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TP A décortiquer – Preuve de l'existence de Dieu par les frères Bogdanov
En zététique, un dieu n’est soumis à l’analyse critique que dans la mesure où des « preuves » sont apportées à son existence, ou bien lorsque l’hypothèse « dieu » est utilisée dans une démonstration rationnelle. Entraînons-nous à trouver les erreurs dans l’argumentaire des deux frères. Nous n’avons pas encore fait ce TP. Vous en faites une analyse ? Ecrivez-nous.
Richard Monvoisin
Extrait d’une interview au journal Suisse Le Matin – Les frères Bogdanov: « Dieu est une radiation fossile », par Anne-Catherine Renaud, 5 juin 2010.
Igor : Oui, Dieu existe de manière très évidente. L’image d’un ordre extrêmement précis est associée à la première lumière qui précède le big-bang. L’univers n’est pas né du hasard, mais il a été régi par cet ordre. Les lois, qui ont bien dû être édictées par quelque chose, remontent à plus de 13 milliards d’années; elles correspondent à un scénario qui forme le code cosmologique – c’est-à-dire le code génétique – de l’univers. Celui-ci obéit à des combinaisons de nombres qui ne sont pas là fortuitement. Ils sont le produit d’un réglage si fin, d’une conception et d’une précision si inimaginables qu’ils ne peuvent pas être le fruit du hasard.
Grichka : Nous pensons que l’on peut aller vers Dieu à travers l’astrophysique théorique et la cosmologie. Oui, on peut trouver Dieu grâce à la science! C’est ce que nous développons dans ce livre. Une cause – que nous acceptons d’appeler Dieu – a réglé les vingt premiers paramètres cosmologiques qui sont à l’origine de la création de l’univers. Tout a fait sens à partir de ce moment précis. Igor et moi voulons apporter un message d’espoir à tous ceux qui cherchent
Mais c’est quoi Dieu pour vous : un rayonnement, une force, une intelligence, un être ?
Igor : Il est une intelligence, un esprit. La lumière n’est qu’une trace de sa présence. Pour nous, Dieu correspond à ce qu’a dit Einstein en 1936: «Tous ceux qui sont impliqués dans la science finiront par découvrir qu’un esprit, immensément supérieur à l’homme, se manifeste dans les lois de l’univers.» Dieu est le créateur. C’est une question aux confins de la science et de la foi.
Grichka : Dieu est une information au sens qu’il est immatériel. Il n’est ni énergie, ni être. Il échappe à toute dénomination, Dieu est transcendant. Après avoir expliqué le Big Bang, on se demandait forcément d’où venait cette titanesque explosion. Dans notre bouquin, nous sommes remontés avant le Big Bang, quand la matière et l’énergie n’existaient pas. C’est là que se trouve l’information, tel un code génétique qui contient déjà toutes les données qui régleront l’univers. Comme l’a dit le chercheur Max Planck: «Toute la matière n’existe qu’en vertu d’une force, derrière laquelle nous devons supposer un esprit conscient.» Dieu est prouvé.»
Si l’existence de Dieu est prouvée, qu’en est-il de la foi ?
Grichka : La foi est toujours d’actualité! Nous avons prouvé l’action de Dieu, mais on ne sait pas ce qu’il est exactement. On entrevoit son visage dans le rayonnement premier qu’on appelle fossile, pourtant Dieu reste entièrement inconnu. Igor et moi ne pourrons pas répondre à la question qui est Dieu… On peut juste déceler un fragment de sa pensée à l’origine de l’univers.
Igor : Nous avons simplement voulu dire qu’il est possible d’approcher Dieu par la révélation, mais aussi par la science. Le fait qu’il existe change toute notre vision du monde. C’est apaisant d’un point de vue spirituel et philosophique. Dieu n’est pas un être qui intervient dans nos vies. Il est beaucoup plus vaste! Le miracle est plutôt dans le fait que nous soyons là. C’est à nous ensuite de prendre nos destins en main. Dieu ne nous sert pas, il n’est pas dans la superficialité des choses. Mais s’il existe, cela veut dire que je fais partie d’un tout, que j’appartiens à une réalité plus profonde. Désormais je suis partie prenante de l’univers. Cela m’amène donc à me responsabiliser.
Chaque fois que vous sortez un livre, vous provoquez la polémique. Pourquoi un tel acharnement ?
Igor : Le fait d’affirmer que le mystère de Dieu peut être approché par les voies de la science ne plaît pas aux scientifiques qui sont en majorité laïcs et conservateurs. Nous avons trouvé la main du Créateur avant le Big Bang et eux ne veulent rien avoir à faire avec Dieu.
Grichka : Toute idée nouvelle en sciences provoque des débats violents. Les visions révolutionnaires engendrent des crispations, c’est connu. Même Einstein a dû présenter quatre fois sa thèse pour qu’elle soit acceptée. Mais ce qui nous dessert le plus, c’est que nous sommes des sujets médiatiques. Et des vedettes de télé ne peuvent pas avoir des idées fondamentales sur l’univers. Cela ne passe pas!
«Notre âge réel est de 31 ans!»
Invités de «Sept à huit» sur TF1 dimanche 30 mai, Igor et Grichka Bogdanov ont botté en touche la question relative à leur transformation physique spectaculaire. En revanche, ils nous en parlent.
« Nous ne sommes pas candidats à la chirurgie esthétique, car nous aurions eu trop peur du bistouri ! assure Grichka. Notre physionomie qui évolue fait partie du fameux mystère Bogdanov qui ne doit pas être trop éclairci… Mais vous savez que nous aimons explorer de nouvelles formes techniques, et notre aspect physique fait partie de notre champ d’exploration. La science permet d’agir sur certaines conditions de santé. Nous sommes donc allés aux États-Unis pour suivre un traitement expérimental par petites touches. Tout cela est réalisé avec la collaboration de scientifiques de très haut niveau. Igor et moi sommes des explorateurs, nous ne faisons pas dans le commerce. Selon nous, l’homme n’est fait ni pour vieillir ni pour mourir. Nous sommes à la veille d’une révolution très importante où les progrès génétiques croisés avec les progrès de l’intelligence artificielle vont considérablement augmenter l’espérance de vie. D’ici à 2040, l’homme dépassera les 150 ans. D’ailleurs il a été créé pour grandir en sagesse et non pour tomber dans le naufrage de la vieillesse. Igor et moi avons inventé le concept du cinquième âge qui est celui de la renaissance, alors que le quatrième âge est celui de la déchéance. Notre credo: « Hier vieux à 80 ans, demain jeunes à 120 ans ! » Nous avons suivi aux États-Unis un protocole précis qui a permis de dater notre âge biologique – à l’opposé de l’âge civil lié à la date de naissance – grâce à des marqueurs physiologiques. Or Igor et moi vieillissons plus lentement. Notre âge réel est de 31 ans ! ».
