RFI vs. Scepticisme scientifique : le CORTECS sur les ondes

Vous aurez probablement remarqué notre rareté sur les médias. Il ne s’agit pas d’un manque de sollicitation, au contraire ! Il s’agit d’une position collective qui ne fait que se confirmer avec le temps. Comparatif entre deux prestations, sur le ballado Scepticisme scientifique le 16 octobre 2015 et sur RFI le jeudi 29.

Épisode 1

Je passais à Louvain-la-Neuve en octobre pour de la didactique des sciences, et parmi quelques à-côtés absolument géniaux (dont une causerie avec Marc Silberstein, des génialissimes éditions Matériologiques, ainsi qu’avec Pascal Charbonnat, l’auteur de la somme Histoire des matérialismes). C’est là que les camarades du ballado sceptique Scepticisme scientifique m’ont mis le grappin dessus.

Avec un magnéto, la piaule de Jean-Michel Abrassart (alias JMA) encombrée de bouquins d’ufologie et d’ouvrages de H. P. Lovecraft, Jean-Michel lui-même et Jérémy Royaux le psychologue « hypnotiseur » (c’est son métier, branche non mystique bien entendu) qui a préparé l’entretien, ça donne une heure et demie de causette approfondie que vous pouvez :

– télécharger en deux parties ici et pour faire votre ménage ou votre vaisselle en bonne compagnie

– ou écouter directement ici :

Épisode 1

Épisode 2

– ou aller à la source et là-bas.

Le résultat, à vous d’en juger, mais j’ai eu en tout cas le temps de développer, d’approfondir, et j’ai pris grand plaisir.

Épisode 2

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Le camarade Antonio Fischetti, connu pour ses pages sciences dans Charlie Hebdo, et que je connais depuis quelques années, me propose de venir causer de pseudo-sciences sur Radio France International, radio sur laquelle il faut un remplacement dans l’émission Autour de la question. Format large (50mn), Antonio très au fait du sujet puisqu’ayant co-écrit en 2004 le fameux Charlie saute sur les sectes avec le regretté Tignous : j’arrive très confiant dans la tour de RFI, à Issy-les-Moulineaux. Antonio m’a demandé si je pouvais fournir des extraits audio éclairants, et vous reconnaîtrez peut-être quelques outils que j’ai utilisé dans mes cours.

Le résultat ? Vous serez seuls juges. J’en suis sorti perplexe pour ma part, non par le travail réalisé par Antonio – les questions étaient bonnes, les extraits adéquats – mais perplexe par le format. RFI demande, de part sa diffusion internationale, un minutage extrêmement précis, à la minute près. Guillaume Ploquin à la technique nous faisait les signes quand il fallait, et Antonio avait un script taillé au cordeau. Les normes de l’émission sont strictes : un journal à la moitié, et deux chansons. Au final ? Perplexe, donc. 50 minutes d’émission, mais une impression de peau de chagrin. J’ai eu l’impression de faire des séries de phrases brèves. J’ai même tellement été surpris par la fin que je n’ai pu ni rendre un hommage appuyé à mes camarades, ni surtout faire ce que je désirais : lancer un appel aux enseignants africains francophones.

Vous pouvez forger votre opinion en :

– téléchargeant ici pour faire votre repassage ou bêcher le jardin en bonne compagnie

– ou en écoutant directement ci-dessous :

– ou en allant à la source .

Alors c’est vrai, j’avais écouté d’autres émissions de Autour de la question, mais je ne me rappelais pas que c’était si « ramassé ». Alors si le format ne me convenait pas, pourquoi y suis-je allé ?

C’est que je suis pris dans l’éternel dilemme du CORTECS :

Choix A :  faut-il passer le message critique dans les médias, quoi qu’ils vous fassent ? (C’est l’option que prend dans une certaine mesure, le sociologue Gérald Bronner par exemple, Florent Martin de l’Observatoire zététique, le physicien Jean Bricmont, ou Jean-Michel Abrassart, du podcast Scepticisme scientifique).

ou choix B : refuser d’y aller quand le format n’est pas adéquat, ou lorsqu’il faut, pour être audible, devenir un fauve comme dans certaines émissions de prime-time – entendez par « fauve » quelqu’un qui doit couper la parole à ses interlocuteurs pour se faire entendre, faire des phrases courtes, percutantes, si possible avec le ton hargneux et hautain qu’on aime voir chez un sceptique (je ne plaisante pas : j’ai disparu d’une émission il y a quelques années, parce qu’un autre sceptique était plus télévisuel, ayant usé d’invectives et de moqueries envers des adhérents à des thérapies « alternatives »). Cette solution de retrait fut prise par exemple par le sociologue Pierre Bourdieu à la fin de sa vie (voir à ce sujet son petit livre Sur la télévision et la conférence attenante, ci-dessous) et c’est la position pour l’instant adoptée collectivement par notre collectif, depuis maintes mésaventures télévisuelles notamment.

Le choix A vous mène parfois jusqu’à la caricature. Mais le choix B vous fait disparaître. Au CORTECS, nous pensons que notre job consiste à enseigner, et pour cela, il faut du temps, difficilement compatible avec le format audiovisuel. Nous pensons aussi qu’il est sain que n’apparaissent pas de « figures » médiatiques , en mode sous-commandant Marcos, ou Lazarus – c’est d’ailleurs pour cela que nous faisons tourner entre nous les interventions que nous acceptons. Sur ce point, je connais des avis divergents : les amis de la Tronche en biais me rappelaient  tantôt qu’une figure médiatique entraînerait plus de sillage qu’une masse anonyme… et je pense que c’est vrai. Mais c’est du court terme, et c’est flatter les mécanismes psychologiques les plus archaïques chez nous. Faut-il aller parler d’esprit critique dans des émissions très regardées mais dont le format, coincé entre le rire d’une miss France et un grincement de chroniqueur, ne permet aucun développement ? Serions-nous cohérents, en allant dans la meute chez Taddeï couper la parole aux autres pour pouvoir en placer une ? D’un autre côté, faisons-nous notre boulot d’éducation populaire en refusant presque toujours de communiquer dans les médias ?

Le cas de RFI est une illustration de ce dilemme : des centaines de milliers d’oreilles, pour une émission un peu engoncée dans un grand nombre de contraintes. Le ratio était valable, et nous avons fait collectivement le choix de m’y envoyer. Nous avons accepté quelques fois France Inter, sous certaines conditions. Avons refusé le Point (qui a quand même fait un article !). Avons refusé Ruquier. Avons accepté Le Monde Diplomatique. Avons voulu refuser Le Monde, puis dûmes accepter, contraints par le fait que plusieurs personnes avaient contribué avant nous à un article sur nous, et cela devenait embarrassant. Bref, notre « algorithme » média tourne en permanence. A chaque fois, le dilemme. A chaque fois, la peur que le format ne sabote complètement le propos.

Notre crainte ? Que si nous adhérons au principe que « au fond, tant que des gens entendent un discours critique, même bref, c’est toujours ça« , et que « de toute façon,  ce format est moins pire que bien d’autres« , alors nous ne voyons pas ce qui freinerait notre descente progressive dans les médias de plus en plus médiocres – il y aura toujours pire ailleurs !

L’esprit critique vaut-il qu’on le brade chez Ardisson, chez Berlusconi ? Mais doit-il être « réservé » à des barbus qui fument la pipe à 3 heures du matin sur une chaîne que personne ne regarde, ou qui pérorent sur une radio grandes ondes qui n’a que trois auditeurs boursouflés ? Si l’on devait tourner la question scientifiquement, elle serait comme suit : quand est la limite entre le format fast-thinking et le junk-thinking ? Franchement, au CORTECS, ne sachant pas répondre à cette question, nous tendons à la discrétion.

Richard Monvoisin

PS : le travail collectif lancé par JMA compte plus de 300 émissions, qui vraiment méritent une forte audience. A nous de compenser la maigre diffusion de ces contenus précieux – d’où cet article ! Il faut piller Scepticisme scientifique (et son petit frère tout récent outre-atlantique Le monde merveilleux du scepticisme, de Isabelle Stephen et Christopher Hammock). De quoi égayer même des travaux de plomberie.

Le Phallus et le Pas Tout, la théorie sexuelle – coup de main pour film grand public décryptant la psychanalyse

Repousser les murs et les cloisons intellectuelles peut se faire de maintes manières, au burin, au pic à glace, à la lime, ou au documentaire. Par les siennes, Sophie Robert a contribué plusieurs fois aux événements pédagogiques du CORTECS. Elle remet le couvert ce mois-ci, et demande un coup de main pour sa nouvelle contribution audiovisuelle : Le Phallus et le Pas Tout.

Rappelez-vous : Sophie Robert en novembre 2011 dans l’UE zététique & autodéfense intellectuelle de Grenoble juste avant l’interdiction de son film « Le mur », sur des propos de psychanalystes ; puis la joie de voir le film à nouveau autorisé, et un nouveau passage de Sophie par la capitale des Alpes dans le cadre du cycle « Connaissances censurées« , au printemps 2015.

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Là, c’est dans nos écrans qu’elle revient, avec trois cadeaux.

  • Les déconvertis de la psychanalyse (voir ici), dans le quel vous reconnaîtrez un de nos amis, Jacques Van Rillaer (auteur d’Argumentaires lacaniens sur le Mur), et un plateau de quatre personnes, rares, qui ont réussi à se déconvertir, rebrousser chemin, reconnaître s’être fourvoyés et capables d’en parler.
https://www.dailymotion.com/video/x37mxys
  • Les fondamentaux de la psychiatrie (voir ici), au cours duquel trois psychiatres et un neuroscientifique posent les repères fondamentaux de la psychiatrie scientifique, tout en questionnant le sens des notions de psychisme et d’inconscient.
https://www.dailymotion.com/video/x37mxys

Et enfin, Le Phallus et le Pas Tout, film long métrage grand public en salle ! – pour lequel vous pouvez, à l’instar du CORTECS, devenir contributeur/trice !

