Atelier Esprit critique, français et zététique pour BTS

Mortimer Leplat est enseignant de français au lycée Frédécic Ozanam à Lille et, comme de plus en plus de collègues, il a décidé de se lancer en 2013 dans un projet en lien avec l’esprit critique et la zététique. Sous forme d’ateliers à destination d’étudiants en BTS et dans le cadre de l’accompagnement personnalisé, voici comment il a procédé, les sujets choisis, et surtout, chose assez rare pour nous scientifiques bornés et obtus, comment il a réussi à insérer de l’outillage critique à travers un mélange étonnant d’études de textes littéraires et une présentation de sujets zététiques. On ne peut que l’encourager à continuer (et à faire des petits…) !
Si vous aussi souhaitez partager votre travail, vos essais et cours, n’hésitez pas à nous contacter.
Denis Caroti


Les ateliers :

Les deux premières heures (travail sur la réfutabilité) Les deux heures suivantes (nos sens nous trompent) Atelier sur la morphopsychologie  Graal et rasoir d’Occam   


Le contexte

Cet atelier se déroule dans le cadre de « l’accompagnement personnalisé » (AP) mis en place par la réforme du lycée. Les enseignants y sont libres de proposer un peu ce qu’ils veulent, aussi ai-je saisi l’occasion pour proposer à des élèves de première année de BTS une initiation à la démarche critique et plus particulièrement à la zététique.

Cependant, même si l’AP peut paraître très libre à première vue, les contraintes administratives et d’horaire sont très lourdes, et j’ai appris que les douze heures dont j’estimais (un peu au pif à vrai dire) avoir besoin s’étaient vu diviser par trois : quatre heures, donc, soit deux séances de deux heures par semaine, et des élèves qui tournent tous les quinze jours. Bon, au fond ça n’est peut-être pas plus mal : je débute et le fait de proposer une progression suivie sur douze heures m’effrayait un peu. Là, je vais pouvoir procéder par « tâtonnement expérimental », en changeant ce qui n’a pas marché d’une session à l’autre.

Le contenu

Deux premières heures :

CorteX_Croyance_niveau_etudeJ’ai commencé, histoire de montrer aux élèves que ça ne rigolait pas, par leur passer un des quatre petits films du GEMPPI, celui sur les médecines parallèles. Ce film dure un quart d’heure, après quoi j’ai recueilli les réactions des élèves lors d’un petit débat. Tous (c’est-à-dire les six qui se sont inscrits…) se sont montrés sensibles à l’histoire de cette petite fille soustraite à la chimio par un gourou pratiquant la « médecine quantique ». Je voulais arriver avec les élèves à faire émerger le point suivant : les parents sont-ils des imbéciles ? Pour répondre à cette question, j’ai projeté aux élèves deux graphiques tirés de Devenez sorciers, devenez savants, qui montrent que, contrairement à ce qu’on aurait pu croire, il n’y a aucune corrélation entre le niveau d’étude et celui de croyance dans le « surnaturel ». D’où l’utilité de travailler son esprit critique…

Autre question qui est venue sur la table : ce qu’affirme le gourou-médecin-quantique-thérapeute-holistique aux parents de la petite fille, les histoires de « double énergétique qui n’entre plus en résonance avec le corps physique », c’est scientifique ? Non, on est bien d’accord… Le jargon utilisé n’est-il pas là simplement pour impressionner et accréditer artificiellement des thèses non éprouvées ? Certainement. Pourtant, ledit thérapeute appuie son discours sur certaines propriétés des particules élémentaires : le point crucial est donc, pour éviter de se faire embobiner, de réussir à faire la différence entre science et pseudoscience. J’ai alors présenté le critère de réfutabilité de K.Popper et demandé aux élèves de l’appliquer à quatre textes (ben oui, je suis prof de français…) très différents, mais qui présentent le point commun d’utiliser un argument ad hoc pour soustraire leur théorie à la réfutation :


Les deux heures suivantes :

Je souhaitais présenter quelque chose d’un peu plus fun aux élèves, sur le thème « nos sens nous trompent, un témoignage n’est donc pas une preuve ». J’ai réalisé une présentation, partant de l’affaire du Yéti nain de Levens (http://www.unice.fr/zetetique/articles/JB_yeti_nain/index.html). J’ai demandé aux élèves l’hypothèse explicative qui leur semblait la plus probante : présence d’un yéti ou taches dues à l’éclairage entre les feuilles de l’arbre ? Tous ont pensé que la deuxième explication était plus convaincante, ce qui m’a permis d’introduire le rasoir d’Occam et l’importance de rechercher une alternative moins « coûteuse » intellectuellement face à un phénomène dit « paranormal ».

Puis j’ai poursuivi sur les « paréidolies », ou erreurs de perceptions faisant voir des choses connues dans des formes sans aucune signification. Je me suis servi du triangle de Koniza pour leur montrer que notre cerveau cherchait à donner du sens à ce qui n’en a pas forcément a priori, puis je leur ai montré des exemples, en les faisant participer : « bon, là, vous voyez quelque chose ? Quoi à votre avis ? » Ils ont eu un peu de mal à reconnaître la Vierge ou Elvis sur les toasts, mais une fois que le premier élève les a reconnus, ça a paru évident pour tout le monde.