Les médecines non conventionnelles – Des outils pour s'y retrouver, par Richard Monvoisin
Kinésiologie, réflexologie plantaire, acupuncture, chirurgie à mains nues, homéopathie, fleurs de Bach, barrage du feu, détox, cure Breuss, etc. : comment choisir dans un tel panel de pratiques parfois très différentes les unes des autres ? Sur quels critères ? Comment se faire un avis sur l’efficacité de telle ou telle pratique ? Richard Monvoisin, invité dans le cadre des cycles de conférences organisés par la bibliothèque marseillaise l’Alcazar et le CorteX, présente dix outils simples que chacun-e pourra s’approprier pour faire ses choix thérapeutiques en connaissance de cause.
Partie 1/3
Introduction : présentation de la zététique, déclaration de conflit d’intérêt, distinction remport d’adhésion/acte de foi, quatre sens du mot science
1. Le rasoir d’Occam – exemple : les barreurs de feu
2. La réfutabilité de Popper
3. Les maladies spontanément résolutives
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Partie 2/3
4. La différence entre corrélation et causalité (effet cigogne, post hoc) – exemple : la cure Breuss
5. L’effet placebo et l’efficacité propre – exemple : le viagra
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Partie 3/3
6. La flatterie de l’intuition – validation subjective, paradoxe d’Asher
7. L’exotisme
8. L’effet Bof
9. Les prétentions floues – exemple : ADN végétal, fleurs de Bach, la détox du M. Bourdin.
10. La quête du sens
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Voici le matériel vidéo utilisé dans cette présentation :
– Barreurs de feu
– Cure Breuss
Les collègues de Lazarus – Entrevues
Lazarus sait s’entourer. Voici du matériel vidéo fabriqué par ses soins et qui, à l’instar de l’esprit critique, ne s’use que si l’on ne s’en sert pas.
Attention Lazarus, pour l’instant il n’y a pas de femme dans tes copains.
Pour tout savoir sur le projet Lazarus Mirages, cliquer là.
Débat "y a-t-il des limites à la liberté de disposer de son corps ?"
Février 2013, à 24 heures d’intervalle, deux débats critiques sont organisés sur des campus français. Guillemette Reviron s’occupe du campus de Montpellier, Richard Monvoisin de celui de Grenoble, avec une heure chacun-e et un thème commun : y a-t-il des limites à la liberté de disposer de son corps ?
Voici le matériel associé à l’atelier, pour tout enseignant souhaitant refaire le même débat dans sa classe, son amphi ou avec ses collègues.
J’ai organisé une centaine de débats comme celui-ci, mais cette fois, deux jours avant, je n’avais aucun matériel vidéo spécifique, et ma collègue Guillemette m’a donné son pack, un lot de documents. J’ai commencé à le dépouiller, et je me suis rendu compte que ces documents portaient plus sur le transhumanisme que sur la question éthique centrale que je voulais aborder. Consacrant tout ce mois à des Midis Critiques sur les super-héros et la question du transhumanisme, je souhaitais réellement faire un Midi éthique. J’ai donc comme à mon habitude tracé une carte conceptuelle des lieux communs classiques de cette discussion, sur un bout de papier, et…. j’ai décidé de faire ce midi éthique « à l’ancienne », sans informatique, sans document, juste un livre et de la craie.
Le cadre : un amphi avec une cinquantaine d’étudiants, de la L1 au doctorat.
Le livre : celui de Ruwen Ogien, l’influence de l’odeur des croissants chauds sur la bonté humaine, et autres questions de philosophie morale expérimentale (Grasset, 2012). J’ai déjà croisé Monsieur Ogien lors d’un colloque à Grenoble, et je lui avais demandé des pistes pour introduire pédagogiquement les expériences dont il parlait, mais j’avais eu une sorte de fin de non-recevoir. Qu’importe ! Je ferai avec ce que je sais.
La question : le titre exact que j’avais choisi était : Drogues, dopages, gestation pour autrui, cannibalisme… y a-t-il des limites à la liberté de disposer de son corps ?
Déroulé : j’ai procédé en 4 étapes.
1. J’ai défini les deux grands courants éthiques modernes principaux, les éthiques déontologique et conséquentialiste (dont l’utilitarisme est l’une des formes) en lisant les pages 26 et 27 du livre (lien).
2. J’ai ensuite expliqué que j’avais un mal fou à mettre des limites recevables à la liberté de disposer de son corps, et que j’aimerais partager ces doutes avec eux au travers de quelques exemples que voici :
- Tatouage (j’avais pris pour exemple Vladimir Frantz, candidat aux élections présidentielles tchèques, et presqu’entièrement tatoué)
- Piercing
- Stupéfiants
- Dopage (j’avais pour cela repotassé Jean-Noël Missa, auteur de Philosophie du dopage (PUF, 2011), intervenu dans l’émission du 11 octobre 2012 de M. Canto-Sperber sur France Culture http://www.franceculture.fr/emission-questions-d-ethique-quels-problemes-moraux-pose-le-dopage-2012-10-11
- Transidentité
- Transhumanisme
- Avortement : j’ai lu le descriptif des pages 173-174 de Ogien sur « On vous a branché un violoniste dans le dos », tiré d’un cas proposé par Judith Jarvis Thomson, A defense to abortion, Philosophy and public affairs, 1, 1, 1971, pp 47-66.
- Prostitution
- Euthanasie
- Suicide
- Inceste : j’ai lu la description de Ogien p. 101, tirée d’un cas donné par Jonathan Haid, The emotional dog and its rational tail. A social intuitionist approach to moral judgment, Psychological review, 108, 2001, pp. 814-834.
- Pédophilie – ou plutôt « pédocriminalité sexuelle » (je n’ai hélas pas eu le temps d’introduire ce sujet, qui mériterait presque une réflexion en soi à part entière)
- Cannibalisme : j’ai narré les cas d’Issei Sagawa, célèbre pour avoir tué et en partie mangé une étudiante néerlandaise à Paris en juin 1981 et de Rudy Eugene dit « le Zombie de Miami », pour évincer le cannibalisme criminel, qui ne fait bien entendu pas l’objet de discussion – l’une des personnes (la « mangée ») n’étant pas consentante. Reste toutefois les cas « consentants », comme l’affaire Armin Meiwes en 2001: Meiwes publia plusieurs annonces sur le Net dans lesquelles il déclarait rechercher un homme voulant être mangé. Parmi les répondants, un certain Bernd Jürgen Armando Brandes, un ingénieur berlinois de 43 ans, accepte d’abord d’un commun accord de se laisser sectionner le pénis et de le cuisiner puis de le manger ensemble (scène qui dura 9 heures et fut filmée), puis donne son consentement pour mourir et être mangé. Meiwes tua donc Brandes au couteau, l’éviscéra et congela environ 30kg de viande.
