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Impacts de la psycho-pop, par Brigitte Axelrad

Les médias utilisent l’intérêt du public pour les questions psy, ce qui leur permet de faire de l’audience et des ventes importantes. Le représentant de Psychologies Magazine ne se cache pas pour dire que le mal être des gens, et plus particulièrement des femmes, constitue son fond de « commerce » !
Ces émissions et ces revues abordent les sujets psy de façon superficielle et souvent réductrice. Elles font entrer dans le langage populaire des concepts empruntés à la psychanalyse et dont tout le monde croit connaître le sens.

La vigilance critique devrait, à mon sens, guider l’écoute et la lecture de cette presse psycho-pop. Notamment apprenons à détecter le « rapt des concepts », en particulier ceux qui sont issus de la psychanalyse : complexe d’Œdipe, refoulement, lapsus révélateurs, actes manqués, etc. et surtout l’inconscient, comme la clé d’interprétation de toutes les manifestations d’ordre « psychique ».
Ces médias propagent par ailleurs des approches pseudo-scientifiques telles que celles de Jacques Salomé, la psychogénéalogie, les thérapies de la « mémoire retrouvée » et toute la vague des thérapies « New Age », et des méthodes contestables et contestées, telles que la PNL (Programmation Neuro-Linguistique), l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing), l’hypnose, l’imagerie guidée, la communication facilitée (CF), la canalisation, etc. Quand on entend ou lit des termes issus du vocabulaire scientifique et utilisés hors de leur contexte, tels que « quantique », « énergie », « hologramme », une méfiance redoublée serait de mise.

La place privilégiée de la psychanalyse dans la société française.

L’une des raisons qui donne à la psychanalyse cette première place dans l’interprétation des comportements et des troubles psychologiques est peut-être le fait qu’elle a été enseignée dans les classes terminales des lycées et a constitué le socle des cursus universitaires de philosophie et de psychologie.

Une autre raison est, de mon point de vue, l’icône de Sigmund Freud, considéré dans son domaine à l’égal de Copernic en astronomie, d’Einstein en physique ou de Darwin en biologie, comme Freud lui-même se plaisait à le dire, en qualifiant la psychanalyse de « troisième révolution » dans le monde des idées.

Contester l’image ou les théories de Freud est en France un sujet relativement tabou. Les tentatives récentes des auteurs du Livre Noir de la psychanalyse, de Jacques Bénesteau ou de Michel Onfray, ont du mal à s’imposer dans l’opinion. Contester Freud est encore chez nous un sacrilège et souvent taxé d’antisémitisme.

Ceci n’est plus le cas dans le reste du monde, à l’exception notable de l’Argentine.

Vous pouvez remarquer qu’à chaque accident grave : attentat, catastrophe naturelle ou phénomène social, les médias font appel au psychanalyste de service et non à un psychologue, pour commenter et préconiser des solutions d’aide psychologique aux victimes.

La prétention de la psychanalyse à tout expliquer a conduit depuis qu’elle existe à n’attribuer qu’une seule cause à toutes sortes de pathologies, dont on n’a pas encore l’explication scientifique. C’est le cas en particulier de l’autisme, dont la responsabilité a été attribuée, depuis les pseudo-travaux de Bruno Bettelheim, à la « mère-réfrigérateur », concept dû à Léo Kanner et aussi sexiste que… faux. Fort heureusement aujourd’hui, les progrès de la génétique, des moyens d’investigation comme l’IRM (Imagerie par Résonance Magnétique), ont envoyé ce concept à la poubelle. Mais ces théories fumeuses guident encore les psychiatres adeptes du packing, cette sorte de camisole glacée utilisée pour des enfants, et empêchent le développement des thérapies comportementales comme le traitement ABA (Applied Behavioral Analysis).

La psychanalyse s’est attribué une place de choix en psychothérapie, malgré les preuves apportées aujourd’hui que Freud a falsifié ses résultats et dissimulé ses échecs thérapeutiques, comme celui de l’homme aux loups, par exemple. La psychanalyse prétend donner aux troubles psychologiques une seule explication : les traumatismes sexuels, qui auraient été subis dans l’enfance. Elle incite les patients à creuser dans le passé pour retrouver la cause de leurs difficultés actuelles. Une cure psychanalytique peut durer des années. À l’inverse, les thérapies cognitivo-comportementales (TCC), dites brèves, sont fondées sur les connaissances issues de la psychologie scientifique. Le thérapeute intervient sur les processus mentaux ou cognitifs, conscients ou non, considérés comme à l’origine des émotions et de leurs désordres, pour changer le comportement du patient. Comme l’a dit Jacques Van Rillaer, lorsque le patient est au fond du trou, mieux vaut lui donner une échelle pour en sortir qu’une pelle pour le creuser !

