Croyances, connaissances et boule de neige

Quand nous abordons dans nos cours la question de la distinction entre croyances et savoirs (ou connaissances, je ne ferai pas la distinction ici), cette distinction repose sur un postulatqui pose bien des problèmes.Croyances et savoirs sont-ils, en effet, si facile de les distinguer ? L’objet d’une telle discussion anime les épistémologues depuis des lustres et en quelques heures ou lignes, il serait bien entendu illusoire d’apporter une réponse nuancée. Il est par contre possible de faire réfléchir à cette question, et de bien des manières. Nous proposons ici un atelier très simple à mettre en place, décliné sous la forme d’un débat boule de neige et permettant de faire émerger la complexité de cette problématique, donnant ensuite quelques pistes pour y répondre.

Le débat « boule de neige »

Principe du débat

Le débat « boule de neige » est, comme son nom l’indique, un débat permettant « d’accumuler » les contributions de plusieurs élèves/étudiants/personnes sur un sujet donné1. Il se déroule en différentes étapes et l’objectif est de faire participer toutes les personnes, pour échanger des arguments et construire une réponse collective sur un sujet donné. Chaque étape est chronométrée, permettant de rythmer les discussions. Seuls dans un premier temps, les participants se regroupent petit à petit en différentes « boules » pour échanger leurs arguments et discuter.

Déroulement du débat

Pour commencer, il faut tout d’abord choisir une affirmation, une phrase sur laquelle on souhaite faire réfléchir.

  • On commence le débat boule de neige par une phase de réflexion individuelle avec la consigne suivante : « Êtes-vous d’accord ou pas avec cette affirmation ? » puis « Trouver des raisons/arguments justifiant votre position. » Cette première étape peut durer entre une et trois minutes afin de laisser le temps à chacun de prendre conscience du problème posé par l’affirmation.
  • Dans une deuxième étape, on regroupe les participants deux par deux, toujours avec les même consignes auxquelles on ajoute qu’il faut maintenant présenter ses arguments et cerner les points d’accord et de désaccord. Cette phase peut durer entre deux et cinq minutes maximum : en effet, à deux, il arrive souvent que les arguments échangés ne soient pas très nombreux. Mieux vaut alors enchaîner sur l’étape suivante.
  • La troisième étape permet de regrouper par quatre les participants (on réunit les groupes précédents deux par deux). Les consignes sont identiques. C’est sans doute l’étape la plus prolifique et pertinente du débat, aussi prévoir entre 10 et 15 minutes est tout à fait raisonnable.
  • On réunit ensuite les « boules » de quatre pour former des groupes de huit, toujours avec les mêmes consignes, précédées de cette recommandation : « désignez une personne de chaque groupe pour résumer en quelques phrases les différents arguments avancés précédemment ». À huit, la discussion est souvent animée, mais on remarque aussi que certains peuvent prendre plus (trop) souvent la parole : l’occasion de rappeler quelques règles utiles comme le bâton de parole (avec restrictions sur le nombre de fois autorisées) ou la désignation d’un responsable donnant la parole au fur et à mesure des demandes (mains levées).
  • Selon la disposition de la salle et l’envie ou pas de l’animateur-trice, on peut former des groupes de seize. Mêmes consignes.
  • La dernière étape consiste à réunir tous les participants : debout, en cercle, tout le monde débat ensemble. Si un consensus se dégage, on peut demander de l’indiquer. Dans le cas contraire, on demande de rapporter les différents points de divergences.

  • Le rôle de l’animateur-trice dans toutes ces étapes est de gérer le temps et, dans la dernière étape, de s’occuper de la prise de parole du groupe (ou de désigner quelqu’un pour le faire). Pendant toute la durée des débats, il-elle circulera autour de chaque groupe, aidant ou relançant si nécessaire les participants à nuancer, envisager d’autres pistes, sans répondre directement aux questions portant sur le fond du sujet. Il est important de garder un certain retrait vis-à-vis des échanges de chaque groupe afin d’éviter au maximum le regard du « sachant » à un moment où chacun est invité à exprimer son point de vue de manière totalement égale aux autres.

Croyances ? Connaissances ?

Le choix de l’affirmation

Pour faire réfléchir et discuter élèves, étudiants ou enseignants en formation, j’ai toujours choisi la même affirmation : « Les croyances s’opposent aux connaissances« . Elle permet de faire émerger un ensemble de questions et de problèmes que les participants, ensemble, vont tenter de résoudre. Par le jeu des échanges, les personnes les plus convaincues dès le début se rendent compte que d’autres avis peuvent être légitimes, en fonction de la force des arguments avancés. Certains m’ont parfois suggéré d’inverser le sens de l’affirmation, ce que j’ai fait, sans observer de grands changements dans les débats entendus.