3. J’ai opté dès le 4ème item (les drogues) pour un débat mouvant entre abolitionnistes et liberté totale. Bien sûr, il a fallu créer un case spéciale pour les non-abolitionnistes défenseurs d’une limite, ce qui fit un débat à trois bandes.
Conclusion
Le débat fut très riche, et me réserva quelques surprises. Première surprise, les limitations concernant les tatouages ont très vite concerné le message tatoué : les limitations devinrent des limitations de liberté d’expression – pas d’encouragement au meurtre, au racisme, au suicide, etc.
Deuxième surprise : certains sujets sont des « attracteurs étranges », et prirent une grande place dans le débat. Les drogues par exemple, posèrent le problème de l’addiction, plus ou moins consentie – ce qui fut l’occasion de nuancer un peu avec l’ASUD, association d’usagers de drogues qui revendique le droit de se droguer heureux. Ces points focaux de la discussion ne me permirent pas en 1h20 d’aborder sereinement le dopage, le transsexualisme et le transhumanisme (qui faisait en parallèle l’objet d’autres débats que je menais, donc mon public n’était pas naïf sur ces questions).
J’ai également évincé la pédocriminalité sexuelle, qui mériterait pourtant un long développement : quelles sont les justifications des limites d’âge posées par la loi pour avoir le droit d’avoir des relations sexuelles avec quelqu’un de majeur ? Il ne s’agit bien sûr pas de cautionner quoi que ce soit, mais de regarder froidement l’immense continuum entre une « pédophilie » sur enfants en bas âge, non consentants ou non comprenants, et une pédophilie prenant la forme d’une relation « saine » et consentie, mais dont l’une des personnes est sous une certaine limite d’âge. Se pose, comme à chaque fois, la question du consentement, ce que l’âge ne garantit pas – pensons à une personne majeure mais mentalement handicapée.
J’ai reçu par la suite quelques messages de discussion : un premier qui disait que ce type de débat était dangereux car il dissipait des limites difficiles à acquérir pour de jeunes adultes. D’autres (2) qui disaient au contraire que cela avait fendillé leur assurance dans certaines positions – notamment sur le suicide et la difficulté même morale d’empêcher quelqu’un de se suicider s’il le souhaite vraiment.
C’est un type de débat assez remuant et méritant toutes les nuances possibles et une grille rationnelle sur les limites morales. Il faut rappeler plusieurs fois qu’il ne s’agit en rien de légitimer des actes, notamment les actes non consentants, mais de questionner certains de nos présupposés moraux : toute la nuance doit être appuyée lors des questions de suicide, d’inceste, et éventuellement de pédophilie, afin qu’un-e étudiant-e ayant traversé un drame de ce genre puisse rester dans le débat. J’encourage également à préciser d’emblée que la prise de parole se fait en levant la main (pour éviter lorsque les débats s’échauffent, que les gens se coupent la parole), et que l’animateur se rangera toujours du côté des minoritaires à chaque phase de discussion, de manière à ne pas laisser une personne isolée se sentir ridicule. Ce dernier point est assez difficile quand il s’agit de suivre des personnes très déontologistes, qui revendiquent qu’on interdise le tabac, l’alcool et toute substance addictive.
Suite aux questions, j’ai rappelé ma position de départ : j’ai énormément de mal à poser des limites à toutes ces questions, et j’ai peur que ce travail soit impossible sans fragiliser ce qu’est le consentement personnel et la liberté individuelle. Je ne vois qu’un cas, la pédophilie, où je suis prêt à accepter une limite contraignante pour deux personnes amoureuses dont l’une n’est pas majeure sexuelle, si c’est le prix à payer pour protéger le reste d’une population d’enfants qui pourrait être consentante sans pleine connaissance de cause. Et encore, je suis un peu ennuyé, et je préférerais du cas par cas, car la connaissance de cause est multifactorielle.
Avril 2013 Le CorteX dans Le Monde – Les charlatans de la physique quantique
Un petit tour sur le vaste Web convainc vite qu’une théorie scientifique majeure du XXe siècle, la physique quantique, s’épanouit ailleurs que dans les labos de recherche. Médecines ou thérapies alternatives, voyance ou sectes religieuses en raffolent.
Les charlatans de la physique quantique
LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | par David Larousserie
Ce grand foutoir ésotérico-thérapeutico-quantique a agacé Richard Monvoisin, enseignant en épistémologie et didactique des sciences à l’université de Grenoble. Au point de vouloir désintoxiquer le lecteur des fausses idées qui fleurissent sur la mécanique quantique, répandues par souci commercial par quelques gourous. Fidèle à la ligne de la maison d’édition Book-e-book, spécialisée en zététique, la discipline qui enseigne l’art du doute et développe l’esprit critique, l’auteur en profite aussi pour expliquer ce que dit ou ne dit pas cette fameuse mécanique quantique. Car son côté bizarre (mais qui marche, dans les transistors, les disques durs ou les lasers…) prête le flanc à moult récupérations.
L’équivalence masse-énergie sert à justifier que l’énergie du corps peut réparer ou créer de nouvelles cellules de notre organisme. La dualité onde-particule se confond avec le duo corps-esprit. Le fameux principe d’incertitude d’Heisenberg ouvre grandes les portes d’une incertitude générale de la connaissance, que d’autres notions, mystérieuses, pourraient combler. Le chat de Schrödinger, « mort et vivant », est utilisé comme preuve que la conscience peut tout. Bref, avec des mots nouveaux et des concepts scientifiques subtils, il est facile d’impressionner le chaland.
A qui la faute ?
Avec humour et pédagogie, l’auteur démonte toutes ces constructions et surinterprétations. À l’aide d’un phare, il réalise un dispositif permettant de filer plus vite que la lumière. Avec un cylindre, vu selon l’angle tantôt comme un cercle ou comme un rectangle, il crée une dualité qui, certes, n’a rien de quantique, mais qui correspond à la version faussée de quelque charlatan. Des démonstrations sans appel.
Une dernière partie, provocatrice, pose une question dérangeante : à qui la faute ? Certes, les gourous eux-mêmes peuvent séduire et tromper sciemment. Mais la faute repose aussi, selon l’auteur, sur un acteur inattendu, la vulgarisation scientifique. Autrement dit, les rois du genre que sont les mensuels Science & Vie et Sciences et avenir auraient une part de responsabilité dans ces distorsions quantiques. En jouant avec les concepts pour séduire les lecteurs, ils créeraient plus de confusion que d’information. Et planteraient des graines qui germeront en crédulité… Malheureusement, cette audacieuse et très critiquable hypothèse n’est que trop peu développée. Pour en savoir plus, le lecteur curieux devra se référer à la thèse de Richard Monvoisin, soutenue en octobre 2007, Pour une didactique de l’esprit critique (accessible sur www.cortecs.org/bibliotex).