Les thérapies cognitivo-comportementales ont du mal à être reconnues malgré leur efficacité supérieure à celle de la psychanalyse. Le rapport de l’INSERM, publié en 2004, en a apporté la preuve, mais il a été retiré du site du Ministère de la Santé sous la pression des écoles psychanalytiques (1). Depuis 2004, l’encadrement de la profession de psychothérapeute a fait l’objet d’un projet de loi, finalement publié en 2010 avec des amendements, pour protéger surtout la pratique des psychanalystes, qui sont dispensés du cursus universitaire. Richard Monvoisin a fait remarquer que, pour devenir psychanalyste, il suffit en gros d’avoir fait soi-même une psychanalyse. Comme si de s’être fait soigner les dents chez un dentiste procurait la connaissance et le droit d’exercer le métier de dentiste !

Les thérapies de la « mémoire retrouvée »

Elles sont fondées sur la théorie de la séduction de Freud, qui a précédé celle du complexe d’Œdipe. Les thérapeutes adeptes de la « mémoire retrouvée » n’ont qu’une seule théorie : les difficultés existentielles du patient n’ont qu’une seule cause, un abus sexuel subi dans l’enfance, que l’inconscient aurait « refoulé » pour protéger la « victime ». Retrouver le souvenir de l’abus permettrait seul la « guérison ». Dans ce contexte, le thérapeute exerce sur le patient une pression psychologique pour lui faire accepter cette cause. Une partie de ces patients finit par accepter cette explication à son mal être et retrouver des « souvenirs enfouis » d’abus sexuel.

Comment être sûr que ces souvenirs sont vrais ou faux ? Quels indices permettent de faire la différence entre vrais souvenirs et faux souvenirs ? Sans corroboration extérieure, vous ne pouvez pas faire la différence. Les vrais souvenirs comme les faux peuvent comporter les mêmes détails et être exprimés avec confiance et émotion. Elizabeth Loftus a montré que la mémoire est malléable et ne fonctionne pas comme une bande magnétique ou le disque dur d’un ordinateur, elle reconstruit en permanence les souvenirs. Plusieurs expériences, menées par elle et son équipe de chercheurs, en apportent la preuve : « Bugs Bunny à Disneyland », « Perdu dans un centre commercial », etc. La mémoire est donc sujette à manipulation par des thérapeutes convaincus du bien-fondé de leur théorie. Richard McNally, professeur à Harvard, a montré que la théorie du refoulement n’a jamais pu être prouvée, Daniel Schacter, professeur à Harvard lui aussi, fait remarquer et que les traumatismes violents subis dans les camps de concentration ou dans les conflits ne sont pas oubliés.

Quand un patient consulte un psychothérapeute, il est fragilisé, a besoin d’aide, et espère guérir de son mal être. Il lui sera difficile de se rendre compte qu’il est manipulé, si c’est le cas. La théorie de l’engagement l’incite toujours à continuer sa thérapie avec le même thérapeute, dans l’espoir que l’effort commencé portera ses fruits.

Il est quasiment impossible de différencier d’entrée de jeu un psychothérapeute des « faux souvenirs » d’un autre. Il peut être psychiatre, médecin, psychanalyste, psychothérapeute reconnu ou auto-proclamé. Les psys qui dénoncent chez les autres la méthode des faux souvenirs, alors qu’ils la pratiquent eux-mêmes, prétendent que les souvenirs qu’ils amènent leurs patients à retrouver sont vrais.

En conclusion, s’informer et garder son esprit critique sont les principales armes pour déjouer les pièges des psycho-pop.

Brigitte Axelrad

CorteX_SPS_HS_Psycha(1) Complément : lien vers l’article d’Esteve Freixa, qui se trouve également dans le hors-série Psychanalyse de Science & Pseudosciences N°293, décembre 2010. Et pour se rappeler de la génèse de la vindicte contre le rapport Inserm, on pourra lire cet article d’E. Faverau dans Libération de  22 février 2005.