Son nouveau film dédié au décryptage de la théorie sexuelle des psychanalystes, est presque terminé. Elle lance une souscription pour en finaliser la production car son ambition, non des moindres, est de créer les conditions d’un débat national sur la théorie et la pratique des psychanalystes, sur les sexualités, les rapports hommes-femmes, les enfants.

A propos du film, cliquer là. Extrait ci-dessous (attention, personnes sensibles à l’imposture intellectuelle s’abstenir – il y est entre autre question de « femme phalliquement lourde »).

https://youtu.be/j0Ye5mX4vUs

La somme nécessaire pour faire de ce long métrage un film de cinéma est supérieure à celle qu’il est possible de collecter sur un site de financement participatif. Aussi cherche-t-elle des contributions, des apports en numéraire supérieur ou égal à 250 euros, en échange de quoi les contributeurs percevraient un pourcentage sur les recettes du film en salles ainsi que sur tous les bénéfices d’exploitation du film (en plus d’avoir son nom au générique du film).

La marche à suivre et toutes les informations sont réunies en première page de Dragon Bleu TV.

Le CORTECS se joint à Sophie Robert. Repoussons les murs.

RM

Sciences politiques + sciences humaines = "bullshit occidental inutile"

Vieux débat que le clivage entre sciences durechapos et molles, sciences exactes et sciences politiques, humaines et sociales. Or deux acteurs nouveaux viennent apporter leur contribution : le président Ouzbèke, et le ministre de l’éducation japonais.
Celles et ceux qui suivent nos cours savent que le clivage sciences « dures« / sciences « molles » est moribond. D’abord parce que les sciences « dures » ne sont pas toujours dures, loin de là. Quant aux sciences « ‘molles », elles ne sont pas molles en méthode, seul leur objet est particulièrement ductile, car complexe et multi-paramétré. Cependant, ce clivage est savamment entretenu de toutes part : par les sciences exactes, laissant croire ainsi en une supériorité intrinsèque de la physique et évacuant tranquillement les affres des biais de publication ; par les sciences humaines aussi, car en laissant penser que leur épistémologie est molle, c’est un viatique pour toutes formes de travaux médiocres et d’impostures intellectuelles. Mais dans ce débat, deux acteurs peu orthodoxes viennent apporter leur contribution : le président Ouzbèke, et le ministre de l’éducation japonais.

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Islom Abdug‘aniyevich Karimov, président de l’Ouzbékistan depuis 1989 souhaite réformer le système d’instruction chez lui, notamment en interdisant les sciences politiques. Il s’agit selon lui d’une « pseudoscience occidentale (1) qui ne prend pas en compte le modèle ouzbèke ». Alors, depuis un décret du 24 août 2015 signé par par le ministre de l’enseignement supérieur ouzbek, Alisher Vakhabov, les sciences politiques s’appelleront désormais, à partir de septembre 2015, « théories et pratique de la  construction d’une société démocratique en Ouzbékistan » . Un changement d’appellation qui n’est pas anodin puisque le ministre a ordonné la création d’un « fonds spécial » dans les bibliothèques des universités où seront versés les livres et documents en lien avec les sciences politiques. Les étudiants pourront seulement les consulter sous réserve d’une autorisation. En réponse, Farkhad Tolipov, un professeur de sciences politiques en Ouzbékistan, s’est fendue d’une lettre publiée le 29 août sur Facebook (accrochons-nous, c’est du cyrillique) pour dénoncer cette décision, dans un pays dont le président, réélu pour la sixième fois avec plus de 90% des voix, a un fonctionnement autocratique jalonné de plus d’une dizaine de milliers de prisonniers politiques et religieux

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Quant au ministre japonais de l’éducation, Hakubun Shimomura, il a écrit en septembre une lettre aux présidents des 86 universités du Japon pour leur demander de se débarrasser des départements de sciences humaines et sociales, jugés inutiles, « ou de les convertir afin qu’ils correspondent mieux aux besoins de la société », en l’occurrence se centrer sur des savoirs immédiatement utilisables et non des savoirs purement théoriques. Sur les soixante universités japonaises qui proposent des cours en littérature et sciences humaines, dix-sept (les plus vulnérables) ont déjà annoncé qu’elles cesseraient d’accepter des étudiants dans ces disciplines, et en tout, vingt-six facultés ont confirmé qu’elles fermeraient ou réduiraient leurs départements. Devant le tollé, Shimomura a tenté de pacifier un peu : « Nous ne prenons pas les études de sciences humaines à la légère » [mais il faut mettre] « la priorité sur les sciences appliquées, immédiatement utiles pour la société ».

Ces deux exemples d’actualité peuvent certes être critiqués notamment parce que les décisions citées émanent d’autorités exécutives dont la légitimité est contestée, et reposent sur des arguments que nous trouvons discutables (la primauté de la « science appliquée » sur la « science théorique »). Ils soulèvent toutefois un question centrale sur le plan éthique : qui décide des besoins de la société? Car chose étonnante, en France comme ailleurs, les recherches publiques se font avec de l’argent public, pour le bien du public, mais… sans consultation du public. Le public pourrait se demander où est l’entourloupe.

RM

(1) Sur cette critique « occidentale », nous recommandons la lecture du livre de A. Sokal Pseudosciences et postmodernisme, : Adversaires ou compagnons de route ?, O. Jacob, 2005.

Sources : Canard enchaîné, le Figaro, Libération, le Monde diplomatique, Times of Higher Education.

Le géocentrisme comme intrusion spiritualiste dans la cosmographie moderne – dossier de Timothée Gallen

Timothée Gallen est en troisième année de licence d’histoire à l’Université de Grenoble-Alpes. Il a travaillé de conserve avec Guillaume Guidon (histoire), Richard Monvoisin (épistémologie) et Clara Egger (mouvements religieux) sur un sujet étonnant : le géocentrisme, théorie contestée au moins depuis Copernic et qui consiste à poser la Terre est au centre de l’Univers, et son retour en force dans certains travaux religieux musulmans et catholiques, et en particulier dans un documentaire intitulé The Principle.

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Timothée Gallen, en pleine réflexion

Ce travail est le fruit d’un stage court, par un jeune étudiant, sur un sujet dont les sources sont difficiles. A ce titre, nous diffusons son travail, certes non exempt de coquilles ou d’imprécisions, mais qui motivera probablement des recherches ultérieures sur cette nouvelle forme d’intrusion spiritualiste en science.

 Le dossier en pdf – Télécharger ici.

Le géocentrisme comme intrusion spiritualiste dans la cosmographie moderne.

Sous la direction de Richard Monvoisin et Clara Egger, CORTECS, Université Grenoble-Alpes.

Introduction

    Le géocentrisme est la théorisation antique selon laquelle la Terre serrait au centre de l’univers, toute autre objet céleste tournant autour d’elle. Cette représentation cosmologique fut très répandue dans l’Antiquité, cela depuis au moins le Timée (env. 360 av. EC) de Platon (428/427-348/347 av. EC) 1. Héraclide du Pont (v 388-v 310 av. EC) est la plus ancienne source dont nous disposons qui admette la rotation de la Terre autour d’elle même, suivi d’ Aristarque de Samos (env. 310-230 av. EC) qui ajoute à celui de Héraclite une rotation autour du Soleil 2. Le modèle géocentrique fut discuté plusieurs fois jusqu’à ce que, 1800 ans plus tard, Copernic (1473-1543) commence à la remettre réellement en cause dans ses travaux publiés en 1543 (« De la révolution des orbes célestes ») , puis que Galilée (1564-1642) y apporte son soutien de par ses observations. Ce n’est cependant qu’en 1727, à la suite de la publication des travaux de James Bradley sur le problème dit d’ « aberration de la lumière »3, qu’est apportée la première preuve expérimentale du mouvement de la Terre autour du Soleil, suivi en 1851 par l’expérience de Foucault et de son pendule. Aujourd’hui, l’observation pragmatique de l’univers par nos télescopes et satellites nous donne une carte relativement précise de l’univers observable. Dans le monde scientifique actuel, aucun débat n’a lieu sur le modèle cosmographique régissant notre galaxie. La science actuelle a dés-anthropocentré notre vision et compréhension du monde en changeant progressivement de paradigmes, certes, mais en abandonnant progressivement les lectures théistes, téléologiques ou concordistes. .

     Après avoir progressivement remplacé le géocentrisme chez les savants post-coperniciens, le modèle héliocentrique a continué de rencontrer chez les autorités religieuses du XVIe au XVIIIe siècle, des obstacles épistémologiques et des résistances de deux types, que nous retrouvons encore aujourd’hui dans certaines communautés religieuses fondamentalistes ayant une lecture littérale des textes :   

 – celle d’ordre théologique qui tient à celui de l’image de l’univers apporté par la Bible, la Torah ou le Coran. Les autorités catholiques condamnèrent les héliocentristes tels que Galilée ou Bruno, ainsi que leurs propos jusqu’à ce que le Pape Benoît XIV autorise en 1741 puis 1757 l’édition des œuvres de Galilée auparavant censurées et les autres travaux héliocentriques. Les théologiens protestants ayant une lecture littérale de la Bible tel que Martin Luther 4 (1483-1546) ou encore Philipp Melanchthon 5 (1497-1560) condamnèrent eux aussi de manière plus ou moins soutenu ce modèle dans leurs écrits.