CorteX_triangle CorteX_Toast_Vierge CorteX_Pareidolie_Elvis
Triangle de Koniza Paréidolie de la Vierge Marie Paréidolie d’Elvis (ou Elvis toast)

Une apparition de Jésus sur l’anus d’un chien a énormément plu, le fait de la passer juste après le visage très très vague dudit Jésus sur un drap, avec à côté un prêtre en train de dire : « moi j’y crois », évidemment ça fait rire…

CorteX_Jesus_coussin CorteX_Pareidolie_Jesus_anus_chien
Apparition de Jésus dans une église à la Réunion Sans commentaire

Tout cela m’a pris environ 45 minutes. Après je leur ai dit que si, au niveau visuel, on recherchait du connu dans ce qui est vague, ça marchait aussi au niveau intellectuel, et j’ai enchaîné sur une vidéo d’un spectacle de Frank Lepage donnant un cours de langue de bois (http://www.dailymotion.com/video/x9wwg5_franck-lepage-langue-de-bois_fun), qui a donc été l’occasion d’expliquer aux élèves le principe de l’effet puits. Je leur ai ensuite proposé de faire la même chose à partir du générateur de discours dans Devenez sorciers, devenez savants. Ils ont préparé ça pendant deux minutes, et sont venus faire quelques jolis discours devant les autres.

Enfin, j’ai décortiqué avec eux un horoscope. On a vu combien les descriptions étaient stéréotypées et faciles à reproduire en utilisant quelques trucs simples : être toujours positif, être vague (utiliser le mot « tout »), ratisser large (par exemple avec des « et » et des « ou »), etc. Ils ont alors pu rédiger entre eux des horoscopes. C’est un petit exercice d’écriture qui passe assez bien avec les élèves, en tout cas on a bien ri !

Voilà, je pense faire évoluer cet atelier de session en session : la suite bientôt, donc !  


Atelier sur la morphopsychologie

Pour cet atelier, j’ai commencé par projeter aux élèves le visage de Dracula tiré du film Nosferatu de Murnau, puis je leur ai demandé de le décrire en quelques lignes. CorteX_DraculaJ’ai choisi la version de Murnau car, malgré de nombreuses différences, c’est encore dans ce film que l’aspect physique de Dracula correspond le mieux au portrait initial que Bram Stocker fait dans son livre. Après avoir procédé à quelques lectures des productions des élèves au cours desquels j’ai mis l’accent sur certaines caractéristiques physiques qui auront une importance par la suite (nez, oreilles et sourcils), je leur ai distribué ledit portrait :

« Son visage donnait une impression de force, avec son nez fin mais aquilin, des narines particulièrement larges, un front haut et bombé, des cheveux qui se clairsemaient aux tempes, mais, ailleurs, épais et abondants. Les sourcils, massifs, se rejoignaient presque à l’arête du nez et paraissaient boucler tant ils étaient denses. La bouche, pour autant que je pusse l’entrevoir, sous l’épaisse moustache, présentait quelque chose de cruel, sans doute en raison des dents éclatantes et particulièrement pointues. Elles avançaient au-dessus des lèvres elles-mêmes dont le rouge vif soulignait une vitalité étonnante chez un homme de cet âge. Les oreilles étaient pâles et se terminaient en pointes. Le menton paraissait large et dur et les joues, malgré leur maigreur, donnaient toujours une impression d’énergie. L’impression générale était celle d’une extraordinaire pâleur. »

Plus loin dans le roman, Mina Harker, interrogée par le professeur Van Helsing, note que « Le comte est un criminel et de type criminel. Nordau et Lombroso le classeraient dans cette catégorie. »

Nous quittons ici le terrain de la fiction pour rejoindre celui de la réalité : Mina Harker fait ici allusion à la théorie de la criminalité innée que Cesare Lombroso exposa dans L’homme criminel (1876), dont j’ai distribué un extrait aux élèves (tiré de La mal-mesure de l’homme de Stephen Jay Gould) en leur demandant de repérer, dans le portrait de Dracula, les éléments qui en semblaient tirés :

« Le nez [du criminel] au contraire […] est souvent aquilin comme le bec d’un oiseau de proie. »

« Les sourcils sont broussailleux et tendent à se rejoindre au-dessus du nez. »

« […] avec une protubérance sur la partie supérieure du bord postérieur […] une survivance de l’oreille pointue. […] »

Lombroso pensait ainsi que la criminalité était quelque chose d’inné qui conférait au criminel des traits de visage particulier. Bien sûr, puisque la criminalité était innée, elle était également incurable, et la théorie de Lombroso a contribué à envoyer à la mort des gens qui avaient accompli des délits mineurs mais qui, étant nés criminels, allaient fatalement commettre un jour ou l’autre des crimes beaucoup plus graves…

J’ai ensuite demandé aux élèves si, d’après eux, cette théorie était toujours en vogue. Certains ont évoqué, pendant la Seconde Guerre Mondiale, les caricatures de juifs, invariablement représentés avec d’énormes nez censés permettre de les repérer au premier coup d’œil.

  CorteX_affiche_juif  

Mais aucun élève n’a mentionné le domaine des ressources humaines et du management, dans lequel (d’après Renaud Marhic, Le New Age, son histoire… ses pratiques… ses arnaques…) la « morphopsychologie », qui prétend que l’on peut connaître la personnalité de quelqu’un en regardant les traits de son visage, serait employée par pas moins de 12% des recruteurs. D’après les théories du docteur Louis Corman, le fondateur de la morphopsychologie « moderne » après les précurseurs que furent Gall ou Lavater, il existerait des « dilatés » de visage, ayant pour caractéristique sociopsychologique une insertion facile, une jovialité, etc., et des « rétractés » qui seraient caractérisés au contraire par une fermeture par rapport à leur milieu social… La forme du visage permettrait ainsi à certains recruteurs de savoir sur quel type d’emploi une personne pourra donner le meilleur d’elle-même…

Pour éprouver la validité de cette théorie, j’ai demandé aux élèves de retrouver, parmi une liste de visages, la profession de chacun :

CorteX_portraits

Cet exercice est tiré du livre d’Alain Cuniot, Incroyable… Mais faux ! Bien sûr, il y a un piège : tous les visages sont ceux de comédiens !