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Note : Brigitte Axelrad, parmi moult productions disponibles sur Sciences & pseudosciences ou sur le site de l’Observatoire Zététique, a écrit chez book-e-book.com l’ouvrage « Les ravages des faux souvenirs, ou la mémoire manipulée » (2010).

 

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Espèces d’espèces – Histoire de la systématique & boule buissonnante

Monument de vulgarisation, aussi limpide d’exempt des erreurs grossières auxquelles les documentaires sont coutumiers, nous souhaitions donner un lien vers le documentaire Espèces d’espèces, de Denis Van Waerebeke, Vincent Gaullier, avec la collaboration de Raphaëlle Chaix, produit en 2009 par Ex Nihilo, Arte, France 5, CNRS images, le Muséum national d’histoire naturelle et présenté par Benoît Giros.

On y retrouve un paquet de chercheurs, comme Pascal Duris, Philippe Bouchet, Jacques Cuisin, Kristoff Voisin, Jean-Pierre Gasc, Mark-Olivier Rödel, Philip C.J. Donoghue, Patrick Forterr, et surtout Guillaume Lecointre que nous connaissons bien.
Pour donner l’eau à la bouche, voici un extrait choisi, gracieusement mis à notre disposition par Didier Van Waerbeke.

Pour briser la représentation fausse de l’arbre du vivant, nous n’avons rien de tel que cet extrait tiré de l’excellent documentaire Espèces d’espèces de Denis Van Waerebeke (2008) qui traite de la boule buissonnante de l’évolution et de la métaphore fausse de l’arbre, avec une introduction à l’histoire de la systématique et les enjeux qu’elle recèle.

J’en profite pour dire qu’il s’agit d’une des rares vulgarisations grand public couplant simplicité et qualité remarquable. Comme quoi, ça existe !

J’utilise cet extrait :

– dans un cours sur la biologie et l’impasse de l’Intelligent Design et du créationnisme scientifique (Licences sciences)

– dans un cours sur les représentations scientifiques fausses dans la vulgarisation (Stage critique des médias, CIES, pour doctorants)

– dans un cours sur l’Histoire et les tentatives de détournements pseudoscientifiques (Licences sciences) 

Et pour aller plus loin, vous pouvez le commander ici.Cortex espèces d'espèces

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Sociologie, anthropologie – Atelier sur le racisme ordinaire et la discrimination

Voici du matériel simple pour animer un atelier sur le « racisme ordinaire » avec des étudiants, des élèves ou du grand public. Il est possible de passer les documents, puis de débattre, ou bien d’ajuster chaque document à un savoir-être bien précis.

Introduction au préjugé

Ci-dessous, quelques documents permettant d’introduire la question du préjugé raciste, même avec un public jeune.

  • Le Noir et le ballon (vous avez la référence de cette vidéo ? Nous la cherchons. Édit du 27 septembre 2017 : merci à Anaïs De Winter qui a trouvé la source : il s’agit d’une pub Thaï de 1980 pour du dentifrice à pâte noire aux herbes du groupe Twin Lotus Company)

Télécharger là

  • Le nageur Moussambani, aux Jeux Olympiques de Sydney (1996)

Ou ici en meilleure qualité :

https://sport.francetvinfo.fr/les-jeux-olympiques/video-natation-un-athlete-ethiopien-fait-le-buzz

Télécharger

Dans le cas présent, il s’agit de Stéphane Caron & Eric Besnard, riant de la mauvaise technique d’un nageur équato-guinéen, en gommant la génèse du problème.

Il est conseillé de regarder cette vidéo avant, et après avoir appris qu’Eric Moussambani n’avait appris à nager que depuis huit mois, n’avait jamais nagé 100 m d’affilée de sa vie, n’avait jamais vu de piscine de 50 m, car son entraînement ayant eu lieu dans une piscine d’hôtel de 20 m, seule piscine dans son pays. Sa fédération disposant de moyens inexistants, son maillot et ses lunettes lui ont été prêtés une heure avant l’épreuve par deux athlètes.

Note : il arrive parfois que cette seule vidéo amène le public à « essentialiser » le problème, en arguant du fait que « bien sûr, les Noirs ne flottent pas très bien, paraît que c’est à cause de leur mélanine », occultant du revers de la main avec un argument non-sourcé tout ce qui fait la génèse du fait que les Noirs Africains ont peu accès aux piscines. 