– celui de l’expérience physique intuitive d’une terre immobile et d’un soleil en mouvement. Le philosophe et théoricien politique Jean Bodin (1529-1596) disait déjà des thèses de Copernic, qu’aucun homme ne pourra jamais croire au mouvement de la Terre 6.
    Il ne sera pas ici question de déconstruire les arguments pseudo-scientifiques des néo-géocentristes, ce travail ayant déjà été fait entre autres par David Palm et le Dr. Alec MacAndrew 7 sur le site www.geocentrismdebunked.org 8, mais de pointer les structures épistémologiques du géocentrisme. Une série de vidéos est aussi disponible sur youtube analysant les arguments géocentristes face aux connaissances scientifiques actuelles 9.

Qu’est ce qu’une intrusion spiritualiste en science ? Définition 

   Afin de comprendre ce qu’est une intrusion spiritualiste en science, il est important dans un premier temps, de définir ce que nous entendons par science, et par la même occasion de rappeler les fondements épistémologiques et les outils méthodologiques de cette dernière. Dans un second temps, nous verrons donc en quoi la démarche scientifique diverge du spiritualisme et de l’acte de foi.

Science :

    Pour notre propos, nous prendrons la définition de la science au tant que démarche intellectuelle contraignante visant à une compréhension rationnelle du monde naturel et social. La démarche scientifique, sous peine de se saborder, souscrit à un contrat matérialiste en méthode 10. Le matérialisme scientifique n’est pas ontologique et ne dit pas que tout est matière, mais que ce avec quoi nous pouvons travailler rationnellement est matière ou résulte d’elle-même. Le matérialisme méthodologique impose donc un contrat laïc à la science. Le scientifique ne peut donc pas ajouter sans aucune preuve ou réelle nécessitée une entité inconnue à ses travaux. Le tronc commun des méthodes scientifiques contient aussi le principe de parcimonie, aussi appelé rasoir d’Occam. Ce raisonnement nous indique qu’il est plus raisonnable, de ne pas multiplier les entités au-delà du nécessaire afin d’expliquer un phénomène. Si plusieurs hypothèses sont en compétition, notre choix doit, dans un premier lieu, préférer l’hypothèse la moins coûteuse cognitivement 11. La science nous apporte donc, dans sa démarche, mais aussi dans ses apports historiques, un message essentiel d’humilité. En effet, la science essaie de comprendre le monde qui nous entoure, malgré nos contingences matérielles et intellectuelles, et en s’imposant des contraintes rigoureuses afin de les pallier. La science ne s’est pas proclamée meilleure méthode d’investigation du réel, mais elle a été modelée, sur un temps long, pour l’être.

Spiritualisme :

    Le spiritualisme 12 quant à lui, postule des entités non matérielles, non appréhendables par la science et qui agissent sur le monde tangible. Le spiritualisme fait entrer des entités in-démontrées dans son raisonnement et ses prétentions explicatives du monde matériel.

    « Le spiritualisme nie le recours exclusif à la matière pour expliquer les phénomènes du monde réel (…) et dans ce but convoque l’Esprit » 13.
Comme le spiritualisme procède d’un acte de foi, il devient de fait incompatible avec la démarche scientifique. Notons que les croyances se veulent régionales et n’ont pas la prétention universelle de la démarche scientifique qui transcende les cultures et les idéologies. Le spiritualisme et le matérialisme méthodologique de la science sont donc deux démarches probablement compatibles dans un cerveau humain, mais incompatibles dans une démarche de description du monde, le spiritualisme niant un des fondements de la méthode scientifique. Certaines personnes ou institutions, comme la fondation John Templeton, ou l’Université Interdisciplinaire de Paris, présentent science et spiritualité/foi/religion sur le même plan, comme conciliable, en compétition, convergente. Voici comment le site www.scienceetfoi.com  présente cette convergence :
     « Loin de s’opposer, la Science et la Foi chrétienne contribuent chacune à nous donner une vision complémentaire et harmonieuse de l’univers qui nous entoure ».
Ces différents discours sont cependant biaisés et nous font accepter, sans raison légitime, le fait de mettre science et foi sur un même plan. Comme le dit Guillaume Lecointre :
    « les deux n’ont rien à se dire. En plus de sophismes, forçant Science et Foi à cohabiter, ces positions mettent une équivalence quantitative entre Science et Foi en sous-entendant que vérité scientifique et vérité spirituelle se vaudrait.»14.
    De plus, il m’est rationnellement possible d’expliquer pourquoi je soutiens telle ou telle théorie face à une autre, mais je n’ai aucun moyen de savoir comment ou même pourquoi privilégier la genèse de la Bible à la cosmogonie grecque antique.