Dans la même collection, signalons aussi la parution d’Esprit critique es-tu là ? 30 activités zététiques pour aiguiser son esprit critique. Riche et amusant.
Quantox, par Richard Monvoisin (Book-e-book, 60 p., 11 €).
Novembre 2011 Le CorteX dans la revue S!lence – Efficacité thérapeutique, quelques notions de base
J’ai écrit cet hiver un article pour la revue alternative S!lence n°399 de novembre 2011. La demande qui m’était faite était celle-ci : instiller un regard critique politique global sur la question des alternatives de santé que défend couramment la ligne éditoriale de la revue. Rêvant moi aussi d’alternatives, en particulier en matière de santé, je me suis posé la question : les médecines dites alternatives sont-elles de réelles alternatives politiques, économiques et sanitaires ?
Il n’est pas impossible que mon article soit un peu… disons… dépareillé des autres dans la revue.
J’ai donc écrit cet article, intitulé Efficacité thérapeutique – Quelques notions de base.
Il est perdu au milieu d’autres dont je ne connais pas du tout la teneur, dans une revue qui existe depuis 1982 et se veut « un lien entre toutes celles et ceux qui pensent qu’aujourd’hui il est possible de vivre autrement sans accepter ce que les médias et le pouvoir nous présentent comme une fatalité« . Programme sceptique en soi, auquel je souscris, mais que je sais drainer derrière lui telle une traîne de mariée un certain nombre de mysticismes, de pseudosciences et de naturalisme ni progressistes, ni libérateurs (1).
Je ne sais pas exactement comment l’article est illustré, et j’espère que je n’aurai pas de mauvaise surprise (la rédaction ne m’ayant pas envoyé la maquette). Je suis inquiet en voyant la couverture, qui est un « faux dilemme sémiotique » magistral : médicaments contre fruits et légumes. Moi qui pense que l’industrie pharmaceutique est un scandale, mais que la « nature » n’est pas bonne en soi ; moi qui pense que les médicaments sont une chose utile qui devraient être du bien public, et qui regarde de près les publications douteuses sur les bienfaits de telle ou telle essence, telle ou telle graine ; moi qui ne sais plus s’il doit plus détester l’autoritarisme des médecins ou les escroqueries mentales de certaines médecins « alternatifs », je me demande bien quel genre de courrier je vais recevoir.
A votre santé ?
La mouvance écologiste dont Silence fait partie promeut les médecines naturelles comme alternative aux médecines de synthèse « classiques ». Ce dossier veut interroger également le pouvoir de la médecine dans son ensemble et le rôle que jouent les médecins dans nos vies. Peut-on se soigner sans médecins ?
Également dans ce numéro : Les nouveaux apports sur l’implication française dans le génocide des Tutsi rwandais présentés par Survie – Le Galoupio – Les Ekovores – Le cirque comme pratique féministe – Fukushima : un an après le début de la catastrophe – Féminisme : y a-t-il de l’eau dans l’évier ? – L’arme « politique » nucléaire ; etc.
Avec : Jean-Pierre Lepri, Elise Aracil, Nadia Donati, Dominique Lalanne, Francis Vergier, Léo Sauvage, Marie-Pierre Najman, Mélité, Serge Mongeau, Richard Monvoisin, Anne Trottmann, Uto, Women’s Circus, Michel Bernard, Guillaume Gamblin…
Sommaire
- Maladies : des enjeux politiques ? (de Nadia Donati)
- Les médecines contre la santé ? (de Serge Mongeau)
- La dégradation de notre environnement met en péril notre santé (Dominique Belpomme, vue par Anne Trottmann)
- Efficacité thérapeutique – Quelques notions de base (de Richard Monvoisin)
- Ordonnance pour la santé au naturel (de Jean-Pierre Lepri)
- Pourquoi la maladie ? (de Jean-Pierre Lepri)
- Comment la santé devient un facteur pathogène… (de Marie-Pierre Najman)
On trouvera les 4 premières pages de la revue ici.
Je tiens à mettre au plus vite mon article entier à disposition de tout le monde. Toutefois, sachant la vie dure des revues de ce type, j’attendrai que celles et ceux qui ont 4,60 euros puissent les dépenser. Les plus pauvres d’entre nous attendront bien deux ou trois semaines, ou fréquenteront librairies alternatives ou bibliothèques publiques.
Pour toute remarque, écrivez-moi ! Monvoisin@cortecs.org
Richard Monvoisin
(1) sur la question du naturalisme, on pourra se faire plaisir en lisant ce cours de Guillemette Reviron.
Ouverture d'un Master 2 Histoire, philosophie, sociologie des sciences
Un master 2 Histoire, philosophie, sociologie des sciences se crée vraisemblablement pour la rentrée 2012-2013 sur le campus grenoblois ! C’est une belle gageure, une vraie nécessité. En toute théorie, ce master sera transdisciplinaire et recouvrira les différentes universités de Grenoble. Il n’est pas impossible qu’à terme on y retrouve quelques morceaux de corteX dedans… En attendant, voici l’affiche et le programme ci-dessous.
Les U.E. suivantes peuvent être suivies indépendamment les unes des autres dans le cadre des accords entre l’UPMF et l’UJF sur les C.U.
Elles peuvent aussi être suivies toutes ensemble dans le cadre du parcours de master « Histoire, Philosophie, Sociologie des Sciences » du master 2 de philosophie. Pour s’inscrire à ce master, contacter Annick.Pardon@upmf-grenoble.fr et Sophie.Roux@upmf-grenoble.fr
PREMIER SEMESTRE
UE 13 SOCIOLOGIE DES SCIENCES – DÉBATS ET CONTROVERSES SCIENTIFIQUES
Dominique Raynaud
Jeudi, de 17.00 à 20.00, du 06 octobre au 1er décembre. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en décembre. En tout 24 heures.
Programme
Les controverses scientifiques sont un sujet privilégié de la nouvelle sociologie des sciences. Elles attestent d’une dimension conflictuelle de l’activité scientifique souvent méconnue, sinon délibérément occultée. Doit-on, sur cette base, souscrire à l’idée que la science est avant tout mue par des intérêts et que les théories considérées comme valides ne le sont que parce qu’elles bénéficient d’un consensus ? Le cours examinera cette question à partir d’études de cas, comme la controverse entre Pasteur et Pouchet sur les générations spontanées. On se propose d’interroger la part qui revient à la rationalité, aux conventions et aux croyances collectives dans la construction des connaissances scientifiques.
Connaissances acquises : Connaître la littérature de base et les principales approches des controverses scientifiques.
Compétences acquises : Savoir distinguer des faits apparentés (désaccords, controverses, polémiques, querelles de priorité ; controverses scientifiques ou controverses dans l’opinion publique à propos des sciences, etc.)
