ici, et vous avez pu l’écouter .)  A côté de lui, et invité par ses soins au Collège de France en 2010, Noam Chomsky (1928-), linguiste et remarquable penseur politique s’il en est, qui fait l’objet de tellement de documentation qu’il est inutile d’en donner ici (hormis peut être ça*).

Ce qui nous fait aimer ces gens repose sur plusieurs points :

  • ils sont parmi les rares représentants des sciences dites « humaines » qui ne font pas du discours mou et pompeux.
  • Ce sont des savants qui, conscients de leur responsabilité d’intellectuels, se sont investis sur le plan le plus complexe des comportements humains : la science politique
  • Ils font le lien essentiel entre le rôle des intellectuels à fournir une vision non faussée des réalités et de la connaissance objective, et la possibilité de transformer la vie en société.
  • Ils sont libertaires.
  • Ils sont intellectuellement honnêtes et probes.

Ils font partie, ces vieux briscards, de nos figures tutélaires.

Voici le montage de l’émission du 23 septembre 2013 de Là-bas si j’y suis, sur France Inter. Ça commence piano, ça finit crescendo. Ça se déguste avec un mélange Vodka-Martini-Olive et ça donne envie d’utiliser son intellect.

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Richard Monvoisin

* Je ne connais pas d’entrée facile au travail de Jacques Bouveresse. J’en connais une par contre chez Noam Chomsky : un petit livre appelé « Sur le contrôle de nos vies« , aux éditions Allia, à 6 euros 20.