Structure épistémologique du géocentrisme dans le monde chrétien et musulman

    Pour faire ma recherche sur les représentants modernes du géocentrisme, j’ai fait comme suit : après avoir pris connaissance que le film géocentriste « The Principle » allait sortir aux États-Unis, j’ai recherché qui étaient les producteurs et réalisateurs ainsi que les travaux sur lesquels ils s’appuyaient. En élargissant ma recherche sur le mouvement néo-géocentrisme chrétien actuel, j’ai pu constater qu’il n’était pas un fait nouveau, mais qu’il avait commencé au moins avec Walter van der Kamp et l’« Association for Biblical Astronomy », originellement appelé la «Tychonian Society» à sa création en 1971 15. J’ai ensuite cherché à connaître les différents néo-géocentristes actuels afin de comprendre quels sont leurs propos et le contexte dans lequel ils évoluent. Comme le détaille très bien le site www.geocentrismdebunked.org, les néo-géocentristes chrétiens actuels adhèrent généralement en lot à de nombreux scénarios complotistes et alternatives sur les thèmes du 11 septembre, de la NASA, du peuple Juif, ainsi que des scénarios simili-créationnistes : par exemple que l’humain et les dinosaures auraient co-existé 16. Nous étudierons plus bas de quelle manière ces croyances s’inscrivent et influent dans leur adhésion au néo-géocentrisme. A la sortie de la bande annonce de The Principle, j’ai pu constater qu’une controverse était née, suite aux réactions des différents scientifiques entrevus dans le film. Par conséquent, j’ai recherché les différentes réactions non seulement des scientifiques, mais aussi celles des réalisateurs et producteurs du film. Après avoir constaté et eu la confirmation par courriel de David Palm 17 que les producteurs de The Principle, et surtout Robert Sungenis, sont actuellement les principaux promoteurs du néo-géocentrisme, j’ai choisi de focaliser mon étude sur eux. J’ai ainsi recherché dans différents articles, dans leurs sites ou dans des entrevues leurs propos afin d’analyser leurs structures épistémologiques. Dans mes recherches sur le géocentrisme, je suis en outre tombé sur la vidéo d’un cheikh saoudien, Al-Bandar Khaibar, soutenant que la terre était stationnaire. Après avoir visionné la vidéo, j’ai décidé de rechercher si le néo-géocentrisme musulman était comparable au néo-géocentrisme chrétien. Après avoir utilisé les options de recherche de Google et avoir demandé à un arabophone de m’aider dans mes recherches, il s’est avéré que le cheikh n’avait jamais fait parler de lui avant cette vidéo. J’ai donc décidé de rechercher quelles sont les raisons pouvant amenant un cheikh saoudien à soutenir le géocentrisme dans une conférence universitaire. N’ayant pas pu connaître l’obédience exacte du cheikh Al-Bandar Khaibar, j’ai recherché les spécificités historico-politiques et religieuses de l’Arabie- Saoudite dont il est originaire. Après avoir pris connaissance que le wahhabisme était la religion officielle de l’Arabie Saoudite, ainsi que du pays organisant la conférence, je suis parti du postulat que le cheikh était wahhabite.
    Dans mes recherches, je n’ai pu trouver aucun néo-geocentriste militant ne revendiquant pas son interprétation par rapport à un texte sacré. Les biais d’interprétations, sophismes et manipulations des mouvements religieux sur le géocentrisme sont, dans les grandes lignes, les mêmes que l’on retrouve le plus souvent dans les mouvements voulant concilier science et religion comme le créationnisme et le dessein intelligent . Au même titre que le créationnisme n’accepte pas le dés-anthropocentrisme de l’évolution, le géocentrisme n’accepte pas le dés-anthropocentrisme de la cosmographie moderne. Le fait que l’humain ne soit plus au centre de l’univers et au centre de la création divine n’est pas accepté par les néo-géocentristes. Ils développent donc une vision téléologique de la science, ainsi que des raisonnements à rebours, interprétant des données dans le but de servir un résultat déjà prédéfini. Les tenants du géocentrisme dans le monde chrétien sont, comme nous l’avons dit en introduction, majoritairement présents aux États-Unis. Le promoteur du néo-géocentrisme le plus actif est Robert Sungenis qui, avec Rick Delano a réalisé le film The Principle (2014), basé sur le livre de Robert Sungenis et Robert Bennett « Galileo was wrong the church was wright ». Ce film est présenté comme un documentaire mettant en lumière de nouvelles observations scientifiques stupéfiantes défiant le principe copernicien, postulant qu’il n’y a aucun point de vue privilégié dans l’univers. Robert Sungenis est le fondateur et président de la Catholic Apologetics International Publishing. Le but de sa fondation et de son œuvre a donc une visée apologétique, à savoir, faire la promotion et la défense de la foi chrétienne, et non la recherche scientifique. Dans une entrevue, nous pouvons entendre Sungenis et Delano déclarer que les scientifiques de l’époque moderne 18 tel que Johannes Kepler (1571-1630), faisaient leurs recherches afin de connaître la pensée de Dieu 19.Ils poursuivent leur constat en déclarant «This days, if you talk like that, you’re crazy». Cette réflexion est anachronique et ne prend pas en compte le contexte historique dans lequel les scientifiques de l’époque modernes évoluaient. La science actuelle s’est en effet construite sur les erreurs et corrections de ce que la lecture la plus réaliste possible renvoyait. La pensée scientifique actuelle est bien loin de la pensée scientifique moderne, le plus souvent emprunte d’herméneutique, d’alchimie et d’autres croyances. Il est vrai que les qualités d’historien des deux protagonistes ne se sont pas non plus ressenties quand dans une entrevue, traitant du concile de Vatican II, convoqué en majeure partie à cause de l’affaire Galilée, l’Église devait trouver un nouveau moyen de parler au monde de cette l’affaire et de s’excuser : « Comment l’Église a-t- elle pu se tromper sur l’affaire Galilée, alors qu’elle avait raison sur tout le reste ? » 20. L’impasse est vite faite sur les échecs et erreurs consécutifs qu’a connu l’Église à propos de son récit pseudo-historique, la condamnation à mort de Giordano Bruno, la nécessité de la chasse aux sorcières, l’authenticité du suaire de Turin, celui du « miracle » du « sang » de Saint Janvier… Sungenis & Delano, tout en réduisant et maltraitant la science et ses méthodes dans un premier temps, affirment ensuite, que ce sont en fait les données scientifiques elles-mêmes qui prouvent que la Terre est au centre de l’univers. Cet effet bi-standard 21 crédite donc la science quand elle peut servir les intérêts de l’idéologie de Sungenis & Delano, mais la discrédite quand elle va à son encontre. Dans la même lignée, les deux protagonistes affirment que les données qui démontrent le géocentrisme ne sont pas les leurs, mais celles des scientifiques reconnus, comme ceux du Massachusetts Institute of Technology en partie interviewés dans leur film. D’après leurs propos, le modèle géocentrique serait donc le résultat de la science actuelle. Afin de convaincre leurs lecteurs et auditeurs, ils font ici appel à un argument d’autorité, mélangé à une technique de l’épouvantail et un reductio ad absurdum. Effectivement, le fait qu’un scientifique soit professeur dans une université réputée ne justifie pas que ses théories soient véridiques. En même temps, la position actuelle de la science est déguisée afin de nous faire accepter la position des géocentristes au détriment de celle des autres. Dans une autre entrevue dans le Chicago Tribune en 2011, nous pouvions aussi lire :
« But Sungenis said the renewed interest in geocentrism is
due, in part, to the efforts of Christians entering the scientific domain previously dominated by secularists. These Christian scientists, he said, showed modern science is without scientific foundation or even good evidence.
 »22
montrant une fois de plus, l’effet bi-standard et ou l’ignorance des propos de Sungenis à propos de la science. Enfin, nous pouvons entendre les deux protagonistes dirent que ce serait Satan qui mettrait dans la pensée des scientifiques le fait que l’on soit insignifiant (à l’échelle de l’univers)[23]. Le géocentrisme ne s’inscrit donc pas seulement dans une vision téléologique de la science mais aussi dans un contexte complotiste. Le rasoir d’Occam a donc ici bien à couper, et le contrat laïc de la science est totalement oublié. Plus que de manipuler les données scientifiques, c’est donc tout un scénario qui se met en place et enlève la possibilité à l’ensemble d’être réfuté, ne respectant plus le critère de Popper 23.
    Comme le montre une vidéo 24 filmée lors d’une conférence universitaire organisée dans l’émirat de Charjah, aux Émirats Arabes Unis, le modèle géocentrique perdure encore dans une partie des mentalités musulmanes « fondamentalistes » ayant une lecture littéraliste du Coran (« fondamental » dans le sens où est revendiqué la religion musulmane dénuée de toute Bid’a : «  innovation » condamnable du point de vue du dogme religieux 25. Dans cette vidéo nous pouvons entendre le cheikh saoudien Al-Bandar Khaibar répondre à la question de savoir si la terre est mobile ou immobile, par les arguments suivants :
    « Nous partons de l’aéroport afin de rejoindre la Chine. Si la terre tourne sur elle-même, si l’avion s’arrête sur lui-même dans les airs, la Chine devrait venir sous l’avion toute seule. Par contre, si la terre tourne dans l’autre sens, l’avion serait incapable de rejoindre la Chine, par ce que la Chine tournerait en même temps que l’avion. »
    Mes hypothèses à propos du géocentrisme wahhabite sont, en conclusion, que le géocentrisme peut encore perdurer à cause de deux principaux facteurs : d’un coté, la religion conservatrice qui caractérise l’Arabie Saoudite et les Émirats Arabes Unis, joue un rôle important dans le rejet de pensées ne se conformant pas à leur idéal religieux. La science et ses apports ne sont globalement pas pas rejetés. Quand les innovations vont à l’encontre de l’interprétation qu’ils ont des textes sacrés, elles peuvent alors se voir discréditées au profit d’un attachement à la pensée des « pieux ancêtres »26. D’un autre coté, le contexte politique de tension avec les États-Unis, et de volonté d’affirmation de l’Arabie Saoudite comme leader de l’islam sunnite, crée un climat aussi propice au rejet d’idées perçues comme celles des infidèles. Mes hypothèses découlent de mon analyse, ainsi que des données que j’ai pu récolter. Je n’ai cependant pas pu tester, ni avoir la preuve de mes hypothèses qui sont difficilement expérimentables.
    Les raisons pouvant ramener le modèle géocentrique dans les mentalités fondamentalistes musulmanes s’inscrivent dans un contexte historique, religieux et politique complexe qu’il parait important de restituer.
    L’Arabie Saoudite est une monarchie absolue, dont le droit est basée sur le Coran et la Sunna selon la compréhension des compagnons de Muhammad, contemporains du prophète l’ayant rencontré qui sont de fait les premiers Musulmans. Le Coran est le livre sacré de l’islam considéré par les musulmans comme la parole d’Allah, transmise par l’archange Gabriel au prophète Muhammad. La Sunna : la « coutume » dont tout fidèle doit s’inspirer est « l’ensemble des paroles du Prophète, de ses actions et de ses jugements tels qu’ils sont fixés dans les hadith », « Théorie et pratique religieuse des musulmans réputés orthodoxes, ou sunnites 27» . La politique saoudienne est inscrite dans le mouvement wahhabite prônant une lecture littéraliste du Coran et des hadiths. Le wahhabisme est la religion officielle de l’Arabie Saoudite, du Qatar et de l’émirat de Charjah, membre des Émirats Arabes Unis. Ce mouvement salafiste idéalise les premiers siècles de l’islam comme l’âge d’or 28 de la civilisation islamique 29. La science et les savoirs acquis aux cours des siècles précédents la vie des compagnons de Muhammad, sont donc pour les musulmans wahhabites non légitimes, et seules les connaissances apportées par le Coran et les premiers Musulmans sont légitimes à leurs yeux. Les innovations d’interprétations des textes sacrés (bid’a) sont rejetées de façon radicale. Toute chose qui n’est pas explicitement autorisée par le Coran risque, dans le doute, d’être interdite. A ce titre, le chef religieux Ibn Abd al-Wahhab déconseillait d’ériger des minarets, ces derniers étant inconnus au temps du Prophète et pouvant distraire les croyants 30. En Arabie Saoudite, l’éducation publique, du primaire jusqu’à l’université n’est jamais totalement séparée de l’islam, la politique en éducation imposant parmi ses objectifs, la promotion de « la croyance en Dieu », en « l’islam en tant que mode de vie» et en « Mahomet comme messager de Dieu »31. Si l’Arabie Saoudite voit sa politique intrinsèquement liée à l’idéologie wahhabite, c’est que le royaume saoudien s’est construit sur une alliance théologico-politique entre les chefs politiques de la famille Al Saoud, et la famille du chef religieux Muhammad Ibn Abd al-Wahhab (1703-1792). La famille Al Saoud s’engageait à éradiquer les autres pensées étrangère au wahhabisme dans le royaume, en échange de quoi, l’établissement du wahhabisme sur le territoire assurerait la soumission des fidèles à la couronne saoudienne 32. Venant de plus renforcer le radicalisme des positions saoudiennes, l’Arabie Saoudite joue, dans le contexte politique international actuel, un rôle de défenseur du sunnisme, face à la crainte de l’affirmation de l’Iran chiite dans la région du moyen-orient 33.
    À cette religion caractérisée par un ultra-conservatisme, s’ajoute un autre aspect idéologique que traduit le cheikh dans sa conférence.
    Comme on le constate dans la vidéo, un anti-étasunianisme est présent dans le discours de Al-Bandar Khaibar. Officiellement, l’Arabie saoudite et les États-Unis sont alliés par le pacte Quincy depuis 1945. On constate malgré tout un rejet résultant en grande partie des conflits impérialistes tels que la guerre en Irak ou la guerre en Afghanistan, dans lesquels les États-Unis ont notamment, cherché à s’assurer un contrôle des ressources pétrolières. La politique menée par les États-Unis dans les pays arabo-musulman, ainsi que son soutien à Israël est sans nul doute , un des principaux vecteurs de l’amertume des civilisation musulmane envers les Etats-Unis 34. Dans la conférence 35, Al-Bandar Khaibar illustre cet anti-étasuinianisme lorsqu’il explique qu’il pense que l’alunissage, n’est qu’une tromperie des étasuniens et de Hollywood, afin de détourner les Musulmans de leur religion. Pour information, ce cheikh n’est pas le premier à défendre le géocentrisme en Arabie Saoudite : Dans les années 1980, un cheikh saoudien, grand mufti et président du Conseil des grands oulémas d’Arabie Saoudite du nom de Abd al-Aziz ibn Baz, défendait lui aussi le géocentrisme 36 et que la terre était plate 37. Il changea cependant d’avis lorsqu’un membre de la famille royale saoudienne ayant participé à une mission Discovery, lui explique qu’il avait vu la terre tourner. Il est important de voir qu’ici, contrairement aux principaux tenants du géocentrisme chrétien, les cheikhs ne font pas passer leur croyance sous le couvert de la science. Leurs enseignements n’ont ordinairement pas de visée scientifique. Cependa
nt, comme les textes parlent parfois de la création de l’univers, il est possible de les entendre s’exprimer sur ces sujets, en tirant leur compréhension du monde non pas de l’expérience et des savoirs universels mais des « vérités révélées », sorties du Coran. La pensée wahhabite s’attache non seulement à une lecture littéraliste des textes sacrés en rejetant les innovations d’interprétations apparues au fil des siècles, mais semble aussi vouloir s’inscrire dans la pensée des premiers musulmans. Le cheikh qualifie péjorativement de « rationaliste » 38 le physicien Mohammad al-Massari 39, à qui l’on ne doit pas donner de crédit car il défend que la terre est mobile. Il justifie sa position et ses croyances en se référant aux chiekh Abd alAziz ibn Baz et Saleh Al-Fawzan, ainsi et qu’aux textes sacrées et « à la raison » 40 Le Coran évoque les trajectoires du soleil et de la lune dans la sourate 36 :
    « et le soleil court vers un gîte qui lui est assigné; telle est la détermination du Tout-Puissant, de l’Omniscient. Et la lune, Nous lui avons déterminé des phases jusqu’à ce qu’elle devienne comme la palme vieillie. Le soleil ne peut rattraper la lune, ni la nuit devancer le jour; et chacun vogue dans une orbite. » (Ya-Sin, 38-40)
    Sans être entièrement explicite, nous pouvons comprendre que ce texte est d’inspiration géocentriste, comme l’était le paradigme général lors de son écriture. Cela justifierait donc le raisonnement pré-copernicien du cheikh, voyant la vérité dans les textes et la compréhensions qu’en avaient les premiers musulmans.    

