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Longévité d’une imposture, Michel Foucault – de Jean-Marc Mandosio

CorteX_Mandosio_imposture_foucaultSi nous vouons un grand respect aux sciences politiques et autres sciences humaines, nous ne pouvons que regretter la relative médiocrité d’une bonne part de la production. Entre mollessse des concepts, relativisme latent, jargonnage poussif, notions psychalanytiques désuettes et impostures intellectuelles (au sens de Sokal & Bricmont, voir Bibliotex), un tri est nécessaire, délicat à faire et à expliquer. Alors quand le travail de décryptage et d’éventage des idoles est fait par quelqu’un d’autre, nous sommes très contents de nous y pencher.
Nous venons d’acquérir le livre de Jean-Marc Mandosio Longévité d’une imposture – Michel Foucault, suivi de Foucaultphiles et foucaulâtres, Éditions de l’Encyclopédie des Nuisances, Paris, 2010 (10 euros).

Pour ma part, autant j’appréciais l’engagement de l’auteur, le recul historique et les bribes d’analyse politique des questions de genre et de sexualité de ses deux ou trois ouvrages que j’avais lus, autant la sous-jacence psychanalytique me dérangeait et le permanent recours à ces thèses par des penseurs de toute sorte me paraissait un peu douteux. Le temps manquait hélas pour me faire une idée étayée.

Addendum : j’ai lu ce livre pour préparer une discussion sur Foucault à Antigone. Je n’ai pas été déçu car la critique est fouillée et dénonce plusieurs plans. Sur le plan purement scientifique, il y a des choses intéressantes qu’on lui attribue à tort semble-t-il (comme le fait de se pencher sur des sujets « subversifs »). Cela ressemble à ce que nous appelons l’effet Jules Verne (cf Outillage). Son hypothèse de discontinuité de l’histoire par ex, et celle des episteme, ressemble à s’y méprendre à la théorie de Thomas S. Kuhn sur les paradigmes. Mandosio pointe la dramatisation de l’archive et le tri des archives selon la thèse à défendre, ce qui est tout de même un problème. J’ai par contre tout à fait compris ce qu’il dénonce dans la foucaulâtrie – que j’ai pu vivre plusieurs fois, dans un public s’extasiant sur Foucault sans jamais avoir lu une quelconque ligne. D’ailleurs, lorsqu’on demande qui a lu Foucault, la plupart des réactions sont du type « ah j’ai essayé, mais c’est trop dur j’ai arrêté ». Alors, si c’est compliqué, avec des concepts flous, dans quelle mesure le travail de Foucault frise l’imposture intellectuelle ? J’ai lu Surveiller et punir et Histoire de la folie il y a plus de 15 ans maintenant, avec une grille de lecture plus grossière que maintenant, aussi je ne tranche pas et suspends mon jugement jusqu’à ce que je replonge dedans. En tous les cas, ce que j’ai refeuilleté vite fait ne m’a pas grandement encouragé, ni sur l’homosexualité, ni sur sa philosophie politique. Foucault écrit dans Dits et écrits en 1975 :

« Tous mes livres sont si vous voulez, de petites boites à outils. Si les gens veulent bien les ouvrir, se servir de telle phrase, telle idée, telle analyse comme d’un tournevis ou d’un desserre-boulon pour court-circuiter, disqualifier, casser les systèmes de pouvoir, y compris éventuellement ceux-là même dont mes livres sont issus…eh bien c’est tant mieux […] Je voudrais que mes livres soient des sortes de bistouris, de cocktails Molotov ou de galeries de mines (…)

J’attends que quelqu’un m’explique en peu de phrases quels outils conceptuels de Foucault nous pouvons réellement garder en termes d’autodéfense intellectuelle. (RM, 13 octobre 2011)

Vous aussi, donnez-nous votre avis.

Richard Monvoisin

CorteX_Book_Hist_Populaire_Cote_Azur

Parution d'Une histoire populaire de la Côte d’Azur, 1860 – 1914 de Philippe Jérôme

CorteX_Book_Hist_Populaire_Cote_AzurLes éditions book-e-book.com lancent une nouvelle collection intitulée « Les Amis de la Liberté », tout à fait dans la ligne de notre Histoire des luttes sociales. Premier numéro de cette collection Une histoire populaire de la Côte d’Azur, 1860 – 1914 de Philippe Jérôme. A exiger chez votre libraire préféré-e.

 


 

De 1860 à 1914, la Côte d’Azur, fréquentée par le gratin aristocratique de la planète mais aussi par un certain Karl Marx, a connu un extraordinaire développement. Nice, à la veille de la première guerre mondiale, était considérée comme l’une des grandes villes parmi les plus agréables d’Europe. Mais au dos de cette carte postale s’est aussi écrite la rude saga pour la reconnaissance des syndicats « rouges » comme celui des traminots niçois, pour des Bourses du travail indépendantes des notables locaux à Nice et Cannes, pour l’école publique et laïque dans les quartiers ouvriers et les villages ou contre la sauvagerie patronale s’abattant sur les potiers de Vallauris. Le pacifiste Frédéric Stackelberg, le syndicaliste Léon Morel, l’avocat socialiste Louis Maffert ou le secrétaire de la Bourse du travail, Charles Levignac sont quelques uns des héros anonymes de la période qui va du rattachement/annexion du Comté de Nice fustigé par « Peppino » Garibaldi, à la Grande Guerre dont Jean Jaurès, interdit de parole à Nice par l’extrême droite, fut le premier mort. Qu’ils soient blanquistes influencés par « l’Enfermé » de Puget-Théniers, anarchistes italiens des « Fils de la misère » ou socialistes s’échinant à implanter la SFIO en terrain politique hostile, ils ont tous à leur manière entretenu la petite flamme révolutionnaire qui a permis à ces milliers de travailleurs, français et immigrés, qui ont façonné la Côte d’Azur, d’espérer en un monde meilleur.

Avant-Propos de Max Burlando.
Illustration de couverture par Ernest Pignon-Ernest.

164 pages – Français • Date de parution : 22 août 2011 • ISBN : 2-915312-29-4 15 euros – Frais de port 1 euro

 

Note : au CorteX, nous ne l’avons pas encore lu.
 
 
 
 
 
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Inscriptions au concours BUZZons contre le sexisme

CorteX_buzzons_contre_le_sexisme_buzzerTélédebout lance le concours Buzzons contre le sexisme.
Pour participer, il faut avoir entre 10 et 22 ans (c’est dommage, tous les membres du CorteX ont dépassé la limite d’age) et réaliser une vidéo contre le sexisme. On peut participer seul-e, en équipe ou avec sa classe. Avis aux enseignant-e-s !
Date limite des inscriptions : le 31 décembre 2011
Toutes les informations pratiques se trouvent ci-dessous et sont tirées du site de Télédebout.