  • Nina Simone, la chanteuse noire

Dans son autobiographie Ne me quittez pas, Nina Simone raconte :

« A cause de Porgy, on me comparait souvent à Billy Holliday, ce que je détestais. Ce n’était qu’un morceau parmi tant d’autres à mon répertoire, et il suffisait de m’entendre l’interpréter pour comprendre qu’il n’y avait aucun rapport. Ce qui me rendait furieuse, c’est que visiblement les gens s’appuyaient sur la simple constatation que nous étions toutes les deux noires : si j’avais eu la peau blanche, personne n’aurait fait le rapprochement. (…) Me qualifier de chanteuse de jazz était une manière de dédaigner mon bagage classique, parce que je ne répondais pas à l’image de l’artiste noir que se faisaient les Blancs. Une forme de racisme : « puisqu’elle est noire, c’est forcément une chanteuse de jazz ». Un point de vue qui me rabaissait, tout comme Langston Hughes quand on le qualifiait de « grand poète noir ». Langston était un grand poète, un point c’est tout ; à lui, et à lui seul, revenait le droit de dire en quoi jouait la couleur de sa peau ». (Ne me quittez pas, Presses de la renaissance, 1992, p. 107).

Discrimination raciale dans les institutions

Le racisme ordinaire naissant sur du terreau « ordinaire », il est nécessaire de passer par des témoignages réels et actuels pour montrer la discrimination non seulement dans la vie, mais dans les institutions. Voici quelques exemples :

  • Injure raciale, France 3 Grenoble, 16 mars 2010

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  • Discrimination raciale de Jean-Marie, français d’origine béninoise à la Caisse Régionale d’Île-de-France, France Culture, Les pieds sur Terre 9 février 2011

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  • Discrimination d’un français d’origine maghrébine à la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris, France Culture, Les pieds sur Terre 9 février 2011

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Matériel plus poussé

Il est possible ensuite d’incrémenter un peu le sujet, avec le matériel suivant, dans un ordre de complexité croissant.

  • Racisme ordinaire et début d’analyse socio-économique – Daniel Balavoine chez P. Gildas, Canal + (1985)

Comment le chanteur Daniel Balavoine et le présentateur Philippe Gildas ramènent sur le plan socio-économique la question du racisme ordinaire et bousculent des effets cigogne (confusions corrélation/causalité). Date présumée du document : 6 novembre1985.

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  • Moustafa Kessous, journaliste du Monde, balaye quelques cas de racisme ordinaire dans la vie de tous les jours France Inter, Zapping, 26 septembre 2009)

  • Bi-standard pour le Rwanda – Clip de campagne I hate you, de Hands for hope

Attention ! Cette vidéo peut choquer un jeune public !

Ce clip introduit la différence de traitement médiatique selon la proximité du public avec le sujet qui souffre, en vertu de cette « loi » journalistique qui veut qu’un demi-mort local vaut mille morts lointains*. Il balaye aussi une représentation souvent primitiviste des « noirs qui s’entre-tuent »**, en transposant de manière plausible une scène dans un monde blanc (merci à Eric Bévillard, de l’Observatoire Zététique, de nous l’avoir transmis).

Note : ne sachant pas exactement ce qu’est l’objet social de l’association australienne Hands for hopes, j’utilise en public une version de la vidéo sans la mention de cet organisme.

  • Les propos de Nicolas Sarkozy, prélevés par Désentubages cathodiques (2007)

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Discours prélevés chez N. Sarkozy, avec les amalgames essentialistes suivants.

– Jeune des banlieues = pas de formation qualifiante = oisiveté = trafic

– Jeune des banlieues = non-blanc

– Musulman = faciès particulier (« ça n’a rien à voir avec la religion, quand on est musulman ça se lit sur sa figure »)

Passage incontournable : « Zinedine c’est formidable ! Mais les musulmans de France, ils sont capables aussi d’avoir des hauts fonctionnaires, des chercheurs, des médecins, des professeurs et si on ne donne pas à tous ces jeunes de banlieues des exemples positifs de réussir, comment ils vont croire en la République ? »

Racines de la discrimination

Le moment est tout indiqué pour réfléchir aux racines de la discrimination, sa genèse et la manière dont elle s’installe dans un groupe.

La leçon de discrimination, est un documentaire de 43 minutes tiré de l’émission Enjeux (Société Radio-Canada production) de Pasquale Turbide et Lucie Payeur (2006).