La genèse du documentaire

    Alors que le livre « Galileo was wrong the Church was right » s’accapare des figures telles qu’Albert Einstein, le film quant à lui, recherche sa crédibilité scientifique en faisant apparaître des figures telles que le Dr Laurence Krauss (docteur en physique, professeur de physique et fondateur de la School of Earth and Space Exploration) , le Dr Michio Kaku (physicien théoricien, professeur de physique au City College of New York) et Max Tegmark (cosmologiste, professeur de physique au Massachusetts Institute of Technology).
    Une controverse est apparue après la sortie de la première bande-annonce quand les scientifiques et la voix off (Kate Mulgrew, ancienne actrice dans Star Trek Voyager) se sont exprimés sur leurs étonnement et incompréhension d’apparaître dans un documentaire « géocentrique ». Sur le site www.popsci.com, nous pouvons entendre Max Tegmark dire :
« They cleverly tricked a whole bunch of us scientists into thinking that they were independent filmmakers doing an ordinary cosmology documentary, without mentioning anything about their hidden agenda or that people like Sungenis were involved. » 41
    L’attitude générale des principaux intéressés a été de témoigner leur méconnaissance du contexte dans lequel les réalisateurs comptaient détourner leurs propos, et ont appelé l’audience à ne pas polémiquer sur le film afin de ne pas leur faire de la publicité 42. Sungenis et Delano ont répondu aux accusations en disant que personne n’avait encore vu le film et ne connaissait le propos, mais que tout le monde l’avait déjà calomnié. Pourtant, les propos géocentriques tenus par Sungenis et Delano avec les journalistes, sont souvent plus modérés et leur projet est présenté comme un simple film posant la question de la pertinence du modèle géocentrique. Sommes-nous insignifiants, ou spéciaux, au centre de l’univers ? Notre existence est-elle le fruit du hasard, ou d’une volonté divine ? Voila les questions auxquelles tente de répondre le documentaire. Tout le documentaire est donc articulé sur une question qui n’est pas d’ordre scientifique mais métaphysique, et pour lesquels des arguments scientifiques sont apportés comme réponses et arguments. La science ne répond pas à la question de pourquoi, mais de comment, ce que ne semblent pas comprendre ou savoir les personnes engagées dans ce projet. J’ai tenté d’écrire plusieurs fois à Robert Sungenis et Rick Delano par le truchement de leur site web mais ils n’ont jamais répondu à propos de leurs films ou de leurs propos et positions. Cependant, les scientifiques à qui j’ai pu écrire ne m’ont pas répondu non plus. Il a été impossible pour moi d’obtenir le film, celui-ci n’étant présenté que dans très peu de cinémas étasuniens. D’après le responsable du site www.geocentrismdebunked.org, le film connaît un faible succès et a comme but de préparer le public aux croyances de Sungenis. Cela corrobore les dires des producteurs, annonçant que ce film n’est qu’une introduction pour un prochain projet cinématographique. Analyser chacun des discours donnée par les géocentristes pourrait constituer une étude à part entière : vous en trouvez ici une liste non exhaustive, mais suffisamment explicite à la compréhension des biais majeurs que l’on retrouve dans les propos tenus par les néo-géocentristes.

Conclusion

    Le principal enseignement que nous apprend la science est l’humilité intellectuelle. Nous savons maintenant que nos sens, notre logique, notre expérience du quotidien ou nos croyances sont souvent biaisées. Comme nous l’avons vu, la science s’efforce de nous soustraire, au maximum, de notre condition d’humain et de nos limites afin d’obtenir une vision objective et universelle du monde. Même si les aspects théoriques ne sont pas dans mon propos, il est important de souligner que la science est aussi faite pour être remise en cause et que nos théories et modèles les plus solides, le sont grâce à leurs résistances face à ces remises en question. Pouvoir critiquer les théories est la meilleure façon de prouver leurs crédibilités. Cependant, les acteurs majeurs du néo-géocentrisme ne critiquent quasiment jamais la théorie, mais orientent et manipulent les données à des fins idéologiques tout en donnant un sens finaliste à la science. Enfin si cela n’avait pas encore était clair, je tiens à préciser que la croyance au géocentrisme ne touche qu’une partie marginale du monde musulman et chrétien. Le modèle néo-géocentrique se place de plus, contre l’observatoire du Vatican, et certains sites chrétiens créationnismes, ou partisans de l’intelligent design déconstruisent eux aussi leurs arguments comme pseudo-science. Le néo-géocentrisme soutenu par les chrétiens fondamentalistes est cependant largement plus préjudiciable que le géocentrisme soutenu par une partie de l’islam, en cela qu’il se présente comme compétant en la matière et agit le plus souvent sous le couvert de la science qu’ils instrumentalisent. De plus, ils sont foncièrement engagés dans leurs prêches et n’hésitent pas à faire des conférences et financer des films, alors que les cheikhs saoudiens ne s’expriment qu’aléatoirement sur ces sujets. L’adhésion aux différentes croyances reste un choix personnel, et le préjudice à croire que la Terre occupe une place ayant un sens dans l’univers peut en effet être relativisé. Cependant, il est important pour la communauté scientifique de dénoncer, et de ne pas accepter les discours pseudo-scientifiques mêlant science et religion, qui pourrait laisser croire aux gens une équivalence entre les deux discours sur le plan explicatif, et réduirait grandement sa liberté.

Bibliographie

  • C. Aillet, E. Tixier, E. Valler (dirs), Gouverner en Islam Xème – Xvème siècle, Clefs concours, Atlante, 2014
  • J.C. Augé, Pro-occidentalisme des gouvernements et opinions publiques au Moyen-Orient : une fracture consommée ?, Revue internationale et stratégique 2003/1 (N°49)
  • M. Barah, « Les grandes puissances et le Moyen-Orient : vers une rémanence du facteur américain ?. », Revue internationale et stratégique 4/2010 (n° 80) , p. 165-173
  • J. Debussy & G. Lecointre, Intrusions spiritualistes et impostures intellectuelles en sciences,Paris, Sylepse, 2012
  • D. Lacorne, De la religion en Amérique, Gallimard, 2012
  • G. Lecointre, Les sciences face aux créationnisme, Versailles, Quae, 2012
  • B. Lemartinel, Et l’homme créa la Terre, Paris, Francois Bourin, 2012
  • D. Rigoulet-Roze, Géopolitique de l’Arabie saoudite, Armand Colin, Paris, 2005
  • A. Samir, Le salafisme en Europe. La mouvance polymorphe d’une radicalisation, Politique étrangère 1/2006
  • M. Watson, Prophets and princes: Saudi Arabia from Muhammad to the present. 2008

Webographie

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Zététique et esprit critique en France à la rentrée 2015

Le CORTECS essaie de recenser tous les enseignements spécifiques centrés sur la didactique de l’esprit critique, qu’ils s’appellent « pensée critique », « esprit critique », « autodéfense intellectuelle » ou autre. A la rentrée 2015, voici les enseignements estampillés comme tels dont nous avons connaissance. Du Sud au Nord…

Marseille

Les enseignements, conférences et formations sur Marseille et sa région sont nombreux cette année :

A l’université

Denis Caroti, l'Aristote de la méthode scientifique

Université du Temps Libre (UTL) : deux séminaires « Esprit critique et autodéfense intellectuelle » sont ouverts pour les étudiant-e-s, le cours de niveau 1 ainsi que sa suite, niveau 2, pour celles et ceux ayant suivi le cours n°1. Un lundi sur deux à partir du 28 septembre (Denis Caroti).