Je cite la conclusion de Cuniot : « Comment les « lois » de la morphopsychologie peuvent-elles s’adapter aux comédiens, lesquels, excellents hommes, fins, cultivés, interprètent avec la plus grande véracité les plus ignobles brutes, les sadiques les plus repoussants, compte tenu qu’ils ont le front bas, le nez large, le menton prognathe, les oreilles décollées, etc. ? »

L’intéressant, avec la morphopsychologie, c’est qu’elle ne représente qu’un aspect d’une théorie plus large, celle du déterminisme biologique qui prétend enfermer le destin des hommes dans leurs caractéristiques physiques et biologiques. J’ai demandé aux élèves s’ils avaient d’autres exemples de déterminisme biologique, et la discussion a bien sûr porté sur le racisme. Je n’ai cependant pas résisté au plaisir d’évoquer avec eux la théorie des « styles d’apprentissage », aujourd’hui réfutée (http://www.charlatans.info/news/Les-styles-dapprentissage-refutes) mais qui leur a généralement valu de remplir quelques tests au lycée qui parfois ont malheureusement pu influencer leur orientation.
 

Graal et rasoir d’Occam

Ce cours est une version didactisée d’un article de la newsletter de septembre 2012 de l’Observatoire zététique : « L’énigme du Graal et le principe de parcimonie » (http://www.zetetique.fr/index.php/nl). J’ai choisi de travailler sur ce thème car il me permet de mêler des éléments de culture littéraire à une démarche de type zététique.

J’ai donc commencé par demander aux élèves s’ils avaient entendu parler du Graal et ce qu’ils savaient sur ce sujet. Les réponses furent assez vagues. Les élèves en avaient effectivement entendu parler, surtout à travers des films et des séries télévisées. Ils l’associaient à une coupe plus ou moins en rapport avec la religion chrétienne mais il a fallu que je les aide un peu pour arriver à l’hypothèse la plus connue : le Graal serait la coupe dans laquelle a bu le Christ lors du repas de la Cène, et qui a servi à recueillir le sang de son flanc percé par la lance du centurion Longin pendant sa crucifixion.

CorteX_Graal_croix

Or il ne s’agit là que d’une hypothèse parmi d’autres, car la vérité est que nous ne savons pas très bien ce qu’est le Graal : celui-ci apparaît en effet pour la première fois dans un roman écrit au 12ème siècle par Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, qui raconte les aventures du chevalier Perceval, arrêté en plein périple par une rivière apparue mystérieusement sur laquelle vogue la barque du Roi Pêcheur, qui propose au chevalier de venir se restaurer dans son château, et tant qu’à faire d’y passer la nuit. Pendant que Perceval discute avec son hôte dans le château, un cortège défile sous leurs yeux, où l’on voit apparaître un graal (il s’agit ici d’un nom commun qui désigne en ancien français un plat à poisson) magnifiquement serti de pierres précieuses et précédé d’une mystérieuse lance qui saigne (qui sera plus tard associée à la lance de Longin). J’ai fait lire le passage aux élèves, et ils ont pu constater que si Perceval brûle d’envie de demander pourquoi la lance saigne et ce que contient le Graal, il n’en fait rien, par peur de paraître indiscret.

CorteX_Graal_plat

Dans la suite de l’aventure, le Graal réapparaît à chaque fois qu’un nouveau plat est servi, mais Perceval n’ose pas plus parler, tant et si bien qu’il finit par aller se coucher sans avoir obtenu de réponse à la question qui le taraude. Le lendemain, lorsqu’il se réveille, le Roi Pêcheur a disparu et le château est entièrement vide. Pour comble, Chrétien de Troyes meurt avant d’avoir terminé son roman, et le lecteur lui non plus ne saura donc jamais le fin mot de l’histoire…

Plusieurs auteurs ont écrit des « continuations » de l’histoire de Perceval. Dans la plus célèbre d’entre elles, écrite par Robert de Boron au 13ème siècle, le Graal devient le « Saint Calice » ayant servi à recueillir le sang du Christ, mais rien n’indique que Chrétien de Troyes ait eu cette idée en tête, et il existe bien d’autres théories, qui attribuent au Graal des origines templière, cathare, ou encore celtique.

Après cette longue présentation, j’ai distribué aux élèves deux extraits, l’un tiré des Métamorphoses d’Ovide, l’autre du Da Vinci Code de Dan Brown : il s’agit d’attribuer un degré de probabilité à deux hypothèses explicatives concurrentes de l’énigme du Graal, et de justifier son choix.

Hypothèse 1 : le Graal est un emprunt aux Métamorphoses d’Ovide. Chrétien de Troyes a été influencé par le passage sur la Corne d’Abondance (je l’ai énormément raccourci, car il est très long).

CorteX_ovide

Hypothèse 2 : le Graal représente, comme dans le passage tiré du Da Vinci Code, la descendance cachée du Christ.

CorteX_Da_vinci_code

Laquelle de ces deux hypothèses vous paraît-elle la plus plausible ? Les élèves ont trouvé soit que les deux hypothèses étaient aussi crédibles l’une que l’autre, soit que l’hypothèse numéro deux était la plus crédible.

Je leur alors présenté le rasoir d’Occam, principe logique qui incite à privilégier la première hypothèse, beaucoup moins coûteuse du point de vue cognitif : elle nous demande d’accepter seulement que les écrivains s’influencent les uns les autres (et les points communs entre les deux récits sont nombreux, comme cela est développé dans l’article de l’OZ), alors que la deuxième hypothèse nous demande d’accepter d’emblée l’origine chrétienne du Graal, que rien n’indique, mais également que Jésus a eu une descendance, que celle-ci a été cachée par l’Église sans qu’on n’en sache rien, bref, toute une « théorie du complot » pour laquelle il n’existe pas la moindre preuve.