Points de vigilance

Le rôle de l’animateur du débat est crucial : il faut être capable de laisser débattre les participants sans intervenir comme signalé ci-dessus, mais il est aussi nécessaire de savoir relancer les échanges quand ceux-ci sont au point mort. On pourra par exemple poser des questions au groupe comme « Êtes-vous d’accord sur le sens du mot croyance ? » ou « D’après vous, quels types de croyances s’opposent aux connaissances ? ». On pourra également demander de bien penser à justifier chaque point de vue donné, ou encore de faire la liste des points d’accord ou de désaccord entre les participants.

On peut également conseiller, avant chaque nouvelle « boule », que chaque groupe distinct résume la teneur de ses échanges précédents, permettant ainsi de ne pas tout répéter et d’avancer dans le débat.

Quand arrive le regroupement à plus de 8, se pose la question de la parole. Après quelques minutes passées à débattre, je demande à chaque groupe s’il est satisfait de la manière dont se passent les échanges. Il se peut que laisser la gestion de la parole sans règle explicite fonctionne bien, mais on peut aussi donner quelques conseils comme utiliser un bâton de parole (ne parle que celle ou celui qui a le bâton ou quelque autre objet), ou désigner une personne responsable d’indiquer à qui vient le tour de parler.

Enfin, la dernière « boule » – le groupe entier donc – se réunit pour la dernière partie du débat. Il est alors utile de rappeler que l’objectif de ce dernier regroupement est de parvenir à exprimer de manière collective les différents avis qui ont émergés, avec leurs justifications, leurs arguments ou toutes raisons amenant à considérer qu’une opinion mérite d’être entendue.

Ce type de débat peut aussi être utilisé pour prendre une décision collective : la dernière étape étant utilisée pour faire émerger les différentes propositions et choisir parmi elles le cas échéant.

Quant à la manière d’utiliser ce débat pour traiter de la question de fond sur la différence entre croyances et connaissances, ce sera l’objet d’un prochain article.

Les capacités cognitives ne sont pas suffisantes pour diminuer l’adhésion aux croyances non fondées

C’est un travail de recherche collectif et transdisciplinaire qui a permis la publication de cet article. Jaïs Adam-Troian, Denis Caroti et Thomas Arciszewski ont regroupé leur force pour étudier les réponses à un questionnaire envoyé aux enseignants de l’académie d’Aix-Marseille et sonder leurs croyances et capacités cognitives, mais avec une petite subtilité… En voici le résumé.

Cette étude, intitulée Unfounded beliefs among teachers: The interactive role of rationality priming and cognitive ability, s’inspire de recherches antérieures indiquant que les capacités cognitives doivent être associées à une motivation à être rationnel et à fonder ses opinions sur des preuves pour faire diminuer l’adhésion à des croyances non fondées (croyances surnaturelles et mentalité conspirationniste). Sur la base de ce travail, nous avons cherché à déterminer s’il était possible « d’activer » cette motivation à être rationnel de manière subtile, et si cela était suffisant pour renforcer la relation négative entre les capacités cognitives et les croyances non fondées. Pour cela, nous avons testé deux groupes équivalents d’enseignants du second degré français (762 en tout), le premier étant « amorcé » par une simple question demandant aux sujets de juger à quel point ils se jugeaient comme étant des personnes rationnelles.

Nous avons pu démontrer que cet amorçage, même subtil, renforçait la relation négative entre les capacités cognitives et les croyances surnaturelles non fondées, ainsi que la mentalité conspirationniste, et ce d’autant plus que les sujets se déclaraient être des personnes rationnelles. En d’autres termes, la diminution de l’adhésion aux croyances non fondées est liée négativement aux capacités cognitives que dans le cas de personnes se déclarant être rationnelles. Notons que si cette amélioration de la rationalité détermine complètement le lien entre capacités cognitives et mentalité conspirationniste, elle ne sert qu’à amplifier la relation entre capacités cognitives et croyances surnaturelles.

Ces résultats ouvrent des pistes intéressantes d’application pédagogiques. Des études antérieures ont montré qu’il est possible de promouvoir un scepticisme argumenté à l’égard de croyances non fondées en fournissant aux gens des contre-arguments spécifiques, l’inconvénient étant que de telles interventions ne ciblent que certaines affirmations, et qu’elles peuvent par ailleurs entraîner un effet rebond. En revanche, ces résultats confirment que les interventions pédagogiques visant à développer l’esprit critique pourraient être ciblées, non pas sur des sujets spécifiques, mais plus généralement sur la motivation des personnes à être « épistémiquement rationnelles », c’est-à-dire à reconnaître la valeur de la connaissance et à fonder leurs opinions sur des preuves fiables. Le recours à des stratégies pédagogiques allant dans ce sens, comme le choix de thématiques dont l’intérêt et l’enjeu sont perçus et en rapport avec les motivations du public cible (comme une utilité dans la vie de tous les jours), ou la mise en valeur (et désirabilité) de vertus épistémiques tendant vers la valorisation des connaissances, nous semblent des pistes intéressantes dans le cadre d’enseignements dont l’objectif est la formation de l’esprit critique.