La bande-annonce

[dailymotion id=xksf53]


Présentation du concours (par Télédebout).

Vous avez entre 10 et 22 ans et envie de changer le monde ?

Participez, seul-e, avec votre classe ou en équipe, à notre super concours « Buzzons contre le sexisme ».
Réalisez une vidéo drôle, sérieuse, révoltée, déjantée.

 

Les règles du jeu

1) En quelques secondes faites votre préinscription et dès que vous avez un moment remplissez et renvoyez signé (avant le 31 décembre 2011) votre formulaire d’inscription :
format pdf
; format word .

2) Réalisez une vidéo d’une durée de 2 à 20 minutes, avec une caméra ou même votre téléphone portable. L’important est d’avoir des idées, des choses à dire, à montrer et une grande envie que le monde bouge vers plus d’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes.

A vos caméras, vos imaginations, vos neurones et lancez-vous dans cette belle aventure avec nous.

Spécialement pour vous :
–  un blog pour votre carnet de bord vidéo.
– un forum de discussion qui vous permettra de nous poser toutes vos questions, et de dialoguer entre vous, d’échanger des idées, de vous entraider, car au delà de la compétition, ensemble « Buzzons contre le sexisme ».
– une boite à outil pour vous aider dans la réalisation pratique de votre vidéo.

Quelques idées de sujets

Sur le mode documentaire :

  • Présenter des actions, des associations, des projets, des personnes qui travaillent pour l’égalité entre les sexes ou sortent des rôles habituels donnés aux femmes et aux hommes.
  • Dénoncer les inégalités entre les sexes dans le travail, à la maison, à l’école, dans les médias, dans les instances politiques, dans le langage, dans la publicité…

Sur le mode fictionnel :

  • Utopie : mettre en scène un monde idéal ou l’égalité entre les sexes existerait.
  • Humour : Choisir la parodie, les renversements de situations, pour mettre en évidence les injustices.

Vous pouvez filmer de vraies personnes, mais aussi faire des séquences d’animations en utilisant des poupées, de la pâte à modeler, des dessins…

Vous avez aussi la chance de pouvoir utiliser dans votre montage des vrais extraits télévisuels d’archive de l’INA (Institut National de l’Audiovisuel), qui s’associe à ce concours et vous offre ce beau cadeau. Toutes les infos et les extraits seront sur la page INA.

 

Calendrier du concours

  • Inscription du 1 septembre  au  31 décembre 2011 (une autorisation signée des parents ou tutrices/teurs sera demandée aux mineur-e-s.)
  • Envoi des films avant le 15 mars 2012.
  • Annonce des gagnant-e-s début avril 2012 , remise des prix et projection des films primés au cinéma.

 

Les prix

Tous les films envoyés participeront automatiquement à plusieurs prix :

  • Tous les films participeront au grand prix télédebout avec 3 tranches d’âges: 10-14 ans / 15-18 ans / 19-22 ans et 2 catégories :
    • « vidéo autonome » : quand vous vous inscrivez seul-e ou en équipe mais sans adulte référent.
    • « vidéo accompagnée » : groupe inscrit par un adulte référent (par exemple quand votre enseignant-e-s inscrit votre classe…)
  • et en plus :
    • Les 10 à 14 ans participeront au prix spécial Julie journal Milan Press
    • Les 15 à 22 ans participeront au prix spécial l’Etudiant
    • Les habitant-e-s de Midi-Pyrénées participeront au prix spécial Midi-Pyrénées

C’est un peu compliqué, mais en résumé tout le monde aura plusieurs chances de gagner !

Quels seront les prix ?
Des caméras, du matériel vidéo, des dvds, des livres, etc. Vous le saurez avec précision, avant la fin de l’année 2011.
Et les films primés seront projetés au cinéma.

Tout-e-s les partcipant-e-s recevront un prix de consolation et n’oubliez surtout pas que vous soyez gagnant-e-s ou non vous pourrez être fières d’avoir contribué à votre manière, par votre engagement, vos idées, votre énergie, vos images, vos questionnements à faire un peu changer les choses .

La plupart des films, même non primés, seront mis en ligne sur télédebout.

 

Pour inscrire sa classe


Enseignant-e-s, éducatrices/teurs, animatrices/teurs pour en savoir plus sur la catégorie « vidéo accompagnée« .

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A décortiquer – « Pourquoi l’ostéopathie peut faire du bien à votre bébé ? », France Info, janvier 2

altLes chroniques de France info sont courtes et traitent leurs sujets ultra-rapidement. C’est leur marque de fabrique, mais ce n’est pas une raison pour qu’elles soient truffées de sophismes. La chronique ci-dessous s’intéresse au recours à l’ostéopathie pour les nourrissons. Elle a été diffusée en janvier 2011 dans la rubrique « Tout comprendre», et harponnée par notre ami Nicolas Vivant.
Les sophismes et les biais de raisonnement y sont nombreux et constituent un excellent entraînement de prévention. L’outillage critique est là pour apprendre à les détecter.

Ci-dessous, la chronique audio (durée 5’35)
Retrouvez un début d’analyse en cliquant ici.
 
Vous aussi avez des idées, des suggestions, un complément ?
Vous pointez d’autres biais ?
Entraînez-vous, écrivez-nous.
 
 

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28 septembre 2011, Marseille – Conférence "L'astrologie est-elle scientifique ?"

En partenariat avec la bibliothèque municipale de Marseille L’Alcazar, le CorteX organise un cycle de conférences autour du thème Esprit critique et Sciences.
Pour cette première de la saison, c’est Denis Caroti qui nous parlera d’astrologie, le mercredi 28 septembre, à 17h.

Mercredi 28 septembre, 17h-19h
Lieu : Bibliothèque de L’Alcazar, 58 Cours Belsunce, 13001 Marseille
Contact : accueil-bmvr@mairie-marseille.fr
Entrée libre

 

Quel repas famililal, quelle discussion devant la machine à café, quelle rencontre amoureuse sans la fameuse question « Et toi, tu es de quel signe au fait ? »

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Si l’astrologie est aussi présente dans notre quotidien, ce n’est pas pour autant que nous la prenons forcément au sérieux. Et puis, qu’y a-t-il de mal à regarder son horoscope de temps en temps ? La question devient intéressante et commence à nous interpeler lorsque l’on sait que des entreprises louent les services d’astrologues pour leurs recrutements, quand une astrologue prétend soigner grâce à un thème astral, ou bien encore quand un député affirme publiquement consulter le signe de ses collaborateurs. Nous pouvons alors légitimement nous interroger sur la validité et l’efficacité de cette pratique.

Quels sont les fondements de l’astrologie ? Quelles différences entre astronomie et astrologie ? Qu’est-ce qu’un signe ? Les astres ont-ils une influence sur nous ? L’astrologie est-elle simplement un art ? Une mancie ?