Pour leur montrer les conséquences que peut avoir ce genre de choix, je leur ai parlé du « Mouvement du Graal », organisation à caractère sectaire dont le fondateur serait une incarnation de Jésus, et prétend que le Graal, après avoir servi à recueillir le sang du Christ (le sang du fondateur, donc), repose maintenant dans le Royaume Divin, où il déverse en permanence l’Énergie Universelle dont se nourrit l’ensemble de la Création… Le problème, c’est que ce mouvement dispense à ses membres une vision très particulière de la médecine, source de nombreuses dérives… (Sources : Unadfi, http://unadfi.org/mouvement-du-graal-le-proces-d-un.html )

Eh oui ! L’hypothèse d’un emprunt direct aux Métamorphoses ne fait pas forcément rêver… Mais comme le dit Henri Broch : « Le droit au rêve a pour contrepartie le devoir de lucidité. »

Mortimer Leplat

Le jeu des trois boîtes, ou problème de Monty Hall

Connaissez-vous Monty Hall ? C’est le nom d’un présentateur télé états-unien qui a présenté pendant près de treize ans le redoutable jeu Let’s make a deal mettant en scène un casse-tête probabiliste tout à fait contre-intuitif, et par là même, stimulant la pensée critique. Ce « faux paradoxe » dont la première forme connue a plus d’un siècle est également connu sous le nom du « jeu des deux chèvres et de la voiture ».
Une première version de ce casse-tête nous a été envoyée par Louis Dubé, des Sceptiques du Québec. Suite à sa publication sur cette page, un enseignant de mathématiques en classe préparatoire, Judicael Courant, nous a soumis une version pleine de variantes, ludique, élaborée à quatre mains avec son collègue Walter Appel, qui ne postule plus la bienveillance de l’animateur. De quoi faire chauffer nos neurones.


Version initiale 

CorteX_Monty-Hall

  • 100 $ sont cachés sous l’une de trois boîtes, identifiées : A, B et C.
  • On vous demande de choisir sous laquelle des trois boîtes se trouve l’argent.
  • Ignorant sous laquelle des boîtes se trouve l’argent, vous choisissez au hasard la boîte A.
  • Pour vous aider, on dévoile qu’il n’y a pas d’argent sous la boîte B.

QUESTION : Conservez-vous votre choix : A ?

1. Oui, je garde mon premier choix
2. Non, je change mon premier choix
3. Aucune importance (soit toujours garder, soit toujours changer)
4. Au hasard (l’un ou l’autre à « pile ou face » à chaque coup)

Pour la solution , cliquez sur ce lien : Louis Dubé, des Sceptiques du Québec, le partage avec nous sous une forme simple ; les plus férus de mathématiques pourront le résoudre avec le théorème de Bayes.

 

Variantes

Nous relayons ici les remarques de Judicael Courant sur le jeu des trois boîtes, envoyées au Cortecs en décembre 2014, ainsi qu’une version complètement démoniaque de ce  casse-tête.

Bonjour,
Enseignant de mathématiques et d’informatique en classe prépas, […] je suis cependant déçu par votre page sur le problème des trois boîtes car vous faites l’impasse sur une question qui me semble essentielle pour la résolution du problème : est-on sûr que, lorsqu’on nous dévoile qu’il n’y a pas d’argent sous la boîte B, c’est bien pour nous aider ?
Si on a des raisons d’en douter, la solution peut devenir très différente : par exemple dans le cas extrême ou celui qui a caché l’argent a un côté pervers, on peut penser qu’il ne nous propose de modifier notre choix que parce nous avons trouvé la bonne boîte. On pourrait aussi se demander si, lorsque nous avons choisi la bonne boîte, la personne qui nous aide choisit de façon équiprobable entre les deux boîtes restantes, ou si elle a une préférence (par exemple, elle prend la première dans l’ordre alphabétique).
Je soumets à votre sagacité l’exercice ci-joint que j’ai donné à mes étudiants de MPSI l’an dernier. C’est un énoncé repris sur un collègue, Walter Appel, que j’ai volontairement rendu un peu plus complexe […]. Il me semble en effet qu’il y a un point important à débusquer derrière les études de ce genre : elles partent d’hypothèses a priori, très souvent implicites et non remises en question.

Version initiale

En 1761, Thomas Bayes, théologien protestant, quitte pour toujours cette vallée de larmes. Il arrive aux portes du Paradis et, comme il n’y a plus beaucoup de places et que Bayes a parfois eu des opinions assez peu orthodoxes en manière de théologie, Saint Pierre lui propose le test suivant. T. Bayes est placé devant trois portes identiques, dont deux mènent à l’enfer et une au paradis, et il est sommé de choisir. N’ayant aucune information a priori, Bayes choisit une des portes au hasard. Avant qu’il ait le temps de l’ouvrir, Saint Pierre — qui est bon — lui dit : « Attends, je te donne encore un renseignement… » et lui ouvre une des deux autres portes (menant bien entendu à l’enfer). Que doit faire Bayes ? Garder sa porte, ou changer d’avis et prendre l’autre porte non ouverte ?

Variante 1

Reprendre l’exercice dans le cas où Saint Pierre a passé la soirée précédente à faire la fête, il ne sait plus du tout où mènent les portes et en ouvre une au hasard et se rend compte qu’elle mène à l’enfer.

Variante 2

Vous arrivez vous-même devant Saint Pierre mais vous remarquez qu’il a un pied de bouc : Saint Pierre a tellement fait la fête qu’il n’est plus en mesure de s’occuper des entrées et Satan en a profité pour le remplacer (en se déguisant). Vous imaginez assez vite ce que fait Satan : lorsqu’un candidat a choisi une porte,

  • si elle conduit vers l’enfer, il le laisse prendre la porte choisie 
  • si elle conduit vers le paradis, il lui montre une porte conduisant vers l’enfer et lui propose de changer.