C’est une remarquable expérience lors de laquelle Annie Leblanc, enseignante dans une école primaire de Saint-Valérien-de-Milton, en Montérégie fait vivre à ses élèves du primaire la réalité des personnes qui subissent la discrimination en divisant sa classe en deux groupes sur un critère arbitraire – la taille -, un groupe étant valorisé et l’autre dévalorisé par l’enseignante. Ainsi la discrimination est subie par les grands la première journée, puis par les petits le jour suivant…

Le documentaire La leçon de discrimination est vendu en DVD aux professionnels de l’éducation. Pour plus deAnnie Leblanc indiquant la limite de taille renseignements, communiquez avec les Services éducatifs de Radio-Canada.

Notons que ce type d’expérience, aussi bouleversante soit-elle, n’est pas une première : il y eut entre autres celle de Jane Elliott (1968), discriminant à l’époque sa classe sur la base de la couleur des yeux.

Pour voir A class divided, (Frontline, PBS1), c’est ici (en version originale). Madame Elliott remit d’ailleurs une « dose » en 2010 avec une expérience intitulée How racist are you ? (Combien êtes-vous raciste?) que l’on peut regarder (version originale également).

Il est loisible ensuite de donner une sorte de recul historique, et de cadre théorique pour « penser » les origines de ce racisme ordinaire.

  • Nénuphar, chanson officielle de l’Exposition coloniale de 1931 à Paris (extrait INA prélevé dans 2000 ans d’Histoire, de Patrice Gélinet sur France Inter, 19 août 2010).

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  • Fabrication de l’éthnicité chez les mineurs d’Afrique du Sud – Extrait d’interview du géographe Philippe Gervais-altLambony dans l’Afrique enchantée, France Inter, 17 juillet 2011 (émission « le chant des mineurs »).
 
On comprend ainsi qu’un critère prétendument scientifique prend sa source directement dans une oppresion socio-économique mâtinée de préjugés moraux.
Pour en savoir plus : Philippe Gervais-Lambony, L’Afrique du Sud, Le Cavalier Bleu, collection Idées Reçues (2009).
  • Fabrication de l’ethnicité chez les Rwandais. Le cas fut pratiquement similaire ans le Rwanda belge, dont l’ethnicité Hutu/Tutsi est une construction coloniale réinterprétant en terme raciste/ethniciste ce qui relève d’anciens clivages socio-économiques. Les cartes d’identité « ethniques », instituées par le colonisateur belge en 1931, décrètent des critères biométriques qui n’ont pas de pertinence scientifique.
On pourra alors utiliser l’excellent documentaire Rwanda, l’histoire qui mène au génocide, de R. Genoud (1995), en particulier les passage de Claudine Vidal. 
  
Pour en savoir plus :
CorteX_Gouteux_nuit_rwandaisecouvJean-Paul Gouteux, La nuit rwandaise, Esprit frappeur (2002) CorteX_Franche_Rwanda
Dominique Franche, Généalogie du génocide rwandais, Tribord (2004)

  

 
 
  • Race, chaînon manquant : la science au service de la politique – extrait du documentaire Zoos Humains, de Pascal Blanchard et Éric Deroo (2002).
 

Analyse de la construction de la différenciation des races. Dévoiement des concepts darwiniens, et entreprise de hiérarchisation. Le biologiste André Langaney explique comment placer le « nègre » comme chaînon manquant au XIXe, permet « d’expliquer » à rebours du même coup le rabaissement de l’esclavage et la théorie de l’évolution.

Et le narrateur explique comment en essentialisant ainsi une infériorité, on justifie ainsi une politique coloniale sans merci.

Des éléments de cette compilation ont été déroulé par Richard Monvoisin :

Vous voulez aller plus loin ? Nous vous enjoignons à lire ce monument de la littérature scientifique qu’est « La malmesure de l’Homme », de Stephen Jay Gould (1983) qui compile toutes les (pseudo-)théories ayant tenté d’accréditer scientifiquement le racisme, le sexisme et le criminalisme.

Vous voulez aller…. encore plus loin ? Vous pouvez lire une analyse critique de La malmesure de l’Homme  écrite par Serge Larivée, de l’université de Montréal, dans Vices et vertus de S. J. Gould, Revue québécoise de psychologie, vol. 23, n°3, 2002, pp 7 – 23).