Dans cette conférence, nous présenterons quelques bases pour mieux comprendre la démarche scientifique et en tirer les outils nécessaires à une critique argumentée des revendications scientifiques de l’astrologie.

Denis Caroti

7 octobre 2011, Grenoble – Comment fabriquer une religion ? par Jean-Manuel Traimond

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Nos ami-es d’Antigone présentent cette conférence-débat avec Jean-Manuel Traimond : Comment fabriquer une religion ?

Texte de présentation

Une religion, c’est comme un hamburger. Ca se vend. Et comme un hamburger, il faut d’abord la fabriquer.

Comment ? Selon quelles règles ? Avec quels ingrédients obligatoires, avec quels tours de main conseillés ?

Jean-Manuel Traimond, auteur anarchiste et mécréant de longue date, fasciné par l’infinie capacité de l’être humain à prendre ses fictions pour la réalité, a cartographié nos zones vulnérables et recensé les manoeuvres des vendeurs de fantômes.
Venez découvrir les pièges de la dissonance cognitive, les séductions des rites, les embuscades de la doctrine…

Prix libre

Autres événements sur http://www.BibliothequeAntigone.org

30 sept, 1er oct.2011 – Barcelone, colloque liberté de la recherche contre influence cléricale

Au CorteX, nous annonçons des évenements avec lesquels nous ne sommes pas forcément d’accord, mais qui nous font nous creuser la cervelle. Voici celui-ci, qui ouvre un champ de réflexion immense et donnera peut être aux lecteurs l’envie d’y aller voir de plus près (début de questionnement à la fin de l’article).

CorteX_Libre_PenseeVendredi 30 septembre et samedi 1° octobre 2011, colloque international à Barcelone

Défendre la liberté de la recherche contre l’influence  cléricale

Campus Universitat de Barcelona Facultat de Dret de  la Universitat de Barcelona 
Avda. Diagonal, 684  08034-BARCELONA


Lettre de la Libre Pensée :

La newsletter de l’AFIS (association française pour l’information scientifique) rappelle à son tour que Le député  radical-socialiste français Jean Michel a posé au ministre des  affaires européennes une question écrite où il s’indigne de la  composition du Groupe Européen d’Ethique des Sciences et des  Nouvelles Technologies, mis en place dans le cadre des  institutions de l’Union européenne et fait observer, en ce qui  concerne le gouvernement français :

« la représentante  française ne peut être, elle aussi, considérée comme un membre  indépendant et neutre. Enseignante à la faculté de théologie  de Strasbourg, elle fait partie de l’ordre des vierges  consacrées et a donc pour mission de « porter au coeur du  monde l’amour de Dieu » et de promouvoir la religion dans la  société. »

Le congrès national de Foix de la Libre Pensée, pour sa part a  estimé que loin d’être une surprise, cette composition marquait  le caractère irrémédiablement clérical de l’UE et a voté la  motion suivante (extrait) :

« La récente révision des lois dites de « bioéthique » a  confirmé le blocage de fait des recherches sur l’embryon  humain en laissant libre cours aux pressions exercées par le  Vatican et la hiérarchie catholique au sein même du  parlement. Le congrès dénonce cette double atteinte à la  laïcité et rappelle son exigence : Il faut lever toutes les interdictions concernant les  recherches scientifiques sur l’embryon humain. »

Les  inscrits et les souscripteurs recevront sur demande les résumés  des interventions dès avant le colloque pour faciliter leur  participation active. Des liens utiles pour le transport et un  hébergement à prix modéré leur seront également proposés.

Renseignements 01 46 34 21 50 – Programme ici.

Remarque de RM : le blocage de recherches pour cause de pressions religieuses ou idéologiques est condamnable en soi, car cela signifie qu’on interdit des pans entiers de recherche sur certains sujets – c’est ce qui se passe en Histoire sur les lois mémorielles, ou dans certains épisodes de l’histoire des sciences, le cas le plus marquant étant certainement celui de la génétique de Morgan sous Lyssenko. Mais que défend-t-on dans ce communiqué ? La non-pression exterieure religieuse ? Ou la liberté de recherche sur ce sujet ?

La structure de l’argumentaire me parait former un faux dilemme étrange : si je veux m’opposer comme la LP à la pression vaticane sur la recherche, suis-je obligé de chanter la liberté de recherche sur l’embryon ? L’affirmation est gigogne, j’ai l’impression qu’elle contient l’idée non-dite suivante : il n’y a aucune raison « externe » qui doit venir freiner la recherche scientifique.Or, je ne sais pas s’il n’existe pas des raisons externes qui devraient limiter cette recherche. Je sais que je suis contre la pression religieuse sur « l’élaboration des connaissances » (qui est déjà différente de la Recherche, mot complexe), mais je ne suis pas certain d’être pour « lever toutes les interdictions concernant les  recherches scientifiques sur l’embryon humain ». Pour y répondre, il me faudrait au moins savoir à qui appartiendront les résultats de ces recherches : au bien public ? A des structures privées ?

Alors je vais écrire à l’ami qui m’a envoyé cette annonce, et lui proposer de répondre à mes interrogations ci-dessous, s’il le souhaite.

RM, 5 sept. 2011

Pour y répondre, il me faudrait au moins savoir à qui appartiendront les résultats de ces recherches : au bien public ? A des privés ?

Alors je vais écrire à l’ami qui m’a envoyé cette annonce, et lui proposer de répondre à mes interrogations ci-dessous.

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Appel à vigilance : science et idéologie anti-avortement feront-ils bon ménage à Grenoble ?

CorteX_OeilIntrusions idéologiques : science & anti-avortement peuvent-ils faire bon ménage ? Aucune accusation, simplement un questionnement fort sur des questions souvent passées sous silence.
Ouvrons l’oeil.

 


Un chercheur du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) et un professeur au Collège de France ont fait réaliser un documentaire sur leurs activités, intitulé Des chimistes bio-inspirés, l’hydrogène de demain (1), dont la projection à Grenoble est prévue le 30 septembre 2011.

L’hydrogène de demain, ça se discute : tout dépend pour quoi, pour qui, au service de qui, avec quel contrôle et quel ratio bénéfice/risque…. Mais la question n’est pas là.

Le réalisateur du documentaire, Matthieu Chauvin, est un militant religieux pro-vie, ou pour être plus rigoureux : anti-choix, c’est-à-dire qu’il estime la vie de l’embryon plus importante que le choix potentiel de la femme qui le porte. Il fut un habitué des blocages et obstructions dans les salles obstétriques pour empêcher les avortements, comme au temps des âges farouches et du professeur Lejeune (1926-1994). Heureusement, des luttes sociales et féministes sont passées par là, et ont permis de montrer que la souffrance d’un embryon était une hypothèse hasardeuse, alors que la souffrance de la mère contre son gré était elle bien réelle. La loi Veil de 1975 a marqué une des avancées sociales majeures du XXe siècle.