Vous choisissez une porte, Satan vous propose de changer. Que devez-vous faire?

Variante 3

En fait, vous réalisez que Satan est bien plus pervers que cela:

  • si le candidat choisit une porte conduisant vers l’enfer, il lui propose quand même de changer avec la probabilité p1
  • si le candidat choisit la porte conduisant vers le paradis, il lui propose de changer avec la probabilité p2.

Que devez-vous faire?

Atelier Esprit critique & Travail – la Fabrique du futur

J’ai co-animé avec notre compère Philippe Rennard un atelier sur le sujet du travail dans le cadre du cycle de coformation de la Fabrique du futur, à Grenoble. Voici le déroulé de cet atelier et le matériel utilisé pour aborder des notions d’esprit critique dans le vaste domaine du travail, que ce soit dans la présentation de chiffres ou de graphiques ou dans les discours politiques.


Cet atelier avait pour objectif de décortiquer des discours politiques et médiatiques autour du monde du travail afin de mettre en lumière des techniques de manipulations langagières, de raisonnements fallacieux, et l’utilisation abusive de chiffres et de données scientifiques.

Après le décorticage d’exemples, le groupe était ensuite invité à échanger sur les enjeux et les implications de ces petites et grandes manipulations.

1ère étape : un peu d’outillage critique

Avant de partir sur le terrain il est nécessaire de s’équiper.CorteX_Chiffre_chomage_comparaison_graphique_Le_Petit_journal_29_11_2011_image2 J’ai donc présenté une partie des techniques de manipulation des chiffres, de leur présentation fallacieuse et des moyens de s’en prémunir en utilisant essentiellement du matériel tiré de l’article de Nicolas Gauvrit et du matériel de Guillemette Reviron : Mathématiques et statistiques – Graphiques, attention aux axes ! .
Cet outillage est important car il permet de tordre le cou à l’idée d’une objectivité totale dans la présentation de résultats scientifiques, qui bloque le débat et empêche toute contestation sous le prétexte que « c’est arithmétique ! on ne peut donc rien y faire ». Comme le dit Franck Lepage « On ne va pas descendre dans la rue en disant : non à l’arithmétique, non à l’arithmétique ! ».
Comprenons bien que si les données de bases sont objectives, la manière dont on en rend compte ne l’est pas forcément.

2ème étape : utilisation de données scientifiques

Des chiffres du chômage jusqu’aux sondages d’opinion, les discours politiques et médiatiques à propos du travail sont régulièrement étayés par des données de type scientifique. Pourtant ces données apparemment objectives peuvent être largement dévoyées, que ce soit pour mieux coller à la ligne éditoriale d’un journal, à celle d’un courant politique. J’ai présenté deux exemples.

1er exemple : le Journal du dimanche du 12 octobre 2008 affiche en couverture « Sondage : les Français veulent travailler le dimanche. »

L’article s’appuie sur un sondage Ifop-Publicis et indique que 67% des français veulent travailler le dimanche. Pourtant, quand on prend le temps d’éplucher ledit sondage, on se rend compte que la question était posée d’une bien curieuse façon.
Question : « travailler le dimanche est payé davantage qu’en semaine. Si votre employeur vous proposait de travailler le dimanche, accepteriez-vous ? ».
CorteX_travai_Titre choc2Réponses possibles :
– non jamais (33%)
– de temps en temps  (50 %)
– toujours  (17 %)
 
On note que la question n’est pas « voulez-vous travailler le dimanche ? » ou « êtes-vous favorable au travail le dimanche ? » comme le titre de l’article semble l’affirmer.
La question est construite d’abord sur une prémisse (travailler le dimanche est payé davantage qu’en semaine) puis une hypothèse (si votre employeur vous proposait de travailler le dimanche, accepteriez-vous ?). Cette construction oriente particulièrement les réponses des sondés, qui n’ont que le choix d’accepter la prémisse de départ qui ne va pourtant pas de soi (travailler le dimanche n’est pas forcement payé plus) et qui se centre sur l’aspect pécuniaire.
Enfin, les réponses possibles sont restreintes : – non jamais – de temps en temps  – toujours. La proposition de réponse à 3 entrées induit presque automatiquement un effet Bof en offrant une réponse moyenne, consensuelle : « de temps en temps », ce qui expliquerait peut-être les 50% pour cette réponse.
Les 3 entrées offrent, en outre, la possibilité de présenter les résultats à la guise du commentateur : « Travail le dimanche : 67% des français y seraient favorables », c’est-à-dire, 50 % « de temps en temps » + 17 % « toujours ».  Mais on pourrait commenter également : « Travail le dimanche : 83 % des français n’y seraient pas vraiment favorable » : c’est-à-dire 50 % « de temps en temps » + 33% « non jamais ».
Cette présentation joue sur un effet Bi-standard, qui consiste à raisonner selon deux standards différents selon les circonstances, en gros changer les règles en cours du jeu.
Article lié, sur Agoravox

2ème exemple : Le Figaro.fr du 12 Octobre 2010 titre « Partir plus tôt en retraite peut nuire à la santé »

CorteX_travai_Le figaro_travail et sante« Partir plus tôt en retraite ne permet pas forcément aux ouvriers d’en profiter plus longtemps. Au contraire, un rapport publié par l’Institut allemand pour l’étude du travail, montre que cela augmente les chances de mourir prématurément », annonce l’article du Figaro en octobre 2010, étude scientifique à la clé.
Fatal Attraction ? Access to Early Retirement and Mortality”, Andreas Kuhn Jean-Philippe Wuellrich, Josef Zweimüller, Institute for the Study of Labor, August 2010.