Résumé en anglais :

Previous research suggests that Unfounded Beliefs (UB) such as conspiracist beliefs and beliefs in the supernatural stem from similar cognitive and motivational mechanisms. More specifically, it has been demonstrated that cognitive ability is negatively associated with UB, but only among individuals who value epistemic rationality. The present study goes beyond previous correlational studies by examining whether the negative association between cognitive ability and UB can be strengthened through a subtle rationality prime. In a large scale online experiment (N = 762 French teachers), we demonstrate that priming rationality (vs. control) does enhance the negative relationship between cognitive ability and adherence to supernatural beliefs, as well as Conspiracy Mentality (d = .2). This effect was not obtained for Illusory Pattern Perception. This study’s usefulness as a ‘proof of concept’ for future interventions aimed at reducing UB prevalence among the public is discussed.

Vidéo – Conférence « Croyance et raison : le problème de la démarcation »

Vidéo de la conférence « Croyance et raison : le problème de la démarcation », donnée le 12 janvier 2017 par Albin Guillaud et Ismaël Benslimane pour des enseignant·es de philosophie, dans le cadre du Plan académique de formation (rectorat de Lyon). La première partie est une introduction générale au problème, la seconde partie concerne les outils pédagogiques qui nous semblent pertinents pour parler de ces sujets.

 Cette conférence avait pour but d’introduire les différents outils et méthodes utilisés par le CorteX pour parler de science, de croyance, de matérialisme, du vrai/du faux, etc. Si vous êtes amené·e·s à faire des enseignements autour de la pensée critique, ce genre d’introduction nous semble essentiel avec un public lycéen ou étudiant afin de poursuivre, sur des bases solides, une réflexion sur les mécanismes à l’œuvre derrière certaines croyances (telles que les complotismes, les intrusions spiritualistes ou les théories controversées).

Pour approfondir après la conférence, vous trouverez ici des conseils d’ouvrages sur le sujet.

Conseils d'ouvrages en philosophie des sciences (Croyance et Raison : Le problème de la démarcation)

Suite à la conférence « Croyance et Raison : Le problème de la démarcation » (vidéo disponible ici), donnée le 12 janvier 2017 par Albin Guillaud et Ismaël Benslimane pour des enseignantes et enseignants de philosophie, voici quelques conseils d’ouvrages permettant à la fois de s’outiller pour aborder une épistémologie de terrain (différents usages du mot « science », affirmation de type scientifique, matérialisme en méthode, etc.), et de mieux comprendre les mécanismes à l’œuvre derrières certaines croyances (complotismes, intrusions spiritualistes, théories controversées, etc.). Ce sont de précieux préalables à tout enseignement complet de la pensée critique avec un public lycéen ou étudiant.

 

Remarques

Comme de nombreux types de classification, les catégories de la présente bibliographie se recouvrent parfois. De nombreux ouvrages auraient donc pu être classés à plusieurs endroits différents. En outre, puisque la formation n’avait pas pour objet une introduction à la philosophie des sciences, nous n’avons pas fait figurer dans cette bibliographie les grands classiques sur le sujet (Popper, Duhem, Kuhn, etc.). Les commentaires entre parenthèses qui suivent certaines références sont les nôtres.

Bibliographie principale

Sur l’autodéfense intellectuelle et la zététique

  • Baillargeon Normand, Petit cours d’autodéfense intellectuelle, Montréal, Lux, 2006.
  • Broch Henri, L’art du doute ou Comment s’affranchir du prêt-à-penser, Valbonne, Éd. Book-e-book, 2008.
  • Broch Henri, Comment déjouer les pièges de l’information ou Les règles d’or de la zététique, Valbonne, Éd. Book-e-book, 2008.
  • Collectif CorteX (Saint-Martin d’Hères Isère), Esprit critique es-tu là ? : 30 activités zététiques pour aiguiser son esprit critique, Sophia-Antipolis, Éd. Book-e-book, 2013. Tout le matériel pédagogique contenu dans cet ouvrage se trouve ici
  • Pinsault Nicolas et Richard Monvoisin, Tout ce que vous n’avez jamais voulu savoir sur les thérapies manuelles, Saint-Martin-d’Hères, PUG, 2014.
  • Monvoisin Richard, Pour une didactique de l’esprit critique – Zététique & utilisation des interstices pseudoscientifiques dans les médias, Didactique des disciplines scientifiques, Saint-Martin-d’Hères, Université Grenoble 1 – Joseph Fourier, 2007.
    Document qui contient plusieurs types de matériaux pédagogiques. Cette thèse est accessible en ligne ici.