Mais Matthieu Chauvin n’est pas content du tout. Son

« engagement pour le respect de la Vie commence pendant les années étudiantes avec les collages d’affiches. Au début des années 90 [il] prend part à une dizaine de sauvetages. Ces occupations, non-violentes, de blocs obstétricaux où se pratique (sic) les avortements le conduisent à quatre reprises au tribunal. »

En 2007, il réalise un documentaire anti-avortement, « La Vie est en nous », qui nous téléporte en plein Moyen-ÂgeCorteX_La_vie_en_nous à grands coups de « syndromes post-abortifs » (2).

Puis

« L’objection de conscience le mène naturellement à l’action politique avec le désir de s’appuyer sur sa foi catholique pour participer à la construction du Bien Commun en s’inspirant de la Doctrine Sociale de l’Église. Il est, pour lui, évident que les Chrétiens ont une vision originale de la société et que leur contribution à la construction de la civilisation européenne qui a commencé, pour la France, à Lyon en [l’an] 177, doit se poursuivre. »

Il rejoint en toute logique Axel de Boer (4) et la grenobloise Jeanne-Marie Laveyssière (5) pour forger le parti Solidarité-France en 2008. Programme :

« défendre un projet de civilisation pour l’Europe et la France au XXI° siècle. Un projet construit autour du respect de la personne, en commençant par le respect de la vie et en s’appuyant sur la Doctrine Sociale de l’Eglise, la Famille et le monde associatif. »

 Il emmena d’ailleurs la liste Sud-Est de ce parti lors des Européennes, pour donner

« plusieurs mesures très concrètes pour construire une Europe respectueuse de tous les hommes (sic), de l’instant où ils sont conçus jusqu’à leur mort, naturelle et entourée. (…) Une Europe qui préserve l’environnement, qui reconnaisse ses racines chrétiennes, qui place le politique, le social, le culturel, l’économique et le financier au service de l’Homme ».

Alors nous voulons partager notre questionnement.

Il n’est pas question de remettre en cause la liberté de conscience – même si normalement celle-ci s’arrête aux pages du Code Pénal : il n’est pas permis de nuire à autrui au nom de sa croyance, et hélas, c’est pourtant ce qui arrive à un certain nombre de femmes souhaitant une Interruption Volontaire de Grossesse.

Il n’est pas question non plus de présumer de la valeur scientifique du film (qui n’est pas accessible encore).

Nous souhaitons toutefois susciter la réflexion. Coïncidence ou lien causal, la principale porte d’entrée du christianisme en science en ce moment est, avec le combat contre la « théorie » du genre, la lutte contre l’utilisation de cellules-souche de l’embryon. Soyons honnêtes, il y a probablement une gamme d’autres raisons pour hésiter sur cette question d’utilisation d’embryons ; mais lorsque c’est une idéologie religieuse ou politique qui porte des interdictions de recherche, la régression sociale en a toujours été la conséquence.

Par le biais des projections d’un film sur l’hydrogène, un militant politique ultra-conservateur, non-laïque, et régressif sur le droit des femmes à disposer de leur corps intervient et débat dans les structures universitaires comme le Collège de France. Cela nous interroge. Est-ce un hasard ? Est-ce une sorte de cheval de Troie ? Il en va du contrat laïque de la recherche et de l’enseignement de bien garder les yeux ouverts.

L’équipe du Collectif de Recherche Transdisciplinaire Esprit Critique & Sciences

PS : et pendant qu’un autre membre du CEA, Jean de Pontcharra (5), s’offusque de l’utilisation potentielle de cellules souches embryonnaires qui serait selon lui une « folie génocidaire mondiale », un colloque aura lieu les 30 septembre et 1er octobre à Barcelone intitulé «Défendre la liberté de la recherche contre l’influence  cléricale».

C’est à Barcelone.Oui, c’est loin.

(1) Annonce (voir également ici)

Le Pr Marc Fontecave, Vincent Artero, Jérôme Garin et le réalisateur Matthieu Chauvin vous convient à la projection du documentaire : Des chimistes bio-inspirés, l’hydrogène de demain (17mn + débat) le vendredi 30 septembre à 13h30 CEA Grenoble – Amphithéâtre Dautreppe.

Ce documentaire a pour objet la vulgarisation des découvertes sur la catalyse bio-inspirée dans le domaine de l’hydrogène menées par Vincent Artero sous la direction de Marc Fontecave au Laboratoire de Chimie et Biologie des Métaux (CEA de Grenoble, CNRS, Université Joseph Fourier). Ce projet permet d’entrevoir des applications industrielles dans la production de l’hydrogène et la fabrication des piles à combustible sans platine. La catalyse bio-inspirée pourrait devenir un élément important de la future économie de l’hydrogène.

Pour les personnes extérieures au CEA, contacter Odile Rossignol (tél. 04.38.78.45.63 – Email: odile.rossignol@cea.fr) quelques jours avant, afin de faire établir une autorisation d’entrée. CEA Grenoble – 17 rue des Martyrs, 38054 Grenoble Cedex 9

 

(2) Avec un peu de motivation, on pourra voir le film ici. Le syndrome post-abortif n’a pas d’existence propre et est typiquement un exemple de création idéologique de concepts pseudoscientifiques. On pourra se référer aux productions de l’APA (American Psychological Association) notamment Chair & al. Report of the APA task force on mental health and abortion (2008), ainsi qu’à l’étude de Charles Vignetta E. & al., Abortion and long-term mental health outcomes: a systematic review of the evidence, in Contraception 78 (2008) pp. 436-450).

(3) L’an 177 marque l’affaire des 47 « martyrs de Lyon », dont Blandine, jetés aux lions sous Marc-Aurèle et considérés comme les premiers martyrs chrétiens.

(4) Axel de Boer s’est d’abord fait connaître dans le mouvement pro-vie La Rose Blanche… Opportunisme (pseudo)historique, il a repris le nom du groupuscule des étudiants résistants aux Nazis Die Weiße Rose (la Rose Blanche) de Sophie et Hans Scholl, pour créer une filiation de toute pièce avec sa « résistance » à l’avortement.

(5) Jeanne-Marie Laveyssière, militante anti-choix de longue date, porte-parole du « Comité pour Sauver l’Enfant à Naître », habite la Tronche (38).

(6) Jean de Pontcharra est également un détracteur de la théorie de l’évolution, et participe à des colloques d’obédience créationniste, comme «  The scientific impossibility of evolution » à Rome en 2009.

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12 Octobre 2011, Marseille – Qu'est-ce que la Nature ? De la chimie aux pseudosciences, par D. Caroti et G. Reviron

Dans le cadre de la fête de la science et de l’Année Internationale de la Chimie, le CorteX – Denis Caroti et Guillemette Reviron – est invité par la Maison des Sciences de l’Université de Provence le 12 Octobre 2011 pour une conférence intitulée Qu’est-ce que la Nature ? De la chimie aux pseudosciences.