Là encore, la lecture de l’étude nous apprend beaucoup de choses, entre autres ces conclusions des chercheurs  : « Pour les hommes, partir à la retraite un an plus tôt augmente de 13,4% les chances de mourir avant 67 ans. Pour les femmes, en revanche, un départ à la retraite anticipé n’a aucun effet sur l’âge du décès » est interprété par le Figaro comme « Partir plus tôt en retraite peut nuire à la santé » C’est une simplification pour le moins radicale.

Ensuite l’article du Figaro ne mentionne pas une donnée importante. En effet, les chercheurs parlent de retraites volontaires et de retraites non volontaires (licenciements par exemple) : « La retraite précoce concernant les départs volontaires ne semble pas liée à la mortalité, alors que la retraite précoce causée par des licenciements involontaires l’est ». Cela change la conclusion de cette étude par rapport à la présentation qu’en fait l’article.

Enfin, l’article du Figaro ne mentionne pas les hypothèses d’explication des chercheurs, conclusion de l’étude : « Finalement, nous apportons des éléments prouvant que la retraite précoce involontaire a un effet négatif sur la santé, mais pas nécessairement la retraite précoce volontaire »

Ce sont bien les départs en retraite « involontaires » qui auraient un impact significatif sur la mortalité, et non le fait – en lui-même – de partir à la retraite plus jeune. Nous avons donc affaire à un effet Cigogne.
On peut se demander si l’article du Figaro n’a pas été construit d’abord sur une conception idéologique – qui serait : « partir en retraite plus tôt n’est pas forcément une bonne chose » – puis étayé ensuite par les données de l’étude scientifique, non sans de petits oublis et de grandes simplifications. Cela s’apparente à un effet petit ruisseaux : si les petits ruisseaux font les grandes rivières, les petits oublis (ou erreurs) permettent les grandioses théories. Pour éviter cet effet, on peut se poser la question suivante : tous les paramètres sont-ils donnés et donnés correctement ?

Article lié, sur Acrimed


3ème étape : supports vidéo

Désormais lourdement armé contre les manipulations, mon co-animateur Philippe Rennard a pris le flambeau pour présenter une série de documents vidéos comme supports de discussion. Il présente, quatre exemples de vidéos et résume les réactions qu’elles ont pu susciter.
Ces commentaires s’inscrivent dans le travail de réflexion de la fabrique du Futur : « Un autre monde du travail est possible… oui, mais lequel ? » 

1/ Serge Dassault et la valeur « travail »

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=cCnEYdhtqJM]

Dans cet exemple Serge Dassault oriente la pression sur les salariés :

  • en comparant l’incomparable, à savoir (bons) travailleurs chinois et (mauvais) français, sans même évoquer les différences abyssales entre les standards socio-productifs des pays respectifs ;
  • en nivelant par le bas : nous devrions culpabiliser de ne pas travailler assez, au lieu de nous mobiliser contre l’exploitation des travailleurs chinois.
C’est un discours qui fait fi des contraintes concurrentielles et des injonctions productivistes
 
 

2/ UMP : la République du travail et du mérite

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=PfnXQixZXvg]Dans cet exemple, Camille Bedin tente de masquer la répartition arbitraire des richesses :

  • sous couvert de l’idée reçue « la réussite ne pourrait s’accomplir en dehors du travail ». C’est la représentation d’un travail qui (par la magie du mérite) engendrerait la réussite sociale qui est inlassablement répétée ici ;
  • sous le concept « d’égalité des chances », cache-sexe des inégalités auxquelles aboutit une économie basée sur le capitalisme. Les déclinaisons récentes de ce concept vont de la Bourse au mérite aux internats d’excellence, structures sujettes aux discriminations positives qui permettront d’entretenir le mythe de l’ascension sociale ;
  • sous la gabegie de « l’assistanat » désignée comme cause de tous les maux économiques et sociaux. Cela résulte pourtant des impasses de l’idéologie du mérite dont le seul partage des richesses n’assurerait certainement pas la paix sociale.

3/ Wauquiez et les contreparties au RSA

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=hp0hX7XMdMs]

Laurent Wauquiez tente dans cet exemple de rendre évident des conditions à l’octroi de minima sociaux :

  • en manipulant les chiffres. Selon lui, un couple au RSA gagnerait plus qu’un couple au SMIC. C’est faux ;
  • en substituant à l’emploi salarié un service bénévole de travail obligatoire ;
  • en plafonnant, c’est-à-dire en réduisant les aides de l’État.

Autant de stratégies qui s’effondreraient avec par exemple un revenu de base inconditionnel.


4/ Un jour sur quatre, un Québécois perd la vie au travail

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=9jwNUlbYIYU]

Dans cet exemple le message tente de concilier santé et travail au sein d’une économie qui les rend profondément incompatibles :

  • on travaille pour gagner notre vie, pas pour la perdre. Difficile de ne pas déceler ici un détournement du slogan « soixante-huitard » « on ne veut pas perdre notre vie à la gagner« . Augmenter la sécurité sur un lieu de travail risqué préserve moins de vies que refuser tout travail dans des conditions hasardeuses.
  • la touche patriotique finale et anthropomorphique (le Québec a besoin de tous ses travailleurs) arrive comme pour convaincre de l’intérêt supérieur de la mobilisation dans l’intérêt du « travail » mais pas forcément des salariés.

Philippe Rennard et Nicolas Gaillard

Journalisme – atelier titres de presse

Depuis septembre 2012, je donne un cours « Esprit critique & autodéfense intellectuelle » à l’Université Inter-Âge du Dauphiné. L’une de mes « étudiantes », Yolande Vallon, anime elle-même un atelier « Revue de presse » et m’a demandé un exposé participatif sur la question des titres d’articles. C’était le 15 mai 2013. Voici comment je m’y suis pris. Puisse ceci faciliter la tâche de toutes celles et ceux qui voudraient faire de même.