Sur les processus d’influence et les techniques de manipulation

  • Beauvois Jean-Léon, Les influences sournoises : précis des manipulations ordinaires, Paris, François Bourin, coll. « Société », 2011.
  • Cialdini Robert B, Influence & manipulation, Paris, First, 2004.
  • Joule Robert-Vincent et Jean-Léon Beauvois, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2014.
  • Milgram Stanley, Soumission à l’autorité un point de vue expérimental, Paris, Calmann-Lévy, 1984. (Ouvrage passionnant qui permet d’aller bien au-delà de ce que l’on peut apprendre de cette fameuse expérience par d’autres moyens. On apprendra par exemple que 20 conditions expérimentales différentes ont été réalisées et que les pré-tests effectués sans aucun rétrocontrôle conduisaient presque 100 % des sujets à aller jusqu’à 450 volts.)

Sur le paranormal et quelques théories controversées

  • Broch Henri, Gourous, sorciers et savants, Paris, Odile Jacob, 2007.
  • Charpak Georges et Henri Broch, Devenez sorciers, devenez savants, Paris, O. Jacob, 2003.
  • Broch Henri, Au cœur de l’extra-ordinaire, Sophia Antipolis (Alpes maritimes), Book-e-book, 2005. (Henri Broch s’est employé à l’approche scientifique des phénomènes réputés paranormaux et a utilisé ces mêmes phénomènes pour construire une initiation à la démarche scientifique tant dans son aspect constructif que sceptique.)

Plus de matériel sur ces thématiques dans la collection book-e-book : www.book-e-book.com

Sur la sociologie des croyances

  • Bronner Gérald, La démocratie des crédules, Paris, PUF, 2013.
    Origine du concept de « mille-feuille argumentatif ».
  • Bronner Gérald, La pensée extrême : comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques, Paris, Denoël, coll. « Denoël impacts », 2009. (Quelles sont les différences entre un collectionneur de timbre passionné, un culturiste et un fanatique religieux ? Il en existe de nombreuses, c’est évident. Cependant, il existe aussi des points communs dans le processus qui les a conduit à faire ce qu’ils font. C’est ce que démontre Gérald Bronner.)
  • Bronner Gérald, L’empire des croyances, 1re éd, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Sociologies », 2003.

Comprendre le « matérialisme en méthode »

  • Bunge Mario Augusto, Le matérialisme scientifique, Paris, Éd. Syllepse, 2008.
  • Charbonnat Pascal, Histoire des philosophies matérialistes, Paris, Éditions Kimé, 2013.
  • Dubessy Jean, Guillaume Lecointre et Jacques Bouveresse (éd.), Intrusions spiritualistes et impostures intellectuelles en sciences, Paris, Syllepse, 2001. (C’est dans cet ouvrage que Guillaume Lecointre explique en quoi l’absence de distinction entre les différents sens du mot « science » (communauté, connaissances, applications, démarche) peut conduire à jeter le bébé (la démarche) avec l’eau du bain (les problèmes liés à la communauté, à l’instabilité de certaines connaissances et aux applications des connaissances).)
  • Silberstein Marc, Matériaux philosophiques et scientifiques pour un matérialisme contemporain − Sciences, ontologie, épistémologie, Paris, Éd. Matériologiques, 2013. (Les deux premiers chapitres en particulier.)