CorteX_image_conf_nature_photosyntheseBien que le sens du mot naturel puisse paraître évident, quand on prend un stylo et qu’on essaie d’en donner une définition, on en arrive assez rapidement à se tordre les neurones. S’il est possible de donner un sens scientifique précis aux mots chimique, synthétique, artificiel et naturel, sens que nous prendrons grand soin de détailler et de discuter, ces définitions n’ont que peu de choses à voir avec le ou les sens communs de ces concepts.

Sur quelles idées reposent les différentes définitions de la nature que l’on rencontre régulièrement dans les médias grand public ou les publicités ? Quelles sont les représentations qu’elles créent dans nos esprits ? Nous verrons que, loin d’être anodins, les décalages entre les définitions scientifiques et celles du langage commun peuvent induire non seulement certaines adhésions pseudoscientifiques, mais aussi des catégorisations sociales dites essentialistes, où l’on postule la nature d’un individu pour le classer selon des critères racialistes ou sexistes.


Ouvert à tous et toutes – Des classes de lycées seront présentes.
Horaires : Mercredi 12 Octobre 2011, 10h – midi (à confirmer)
Adresse : Maison des Sciences – Université de Provence – Centre Saint-Charles, 3 place Victor Hugo, Marseille. Salle à préciser.


              CorteX    CorteX_logo_annee_internationale_chimie

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Sélection commentée de ressources sur la notion de genre

La notion de genre* fait son apparition dans les programmes de Première dès la rentrée 2011. On pourra trouver de très nombreux documents de qualité sur Internet, mais un peu éparpillés. Alors, pour faciliter un peu la tâche aux enseignants de lycée qui souhaiteraient en savoir plus, mais aussi à tous ceux et celles qui aimeraient pouvoir se faire un avis sur ce qu’ils entendent à ce sujet depuis quelques temps, voici une sélection de ressources simples d’accès. J’ai fait un petit mélange de références théoriques et de documents plus concrets, pouvant donner des pistes de réflexion ou des idées de travaux pratiques.

* Ces derniers temps, les médias se sont emparés de cette notion et en ont souvent donné des définitions au mieux imprécises, au pire fantaisistes. Une petite précision sur le sens de ce mot peut donc s’avérer utile pour éviter tout malentendu. Voici une définition du genre donnée par l’historienne Irène Jami (extrait de l’émission La Fabrique de l’Histoire du 9 septembre 2011) :


Typographie

Dans tout le texte, Femmes et Hommes désigneront les groupes sociaux, tandis que femmes et hommes désigneront les personnes à l’identité sexuelle marquée.

CorteX_Image_pourquoi_je_suis_feministe_par_un_garsAvant-propos

Je m’intéresse au genre et j’essaie de comprendre comment il se construit parce qu’il est à l’origine de la discrimination séculaire des Femmes. Je tiens cependant à préciser que ce qui suit n’est pas un réquisitoire contre les hommes : il s’agit seulement de mettre en évidence les rouages d’un système qui mène à l’oppression de la moitié de l’humanité. D’ailleurs, les études réalisées  sur ce sujet démontrent que les Femmes comme les Hommes sont susceptibles d’avoir des comportements genrés, en tant que parents, enseignant-e-s, publicitaires, auteur-e-s, etc. (voir les ressources de la partie Comment se construit le genre).
Les références qui suivent sont presque toutes produites par des femmes qui se revendiquent féministes. Ceci suffit hélas trop souvent à les discréditer avant même de les avoir lues ou écoutées, tant les féministes ont la réputation d’être agressives. Je ne condamne pas cette agressivité, car je comprends l’agacement du groupe social Femme (dont je fais partie) à vivre ces discriminations au quotidien. Je pense par contre que dans un contexte éducatif, il est préférable d’éviter l’agressivité et de garder la virulence tout en privilégiant un ton doux. Cela évite les résolutions hâtives de dissonance cognitive. Je n’ai donc choisi ici que des ressources dont le ton est doux, sauf mention contraire.
Ceci dit, si les Femmes sont les plus touchées par une construction sociale genrée, le genre masculin n’est pas non plus de tout repos : naître avec un pénis contraint souvent à assumer la responsabilité financière de son foyer, à passer plus de temps avec ses collègues de travail qu’avec ses enfants, à toujours se montrer fort, à prendre des risques pour montrer qu’on n’a pas peur, etc. C’est ce que décrit l’auteur de la BD Pourquoi je suis féministe, par un gars, en libre accès sur le site des Renseignements généreux. Cette brochure est parfois un peu caricaturale, mais elle est particulièrement facile d’accès.
Les documents sont répartis de la manière suivante.

Ressources théoriques – Les Hommes et les Femmes sont-ils naturellement différents ?

Notion de sexe biologique

Du point de vue biologique, le sexe désigne le sexe femelle ou le sexe mâle. Il est désigné administrativement dès la naissance et permet de diviser la population en deux groupes : les filles et les garçons. Tout le monde sait ou semble savoir ce qu’est biologiquement une fille ou un garçon et cette notion est très rarement questionnée. CorteX_jaquette_ni_homme_ni_femmePourtant, cette catégorisation n’est pas universelle : certaines personnes naissent avec ce qu’on peut appeler des « variations du développement sexuel », certains individus possédant à la fois des organes génitaux mâles et femelles, d’autres ayant un pénis et de la poitrine, d’autres naissant avec un vagin mais se « virilisant » à la puberté, etc. Les estimations varient mais, pour donner un ordre de grandeur, environ 1 personne sur 4500 est dite intersexe. L’ouvrage Ni homme, ni femme de Julien Picquart, destiné à un large public, fait le point sur de nombreuses questions autour de l’intersexualité. Au passage, il vient bousculer nos représentations et nos certitudes sur la notion de sexe biologique : s’agit-il du sexe chromosomique (un individu mâle possède deux chromosomes XY et un individu femelle deux chromosomes XX), du sexe gonadique (un individu mâle possède des testicules et un individu femelle des ovaires) ou du sexe phénotypique (un individu mâle possède une verge, un individu femelle un vagin, un clitoris et un utérus) ? La plupart du temps, comme ces trois définitions coïncident, il est possible de définir le sexe biologique d’un individu, mais cette définition ne tient plus pour les personnes intersexes. Une anecdote tirée de Ni homme, ni femme (p. 185) pointe du doigt la difficulté d’établir un critère scientifique précis et universellement valable  permettant de faire la distinction homme/femme :