– Ecole Centrale de Marseille : dans le cadre du tutorat assurés par les étudiants de l’ECM à destination des élèves de collèges et lycées marseillais, une formation centrée autour de l’approche pédagogique critique et zététique sera donnée tout au long de l’année (Denis Caroti).

Stages doctoraux

Deux nouveaux stages sont ouverts cette année :

– Zététique & Autodéfense intellectuelle

– Médias et pseudosciences

Les dates sont déjà fixées : 19-20 octobre et 22-23 octobre pour les deux premières journées. Une troisième journée de restitution est prévue pour le mercredi 4 novembre et vendredi 6 novembre (Denis Caroti)

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Nicolas Montes fait un cours de zététique en L1 Science de la Terre et Environnement et en M2 Sciences de l’Environnement Terrestre

Dans le secondaire

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– Conférences Sciences et esprit critique : à destination des lycées de la région PACA (académies de Nice et d’Aix-Marseille), 30 conférences sont à nouveaux proposées (3ème année consécutive) aux lycées qui en ont fait la demande, ceci dans le cadre du dispositif régional Science Culture . Différents sujets sont traités en fonction des attentes des professeurs impliqués dans le dispositif (Cyrille Baudouin & Denis Caroti, Guillemette Reviron).

– Cours « Sciences et esprit critique » au collège Stéphane Mallarmé : tous les jeudis avec les élèves de 3ème qui se portent volontaire pour un cours optionnel traitant de zététique appliquée (Denis Caroti).

– Stages pour enseignants :depuis 2008, la formation « Sciences et pseudosciences » figure au plan de formation pour les enseignants du secondaire. Elle est à nouveau reconduite cette année. Inscriptions à partir du 15 septembre (Denis Caroti, Julien Pellegrino, Yannick Laurent).

Carcassonne

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Marion Margerit et Marie-Hélène Hilaire relancent les Enquêtes Z au collège Le Bastion, ateliers ouverts aux élèves de 6ème et 5ème.

Montpellier

A destination des enseignants

Caroline Roullier
Caroline Roullier

Cette année, cinq formations sont proposées par le Cortecs dans le PAF :

  • Agir pour l’égalité fille-garçon (n° de la formation dans le PAF : 15A0110405) animée par Caroline Roullier
  • Agir pour l’égalité fille-garçon (sous forme de Formation Territoriale – n° de la formation dans le PAF : 15A0110414) animée par Caroline Roullier
  • Médias, pseudosciences et esprit critique (n° de la formation dans le PAF : 15A0110667) animée par Guillemette Reviron
  • Mathématiques et auto-protection intellectuelle (n° de la formation dans le PAF : 15A0110484) animée par Guillemette Reviron
  • Vivre et apprendre dans l’établissement (sous forme de Formation Territoriale – n° de la formation dans le PAF : 15A0110461) animée par C. Roullier et G. Reviron

En détention

Les ateliers Médias et esprit critique se dédoublent à la maison d’arrêt de Villeneuves-lès-Maguelone et s’exportent au centre pénitentiaire de Béziers. Ils seront animés par Caroline Roullier et Guillemette Reviron

A l’université

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Deux sessions du cours Sciences et auto-défense intellectuelle seront proposées aux étudiants de L2 de l’Université de Montpellier, une par semestre. Ces cours sont ouverts moyennant discrétion.

Stages doctoraux

Outre le stage Médias et pseudosciences qui existe depuis 2010, Guillemette Reviron animera le stage Auto-défense mathématiques pour non mathématiciens

Nice

L’équipe composée d’Aziz Ziad, Martine Adrian-Scotto, David Mary et Thierry Corbard ont repris les enseignements légendaires de Henri Broch pour les licences 1 de sciences fondamentales.

Grenoble

Stages pour enseignants : depuis 2013, la formation « Sciences et esprit critique, zététique » figure au plan de formation pour les enseignants du secondaire. Elle est à nouveau reconduite cette année, à destination des collègues de physique-chimie, SVT, mathématiques et technologie, travaillant dans les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie. Inscription ici.

L’unité d’enseignement transversal « Zététique et autodéfense intellectuelle« , par Richard Monvoisin existe depuis 2005. Ce cours est ouvert au public.

Le cours spécialisé « Sciences et pseudosciences politiques » est porté pour la 2ème année par Clara Egger à l’Institut d’études politiques (second semestre). Il est ouvert au public.

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La première édition du séminaire « Complots et conspirationnismes« , co-animé par Clara Egger et Raùl Magni-Berton est ouvert à l’Institut d’études politiques. Il s’agit d’un séminaire de formation à la recherche, destiné aux étudiants de troisième année. Les cours débuteront le 17 septembre et se dérouleront principalement au premier semestre. Le second semestre est dédié au suivi des travaux des étudiants.

D’autres cours de pensée critique appliquée à des thèmes spécifiques existent à l’IEP, au niveau Master. Le cours « Les ONG et le système international » est ouvert, depuis 2013, aux étudiants en première année du master « Politiques et Pratiques des Organisations Internationales ». Deux autres cours débutent cette année : le cours « Élaboration de la décision scientifique »  (premier semestre, Master 1 & 2 « Sciences, Techniques et Démocratie ») et le cours « Les ONG islamiques » (premier semestre, Master 1 « Intégration et Mutations en Méditerranée et au Moyen-Orient »).

Stage doctoral « zététique & didactique de l’esprit critique« , depuis 2006, par Richard Monvoisin.

Le stage doctoral « Médias & pseudosciences » créé en 2008 et le stage doctoral Auto-défense mathématiques pour non mathématiciens seront portés par Guillemette Reviron.

Stage doctoral « Science sans conscience… », depuis 2014, porté par Guillaume Guidon et Clara Egger.

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Albin_Guillaud

Stage « La santé  du thésard« , créé en 2015, est animé par Nelly Darbois et Albin Guillaud.

Stage doctoral « Enseignements et dominations« , depuis 2015, porté par Clara Egger.

Ismaël Benslimane

Le « Cours pratique d’autodéfense intellectuelle » à l’Université inter-âge du Dauphiné a été créé en 2012. Il est repris en 2015 par Ismaël Benslimane et Clara Egger.

 

Chambéry

Tudy Guyonvarch propose un atelier Autodéfense intellectuelle à la Maison d’enfance du Biollay, un centre de loisirs associatif géré et financé par la mairie. 7 séances sont proposées pour des enfants de 7 à 10 ans les mardis soirs de février-mars sur le Temps d’Accueil Périscolaire.

La Rochelle – Poitiers – Tours

Stage doctoral « zététique & didactique de l’esprit critique« , depuis 2011, par Richard Monvoisin, pour doctorant-es de Tours, Poitiers, Angers, La Rochelle relevant des écoles doctorales CIMES et CPMEC.

Lyon

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Le cours de Denis Machon s’adresse aux étudiants de L2 et L3 de toutes les spécialités de l’université Lyon I. Il s’intègre dans les enseignements intitulés « Transversales : Sciences Humaines et Sociales ». Denis est secondé de Mailÿs Faraut.

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Mailys Faraut

Brest

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Delphine Toquet développe depuis plusieurs années un enseignement critique pour les étudiant-es de l’école d’ingénieurs de Brest. Le CORTECS est invité chaque année en janvier pour y réaliser des ateliers zététiques.

Saint-Ouen

Sophie Mazet faisait un atelier d’autodéfense intellectuelle dans son lycée Auguste Blanqui de Saint-Ouen. Hélas nous ne pouvons en dire plus, car cette dame n’a jamais souhaité fonctionner en réseau.

Paris

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Florian Gouthière

Le Master Journalisme, culture et communication scientifiques de l’Université Denis Diderot (Paris VII) intègre désormais, au premier semestre de son Master 2, un module « esprit critique », inclus dans ses TD de médiation scientifique. Ce module a été conçu par Florian Gouthière il y a trois ans, initialement pour la Licence (L3) préalable à ce master. Les cours font découvrir aux étudiants les principes de base de la zététique, plusieurs mise en situation les amenant à mettre en pratique la théorie.

Lille

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Mikaël Salson

L’informaticien Mikaël Salson a ouvert deux enseignements de zététique. Le premier existe depuis 2013, pour les master de la filière journalisme scientifique de l’école supérieure de journalisme ; le second est une option pour les licence 3ème année d’informatique.

Le psychologue Mikaël Mollet a développé une unité d’enseignement sur la méthodologie en psychologie, niveau licence 2 à l’Université Charles-de-Gaulle Lille 3.

Le cours de l’Université de Marne-la-Vallée n’existe plus, tout comme le cours de zététique de l’INSA de Lyon. Quant aux cours de l’école d’ingénieurs de Sceaux et de l’Université d’Artois, nous n’avons pas de nouvelles fraîches, idem pour l’école Polytechnique Supérieure de Dakar et l’Université de Belgrade.

Vous connaissez d’autres cours de ce genre ? Écrivez-nous.