* Lire à ce propos Aubenas & Benasayag, La fabrication de l’information, les journalistes et l’idéologie de la communication, la Découverte (2007).

** Représentation battue en brêche entre autres dans B.Diop, O.Tobner-Biyidi, F-X. Verschave, Négrophobie, éditions Les Arènes (2005).

Richard Monvoisin

Le racisme au quotidien 3/3 : Racisme au quotidien

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Biologie, évolution, créationnisme : matériel vidéo de Joël Peerboom

Joël Peerboom a incrusté dans le fil de sa pièce de théâtre sept documents vidéo.

Dans l’ordre :

1. Extrait du reportage d’Anne Schiffmann, Au quotidien, RTBF, sur la perception de la théorie de l’évolution dans les écoles en Belgique. Sont utilisées les trois premières minutes.

Télécharger ici.

2. Extrait N°1 de l’enquête de Gorian Delpâture, Questions à la une, RTBF :  « Le créationnisme : un danger pour nos écoles« , de 14’42 à 15’45. On y voit l’enseignement de l’atlernative créationniste en milieu scolaire en Belgique, suite à la demande d’un prêtre protestant, puis la réaction de C. Dupont, Ministre de l’Enseignement Obligatoire de la Communauté Française.

Télécharger ici.

3. Extrait N°2 de l’enquête de Gorian Delpâture :  « Le créationnisme : un danger pour nos écoles« , (cf.précéd.) de 16’48 à 17’32, montrant l’avis erroné d’un professeur de religion sur le darwinisme et la réaction du ministre C. Dupont.

Télécharger ici.

4. Extrait N°3 de l’enquête de Gorian Delpâture :  « Le créationnisme : un danger pour nos écoles« , (cf.précéd.) de 11’48 à 12’34 montrant des morceaux choisis du rapport du Conseil de l’Europe.

Télécharger ici.

5. Extrait N°4 de l’enquête de Gorian Delpâture : « Le créationnisme : un danger pour nos écoles« , (cf.précéd.), de 18’31 à 20’09, montrant un élève musulman étudiant la biologie pour l’examen, mais qui ne croit pas à l’évolution. Réaction de l’inspecteur des cours de religion musulmane pour la Communauté Française de Belgique.

Télécharger ici.

6. Triple extrait de l’interview de Guillaume Lecointre dans « Darwin aujourd’hui », du magazine Effervesciences (CINAPS TV & CNRS Image), de 16’48 à 20’06 puis 20’50 à 22’29 et enfin 23’36 à 26’10 (7 mn 31 s). G. Lecointre y explique le créationnisme, la différence entre savoir et croire, et le contour des sciences.

Télécharger ici, ici et . (Attention ! Nous avons quelques problèmes d’encodage avec 6a et 6b Nous y remédierons dès que nous le pourrons)

7. Extrait du film « Evolution, les pièces d’un puzzle« , de Lionel Daneau et Michèle Antoine (Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique et Triangle 7), de 1’10 à 3’32, portant sur le Pikaïa gracilens et un Anomalocaris sp..

Télécharger ici.

 
En espérant que vue la portée pédagogique de ces séquences, personne ne vienne réclamer un quelconque droit – mais s’il y a problème, évidemment nous retirerons ces ressources.
 
Pour retourner au mémoire de Joël Peerboom, cliquez ici.
RM
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Biologie, évolution, créationnisme – Comment enseigner l’évolution à des élèves croyant qu’elle n’existe pas – par Joël Peerboom

Joël Peerboom nous a autorisé à reproduire son travail, qui servait de corps à son Certificat d’Aptitude Pédagogique (2009-2010), module Psychopédagogie et méthodologie générale, soutenu à l’Institut de Promotion Sociale de la Communauté Française (IEPSCF) de Dison, Belgique. Son titre ? Le refus de la part de certains adolescents d’accéder, grâce à l’école, à certaine(s) connaissance(s) spécifique(s), dû à l’assimilation antérieure, et principalement hors scolaire, de croyance(s) qui s’y oppose(nt). Cas particulier du rejet de la théorie de l’évolution. Comble du luxe, Joël a fait une soutenance sous forme de pièce de théâtre.

Vous trouverez donc ci-dessous :

Grand merci Joël !
Si le CorteX croyait au créationnisme, il postulerait que ce genre de dossier est le but ultime de la création :-).
Pour toute suggestion, écrivez-nous, et/ou à l’auteur.