Dans la grèce antique, les athlètes concouraient nus pour que l’on soit bien sûr de leur sexe*. Encore au XXème siècle, les choses n’avaient que peu évolué et jusqu’à la fin des années 1960, l’on se contentait d’examens visuels ou manuels. C’est l’affaire Erika Schinegger qui a changé la donne. En 1966, cette skieuse était sacrée championne du monde. Mais l’année suivante, un test réalisé par le Comité International Olympique (CIO) en vue des JO de Grenoble de 1968 indiquait qu’elle était chromosomiquement mâle : XY et non XX. Erika Schinegger était disqualifiée […] tandis que le CIO décidait de systématiser les tests chromosomiques pour que seules les « vraies femmes » puissent concourir dans la catégorie « femmes ». On signalera au passage que l’on n’a pas fait de test chez les hommes pour démasquer les « faux hommes » […][V]oilà donc le test chromosomique dit « de Barr » généralisé chez les femmes. Mais la technique posa de nombreux problèmes, le moindre n’étant pas qu’une femme peut être XY, qui plus est sans que cela ne change quoi que ce soit à ses capacités sportives. Un nouveau test fut donc mis en place en 1992, un test qui ne se basait plus sur les chromosomes mais sur les gènes. Las ! Le test n’était toujours pas jugé suffisant. Les médecins responsables de sa mise en place n’en étaient pas satisfaits et lors des JO de Sydney en 2000, le CIO décida de suspendre la pratique systématique des tests, jusqu’à ce que l’on en trouve un fiable. Ainsi, le monde sportif est passé, suivant en cela les études médicales, de simples examens anatomiques à des tests chromosomiques, puis génétiques, avant de renoncer devant ce constat qu’établir un test qui détermine rapidement et définitivement le sexe d’une personne s’avère actuellement impossible.

(*) Les athlètes de la Grèce antique concouraient nus, mais il est peu probable que ce soit pour prouver qu’ils sont de sexe masculin. R. Monvoisin et moi en discutons dans une note à la fin de l’article.

Notion de genre

L’existence de personnes intersexes questionne non seulement la notion de sexe biologique, mais aussi l’attitude que nous sommes censés avoir à leur égard. En effet, lorsqu’il est impossible de catégoriser un enfant dans une des cases « mâle » ou « femelle », nos petits réflexes du quotidien peuvent être perturbés : lui offrira-t-on par exemple une poupée ou une voiture télécommandée ? Un vélo rose ou un vélo bleu ? L’imaginera-t-on devenir plutôt infirmière ou plutôt médecin ? Usuellement, nos attitudes et nos attentes dépendent du sexe biologique de la personne à qui on s’adresse et contribuent à une construction sociale d’une « féminité » et d’une « masculinité » qui varie en fonction des époques et des lieux géographiques. Etudier le genre, c’est décrire les rôles et les comportements qui sont attendus des individus en fonction de leur sexe et les mécanismes qui instaurent et propagent cet état de fait.
CorteX_jaquette_cerveau_sexe_pouvoirLa plupart du temps les individus peuvent être classés dans une case « mâle » ou « femelle », quitte à inventer des notions comme « femmelette » ou « garçon manqué » pour incorporer les récalcitrants. On observe alors que certains comportements sont plus adoptés par un sexe que par l’autre : les Garçons sont plus turbulents, les Filles sont plus câlines, les Hommes se repèrent mieux dans l’espace, les Femmes savent s’occuper des enfants, etc. S’il est faux que toutes les femmes sont douces et que tous les hommes sont ambitieux, il existe bien certaines tendances, plus ou moins marquées, spécifiques à chaque sexe. Est-ce le fruit direct de la biologie ? Il semble plutôt que ce soit le fruit d’une habituation lente dès le plus jeune âge, d’une construction sociale : ce qu’on appelle le genre.

Des explications naturelles aux différences entre les Hommes et les Femmes ?

Il est coutume d’opposer des arguments tirés de la préhistoire pour justifier les différences de comportements entre les Hommes et les Femmes. D’autres fois, ce sont les différences entre les cerveaux des Hommes et des Femmes. Le livre Cerveau, sexe et pouvoir de Catherine Vidal et Dorothée Benoit-Browaeys passe en revue de nombreux arguments invoquant la « nature » et s’appuie sur les dernières études scientifiques parues sur le sujet pour démontrer que presque tous ces arguments sont basés sur des idées reçues et… fausses. D’une part, il n’existe pas de points communs significatifs à l’ensemble des cerveaux de femmes (ou d’hommes), et d’autre part, le développement du cerveau est extrêmement conditionné, en permanence, par ses interactions avec l’entourage, ce qui minimise toute explication de type naturaliste. Voici un extrait de La tête au carré (France Inter, 20 septembre 2011, 16’42 à 18’34) où Catherine Vidal explique comment la découverte de la plasticité cérébrale a remis en cause la vision déterministe que l’on pouvait avoir il y a vingt ans encore :

Commentaire ajouté le 6 septembre 2012 – Tout individu est plongé dès sa naissance dans un environnement social, ce qui rend sinon impossible du moins très difficile la distinction entre le rôle des processus biologiques et celui d’une construction sociale dans la différenciation entre les sexes. Nous avions envie d’en savoir plus sur les connaissances actuelles dans ce domaine, nous avons donc mandaté C. Brandner, chercheure  au Laboratoire de Recherche Expérimentale sur le Comportement (Lausanne), pour faire le point sur les connaissances actuelles sur le sujet. Le résultat est .

Autres ressources de Catherine Vidal :

Hommes, femmes : avons-nous le même cerveau ? , Editions Le Pommier, 2007 (Petit ouvrage très accessible à un grand public)
Le cerveau évolue-t-il au cours de la vie ? , Ed. Le Pommier, 2009 (Petit ouvrage grand public sur le plasticité cérébrale, notion clef contre le déterminisme biologique)
Cerveau, sexe et liberté , Ed. Gallimard/ CNRS, 2007 (DVD également très accessible)

Suggestions pédagogiques du CorteX

Le CorteX propose trois démarches pédagogiques pour aborder le sujet :

– le cours Biologie, idéologies, racisme, sexisme – comment monter un cours de biologie à partir des pseudo-sciences, où R. Monvoisin construit un cours sur les pseudo-sciences en biologie et en arrive progressivement à la question du genre ;

– le cours Biologie, essentialisme – Nature, écologisme, sexisme, racisme, spécisme où je déconstruis certaines rhétoriques invoquant « la nature », en particulier les rhétoriques dites essentialistes : ce sont celles qui s’appuient sur les différences physiologiques « naturelles » entre les Hommes et les Femmes pour en déduire l’existence d’une « nature » ou d’une essence différente, c’est-à-dire un ensemble de caractéristiques intellectuelles, affectives ou comportementales qui sont immuables et universelles.

– l’atelier-débat sur la « théorie » du genre, ludique et destiné à un large public, où R. Monvoisin introduit les questions soulevées par les notions de féminin et masculin en partant de matériel essentiellement tiré des médias.

Pourquoi s’échiner à comprendre ce qu’est le genre ?