Mémoire CORTECS de sciences politiques – analyse critique du "Choc des civilisations", de S. Huntington

Gabriel Giraud est étudiant à l’Institut d’études politiques de Grenoble. Il a choisi pour son mémoire 2014-2015 de s’atteler à la déconstruction de la thèse, très à la mode dans les milieux néo-conservateurs, du choc des civilisations « occidentale / arabo-musulmane ». Il a donc entrepris l’analyse critique du livre-source, celui du professeur de Harvard Samuel Huntington (Le choc des civilisations, paru en 1996 sous le titre The Clash of Civilizations and the Remaking of World Order  aux éditions Simon & Schuster, et traduit en français en 1997 aux éditions Odile Jacob. Ce livre, souvent cité, est finalement peu lu, et renferme une certaine médiocrité épistémologique que pointe avec talent Gabriel. Son mémoire, « Le scénario du choc des civilisations, analyse critique d’une théorie pseudo-scientifique » fut encadré par Clara Egger, du CORTECS, et lui a valu une excellente évaluation.

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Étudiant à Sciences Po Grenoble (master Transmédia), j’ai suivi par curiosité les cours de Zététique & autodéfense intellectuelle (R. Monvoisin) et de Sciences et pseudo-sciences politiques (R. Monvoisin & C. Egger). Ces cours m’ont donné l’envie de tenter un mémoire de fin d’année original, utilisant les outils de la pensée critique. L’ambition était d’élever, dans la mesure du possible, la « science politique » à la rigueur de la démarche scientifique qui caractérise les « sciences dites dures ».
Partant du constat que le « terrorisme » islamiste était trop souvent traité dans les médias sur un plan idéologique, et que les discours les plus agressifs envers la religion musulmane étaient la plupart du temps contredits sur un plan strictement moral (« islamophobie », « extrémisme »), je souhaitais analyser ces arguments à l’aide d’outils rationnels et dépassionnés. La théorie du choc des civilisations de Samuel Huntington s’est imposée comme une référence, encore étudiée dans nos cours de relations internationales à l’insitut d’études politiques.
Coïncidence, les attentats contre Charlie Hebdo ont relancé le débat sur l’Islam alors même que je venais de commencer ce travail, sous la direction de Clara Egger. Ce fut alors l’occasion d’étudier le traitement médiatique de ces événements, afin d’évaluer l’influence de l’imaginaire du « choc des civilisations » et ses enjeux politiques.
Ce mémoire ne prétend cependant pas apporter une réponse à Samuel Huntington : il se contente de déconstruire la pseudo-scientificité de sa démarche, qui a contribué à légitimer ses thèses et à les rendre populaires.

Télécharger le scénario du choc des civilisations, analyse critique d’une théorie pseudo-scientifique, par Gabriel Giraud (2015).

Onus probandi, ou charge de la preuve (qui revient à celui qui prétend)

Faisons un petit exercice : veuillez s’il vous plaît fermer les yeux l’espace de deux secondes, là, maintenant. Puis rouvrez-les43. Nous vous affirmons que le livre que vous tenez en main en a profité, pendant que vos yeux étaient fermés, pour se transformer en petit monstre verdâtre globuleux, silencieux, inodore et de même masse. C’était tellement rapide que vous n’avez rien perçu… Comment ? Vous ne nous croyez pas ? Prouvez-nous que ce n’est pas vrai. A-ah ! Vous ne pouvez pas montrer que c’est faux…? Vous êtes donc obligé de croire en notre monstre.

Vous l’avez compris : c’est à celui qui prétend quelque chose de le prouver et non aux autres de prouver que ce qu’il prétend n’est pas vrai. Ce n’est pas aux critiques de Claude Vorilhon, alias Raël de prouver qu’il n’a pas pu être enlevé par des extraterrestres, mais bien à lui de démontrer qu’il l’a été. De la même façon, ce n’est pas aux critiques d’une technique manuelle de montrer qu’elle est inefficace, mais bien aux prétendants de montrer qu’elle possède l’efficacité que ceux-ci lui prêtent44. Imaginons le bazar s’il fallait prendre pour vraie toute affirmation, par exemple sur un médicament, et devoir attendre que quelqu’un montre qu’elle est fausse pour y renoncer. Tout vendeur de potions pourrait rétorquer à vos doutes : « prouvez donc que ma potion n’est pas miraculeuse ». Il est de toute façon logiquement impossible de montrer que quelque chose n’existe pas. Ce problème est appelé la charge, ou le fardeau de la preuve (burden of proof, disent les anglo-saxons), et cela incombe à celui qui prétend45. Ce renversement de charge de la preuve sert d’appât pour des appels à l’ignorance, ou ad ignorantiam, formes de démonstration absurdes à l’image de notre livre-monstre globuleux, qui consiste à dire qu’une proposition est vraie parce qu’elle n’a pas été démontrée fausse. 

(extrait de Tout ce que vous n’avez jamais voulu savoir sur les thérapies manuelles, N. Pinsault, R. Monvoisin, PUG, 2014).

Voici un exemple d’onus probandi donné par Simone de Beauvoir.

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Best of – Les meilleurs dossiers Z du semestre 20, mai 2015

Comme chaque année depuis exactement 10 ans, les étudiant-es qui suivent le cours Zététique & autodéfense intellectuelle à l’Université Grenoble-Alpes rendent des dossiers. Certains sont vraiment très bons, et méritent d’être diffusés. Cândido Godoi la « ville » des jumeaux, la route de Bimini, la table oui-jà, les capacités de reconnaissance d’ossement par les éléphants, l’influence de la musique sur les chèvres et le lait qu’elles produisent et le terrifiant mystère de la tartine beurrée.

Notez bien que pour des étudiant-es de 1ère et 2ème année, ce type de travail d’enquête est souvent une première pour elles-eux, aussi la forme est-elle parfois décousue, et les fautes pléthoriques. Peu importe : ce qui compte est la qualité de la recherche.

Examen de « zététique & autodéfense intellectuelle », mai 2015. Essayez !

Voici l’examen de l’unité d’enseignement Zététique & Autodéfense intellectuelle, ouverte aux licences 1 et 2 toutes disciplines à l’Université Grenoble Alpes. Auriez-vous eu une bonne note ? Vous avez deux heures, tous documents papier autorisés.

Documents autorisés / Ordinateurs, tablettes, smartphones non autorisées (car tout le monde n’est pas équipé de la même façon). Le corrigé est ici

Cours (5 points)

Question 1 (3 points)

Igor et Grishka Bogdanoff affirment que les lois de notre univers sont trop précises pour être apparues par hasard ou par accident. Par conséquent, l’univers doit avoir été créé par un être intelligent, pourquoi pas Dieu. Avons-nous affaire à une théorie scientifique ? Justifiez votre réponse.

Question 2 (2 points)

2) Quel est l’intérêt pédagogique et intellectuel du Monstre en spaghetti volant (Flying spaghetti Monster) ?

Thérapie (6 points)

Question 1 (3 points)

Le naturopathe autrichien Rudolf Breuss a développé dans les années 80 une cure contre le cancer appelée cure Breuss. Son principe est le suivant : faire « mourir le cancer de faim », en de donnant au malade que des jus de légumes (et un peu de tisane) pendant 42 jours. Dans son livre Krebs. Leukämie und andere scheinbar unheilbare Krankheiten, il affirme

  • qu’il s’agit d’une guérison naturelle,

  • que 100 % des gens qui l’utilisent sont satisfaits.

Quelles critiques pouvez-vous faire de ces deux affirmations ?

Question 2 (3 points)

Un de vos amis vous dit ceci :

« C’est fou, je me suis brûlé la main avec une casserole d’eau bouillante, j’ai téléphoné à un barreur de feu et hop ! Non seulement la douleur est partie rapidement, mais en outre je n’ai pas eu de cicatrice. C’est incroyable, mais les barreurs de feu, ça marche ».

Votre ami a-t-il raison ? Justifiez votre réponse.

Protocoles expérimentaux (5 points)

Question (1,5 points)

Un monsieur vous dit que chaque fois qu’il est seul, des esprits de défunts lui parlent dans sa tête. Quel type de protocole expérimental zététique mettriez-vous en place pour vérifier l’affirmation de ce monsieur ?

Question 2 (3,5 points)

Une dame vous dit être capable, avec sa baguette de sourcier, de deviner où il y a de l’eau sur n’importe quel terrain. Il lui suffit de se promener, et la baguette lui indique l’endroit. « Selon les mouvements de la baguette, je peux même donner la profondeur ». Quel type de protocole expérimental zététique mettriez-vous en place pour vérifier la capacité de la dame ?

Analyse de titres de presse (5 points)

Quelles critiques peut-on faire aux titres de presse suivants ?

  • Le sort s’acharne-t-il encore sur le Népal ?, Ismaël Karakawiwo’ole, Rainbow Press, 1er mai 2015

  • Hypnose : science ou arnaque ?, Alain Guillebot, Sciences & Avenir, mars 2015

  • Les grévistes de la RATP prennent encore en otage les parisiens, Mrkev Denisova, DNES, 14 février 2015

  • On pense avoir trouvé le gène de la violence, Lucas Bécou, Périgord sciences, décembre 2014

  • Les femmes sont sensibles, c’est leur nature, Virgolette Virrone, Freudismeonline.com, mars 2015

Bon courage ! Que l’esprit critique vous accompagne.

Le corrigé est ici.

Richard Monvoisin

Examen de « zététique & autodéfense intellectuelle », mai 2015 – Corrigé

C’était la première année qu’un tel examen sur table était proposé, contraint en cela par le nombre de personnes à évaluer (entre 300 et 350 chaque semestre). Alors qu’auparavant, des dossiers d’enquête scientifique étaient attendus, j’ai voulu voir si 350 copies étaient moins lourdes que 80 dossiers. Fatale erreur ! Non seulement c’est très pénible (35 heures de correction environ, avec pause obligatoire toutes les 10-12 copies sous peine de massacrer la dernière), mais en outre c’était sans compter le fait que j’avais, pour atténuer l’évaluation normative, proposé à qui souhaitait de rendre un dossier… Au final, j’avais mes centaines de copies, auxquelles se sont greffées une quinzaine de dossiers et… des étudiant-es non inscrit-es venu-e-s passer l’examen pour le fun (que j’ai évidemment corrigées). En conclusion, je me conforte dans l’idée que l’évaluation normative telle qu’elle est pratiquée devrait être abolie – hélas c’est difficile de faire entendre ça à l’université.