Bibliographie
Berthelot, J.-M. (2008). L’Emprise du vrai. Connaissance scientifique et modernité. Paris, PUF.
Bloor, D. (1983). Sociologie de la logique ou les limites de l’épistémologie. Paris: Pandore [1976]Bloor, D. (1983). Sociologie de la logique ou les limites de l’épistémologie. Paris:
Pandore [1976].
Bloor, D. (1983). Sociologie de la logique ou les limites de l’épistémologie. Paris, Pandore.
Boudon, R. et Clavelin, M. éds. (1994). Le relativisme est-il résistible? Paris, PUF.
Bunge, M. (1991-1992). A critical examination of the new sociology of science. Philosophy of the Social Sciences 21, 524-560 & 22, 46-76.
Callon, M. et Latour, B., éds. (1991). La science telle qu’elle se fait. Paris: Éditions La Découverte
Collins, H.M. (1981). Stages in the Empirical Programme of Relativism. Social Studies of Science 11(1), 3-11.
Engelhardt, H.T. et Caplan, A.L. eds. (1987). Scientific controversies. Cambridge, Cambridge University Press.
Latour, B. (1989). « Pasteur et Pouchet », M. Serres, Éléments d’histoire des sciences. Paris, Bordas, 423-445.
Merton, R.K. (1973). The sociology of science. Theoretical and empirical investigations. Edited with an introduction by Norman W. Storer. Chicago / London, The University of Chicago.
Raynaud, D. (2003). Sociologie des controverses scientifiques, Paris, PUF.
Roll-Hansen, N. (1979). Experimental method and spontaneous generation: The controversy between Pasteur and Pouchet. Journal of the History of Medicine and Allied Sciences, 34: 273-292.
Roll-Hansen, N. (1979). Experimental method and spontaneous generation: The controversy between Pasteur and Pouchet. Journal of the History of Medicine and Allied Sciences, 34: 273-292.
Roll-Hansen, N. (1979). Experimental method and spontaneous generation, Journal of the History of Medicine, 34, 273-292.
Schweber, L. (1997). « Controverses et styles de raisonnement », Enquête 5, 83-108.
Schweber, L. (1997). Controverses et styles de raisonnement. Enquête, 5: 83-108.Schweber, L. (1997). Controverses et styles de raisonnement. Enquête, 5: 83-108.
Schweber, L. (1997). Controverses et styles de raisonnement. Enquête, 5: 83-108.
Evaluation : Dossier 50% et oral 50%. Les étudiants remettent en fin de semestre un dossier analysant une controverse scientifique et en font une présentation orale. Les travaux collectifs sont encouragés.
UE 14 : LA PHILOSOPHIE ET LES LANGAGES – HISTOIRE ET THÉORIE DE LA RÉVOLUTION SCIENTIFIQUE
Sophie Roux
Mercredi, de 17.00 à 20.00, du 05 octobre au 30 novembre. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en décembre. En tout 24 heures.
Programme
Depuis les travaux de Thomas Kuhn sur la Révolution scientifique du XVIIe siècle, les changements scientifiques et techniques sont souvent décrits en termes de « révolutions », de « bouleversements radicaux » ou de « changements de paradigme ». Après avoir présenté quelques-uns des faits historiques et des théories philosophiques qui ont déterminé les travaux de Kuhn, on examinera les caractéristiques de sa théorie du changement scientifique, ce qui permettra pour finir de comprendre les critiques qu’historiens, philosophes et sociologues ont faites à cette théorie. Ce cours permettra donc à la fois d’acquérir quelques connaissances sur la période cruciale de l’histoire des sciences Révolution scientifique du XVIIe siècle, de montrer l’apport de différentes disciplines (histoire, philosophie, sociologie) à une même question et d’acquérir une véritable distance critique par rapport aux discours actuels sur telle ou telle révolution que nous serions en train de vivre.
Connaissances acquises : textes canoniques d’une période cruciale de l’histoire des sciences ; conceptualisation de la nouveauté et de l’innovation dans l’histoire ; débats contemporains sur la nature du changement scientifique.
Compétences acquises : Resituer la question générale de la nouveauté et du progrès dans l’histoire des idées ; Analyser un débat historiographique ; Comprendre les enjeux d’une question épistémologique ; Apprendre à envisager une même question dans la perspective de différentes disciplines (histoire, philosophie, sociologie) ; Être capable d’analyser avec une distance critique les discours actuels sur les « changements de paradigme », les « révolutions scientifiques », « l’incommensurabilité » et les « bouleversements conceptuels ».
Indications bibliographiques
Pour s’initier à la période considérée, on consultera :
Koestler, A., Les somnambules, tr. fr. G. Fradier, Paris, Calmann-Lévy, 1960.
Mazauric, S., Histoire des sciences à l’époque moderne, Paris, Armand Colin, 2009.
Pour comprendre la philosophie des sciences que critique Kuhn, on lira :
Hempel, C., Éléments d’épistémologie (1966), tr. fr. B. de Saint-Sernin, Paris, Armand Colin, 1972.
Nagel, E., The Structure of Science, Hackett Publ. Compagny, Indianapolis, 1979.
Les principaux ouvrages de Kuhn sont traduits en français :
Kuhn, T., La Révolution copernicienne (1957), tr. fr. A. Hayli, Paris, Fayard, 1973, et Le Livre de Poche, 1992.
Kuhn, T., La structure des révolutions scientifiques (1962, 1970), tr. fr. L. Meyer, Paris, Champs Flammarion, 1983.
Kuhn, T., La tension essentielle (1970), tr. fr. M. Biezunki, Paris, Gallimard, 1990.
Enfin, pour des critiques de Kuhn, on partira de :
Shapere, D., « La structure des révolutions scientifiques » (1964), tr. fr. in P. Jacob éd., De Vienne à Cambridge, Paris, Gallimard, 1980, p. 321-335.
Westman, R. S., « Two Cultures or One ? A Second Look at Kuhn’s The Copernican Revolution », Isis, vol. 85, n°1, 1994, p. 79-115.
Évaluation : Elle consistera ou bien en l’analyse détaillé d’un article ou d’un chapitre d’ouvrage, éventuellement en anglais, proposé par l’enseignante en accord avec les intérêts de l’étudiant et avec le programme du cours, ou bien en un contrôle oral des connaissances en fin de semestre.
UE 15 : PHILOSOPHIE DES SCIENCES -CONCEPTS FONDAMENTAUX DE LA PHILOSOPHIE DES SCIENCES
Michel Dufour
Vendredi, de 14.00 à 17.00, du 07 octobre au 2 décembre. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en décembre. En tout 24 heures.