Cette construction sociale, en assignant arbitrairement des rôles aux individus en fonction de leur sexe, contribue à perpétuer les inégalités Hommes/Femmes. Le texte d’ Yves Bonnardel intitulé De l’appropriation… à l’idée de Nature paru dans les cahiers spécistes n°11 (1994) démontre comment les arguments essentialistes servent à légitimer la domination des Femmes par les Hommes et comment la construction d’un genre féminin et d’un genre masculin assoit cette oppression. Repérer les différences de droits et décrire les mécanismes qui les instaurent et/ou les perpétuent constituent le premier pas pour les faire disparaître.

Comment se construit le genre ?Quelques outils pour (faire) prendre conscience qu’une vigilance permanente est nécessaire.

La construction du genre se fait et se propage dans toute situation où les comportements attendus diffèrent pour les Hommes et les Femmes. Si certaines ressources insistent surtout sur la construction du genre féminin, la société façonne aussi bien les garçons que les filles, en diffusant des modèles genrés dans les manuels scolaires ou la publicité, mais aussi dans le cadre familial ou professionnel.

Outils pédagogiques – Jouets

CorteX_jouets_sexistesMadeleine Labie, institutrice, analyse ses propres pratiques sous l’angle du genre et propose des pistes de réflexion dans la vidéo intitulée Une instit raconte – Pratiques langagières sexuées (sur Télédebout). Elle explique en particulier comment quelques habitudes de langage permettent de tordre le cou à la fameuse règle de grammaire française qui stipule que « le masculin l’emporte sur le féminin ».Catherine Giard, psychologue scolaire, analyse la pratique des enseignant-e-s dans la vidéo La différenciation sexuée en classe (sur Télédebout) et révèle qu’il suffit souvent d’avoir pris conscience de cette différenciation de nos comportements pour y remédier.

Les livres scolaires, la littérature jeunesse, les spectacles jeune public sont également des vecteurs de la construction du genre. Dans la plupart des albums jeunesse, les rôles et les attitudes des personnages féminins et masculins sont très différenciés : activité, extérieur, public pour les garçons ; passivité, intérieur, privé pour les filles. De la même manière, le code couleur rose et bleu dans les magasins de jouets oriente les petites filles vers le maquillage, les robes de princesses, les poupées et les activités ménagères tandis que les garçons sont invités à jouer aux voitures, aux soldats, au ballon, aux pirates etc. C’est le sujet du livre Contre les jouets sexistes, introduction pour non-spécialistes à la question du genre dans les jouets et la littérature jeunesse. On y trouvera des descriptions de séances sur le genre menées en école primaire.
Sylvie Cromer, cofondatrice de l’association Du côté des filles, présente le 7 décembre 2009 les résultats des dernières études lors du colloque « Filles, garçons : une même école ? » et fait le même constat en ce qui concerne les outils pédagogiques :

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Un extrait du film The Yes Men de C. Smith, S. Price et D.Ollman (2005) qui relate deux initiatives pleine d’humour :

[dailymotion id=xky3ti]
 
Pour finir, voici un comparatif des catégories proposées aux garçons et au filles sur des sites de jeux en ligne « Les rubriques du genre« .

Musique pour enfants

Les chansons pour enfants peuvent porter un message non-sexiste. Voici la vidéo de jeunes amateur-trice-s du groupe pour enfants ZUT. Merci à Nicolas Gaillard.

[dailymotion id=x1oksy].
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Famille

CorteX_Illustration_drole_de_genreIl existe de nombreuses études sur la répartition des tâches ménagères entre les Hommes et les Femmes. Pour alléger la présentation et pour ouvrir le débat sur la répartition des tâches selon les sexes, je préfère utiliser des extraits du film Drôle de genre de J-M. Carré (à venir) dans lequel les Hommes s’occupent des enfants, de la maison et des problèmes de crêche pendant que les Femmes mènent une vie professionnelle exténuante, sont députées et offrent des sous-vêtements sexy à leurs maris..
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Métier

CorteX_infirmiereLa construction du genre oriente a priori le choix des Hommes ou des Femmes vers des types de métiersCorteX_pompier différents. Isabelle Collet a déjà contribué au CorteX en analysant la situation des métiers de l’informatique dans sa conférence Opératrices de saisie ou hackeuses : la place des femmes dans les métiers des technologies de l’information, ou dans son intervention L’informatique a-t-elle un sexe ?

Publicité

La publicité diffuse une vision très genrée du monde. Dans ces deux publicités de Zalando.fr, les Femmes sont transformées en acheteuses obsessionnelles de chaussure :

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Pour vendre une voiture ou de la lessive, certaines publicités cantonnent la Femme à son rôle de séductrice ou bien l’enferment dans son rôle de ménagère. C’est le sujet de l’exposition de Sylvie Travaglianti, Paysage du sexisme ordinaire.

CorteX_Sylvie_Travaglianti_Paysage_sexisme_ordinaire_DunePlaceLiberteTexte de l’autocollant : « on vous rêve rampante »

 

On pourra voir d’autres photos issues de l’exposition ici et écouter l’analyse de la photographe dans ce reportage de  Télédebout. On aura probablement le plus grand désarroi à trouver ces représentations genrées jusque dans les campagnes de recrutements d’enseignants par l’Education nationale (voir l’article Entraînez-vous ! Analysez la campagne publicitaire « L’éducation nationale recrute«  de Nicolas Gaillard).

Médias

Cette vidéo réalisée par Natacha Henry pour TVE Londres en 2000, Où sont les femmes ?, donne un aperçu de la surreprésentation des Hommes et de l’image des Femmes véhiculée dans les médias. Monique Perrot-Lanaud, Virginie Barré, Isabelle Fougère, Isabelle Germain, à l’époque toutes les quatre membres de l’Association des Femmes Journalistes, présentent chacune un petit document révélateur de la (petite) place accordée aux Femmes dans les médias. Cela peut donc aussi donner des idées de travaux pratiques.

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On pourra aussi aller faire un tour sur l’analyse coopérative de l’article A décortiquer – Crise du masculin, Le Monde, 7 Mars 2011 où l’auteur prétend expliquer la crise économique de 2008 par le fait que les responsables économiques sont des Hommes.  

Répartition de la parole

Discussion_homme-et-la-femmeC’est peut-être le plus difficile à déconstruire, chez les unes et chez les autres : la répartition de la parole. Les Hommes et les Femmes ne sont égaux ni devant la prise de parole, ni devant le temps de parole, ni devant l’attention portée à ce que dit l’autre, que ce soit en public ou en privé. On pourra découvrir de nombreux mécanismes qui se mettent en place lors d’une assemblée mixte dans la brochure intitulée La répartition des tâches entre les femmes et les hommes dans le travail de la conversation mise à disposition sur le site des Renseignements Généreux.