RM

Le clitoris, ce cher inconnu – Introduction au sexisme « scientifique »

Un vrai bain de jouvence que ce documentaire de Michèle Dominici, Le clitoris, ce cher inconnu.

Non seulement la majorité d’entre nous, femmes, hommes ou autres, y apprenons des choses en 2011, mais c’est une manière subtile d’aborder les argumentaires pseudoscientifiques qui jalonnèrent les âges pour placer la femme dans un ordre inférieur à l’homme, et lui conférer une « nature » maternelle, une « essence » soumise.

Voici un montage de deux extraits que j’utilise en cours pour des étudiants de licence et des doctorants-moniteurs, mais aussi en divers ateliers publics. Merci à l’auteure !

Richard Monvoisin

Pour la version complète du film, vous la trouverez  aisément en ligne, mais nous ne pouvons que vous encourager à l’acquérir directement à  http://www.clitoris-film.com

CorteX evolution humaine

Biologie, idéologies, racisme, sexisme – comment monter un cours de biologie à partir des pseudosciences

Comment élaborer un cours d’épistémologie de la biologie, en partant des pseudothéories ayant servi à des thèses idéologiques ? Voici une manière de s’y prendre telle que je l’ai développée, en cours de « Zététique & Autodéfense intellectuelle » pour des licences de science, et surtout pour l’enseignement Questions d’Actualités en Biologie de ma collègue Isabelle Lebrun destiné aux Licence 3ème année de Sciences de la Vie et de la Terre (SVT).

Je souhaite pointer les principaux détournements de la science biologique dans l’histoire sont les détournements idéologiques liés au racisme / aux mélanges spiritiualistes science-religion / au sexisme / à l’ordonnancement normal-pathologique, et montrer quelques outils d’épistémologie (comme le critère de réfutabilité des théories de Popper) pouvant être utiles pour pressentir la pseudo-science.

J’ai commencé par l’analyse de l’arbre phylogénétique du vivant, qui jusqu’à il y a peu était « orienté » vers l’humain, comme si l’humain était l’aboutissement d’un dessein intelligent, ou d’un créationnisme, et comme si l’ordonnancement des espèces montrait une perfection croissante. J’ai utilisé l’extrait du documentaire « Espèces d’espèces » illustrant parfaitement ce point (voir Biologie, évolution – Métaphore de la boule buissonnante). Nous avons également analysé les représentations classiques de l’évolution humaine, présentant un schéma faux, comme dans les exemples ci-dessous.

CorteX evolution humaine

CorteX evolution humaineCorteX evolution humaine

Puis j’ai analysé, sous forme de questions / réponses, des exemples de transformisme lamarckien qui passent l’air de rien, dans un certain nombre de fictions, que ce soient des pubs (comme Guinness, voir Biologie & vulgarisation – Analyse d’une pub Guinness – raisonnement panglossien), des films (Biologie, nutrition – Arguments anti-lait et lamarckisme dans le film Snatch), des documentaires (documentaires botanistes ou des docu-fictions comme L’Odyssée de l’espèce, voir Biologie, évolution – Erreur dans L’odyssée de l’espèce), ou des dessins animés pour enfants comme Il était une fois l’Homme.

Après avoir détaillé les enjeux et les drames des interprétations Intelligent Design et créationnistes, ainsi que le procès du Singe et le tout récent procès de Dover, nous avons ensuite parlé des détournements ouvertement racialistes ou nationalistes, que ce soit l’époque de la phrénologie et de la criminologie de Lumbroso, la hiérarchisation des races ou le nationalisme sous-jacent comme dans l’affaire du crâne de Piltdown.

Pour montrer que la modernité n’est pas exempte de ce type d’inflexion idéologique, j’insisite longuement sur les cas récents d’utilisation de la pseudo-science pour stigmatiser des populations : les classements DSM de pathologie (qui classait l’homoséxualité comme une pathologie mentale jusqu’en 1973), les affaires autour du gène « gay », et tout récemment les déclarations de N. Sarkozy sur l’origine génétique de la pédophilie (ci-dessous).

Télécharger ici

J’aborde ensuite le lyssenkisme, comme exemple de « science officielle » et de manipulation théorique vers le marxisme, ou le «pseudo-darwinisme social» de Spencer comme manipulation théorique vers le capitalisme.