Je savais que j’allais avoir pendant une heure et demie une quinzaine d’habitué-es (qui s’avérèrent près d’une trentaine) majoritairement retraités. Un public retraité qui vient se former est généralement un public déjà pointu, et il faut bien intégrer le fait que nous n’avons pas affaire à des « perdreaux de l’année tombés de la dernière pluie ». Les exemples que j’ai choisis étaient donc assez pointus, volontairement. Pour un public jeune (pré-bac), je déconseille donc le matériel de presse employé ici, et enjoins à en choisir du plus facile.

Une heure et demie, avec le temps d’installation, est un temps court. Aussi ai-je opté pour l’efficacité.
J’avais la possibilité de projeter, aussi ai-je concocté un diaporama sous Libre office.
Voici la trame que j’ai employé.

Introduction

J’ai expliqué la notion de fabrique du consentement (E. S. Hermann et N. Chomsky 2008) et j’ai précisé que la manufacture de l’opinion commence dès le choix d’un titre, souvent percutant, court, de manière à être « apéritif », mais truffé de non-dits et d’implicite.

1ère partie : introduction des notions de base

J’ai exposé l’effet paillasson, puis l‘effet impact, en montrant pour chacun des exemples simples, puis plus complexes, et en parlant des risques inhérents à ces effets.
Pour l’effet paillasson : des tautologies, des définitions peu claires et l’encouragement au raisonnement « à la hache », par gros paquets stéréotypaux. Dans mon illustration sur la délinquance, j’ai repris un TP de G. Reviron (ici) ainsi que des articles de Laurent Mucchielli (entre autres ).
Plus de détails ici : effet paillasson.

Pour l’effet impact : l’appel à l’émotion plus qu’à la raison. J’ai entre autre repris ce remaniement de la langue suggéré dans un amendement de la loi Loppsi 2 transformant vidéosurveillance en vidéoprotection, moins « anxiogène ».
Plus de détails là : effet impact.
J’ai ensuite introduit la notion de Mots fouines (voir Baillargeon 2005), ainsi que l’exposé sur les mots à effet puits et la langue de bois de Franck Lepage, de la SCOP d’éducation populaire Le Pavé.
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=oNJo-E4MEk8]
Vinrent les carpaccios journalistiques ou arts de mettre en scénario préfabriqué l’information qui passe (appel à la peur, à l’espoir, et fabrication du scoop), avec quelques exemples appuyés.
J’ai terminé par la notion de plurium interrogationum, ou effet gigogne, art de cacher dans une question une prémisse non négociée.

2ème partie : discussion sur quelques titres de presse du jour

J’ai misé sur la fraîcheur de mes exemples et je ne voulais pas être suspecté d’avoir fait un biais de sélection des exemples les plus pertinents. Par conséquent, j’ai attendu le matin même, et ai choisi trois quotidiens célèbres, de subjectivité politique évidente pour deux d’entre eux : Libération, socio-démocrate assez mou, et le Figaro, gaulliste-conservateur libéral. Le troisième, Le Monde, est célèbre pour un certain opportunisme politique, et une ligne éditoriale fluctuante et assez peu lisible.
J’ai alors prélevé trois informations, et leurs traitements respectifs dans chaque journal. J’ai fait les copies d’écran que voici, classée dans l’ordre précité Libération, Figaro, Le Monde. 

  15 mai 2013 Récession – Libération, Figaro, Le Monde
CorteX_France_recession_Libe_15.5.2013
CorteX_France_recession_Figaro_15.5.2013
CorteX_France_recession_Monde_15.5.2013
 15 mai 2013 PSG / Trocadéro – Libération, Figaro, Le Monde
 CorteX_emeutes_PSG_Libe_15.05.2013
CorteX_emeutes_PSG_Figaro_15.5.2013
CorteX_emeutes_PSG_Monde_15.5.2013
15 mai 2013 Cours d’anglais à l’Université – Libération, Figaro, Le Monde.
CorteX_Anglais_libe_15.05.2013
CorteX_Anglais_Figaro_15.05.2013
CorteX_Anglais_Monde_15.05.2013

Je ne rentrerai pas dans le détail du commentaire de ces titres, puisque c’est le public qui l’a produit. On peut toutefois dire que la ligne politique est assez simple à décrypter pour qui connaît le contexte politique en cette fin de première année de mandat de président du PS François Hollande – les articles de Libération sont plus complaisants, ceux du Figaro plus vindicatifs, et ceux du Monde plus modérés.

Je ne peux qu’encourager l’enseignant à faire sa propre moisson de captures d’écran. Je hasarde toutefois un conseil : dans un TP comme celui-ci, il faut bien garder la barre et n’analyser que les titres et non le sujet de l’article en tant que tel. Peu importe notre avis sur la « récession » par exemple, il s’agit de voir la différence de traitement pour une même information. Le risque est grand chez un public politisé de voir un débat hors-sujet démarrer comme un feu de broussailles.
Voici mon diaporama complet.
N’hésitez pas à partager ici-même vos propres ressources.

Richard Monvoisin

Brève bibliographie :
E. S. Herman & N. Chomsky, La fabrication du consentement – De la propagande médiatique en démocratie, Agone (2008)
F. Aubenas & M. Benasayag, La fabrication de l’information, Les journalistes et l’idéologie de la communication, La découverte (1999)
N. Baillargeon, Petit cours d’autodéfense intellectuelle, Lux (2005)
R. Monvoisin, Pour une didactique de l’esprit critique, thèse, Univ. Grenoble (2007)
Crédit image N°1: Fotolia

Luttes paysannes et populaires – Projet Histoire des luttes sociales

Vous avez lu les bases du Projet Histoire des luttes sociales, paysannes, populaires, féminines… Vous voici dans l’onglet Luttes paysannes et populaires. Vous avez vu / entendu quelque-chose de ce genre ? Écrivez-nous.

