
Comprendre la science, par Jean Bricmont.
Les trois émissions de radio qui suivent sont des moments magistraux d’épistémologie. Elles ont été enregistrées et mises en ligne par l’Académie royale de Belgique. La diffusion de tels contenus n’étant pas l’apanage d’un droit régalien, nous nous permettons de vous les proposer ici.
« La science a toujours été au centre de débats et elle l’est encore aujourd’hui. Elle a bouleversé notre façon de comprendre l’univers et de nous comprendre nous-mêmes. Néanmoins, dans une bonne partie de la culture intellectuelle, la science est incomprise ou est vue avec suspicion. Elle suscite l’hostilité à la fois de courants religieux « fondamentalistes » et d’une intelligentsia relativiste ou postmoderne.
Le but de ce cours-conférence en trois leçons est de présenter et de défendre ce qu’on pourrait appeler une approche scientifique du monde. Au cours du XXe siècle, toute une série de philosophes, historiens et sociologues ont tenté de caractériser ce qui faisait la particularité de la démarche scientifique, par opposition à celle des religions ou des pseudosciences. Dans la première moitié du siècle, divers penseurs ont cherché à établir une ligne de démarcation entre science et non-science, en s’appuyant principalement, soit sur la notion de confirmation (les positivistes logiques), soit sur celle de falsifiabilité (Popper). À partir des années 1950-60, suite aux travaux de Quine, Kuhn, et Feyerabend, les critères de démarcation mis en avant précédemment ont été progressivement mis en question, pour déboucher parfois sur une vision purement sociologique et relativiste de la distinction entre science et non-science.
Un des objectifs poursuivis sera de distinguer ce qui est valide de ce qui ne l’est pas dans ces critiques « post-positivistes » de l’épistémologie de la première moitié du XXe siècle. Un autre objectif sera proposer une alternative à cette épistémologie ».
- Cours N°1. Les notions de vérité et d’objectivité, le réalisme et l’idéalisme.
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- Cours N°2. Comment déterminer dans les discours des sciences, des pseudo-sciences et des religions, ce qui est vrai ?
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- Cours N°3. Que penser du déterminisme, du réductionnisme, ou du matérialisme ?
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Les références données par Jean sont :
- Susan Haack, Le bras long du sens commun – En guise de théorie de la méthode scientifique (accessible ici)
- Philosophiques, Volume 30, numéro 2, automne 2003, p. 295-320
- Kuhn édenté : incommensurabilité et choix entre théories (accessible ici)
- Tim Maudlin, Revue Philosophique de Louvain, 1996, volume 94, Numéro 94-3 pp. 428-446
Richard Monvoisin

« En soutien à votre action contre le méusage de la science, je voudrais attirer votre attention sur un article de la revue Science et Vie N°1127 d’aout 2011, page 130.



On ne s’attardera pas sur les créationnismes « négationniste » et « mimétique ». Ils se fondent sur le récit de la création de l’univers dans les grands textes monothéistes, pris de façon littérale. Les contradictions qui en résultent provoquent une négation des résultats des sciences dans le premier cas, ou bien une « science créationniste » qui établit les prétendues preuves de la vérité littérale du texte dans le second cas. Le premier est notamment représenté par Harun Yahya, pseudonyme de M. Adnan Oktar, homme d’affaires et d’influence turc, qui distribua en janvier 2007 dans toute l’Europe son Atlas de la Création, (auto-édité, Global Publishing) y compris dans les établissements scolaires et laboratoires français. En janvier 2012, via Harun Yahya France, il organisait à Paris, à Rouen et à Évry, une série de conférences : « L’impasse moléculaire de la théorie de l’évolution » « l’effondrement de la théorie de l’évolution »…
Or, les créationnismes et spiritualismes cités ont tous un point commun, leur ignorance, réelle ou feinte, de la nature et du périmètre de légitimité de la démarche et du discours scientifiques : ce que les sciences disent, comment elles le disent, ce qu’elles ne disent pas. Quand l’UIP somme les chercheurs de réfléchir aux « conséquences métaphysiques » de leurs découvertes (Le Monde, 23 février 2006) et affirme qu’« un créateur ne peut être exclu du champ de la science », (Le Monde, 2 septembre 2006), elle « oublie » que le propre des sciences n’est jamais de dire ce qu’il faut « croire », mais de démontrer ce qu’il n’est logiquement plus possible de croire. Mais surtout, elle omet de dire si les scientifiques sont appelés à se prononcer sur ces questions à titre individuel, ou à titre collectif. La confusion entraîne le métier de scientifique d’aujourd’hui au delà de sa légitimité. Il s’agit bien là d’une forme de scientisme déguisé. En organisant la confusion entre la quête spirituelle individuelle et le contrat collectif d’une profession, ces offensives peuvent avoir pour effet, à terme, de faire perdre l’autonomie des scientifiques dans la validation des savoirs. En effet, si la profession se voyait collectivement animée d’un agenda métaphysique, il lui faudrait s’attendre à se voir imposé ce qu’il serait conforme de trouver. L’universalisme des connaissances raisonnées, qui tient aujourd’hui précisément à une abstention métaphysique, ne serait plus possible et l’on assisterait à une communautarisation des savoirs.




= dx/dt, l’« accélération » γ = d²x/dt², la « force » F = mγ sont des concepts analytiques quantitatifs parce qu’ils résultent de la combinaison de grandeurs élémentaires mesurables (dans le cas de la vitesse : une certaine quantité d’espace dx et une certaine quantité de temps dt). Au contraire, les « concepts qualitatifs » ne supposent aucune mesure. C’est le cas des concepts de la topologie, comme ceux de « boule » ou d’« anneau de Möbius » (voir ci-contre, l’anneau de Möbius par le graveur Escher).
résultats assez différents de ceux du sondage américain.Il est possible d’imaginer que nos compatriotes se déclareraient plus volontiers darwiniens que leurs voisins d’outre-Atlantique, pourtant il serait sage de rester sceptique face à ces résultats. En effet, pour prendre ce genre de déclarations au sérieux, il faudrait être assuré que le sens commun conçoit clairement ce qu’être darwinien signifie, ce dont il est permis de douter.