Je termine par ce qui est certainement la discrimination la plus insidieuse, celle des femmes, en posant la question du sexisme au travers des âges, au travers de la représentation des organes génitaux féminins qui, tout comme du rôle du plaisir chez la femme, ont toujours suivi dans les livres de science les représentations sociales du moment (orgasme clitoridien infantile chez Freud, orgasme utile ou inutile à la procréation, etc.). Je me suis servi d’un petit montage tiré du documentaire Le clitoris, ce cher inconnu de Michèle Dominici.

Nous discutons enfin des questions de genre, des représentations féminines/masculines dans la presse, puis des corps dans les livres d’éducation, ou étrangement, lorsqu’il s’agit de représenter une action musculaire, ce sont toujours des images de garçon, tandis que les mécanismes passifs (lymphatiques) sont immanquablement représentés par des filles (voir ici, et , entre autres).

Pour une séquence telle que celle-ci, au minimum deux heures sont à prévoir. Et préparez-vous à rester au moins une heure de plus pour discuter après le cours !

RM

  • Pour aller plus loin sur les questions d’évolution, on pourra aller dans la Bibliotex, ainsi que se documenter dans le matériel pédagogique du professeur Barrette.
  • Sur les questions d’idéologie raciale, on lira entre autres La malmesure de l’Homme de Stephen Jay Gould (ainsi que les critiques de ce livre envoyées par Serge Larivée, de l’université de Montréal, dans Vices et vertus de S. J. Gould, Revue québécoise de psychologie, vol. 23, n°3, 2002, pp 7 – 23).
  • Sur les questions de sexisme, une introduction simple se trouve dans le livre Contre les jouets sexistes, éditions L’échappée.CorteX jouets sexistes

Cortecs Girafe

Répulsif anti-girafe, ou preuve par l’absence

Le répulsif anti-girafe : « – Que fais-tu avec cet aérosol ? – Eh ben, c’est un anti-girafe. – Mais il n’y pas de girafe par ici. – C’est bien la preuve que ça marche ! » Ce type de raisonnement, à rapprocher de l’appel à l’ignorance (cf. plus bas) est plus fréquent qu’on ne le pense, surtout dans le domaine thérapeutique. Voici quelques exemples.

  • Les cas concernant l’homéopathie sont pléthore : j’ai pris de l’oscillococcinum et je n’ai pas eu la grippe. 
  • Dans la même veine rhétorique, dans l’analyse critique de la cure Breuss, sensée guérir le cancer par un jeûne drastique à base de jus de légumes1, un courrier m’était parvenu par la suite : « j’ai fait la cure Breuss à titre préventif et me sens tout à fait bien« .
  • Broch cite dans son livre Au coeur de l’extra-ordinaire (2001) une lettre illustrative :

« Savez-vous que mon garde-chasse repère avec le pendule la présence de sangliers dans une forêt ? J’ai même découvert un fait nouveau et extrêmement intéressant, c’est que les sangliers sont sensibles au fluide radiesthésique. Et la meilleure preuve c’est que, quand je vais à l’endroit indiqué par le garde-chasse, les sangliers se sont méfiés et sont toujours partis. »

Canac 1956, in Broch, ouv.cité, p. 2462.

  • Notre collègue archéologue Irna a relevé un panneau anti-girafe dans La révélation des pyramides, documentaire archéo-mystique célèbre de Patrice Pooyard d’après un livre non publié de Jacques Grimault. Jacques Grimault, l’auteur, parlant de « l’écriture des chiffres » léguée selon lui aux hommes par les mystérieux « bâtisseurs » des pyramides, déclare :

C’est parce que ces prêtres écrivaient uniquement dans le sable, l’argile ou sur des tablettes de cire lorsqu’ils s’entretenaient de choses sacrées et secrètes, qu’elle n’a pas pu être observée d’un point de vue documentaire dans les fouilles éthno-archéologiques.

Irna précise qu’en réalité, ont été retrouvées au bas mot 500 000 tablettes d’argile ou de cire antiques…

  • Mon ami le graphiste François B, qui se force à regarder tout un tas de navets cinématographiques pour me trouver des ressources, vient de me dénicher un morceau collector de Comme des frères, de Hugo Gélin (2012). Ci-dessous :

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Le panneau anti-girafe est un genre de sous-partie involontaire de l’appel à l’ignorance.

Sophisme – Appel à l'ignorance