Programme
L’objectif de ce cours est d’aborder un ensemble de concepts qui ne sont manifestement pas tous spécifiques à la philosophie des sciences mais y tiennent un rôle de premier plan. Certains, par exemple le thème causal ou les questions du réalisme, posent des problèmes qui ne sont pas permanents mais reviennent épisodiquement sous des formes diverses dans les disciplines scientifiques spécialisées. Notre point de départ sera la notion même de science et la question de sa définition. C’est à partir d’elle que nous aborderons ensuite celles de cause, justification, loi, réalité, progrès. Notre trajectoire aura un fond historique qui est surtout un prétexte pour (re)faire connaissance avec quelques auteurs classiques et aborder la question de la durée de vie d’un concept. Le style d’ensemble du cours est donc plutôt philosophique et le parcours aboutira aux dernières séances dont les thèmes pourront répondre à une éventuelle demande des participants.
Connaissances acquises : analyses philosophiques contemporaines des notions de cause, de loi, de progrès, de réalité, de justification, d’expérience.
Compétences acquises : pour les étudiants venant des filières scientifiques, faire un retour critique sur les connaissances acquises lors de leur formation ; pour les étudiants venant d’autres filières, apprendre à connaître non seulement des notions philosophiques, mais des résultats scientifiques et les démarches qui ont permis de les atteindre.
Indications bibliographiques
(Les textes ou ouvrages classiques, souvent réédités et/ou retraduits sont indiqués ici sans référence précise à une édition. On peut considérer que n’importe quelle édition fait l’affaire, quitte à les comparer.)
Platon, Théétète
Aristote, Physique
Descartes, Les Principes de la Philosophie. 1644.
Hume, Enquête sur l’entendement humain, 1748.
Peirce Ch, « Les Lois de la Nature » trad. de « Laws of Nature » (1901) que l’on retrouve dans The Essential Peirce (Vol 2), Bloomington and Indianapolis, Indiana University Press, 1998
Popper K, « Trois conceptions de la connaissance », Conjectures et réfutations, Paris, Payot, 1985, trad. de Conjectures and Refutations, Londres, Routledge, 1963
Laudan L, “Progress and Cumulativity”, in Science and Relativism, Chicago, The University of Chicago Press, 1990
Kitcher P, Science Vérité et Démocratie, Paris, P.U.F, 2010, trad. de Science Truth and Democracy, Oxford, Oxford University Press, 2001.
Évaluation : Assiduité et participation (éventuellement à l’occasion d’un exposé oral, typique 30mn) : 40 % ;
Travail écrit sur un thème convenu avec l’enseignant (2800 mots ± 10% si pas d’exposé oral, 4500 mots ± 10% si exposé oral)) : 60%.
UE 16 : HISTOIRE DES SCIENCES -UNE HISTOIRE DES SYSTÈMES DU MONDE
Hugues Chabot
Mardi, de 14.00 à 17.00, du 04 octobre au 29 novembre. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en décembre. En tout 24 heures.
Programme
Il s’agira d’analyser des grandes étapes de l’histoire de l’astronomie et de la cosmologie. On examinera comment, avec la mise en mouvement de la Terre, Copernic, Galilée, Descartes, Newton et leurs successeurs ont été conduits à réviser l’ensemble des principes et des méthodes aux fondements des sciences. Les débuts de l’astrophysique et la révolution cosmologique du début du 20e siècle seront aussi abordés.
Connaissances acquises : Fournir aux étudiants une culture commune en histoire et philosophie des sciences. Les sciences ont une histoire, marquée par des changements de théories mais aussi de pratiques. Les sciences telles qu’elles sont enseignées et pratiquées aujourd’hui ne sont jamais qu’un moment de cette histoire. Cet enseignement est destiné aux étudiants qui souhaitent placer dans une perspective historique nos représentations de l’univers. On insistera sur la relation de complémentarité entre l’histoire des sciences et la philosophie des sciences.
Compétences acquises : Donner un recul critique par rapport aux connaissances scientifiques actuelles ; Développer la compréhension de l’argumentation scientifique et de ses conditions d’exercice.
Indications bibliographiques
Françoise Balibar, Galilée, Newton lus par Einstein, Paris, PUF, Collection « Philosophie », 1984.
Jacques Gapaillard, Et pourtant elle tourne ! Le mouvement de la Terre, Paris, Seuil, Collection « Science ouverte », 1993.
Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, Paris, Gallimard, Collection « Idées », 1973.
Jacques Merleau-Ponty, Cosmologie du XXème siècle, Étude épistémologique et historique des théories de la cosmologie contemporaine, Paris, nrf Gallimard, Collection « Bibliothèque des idées », 1965.
Marie-Antoinette Tonnelat, Histoire du principe de relativité, Flammarion, 1973.
Jean-Pierre Verdet, Une histoire de l’astronomie, Paris, Seuil, Collection « Points sciences », 1990.
Jean-Pierre Verdet (dir.), Astronomie et astrophysique, Paris, Larousse, Collection « Textes essentiels », 1993.
SECOND SEMESTRE
UE 19 : PHILOSOPHIE DE LA TECHNIQUE -LES TECHNIQUES ET LEURS REPRÉSENTATIONS
Jean-Yves Goffi
Mardi, de 17.00 à 20.00, du 31 janvier au 27 mars. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en avril. En tout 24 heures.
Programme
On se propose de mettre en évidence les arguments et les thèses de ceux qui développent une critique radicale des technologies de l’hypermodernité, ainsi que de ceux qui, au contraire, se font les apologistes inconditionnels de celles-ci. Pour ce faire on partira d’une interrogation sur les rapports entre le naturel et l’artificiel : identité, prolongement ou rupture ? Cette question classique en philosophie a été reformulée, au XIXe et au XXe siècle, par l’adjonction d’autres d’éléments et a pris la forme suivante : le développement de la technique se comprend-il comme un progrès dont la marche peut être infléchie ? Ou bien prend-il la forme d’une évolution sur laquelle les êtres humains n’ont, au total, que peu de prise ? Dans ces conditions, les néo-luddistes qui critiquent les technologies le font, le plus souvent, au nom d’une contestation radicale de l’irrationalité des société industrielles et de l’illusion de maîtrise qu’elles entretiennent. Leurs adversaires transhumanistes, qui pensent qu’il est possible d’accéder à une condition dans laquelle l’humanité ira au-delà de ses limitations biologiques actuelles, par une prise en main volontariste de l’évolution sont les héritiers d’une conception du progrès dont les présupposés méritent, pour le moins, d’être examinés.
Connaissances acquises : systèmes des pensées classiques de la technique (Aristote, Bacon, Descartes, Bergson) — Connaissance des arguments et des thèses des apologistes et des contestataires contemporains des techniques.
Compétences acquises : Développement de l’esprit critique à l’endroit des idéologies technophiles et technophobes.
Bibliographie indicative
DUSEK V., Philosophy of Technology. An Introduction, Malden & Oxford, Blackwell, 2006.