Épistémologie

  • Chalmers Alan Francis et Michel Biezunski, Qu’est-ce que la science ? Récents développements en philosophie des sciences : Popper, Kuhn, Lakatos, Feyerabend, Paris, Librairie générale française, 1990.
  • Dubessy Jean, Guillaume Lecointre et Jacques Bouveresse (éd.), Intrusions spiritualistes et impostures intellectuelles en sciences, Paris, Syllepse, 2001.
  • Haack Susan, Defending science–within reason, Amherst, N.Y, Prometheus Books, 2007.
    Les citations utilisées pendant la présentation sont disponibles en français ici.
  • Laudan L, « The Demise of the Demarcation Problem », dans R.S. Cohen et L. Laudan (éd.), Physics, Philosophy and Psychoanalysis: Essays in Honour of Adolf Grünbaum, Dordrecht, Springer Netherlands, 1983, p. 111‑128.
  • Lecointre Guillaume, Les sciences face aux créationnismes : ré-expliciter le contrat méthodologique des chercheurs, Versailles, Quae, coll. « Sciences en question », 2012.
  • Piaget Jean, « La situation des sciences de l’homme dans le système des sciences », dans Épistémologie des sciences de l’homme, Saint-Amand, Gallimard, coll. « Idées », 1970, p. 15-130.
  • Piaget Jean, Sagesse et illusions de la philosophie, 1. éd, Paris, Pr. Univ. de France, coll. « Quadrige », no 139, 1992. (Piaget analyse dans ce livre le rapport entre la philosophie, la science et la question des faits.)
  • Pigliucci Massimo et Maarten Boudry (éd.), Philosophy of Pseudoscience : Reconsidering The Demarcation Problem, 1ere édition, Chicago, University of Chicago Press, 2013.
  • Raynaud Dominique, Qu’est-ce que la technologie ?, Éditions Matériologiques, Paris, 2015. (Dominique Raynaud réalise une analyse philosophique et empirique du rapport entre science et technologie en évitant les écueils technophiles et technophobes.)
  • Raynaud Dominique, La Sociologie et sa vocation scientifique, Hermann, 2006. (Ouvrage plutôt technique dans lequel Raynaud effectue une critique épistémologique et empirique de la thèse d’une épistémologie régionale de la sociologie. C’est aussi un des meilleurs argumentaires à notre connaissance en faveur d’un monisme épistémologique. Avec une approche différente et sur le même sujet on pourra lire le chapitre de l’ouvrage de Jean Piaget « La situation des sciences de l’homme dans le système des sciences » dans Épistémologie des sciences de l’homme (voir ci-dessus).)
  • Raynaud Dominique, Sociologie des controverses scientifiques, Presses universitaires de France, 2003. (Raynaud présente dans cet ouvrage ses études socio-historiques de trois controverses scientifiques : la controverse entre Pasteur et Pouchet sur la génération spontanée en biologie, la controverse entre organicisme et vitalisme en médecine, et la controverse entre extramissionnisme et intramissionnisme en optique. Il utilise ces trois études pour réaliser une analyse de la méta-controverse en sociologie des sciences qui porte, ironie du sort, sur la façon d’aborder les controverses scientifiques. Il s’agit de la controverse entre rationalisme et relativisme. L’auteur examine également en détail si oui ou non Duhem, Quine et Wittgenstein peuvent être utilisés pour justifier le programme relativiste. On trouvera également dans ce livre l’explication de la cohabitation possible entre certitude et perfectibilité en science, ainsi que la description du cadre au sein duquel se trouve réconciliés vérificationnisme et falsificationnisme. Un ouvrage incontournable qui se lit aisément.)
  • Sagan Carl, The demon-haunted world: science as a candle in the dark, 1. ed, New York, NY, Ballantine Books, coll. « The New York Times bestseller », 1997.
    La citation utilisée dans notre conférence se trouve en ligne ici (en français).
  • Sokal Alan D et Jean Bricmont, Pseudosciences et postmodernisme : adversaires ou compagnons de route ?, Paris, O. Jacob, 2005. (Surtout la préface de Jean Bricmont et l’appendice B de Sokal et Bricmont. C’est dans la préface que l’on trouvera l’utile distinction entre aspect affirmatif et aspect sceptique de la science. Dans l’appendice B, les auteurs font état de leur positionnement dans le débat entre réalisme vs. idéalisme et sollipsisme, et entre réalisme scientifique vs. instrumentalisme. Le propos est d’une grande clarté.)
  • Sokal Alan D et Jean Bricmont, Impostures intellectuelles, Paris, O. Jacob, 1997. (Ouvrage qui a marqué les esprits. Concernant le propos de Bricmont, on peut écouter les présentations suivantes :

Bibliographie complémentaire

  • Bouveresse Jacques, Prodiges et vertiges de l’analogie : de l’abus des belles-lettres dans la pensée, Paris, Raisons d’agir : Diffusion Le Seuil, 1999.
    Cet ouvrage de Bouveresse a fait suite à Impostures intellectuelles de Sokal et Bricmont.
  • Bunge Mario, Evaluating Philosophies, Dordrecht, Springer Netherlands, 2012. (Bunge défend dans cet ouvrage une thèse originale : il est possible d’évaluer une philosophie à l’aune de sa capacité à permettre des progrès dans la connaissance du monde et en matière morale.)
  • Bunge Mario, Épistémologie, traduit par H. Donadieu, Maloine, Paris, 1983.
  • Harris Sam, The Moral Landscape, How Science Can Determine Human Values, Free Press, New York, 2010.

Pour approfondir certaines notions

Les enfants et le surnaturel, par Michel Leurquin, professeur des écoles

CorteX_poltergeist_remake« L’enseignement rationaliste peut et doit tout discuter en mettant au préalable les enfants sur la voie simple et directe de l’investigation personnelle ».  C’est sur ces phrases du pédagogue assassiné Francisco Ferrer que s’ouvre cet article envoyé par Michel Leurquin, instituteur (et membre du Comité Para belge).