L’énoncé est disponible ici. Voici le corrigé-type. (total sur 21 points)

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Cours (5 points)

Question 1 (3 points)

Igor et Grishka Bogdanoff affirment que les lois de notre univers sont trop précises pour être apparues par hasard ou par accident. Par conséquent, l’univers doit avoir été créé par un être intelligent, pourquoi pas Dieu. Avons-nous affaire à une théorie scientifique ? Justifiez votre réponse.

Cette question était facile, car l’Intelligent design (dans sa version fine-tuning ici) a été traité à deux moments du cours. J’attendais :

  • raisonnement panglossien
  • irréfutabilité au sens de Popper
  • et entité surnuméraire au coût démesuré ne souscrivant pas à la parcimonie du rasoir d’Occam
  • éventuellement en plus une réflexion sur le hasard peu probable mais possible
  • (et pour les plus acharné-es, introduire les principes anthropiques forts et faibles)

Question 2 (2 points)

2) Quel est l’intérêt pédagogique et intellectuel du Monstre en spaghetti volant (Flying spaghetti Monster) ?

À l’instar de la théière de Russell, de la licorne invisible et rose ou du Dragon de Sagan et Druyand, le Monstre est utile pour les points suivants :

  • incontradictibilité, comme les autres dieux ;
  • la non-impossibilité n’est pas un argument d’existence ;
  • la charge de la preuve incombe à celui qui prétend (onus probandi) ;
  • les critiques exercées sur le monstre se retourne sur les autres croyances, qui elles aussi sont posées sans preuve et prônent l’acte de foi ;
  • contre-balance les revendications créationnistes ou intelligent design dans les contenus d’enseignement (si vous introduisez un argument téléologique dans l’enseignement, pourquoi pas celui du monstre ?)

Thérapie (6 points)

Question 1 (3 points)

Le naturopathe autrichien Rudolf Breuss a développé dans les années 80 une cure contre le cancer appelée cure Breuss. Son principe est le suivant : faire « mourir le cancer de faim », en de donnant au malade que des jus de légumes (et un peu de tisane) pendant 42 jours. Dans son livre Krebs. Leukämie und andere scheinbar unheilbare Krankheiten, il affirme :
– qu’il s’agit d’une guérison naturelle,
– que 100 % des gens qui l’utilisent sont satisfaits.
Quelles critiques pouvez-vous faire de ces deux affirmations ?

J’attendais la critique de la notion de « naturel » (voir à cette fin les travaux pédagogiques de G. Reviron et D. Caroti, ici) – sachant que même une tisane n’est pas « naturelle » puisque c’est une décoction artificielle. On pouvait pointer le discours latent « naturel / plantes / spiritualités vs. artificiel / médicaments / médecine scientifique ».

Le second point nécessitait une critique du mot « satisfait » (non équivalent à « guéri »), ainsi qu’une réflexion sur les probabilités inversées et le biais d’attrition ou « perdus de vue ».

Question 2 (3 points)

Un de vos amis vous dit ceci : « C’est fou, je me suis brûlé la main avec une casserole d’eau bouillante, j’ai téléphoné à un barreur de feu et hop ! Non seulement la douleur est partie rapidement, mais en outre je n’ai pas eu de cicatrice. C’est incroyable, mais les barreurs de feu, ça marche ».

Votre ami a-t-il raison ? Justifiez votre réponse.

Le mécanisme avait été expliqué en cours, mais même en ratant cet enseignement, on pouvait pointer suffisamment de biais classiques (effet cigogne douleur / gravité + Post hoc ergo propter hoc + tri sélectif des données + « ça marche » généralisé hâtivement + hypothèse du don par téléphone peu parcimonieuse au sens du rasoir d’Occam). Avec finesse, on pouvait indiquer que l’ami a probablement tort, mais que pour en être certain, un protocole était nécessaire.

Protocoles expérimentaux (5 points)

Question (1,5 points)

Un monsieur vous dit que chaque fois qu’il est seul, des esprits de défunts lui parlent dans sa tête. Quel type de protocole expérimental zététique mettriez-vous en place pour vérifier l’affirmation de ce monsieur ?

Ayant fait une question intestable de ce type au semestre dernier, l’effet de surprise n’a pas été le même, et beaucoup d’étudiant-es ont répondu « il est impossible de répondre à cette question« , ou « Mu » (que j’ai accepté mais ce qui n’est pas exactement adapté, Mu pointant un plurium affirmatum : « On ne peut correctement répondre à votre question car elle se fonde sur des présuppositions erronées ».). Cependant, certain-es m’ont pris à la lettre, et ont proposé de tester « des esprits de défunts s’expriment-ils dans sa tête quand le monsieur est seul ou en présence d’un sujet, présence randomisée ? » Cela ne teste pas l’affirmation complète, mais un petit bout, et c’est élégant, et j’ai compté quelques points tout de même.

Question 2 (3,5 points)

Une dame vous dit être capable, avec sa baguette de sourcier, de deviner où il y a de l’eau sur n’importe quel terrain. Il lui suffit de se promener, et la baguette lui indique l’endroit. « Selon les mouvements de la baguette, je peux même donner la profondeur ». Quel type de protocole expérimental zététique mettriez-vous en place pour vérifier la capacité de la dame ?

Nombre d’étudiant-es m’ont recraché le cours, sans donner la faisabilité de ce qu’ils proposaient. Rarement a été proposé concrètement une solution pratique type estrade avec tuyauterie et écoulement randomisée. Est fréquemment oublié le traitement statistique des résultats : même si je ne demandais pas le calcul, il faut préciser la prétention, la p-value, le mode de rejet ou d’inclusion des données, qui sont primordiaux pour ce genre d’expérience.

Analyse de titres de presse (5 points)

Quelles critiques peut-on faire aux titres de presse suivants ?

Le sort s’acharne-t-il encore sur le Népal ?, Ismaël Karakawiwo’ole, Rainbow Press, 1er mai 2015

  • « Sort », notion téléologique sans fondement, venant se substituer à l’aléa des phénomènes naturels.
  • « encore », plurium affirmatum, sous-entendant qu’il s’est déjà acharné.
  • « acharné » : mot à effet impact

Bien sûr je ne demandais pas de voir que l’auteur est un mixte entre mon collègue Ismaël Benslimane et Israël Kamakawiwo’ole, interprète hawaïen connu sous le sobriquet de IZ, célèbre pour sa version de la chanson de Arlen et Stothart « Over the rainbow ».

Hypnose : science ou arnaque ?, Alain Guillebot, Sciences & Avenir, mars 2015

  • Structure en faux dilemme, carpaccio dual ou de combat.
  • Opposition science et arnaque injustifiée – compétitive, mais non contradictoire.
  • « ? » qui permet au journaliste de ne pas se mouiller.

Alain Guillebot lui non plus n’existe pas: son nom est un semi-anagramme de mon collègue Albin Guillaud.

Les grévistes de la RATP prennent encore en otage les parisiens, Mrkev Denisova, DNES, 14 février 2015

  • « Prise d’otage » effet impact maximal et partisan
  • Désyncrétisation de l’information (rien sur les causes)
  • « les » grévistes opposés aux « parisiens », alors que les deux sous-ensembles sont fortement mêlés.
  • On pouvait aussi pointer que l’affirmation du journaliste est une sorte d’Homme de paille.

Si DNES (« aujourd’hui ») est une réelle revue tchèque, l’auteure n’existe pas. Mrkev en tchèque signifiant carotte, on a une pensée émue pour Denis Caroti. 

On pense avoir trouvé le gène de la violence, Lucas Bécou, Périgord sciences, décembre 2014

  • « on pense » mots fouines vidant la phrase de sa substance.
  • « gène de… » carotte, marronnier de la vulgarisation scientifique des années 2000.
  • plurium affirmatum : on présuppose que ce gène existe, ne reste qu’à le trouver.
  • Un gène n’est pas responsable d’un comportement spécifique, encore faut-il que le contexte se prête à son expression.
  • « Violence » : terme « puits ».
  • Carpaccio « appel à l’espoir ».

Périgord science n’existe bien sûr pas, mais appuyait le lamentable jeu de mot avec Cabecou, clin d’œil lointain à mon collègue intervenu en cours Julien Peccoud. Un étudiant a indiqué sur sa copie « Périgord science nous prend pour des truffes ».

Les femmes sont sensibles, c’est leur nature, Virgolette Virrone, Freudismeonline.com, mars 2015

  • « les » femmes, généralisation abusive
  • ndistinction sexe / genre, sans parler des intersexuations (abordées en cours)
  • argument essentialiste très coûteux au sens du rasoir d’Occam, alors que la construction du genre l’est bien moins.

Virronne est un anagramme de Reviron, virgolette le terme italien pour guillemet : encore un lamentable clin d’œil à ma collègue Guillemette Reviron. Quant a freudismeonline.com, il n’existe pas, mais il permettait à ceux qui le souhaitaient de faire référence au sexisme latent de la théorie freudienne. Anecdote : alors que je voulais parler de freudisme, certain-es étudiant-es y ont lu « Freud is me ».

Richard Monvoisin