ELLUL J., La Technique ou l’enjeu du siècle, Paris, Economica, 1990.
ELSTER J., Explaining Technical Change, Cambridge, C.U. P., 1983.
HEUDIN J.-C., Les Créatures artificielles. Des Automates aux mondes virtuels, Paris, Odile Jacob, 2008.
GOFFI J.-Y., La Philosophie de la technique, Paris, PUF, 1996.
LEBEAU A., L’Engrenage de la technique. Essai sur une menace planétaire, Paris, Gallimard, 2005.
NOBLE D., The Religion of Technology. The Divinity of Man and the Spirit of Invention, Londres, Penguin Books, 1997.
RAPP F. (ed), Technik und Philosophie, Düsseldorf, VDI-Verlag, 1990.
UE 21A : PHILOSOPHIE DE LA PHYSIQUE – LEÇONS SUR L’EXPÉRIENCE
Sophie Roux
Mercredi, de 17.00 à 19.00, du 31 janvier au 2 mai, en alternance avec l’UE 21B. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en avril. En tout 12 heures.
Programme
Il s’agit d’examiner successivement trois questions classiques en philosophie de la physique qui ont partie liée avec l’expérience, prise dans ses relations avec les sciences qu’on dit, précisément, expérimentales : 1) Que veut-on dire exactement lorsqu’on dit qu’un résultat est « justifié » ou « fondé » par une expérience ? 2) Qu’est-ce qu’une expérience cruciale, les expériences cruciales existent-elles, et sont-elles même seulement possibles ? 3) Qu’entend-on par « expérience de pensée », d’où vient l’élaboration historique de cette notion et quelles sont les débats contemporains qu’elle a suscités ?
Connaissances acquises : Prendre connaissances, par le biais d’une série de questions liées à l’expérience, de certains débats encore vifs dans la philosophie de la physique du xxe siècle.
Compétences acquises : Analyser des articles de philosophie de la physique récents ;appréhender le style de la philosophie analytique ; Comprendre les enjeux d’une question épistémologique.
Indications bibliographiques (un ouvrage par question)
1) Barberousse, A., M. Kistler, et P. Ludwig, La philosophie des sciences au xxesiècle, Paris, Flammarion, 2002.
2) Duhem, P., La théorie physique (1914), rééd. Vrin, Paris, 1981.
3) Horowitz, T. et G. J. Massey éd., Thought Experiments in Science and Philosophy, Savage, MD, 1991.
Évaluation : Elle consistera ou bien en l’analyse détaillé d’un article ou d’un chapitre d’ouvrage, éventuellement en anglais, proposé par l’enseignante en accord avec les intérêts de l’étudiant et avec le programme du cours, ou bien en un contrôle oral des connaissances en fin de semestre.
UE 21B : EPISTÉMOLOGIE DES SCIENCES SOCIALES – LES SCIENCES SOCIALES SONT-ELLES DES SCIENCES COMME LES AUTRES ?
Dominique Raynaud
Mercredi, de 17.00 à 19.00, du 31 janvier au 2 mai, en alternance avec l’UE 21B. En cas d’absence de l’enseignant, des séances supplémentaires pourront avoir lieu en avril. En tout 12 heures.
Programme
Beaucoup d’épistémologies natives, plus ou moins inscrites dans le sillage du Conflit des méthodes, ont cherché à définir une épistémologie propre aux sciences sociales qui mettrait en avant l’un ou l’autre des critères suivants : réalisme des théories, multiplicité des paradigmes, concepts et programmes spécifiques, historicité des faits sociaux, absence de lois ou impossibilité du raisonnement expérimental. On se propose d’examiner ces thèses, tantôt dualistes, tantôt régionalistes, au moyen d’une épistémologie comparée des sciences sociales et des sciences naturelles.
Connaissances acquises : Connaître les principaux auteurs et les principaux courants de l’épistémologie des sciences sociales.
Compétences acquises : Être en mesure de porter un regard critique sur des poncifs appuyés par une littérature abondante et consensuelle.
Bibliographie
Adorno, T.W., Popper, K. R. et al. (1979). De Vienne à Francfort. La querelle allemande des sciences sociales. Bruxelles, Éditions Complexe.
Apel, K.O., La Controverse expliquer-comprendre. Paris, Cerf, 2000.
Berthelot, J.-M. (1990). L’Intelligence du social. Paris, PUF.
Berthelot, J.-M. (2003). « Plaidoyer pour un pluralisme sous contraintes », Revue européenne des Sciences sociales 126, 35-49.
Bunge, M. (1983). Épistémologie. Paris, Maloine.
Cuin, C.-H. (2000). Ce que (ne) font (pas) les sociologues. Genève/Paris, Droz.
Granger, G.-G. (1960). Pensée formelle et sciences de l’homme. Paris, Aubier-Montaigne.
Granger, G.-G. (1980). « Sur l’unité de la science », Fundamenta Scientiae 1, 199-214. Repris dans Philosophie, Langage, Science. Les Ulis, EDP Sciences, 2003, 207-227.
Martin, T. ed. (2011). Les Sciences humaines sont-elles des sciences? Paris, Vuibert.
McIntyre, L.C. (1996). Laws and Explanation in the Social Sciences. Boulder, Westview Press.
Passeron, J.-C. (1991). Le Raisonnement sociologique. Paris, Nathan.
Popper, K.R. (1988). Misère de l’historicisme. Paris, Plon/Pocket.
Raynaud, D. (2006). La Sociologie et sa vocation scientifique. Paris, Hermann.
Testart, A. (1991). Pour les sciences sociales. Essai d’épistémologie. Paris, Bourgois.
Evaluation : Dossier 100%. Les étudiants remettent en fin de semestre une analyse critique de cinq pages sur l’un des textes de référence distribué en cours.
TP Le Monde : "Le régime Dukan est une imposture"
Il n’arrive pas souvent qu’un article du Monde déroule une démarche critique de manière simple. C’est pourtant le cas dans l’article « Le régime Dukan est une imposture !« du 11 janvier 2012 (ici, et reproduit ci-dessous), rédigé par le Groupe de Réflexion sur l’Obésité et le Surpoids (GROS) .
Vous penserez probablement comme nous qu’à l’image de la cavalerie dans Lucky Luke, cela arrive un peu tard, et qu’il aurait fallu délivrer ces informations déjà connues depuis au moins un an (cf. rapport de l’Anses Novembre 2010) pour éviter, à défaut de perte de poids, des pertes de temps et d’argent. Toutefois cet article est bien construit, et c’est l’occasion non seulement de donner des noms aux arguments critiques abordés, mais aussi en seconde partie d’article de renvoyer au Manifeste des révoltés des régimes (révolté-es, comme un certain nombre de féministes et d’antisexistes, luttent entre autres contre le diktat des normes de minceur).