Les enfants sont-ils déjà intéressés par le surnaturel et les phénomènes paranormaux malgré leur jeune âge ? La question est intéressante mais ne semble jamais avoir été le sujet d’une étude complète. J’ai donc profité de la fin d’année scolaire 2000-2001 pour soumettre un petit sondage sans aucune valeur scientifique à 154 enfants âgés de 11 à 13 ans se trouvant en 5ème et 6ème années primaires (CM2 en France). Ces élèves fréquentaient des écoles libres catholiques ou des écoles officielles publiques (où les élèves peuvent opter au choix pour un cours de religion catholique, protestante, orthodoxe, islamique, judaïque ou un cours de morale laïque). Ce sondage a été effectué par écrit et de manière anonyme.

1. Connais-tu ton signe astrologique ?

oui : 95%
non : 5%
Commentaires : Il a également été demandé lors de cette première question de citer le signe si la réponse à la question était positive. Déjà très jeunes, les enfants connaissent leur signe astrologique. Cela n’a rien de très étonnant. Ce qui l’est plus, c’est qu’un certain nombre a même précisé son signe astrologique chinois alors que cela n’était pas demandé sur le questionnaire. Il n’est cependant pas certain que les enfants fassent déjà le lien comme trop d’adultes entre signe astrologique et destin ou caractère des individus.

2. Lis-tu ton horoscope ?

jamais : 16%
parfois : 60%
souvent : 24%
Commentaires : Les enfants n’échappent pas à la déferlante folle des horoscopes. Il est vrai qu’on les retrouve dans la plupart des journaux et des magazines de télévision. Ce n’est pas bien bien méchant car comme la plupart des adultes la lecture de l’horoscope reste un passe-temps amusant sans plus. Peu d’enfants doivent être réellement influencés par leur horoscope du jour. Cependant, il est assez étonnant de constater qu’une grosse majorité d’enfants déclare lire son horoscope de manière assez régulière. Il ne faut pas oublier non plus que la plupart des radios libres privées possèdent leur propre astrologue qui analyse chaque signe chaque jour de la semaine. Peu d’enfants échappent donc à l’horoscope.

3. Crois-tu qu’il existe des personnes capables de prédire l’avenir (des voyants) ?

oui : 21%
non : 50%
je ne sais pas : 29%
Commentaires : La moitié des enfants interrogés ne croient pas qu’il puisse exister de véritables voyants. Il reste donc une moitié qui y croit ou qui n’a pas d’opinion sur le sujet. Les enfants sont trop jeunes pour avoir déjà eu un contact avec un extralucide à moins d’imaginer qu’ils s’y soient rendus avec un de leurs parents. Mais le succès de ceux-ci dans quelques années reste assuré…

4. Crois-tu qu’il existe des personnes capables de lire dans les pensées (la télépathie) ?

oui : 23%
non : 60%
je ne sais pas : 17%
Commentaires : La télépathie connaît un assez beau succès d’estime chez les enfants. C’est un phénomène que l’on rencontre assez souvent dans les bandes dessinées et les dessins animés. La télépathie est également le phénomène auquel les adultes croient le plus. Il nous est arrivé à tous de penser ou de dire la même chose qu’un membre de notre entourage au même instant. Ces faits sont assurément fort troublants même si ce ne sont que de simples coïncidences.

5. Crois-tu en l’existence des extra-terrestres ?

oui : 25%
non : 56%
je ne sais pas : 19%
Commentaires : On peut peut-être s’étonner que « seulement » un quart des enfants interrogés croient à l’existence des extra-terrestres vus leur omniprésence dans les films de science-fiction et dans les dessins animés dont les enfants sont friands. La croyance dans l’existence des extra-terrestres reste cependant une des plus élevées de l’enquête. C’est à cet âge aussi que les enfants d’école primaire abordent les premières notions d’astronomie. Ils y apprennent vite que les autres planètes de notre système solaire n’abritent pas de vie intelligente mais que l’Univers est immensément grand et que les possibilités d’y trouver une vie sont réelles.

6. Crois-tu qu’il existe des personnes capables de communiquer avec les morts ?

oui : 10%
non : 65%
je ne sais pas : 25%
Commentaires : La proportion de oui est relativement basse. Il leur semble difficile de croire que des gens puissent faire parler les morts. Il est néanmoins intéressant de comparer les réponses à celles de la question 8. La croyance aux fantômes est paradoxalement plus élevées. Il reste une part importante d’un quart d’élèves qui n’a pas d’avis sur la question.

7. Crois-tu qu’il existe des personnes capables de faire bouger les objets par la force de la pensée sans les toucher ?

oui : 32%
non : 49%
je ne sais pas : 19%
Commentaires : La croyance dans ce que les parapsychologues appellent psychokinèse est très importante et même assez inquiétante chez les enfants. Un tiers d’entre eux est persuadé de l’existence de ce phénomène. Pourtant, ils sont trop jeunes pour avoir connu le grand Uri Geller… Cela s’explique peut-être en partie du fait que ce genre de phénomène apparaît souvent dans les fameuses bandes dessinées japonaises (mangas) ou dans des films de science-fiction comme Star Wars qui connaissent encore un beau succès lors de leur rediffusion.