Elaboration des connaissances sur le sexe et la sexualité

Le documentaire Le clitoris, ce cher inconnu de Michèle Dominici est notre outil de prédilection sur le sujet. Non seulement la majorité d’entre nous, femmes, hommes ou autres, y apprenons des choses en 2011, mais c’est une manière subtile d’aborder les argumentaires pseudoscientifiques qui jalonnèrent les âges pour placer la Femme dans un ordre inférieur à l’Homme, et lui conférer une « nature » maternelle, une « essence » soumise. Voici le montage réalisé par Richard Monvoisin que nous utilisons en cours :

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 Vie quotidienne


CorteX_Vie-de-Meuf-le-sexisme-ordinaire-illustreAu travail, dans la rue, chez le médecin, en recherche d’emploi, en famille, en couple, enceinte, célibataire, etc. Les Femmes sont confrontées quotidiennement au sexisme ordinaire qui les maintient dans leur rôle de Femmes. L’association Osez le féminisme, pour faire prendre conscience de l’ampleur du phénomène, a ouvert en juillet 2010 un blog qui donne la parole à toutes celles et tous ceux qui veulent partager une expérience sexiste et vie de meuf.com recense aujourd’hui une multitude de témoignages. Certaines situations ont été mises en scènes dans de courtes vidéos : la « drague », les poils, le poids du « Madame », etc. Je les signale parce que certaines d’entre elles apportent un éclairage intéressant sur la question, mais le ton est plutôt dur. Quant au livre Vie de meuf – Le sexisme ordinaire illustré, c’est un outil conçu pour pointer du doigt les inégalités, dans le même esprit que le site, c’est-à-dire avec un côté ludique. Organisé par thèmes et agrémenté de dates, de citations et de quizz, il tente d’expliquer sans agressivité d’où viennent les inégalités et ce qu’elles signifient pour les femmes..

Morale et politique

CorteX_Genre_Kipling_Boutin_2012CorteX_Genre_Boutin_Beauvoir
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

L’inquiétude est grande pour les milieux conservateurs de voir les grandes catégories type Homme / Femme se diluer dans la question du genre. La réflexion peut aisément être lancée avec les affiches de campagne 2012 contre la théorie du genre réalisée par Christine Boutin et le Parti Chrétien-Démocrate (PCD).

Il faut noter que c’est l’un des rares cas en France où une opposition à des faits scientifiques devient un enjeu de campagne

Extraits radio

Le genre peut-il s’opposer au sexe ?, avec Jean-Claude Ameisen, Pierre-Henri Gouyon, Priscille Touraille et Thierry Hoquet, dans « Science Publique » sur France Culture (14 octobre 2011) :

– Catherine Vidal et Eric Fassin dans La tête au carré (20 septembre 2011) :

– Irène Jami dans La Fabrique de l’Histoire (9 septembre 2011) :

Emissions de radio

Sur Grenoble

Cas libre: émission de radio libre antenne au ton doux et très accessible sur les questions des corps, des amours, des sexualités « sans tabou ni jugement ». En direct tous les jeudis, de 20h à 21h sur Radio Kaléidoscope 97 FM (Grenoble) et téléchargeable sur Internet.

Dégenrée : émission de radio au ton plus raide, revendiquée « meufs-gouines-trans », bourrée d’infos mais au style parfois rédhibitoire. De 18h30 à 20h les 2ème et 4ème mercredis du mois (rediffusion les lundis suivants à 19h) sur Radio Kaléidoscope 97 FM (Grenoble). On pourra écouter ou télécharger d’anciennes émissions en ligne. Contact :  degenree[AT]pimienta[POINT]orgission féministe les deuxième et quatr

Sur Paris

Femmes libres : émission créée en 1986 et emmenée par Nelly sur Radio libertaire  le mercredi, de 18 h 30 à 20 h 30. Ton doux. Podcastable.

Sur Marseille

Le complot des cagoles : émission tous les 1ers mercredis du mois sur la radio militante marseillaise Radio Galère (88.4 FM) portée par le Collectif des Pétroleuses.

Sites internet

– Sexisme, féminisme – Les Renseignements généreux

– Genre et pédagogie – Télédebout

– Sexisme – Vie de meuf

– Féminisme, sexisme – Osez le féminisme

Femmes et mathématiques

– Histoire – Mnémosyne (pour le développement de l’histoire des femmes et du genre)

– Hystoire – SIEFAR (Société étudiant les femmes, du Moyen Age à la Révolution française)

Associations et collectifs d’éducation populaire sur le genre

Sur Grenoble

Virus 36 : développe des outils de pédagogie active pour « construire du collectif ». Virus36 accompagne des associations aussi bien dans leur structuration interne (fonctionnement, réunions, prise de décision…) que dans l’organisation d’évènement publics (débats, forums, diagnostics…).Contact

Sur Montpellier

Les cafés du genre :Françoise Mariotti anime depuis 6 ans des rencontres/débats mixtes sur le thème du genre. Elles ont lieu les 2ème Mardis de chaque mois, au Martin’s club – 8 rue de la monnaie – de 18h30 à 20h.
Entrée : 2euros + consommation.

Sur Reims

Les Désobéissantes : cette association féministe propose une lettre d’information gratuite sur les études sur le genre, l’égalité femmes/hommes, les personnes LGBT (Lesbienne-Gay-Bi-Trans) et la laïcité. Elle organise aussi des conférences-débats, ateliers, projections, etc. 

Le CorteX est également disponible pour monter des ateliers de sensibilisation ou de formation continue, en particulier à Grenoble, Montpellier et Marseille.

Si une information n’était plus valable ou si vous connaissez d’autres initiatives, contactez-nous !

Guillemette Reviron (avec quelques morceaux de Richard Monvoisin)

NB – Pourquoi les athlètes de la Grèce antique concouraient-ils nus ?

En relisant cet article, Richard m’a donné une autre raison que celle d’un test de masculinité. Voici notre échange sur le sujet :

RM – Je crois que c’est l’histoire de Kallipateira qui se planque et se travestit pour voir son fils en cachette aux JO (vers – 400 ? A vérifier) ; si ma mémoire est bonne, on faisait défiler et courir les athlètes nus plus pour virer les femmes des stades que pour estampiller les garçons.

GR – Bien vu, la raison invoquée n’est pas la bonne, mais vérification faite, ce n’est pas non plus à cause de l’histoire de Kallipateira, qui a plutôt eu pour conséquence la vérification du sexe des entraîneurs, puisque Kallipateira s’était fait passer pour l’entraîneur de son fils. Pour expliquer la nudité des athlètes, les historiens évoquent plutôt la commodité – pour éviter que les athlètes ne se prennent les pieds dans leur pagne -, un hommage à l’harmonie corporelle ou encore un gage de sincérité – nu, il est plus difficile de tricher (plus de détails ici).

RM – J’ai lu de mon côté que la nudité complète était obligatoire lors des Jeux Panhélléniques, sauf pour les courses de chariot. Je m’en réjouis pour eux 🙂

Associations d’éducation populaire