, 11 janvier 2012
Le docteur Pierre Dukan, fort de ses best-sellers, considère que le niveau de ses ventes tient lieu de preuve scientifique de l’efficacité et de l’innocuité de ses méthodes amaigrissantes.
Prendre le nombre d’exemplaires vendus comme preuve scientifique est une variante de l’effet Panurge (voir ici Principe de la preuve sociale, effet Panurge ou argumentum ad populum).
Considérer que le niveau de ses ventes implique l’innocuité de sa méthode (sous-entendu « si c’était dangereux ou néfaste, ça se saurait, vu le nombre de gens qui s’en sont servi« ) s’appelle le sophisme du pragmatisme.
Aussi enjoint-il, dans une vaste campagne en direction des médecins, de prescrire à tout-va le « régime Dukan ».
Les études scientifiques démontrant l’inefficacité sur le moyen et le long terme des diètes protéinées ? Les études montrant les effets délétères des régimes amaigrissants, qui engendrent ou aggravent les troubles du comportement alimentaire, qui entraînent dépression et perte de l’estime de soi ? Le rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de 2010, qui fait une synthèse de l’état des connaissances en ce qui concerne l’efficacité et la dangerosité des régimes amaigrissants ? Ce ne sont là que les avis d’esprits chagrins, qui n’auraient rien compris au « régime Dukan ».
Si vous adhérez au régime Dukan, c’est que le régime est valide.
Accessoirement, le rapport de l’ANSES (Agence Nationale de SEcurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, ex-AFSSA) sur les régimes est ici (rapport).
Silence assourdissant
La méthode Dukan est assurément un succès. Un succès sur le plan des ventes de livres, un succès médiatique. Mais cela ne nous paraît pas suffire pour la valider scientifiquement et permettre à son auteur de recruter des adeptes au sein du monde médical.
Voir à nouveau Principe de la preuve sociale, effet Panurge ou argumentum ad populum
Soulignons au passage que le terme « adepte » n’est peut-être pas adéquat ici, et que les auteurs prêtent une intention à Pierre Dukan qu’il faut démontrer.
Il nous semble donc que c’est peu demander d’exiger des autorités médicales qu’elles ne cautionnent pas de telles méthodes.
Le CorteX souscrit à ce point.
Or, leur silence assourdissant ne constitue-t-il pas une forme d’approbation ?
Cette formulation laisse entendre : qui ne dit mot consent. Même si c’est probable dans le cas présent, il peut y avoir d’autres raisons pour « ne dire mot ». Être muet par exemple !
Plus sérieusement, le silence des autorités médicales peut être dû a) à un manque de coordination b) à un conflit d’intérêt c) à des études encore en cours d)… etc. Le petit biais dans lequel tombe l’article est le faux dilemme.
Le problème, avec les régimes amaigrissants, se situe dans l’hiatus entre les résultats à court terme et ceux à moyen et à long terme. Une perte de poids rapide ne signifie pas que la méthode soit recommandable aux personnes en difficulté avec leur poids et leur comportement alimentaire. Car, en tant que médecins, ce qui doit nous préoccuper au premier chef, c’est l’évolution du poids et sa stabilité sur le long terme.
Si l’objectif est de maigrir vite, et non durablement, dans ce cas il n’y a pas grand chose à dire, le régime Dukan tient sa promesse.
Si l’objectif est de maigrir durablement (ce que prétend le site officiel de Dukan), alors prendre ce qu’offre le court terme pour une preuve sur le long terme st une variante de l’effet cigogne appelée Effet Atchoum, ou Post Hoc ergo propter hoc .
Les connaissances en matière de génétique et d’épigénétique de l’obésité, de régulation de la masse grasse et de contrôle du comportement alimentaire ont considérablement avancé ces dernières décennies. On sait que les mécanismes neurophysiologiques de contrôle de la prise alimentaire sont ainsi faits que les pertes de poids brutales sont ensuite compensées par des frénésies alimentaires, des boulimies, incontrôlables dans l’immense majorité de cas, et qui conduisent à reprendre le poids perdu, souvent avec un supplément.
L’obésité est plus que jamais assimilée à la laideur et à une carence de la volonté.
Transformer un phénomène social multifactoriel en un problème personnel ou catégoriel s’appelle l’essentialisme (on trouvera parfois naturalisme). On retrouve l’association avec le manque de volonté également à propos des alcooliques et des toxicomanes, mais aussi des « pauvres ». Cela sous-entend que celles et ceux non atteints par le phénomène le doivent, elles/eux, à leur volonté, ce qui est une manière de rehausser son image personnelle, par opposition aux autres.
Ceux qui sont gros le sont par leur faute et deviennent de mauvais citoyens, des délinquants alimentaires et des laissés-pour-compte. Ajoutons à cela la nécessité impérative d’apparaître belle, beau, jeune, tout de suite, la préférence donnée au court terme, et nous obtenons le franc succès de la méthode Dukan.
En tant que médecins et professionnels de santé, nous demandons que le corps médical, par l’intermédiaire des instances qui le représentent, prenne une position claire face aux bonimenteurs. Car qui ne dit mot consent.
A titre d’anecdote pouvant servir de base à un débat avec des élèves ou du public : Pierre Dukan a sorti début janvier 2012 un livre Lettre ouverte au futur président de la République, dans lequel il expose une série de mesures permettant, selon lui, d’éradiquer le surpoids en France. On nous rapporte que parmi ses principales propositions, l’une d’entre elle est la suivante : Dukan propose tout simplement de prendre la « maîtrise » de son indice de masse corporelle comme discipline au baccalauréat.
« Mettre en place une option ‘poids d’équilibre’ au baccalauréat rapportant des points d’option pour ceux qui arrivent à garder un indice de masse corporelle compris entre 18 et 25 entre la seconde et la terminale serait un bon moyen de sensibiliser les ados à l’équilibre alimentaire ».
Une réaction à ce sujet de Bernard Bernard Waysfeld, endocrino-nutritionniste et président du GROS, datée du 9 janvier 2012, est disponible dans le Magazine de la Santé de France 5, vers la minute 17.
Il existe un manifeste des révoltés des régimes, lancé par l’association Allegro Fortissimo, qui lutte contre les discriminations dont sont victimes les personnes de forte corpulence dans la société (problèmes d’accès à l’emploi, au crédit, aux transports, aux soins…). Elle travaille à réconcilier ces personnes avec leur corps et leur image, vis-à-vis d’elles-mêmes, de leur entourage et de la société. Nous reproduisons ici le manifeste pour contester une norme sociale, celle de ma minceur, pseudo-scientifquement correlée à la santé. Il n’est pas nécessaire d’être obèse ou en surpoids pour se sentir concerné-e.
Signer ou soutenir : http://www.allegrofortissimo.com/manifeste.htm
Richard Monvoisin