8. Crois-tu aux fantômes ?

oui : 21%
non : 66%
je ne sais pas : 13%
Commentaires : Voilà des enfants qui ne doivent pas dormir beaucoup les nuits d’orage ! Mais avouons que tous étant enfants nous avons cru à ces fantômes pourtant bien insaisissables. Cette croyance vieille comme le monde diminue cependant fortement avec l’âge.

CONCLUSIONS

Grosso modo, ce sondage laisse apparaître deux groupes : ceux qui ne croient pas en général à l’existence de ces phénomènes (sauf l’une ou l’autre exception) et un second groupe où l’on retrouve ceux qui ont un avis positif et les tièdes qui ne se prononcent pas. Il est difficile de prévoir l’évolution de leur adhésion à l’existence de ces phénomènes, qui dépend vraisemblablement de tout un tas de facteurs dont l’entourage ou le milieu culturel. L’atavisme familial doit être un élément central. Des enfants ayant des parents possédant une belle bibliothèque ésotérique y croiront certainement plus que les autres. Il est certain que tous les enfants sont touchés par ces phénomènes car l’on en parle fréquemment à la télévision, à la radio, sur Internet et dans la presse y compris dans celle destinée aux jeunes, autant de médias que les jeunes de 10 à 12 ans consultent régulièrement. Pensons également à l’influence que peut avoir la lecture de certains livres pour les jeunes comme Harry Potter ou même les ouvrages de maîtres de l’épouvante (Stephen King,…) qui sont déjà lus par les pré-adolescents. Les enseignants ont aussi une grave responsabilité dans l’éducation transmise aux élèves. On pressent également (sans que j’aie de publication à ce sujet) que plus ou moins consciemment, l’intérêt pour le paranormal puisse être directement transmis par les enseignants à leurs élèves. Dans les classes, on fête Halloween, on lit ensemble des romans comme Harry Potter, les exercices de lecture font apparaître fantômes ou gentils extra-terrestres, on fabrique pour la fête des pères des porte-clés aux signes du zodiaque… Les exemples ne manquent pas. Je me souviens personnellement qu’âgé de 13 ans (1ère année du secondaire) une dame donnant un cours de méthode de travail (et qui était professeur de religion catholique) aimait à parler de ces phénomènes qui la passionnaient. Elle déclara même un jour entre autres inepties que 90% des hommes préhistoriques possédaient le don de… télépathie ! L’école doit être un lieu où il faut éviter de transmettre de fausses idées. Les enseignants ont pour rôle de former des hommes et des femmes possédant leur libre-arbitre et qui s’intéresseront à ce qu’ils veulent. Les enseignants doivent avoir le courage de développer le sens critique de leurs élèves, de susciter le débat contradictoire, de faire apprécier la recherche scientifique et ses preuves. C’est à ce prix que la croyance dans le paranormal sera un libre choix, mais éclairé par un doute raisonnable chez les générations futures.

CorteX_Michel_LeurquinCe texte a été publié d’abord ici.

Merci à Michel Leurquin.

Couverture de l'ouvrage de Raphaël Hammer

Lecture : Raphaël Hammer – Expériences ordinaires de la médecine, confiances, croyances et critiques profanes

Couverture de l'ouvrage de Raphaël HammerRaphaël Hammer est docteur en sociologie, et actuellement enseignant et chercheur en Suisse au sein d’une structure regroupant différentes formations paramédicales. Cet ouvrage 1 retranscrit les résultats d’une enquête sociologique menée dans le canton de Genève en l’an 2000, qui s’intéressait aux formes principales de reconnaissance, de valorisation et de critique portées par les « profanes » vis-à-vis des médecins, du système de santé et des thérapies dites alternatives. Son contenu fait écho à de nombreuses problématiques soulevées et traitées au sein du Cortecs. Un livre de plus à ajouter à la bibliothèque critique du praticien en santé !

Une saine méthodologie

Dans le cadre de l’étude sur laquelle s’appuie l’ouvrage, des entretiens semi-directifs ont été menés auprès de 64 hommes âgés de 40 à 60 ans habitant dans le canton de Genève, recrutés via l’annuaire téléphonique, appartenant à différentes catégories socio-professionnelles : travailleurs manuels, instituteurs, employés de bureau. Les conclusions tirées de cette enquête concernent donc un échantillon bien spécifique de la population suisse ; l’auteur insiste à juste titre sur cet élément épistémologique important. Surtout, ce qui est intéressant ici, c’est de voir comment une méthodologie qualitative fréquemment utilisée en sciences sociales (la conduite d’entretien) peut être menée de manière rigoureuse.

Des précisions sur la critique de « la science »

Souvenons-nous, le mot science peut revêtir différents sens2. Rappelons-les brièvement ; le mot science peut renvoyer à la méthode, à la somme des connaissances, aux sciences appliquées et aux technologies, à la communauté scientifique vue de l’intérieur, à la même communauté vue de l’extérieure. Lorsque quelqu’un remet en cause la science médicale, il est donc légitime de se questionner sur ce qu’il désigne par ces termes. C’est ce que fait Raphaël Hammer.

Ainsi, nous découvrons que les personnes interrogées ne remettent pas du tout en cause la science en tant que méthode. En effet, « c’est moins la science en tant que telle qui est l’objet des inquiétudes et des contestations, que les aspects politiques et économiques de son fonctionnement et de son insertion dans la société globale » (p220). Plus précisément, «  ce sont bien les aspects politiques et économiques qui sont au centre des acquisitions les plus fréquentes et les plus vives : l’influence du néo-libéralisme sur la gestion des institutions de soin, l’importance de la rentabilité des politiques sanitaires, ou encore le pouvoir des industries pharmaceutiques et des assurances-maladie sur le système de santé et les pratiques médicales. Nombre de discours sont ainsi marqués par ce sentiment inquiet que la qualité des soins, la santé comme bien en soi et l’équité sont des valeurs menacées par la logique capitaliste et la quête du profit » (p221).

Critères de légitimité des thérapies alternatives selon leurs usagers ou sympathisants

Aiguilles d'acupuncture
Des aiguilles servant à pratiquer l’acupuncture

Le chapitre IV s’intitule « Médecines alternatives et populaires : représentations et usages » et tente de cerner les éléments socio-institutionnels, symboliques, et pratiques qui fondent la crédibilité de ces thérapies aux yeux de leurs usagers.

Les positionnements des interrogés sont différents selon le type de thérapie proposée. Lorsque la pratique est présentée comme étant le fruit d’un talent ou du don d’une personne (c’est souvent le cas avec les barreurs de feu ou les rebouteux), les critères de rationalité, de scientificité et de reconnaissance institutionnelle sont plus fréquemment suspendus ; on se fie alors aux témoignages, à la gratuité de l’acte, comme garants de son efficacité. Lorsque les pratiques sont présentées comme étant le fruit d’un savoir (l’homéopathie, l’acupuncture par exemple), elles sont jugées comme étant digne de confiance, puisque s’appuyant sur un savoir théorique constitué et énonçant peu voir aucun effet secondaire. L’adhésion aux idéologies et aux principes qu’elles véhiculent (l’approche globale de l’individu, la valorisation des défenses propres de l’organisme etc.), le parcours académique des pratiquants, le contrôle par les autorités scientifiques et politiques rassure et leur confère plus de crédibilité.

Le développement de ces pratiques serait avant tout la conséquence d’un profond désenchantement vis-à-vis de la technicité médicale, de la déshumanisation des soins, de la barrière relationnelle et statutaire entre le soignant et la patient. Il est alors étrange de s’apercevoir que les pratiques « alternatives » sont finalement évaluées et choisies selon les mêmes critères que les pratiques dont elles prétendent se démarquer. Les interlocuteurs désirant les utiliser disent qu’elles doivent répondre à des impératifs de validité, de compétence, et d’efficacité. Vis-à-vis d’elles, ils adoptent un positionnement agnostique, qu’Hammer qualifie de « scepticisme libéral » (p173) : ils n’y croient pas, sans pour autant dire qu’elles ne sont pas valides ou efficaces.

Pour de vraies alternatives en santé

Si Raphaël Hammer ne prend pas vraiment position vis-à-vis du statut des thérapies « alternatives », on peut penser qu’en plus de ne pas avoir fait la preuve de leur efficacité propre, elles ne sont pas des alternatives politiques ou économiques 3. Mais alors, que proposer pour parvenir à un système plus efficace et satisfaisant pour le plus grand nombre ? Quelques éléments de réponse sont esquissés dans cet ouvrage. Hammer postule que la question n’est plus d’être pour ou contre la science, mais plutôt de définir le cadre de son développement, d’instaurer un débat autour des questions éthiques. J’ajouterais à cela que tous les citoyens devraient potentiellement pouvoir y prendre part. Mais pour que les échanges soient fructueux, cela nécessitera de bien poser la cadre épistémologique et théorique de départ (notamment, ce que l’on entend par « science »), et de détecter les argumentations fallacieuses, ce qui nécessite que les participants soient formés au préalable au maniement d’outils d’analyse spécifiques.

À titre individuel, en tant que professionnel de santé, l’ouvrage nous rappelle, s’il le fallait, l’importance du dialogue, du facteur relationnel et de l’attention que l’on doit porter aux aspects psychosociaux de la prise en charge de nos patients. Encore faut-il que notre contexte professionnel nous le permette, où que nous nous octroyons cette possibilité.

Nelly Darbois