 

L’affaire Durand, 1910

CorteX_Affaire_DURAND

J’ai (RM) découvert l’affaire Durand sur le catalogue des éditions Rouge et Noir, il y a quelques temps. Ouvrant le livre de Patrice Rannou, qui se lit d’une traite, j’ai été particulièrement stupéfait par cette histoire, qui nous amène au Havre, chez les Charbonniers, et montre comment les grosses compagnies étaient capables d’instrumentaliser ce qui était un fait divers tragique (une rixe entre types ivres menant à la mort l’un d’entre eux, Louis Dongé, notoirement ‘jaune », ou « renard », c’est-à-dire anti-gréviste) en un combat anti-syndical. C’est ainsi que Jules Durand fut accusé sans preuve d’avoir prémédité et commandité l’assassinat de Dongé, et fut condamné à la peine capitale, provoquant ce que d’aucun.es ont appelé l’affaire Dreyfus du pauvre. Les militant.es ouvrier.es, anarchistes et socialistes levèrent des campagnes, dans la lignée des dénonciations des violences patronales fréquentes envers des grévistes (Fourmies 1891, Draveil 1908, etc.) et annonçant la formidable campagne de Louis Lecoin sur Sacco & Vanzetti dix ans plus tard. Jules Durand fut libéré neuf mois plus tard, seul homme condamné à mort au cours du XXe siècle, dont l’innocence sera finalement reconnue par la Cour de Cassation. Mais la prison lui aura volé sa santé mentale, et Durand ne recouvrera jamais la raison, finissant ses jours dix ans plus tard à l’hôpital Sainte-Anne, seul comme un menhir.

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La fabrique de l’histoire du 11 mars 2014 sur France Culture traita du sujet, dans un documentaire d’Anaïs Kien, réalisé par Françoise Camar : Mort d’un Renard – Enquête sur l’affaire Jules Durand.

Télécharger

Un site lui est consacré, julesdurand.fr, ainsi qu’une bande-dessinée, Les docks assassinés, signée Roger Martin et Mako (2016, L’atelier). Il existe également une association des amis de Jules Durand.

Farrebique et Biquefarre, de Georges Rouquier

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Laure Adler est en entretien sur France Culture avec Georges Rouquier (1909-1989) à propos de ses films Biquefarre et Farrebique, témoignages quasi-documentaires de la vie d’un village de l’Aveyron, au sortir de la guerre d’abord puis 40 ans plus tard. Cette émission, qui remonte à 1984, a été rediffusée le 5 mars 2017. Je (RM) ne peux pas évoquer ces films sans faire mention de mon attachement ancien et « tripesque » à ces œuvres.

L’émission est ici :

Télécharger

Les bandes-annonces des films sont là :

Farrebique (1946)

Biquefarre (1983)

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Howard Zinn, une histoire populaire américaine, volet 1, Du pain et des roses

Ce travail salutaire, attendu de longue date, les Mutins de Pangée l’ont mené à bien. Il s’agit d’un retour sur les luttes sociales et populaires oubliées, qui ont émaillé les États-Unis aux XIXe et XXe siècles, et qu’a étudié Howard Zinn durant sa vie. Le film, réalisé par Olivier Azam & Daniel Mermet est produit par Les Mutins de Pangée et distribué au cinéma par Les Films des Deux Rives. Le DVD est désormais disponible. Le film, lui, est sorti en salle le 29 avril 2015.

CorteX_Des_voix_rebelles

L’émotion nous étreint, car Howard Zinn a été une personne fortement inspirante pour nous et notre matériel pédagogique. Je (RM) dois ma première rencontre avec ce personnage au film Good Will Hunting de Gus van Sant (1997) – Téléchargez l’extrait ici (en français). Dès lors, j’ai lu son travail, depuis ses livres et son autobiographie jusqu’à ses pièces de théâtres, dont le fameux En attendant Emma sur Emma Goldman. J’ai retrouvé des traces de ses citations favorites chez des musiciens, comme System of a down (on entend « we can’t afford to be neutral on a moving train » dans Deer dance, ou « There is no flag that is large enough to hide the shame of a man in cuffs » dans la chanson A.D.D), mais aussi chez Pearl Jam, NOFX, Bruce Springsteen et bien d’autres. Enfin, on pourra se régaler et regardant et lisant Des voix rebelles- Récits populaires des États-Unis , un livre-dvd édité par les Mutins de Pangée et les éditions Agone dans la collection Mémoire populaire, autour du film THE PEOPLE SPEAK inédit en France, de Howard Zinn, Antony Arnove et Chris Moore.

Les grandes grèves automobiles

Émission de Jean Lebrun La marche de l’histoire, sur France Inter, diffusée le 10 février 2015.

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« C’était l’époque des lois sur l’expression des travailleurs, que défendait Jean Auroux : on parlait de printemps de la dignité. L’industrie automobile française entrait dans son automne mais n’en avait pas vraiment conscience. PSA perdait de l’argent depuis 1980 mais comptait encore 180 000 salariés dans 8 usines Peugeot, 8 usines Talbot, 18 usines Citroën. Trois grandes grèves secouent successivement le groupe : à l’atelier de carrosserie de Peugeot Sochaux en octobre 1981, dans l’ensemble de l’usine de Citroën Aulnay en mai 1982, à Talbot Poissy le mois suivant. Ces  mouvements qui connaissent un grand écho font de l’O.S qui travaille à la chaîne une figure de proue. Le médiateur que nomme le gouvernement affirme qu’il faut lui ouvrir des « filières de libération ». Or il se trouve que les OS sont de plus en plus des immigrés. Mais, en 1982, ils ne sont pas encore présentés de manière systématique comme tels. C’est progressivement qu’ils vont l’être, à la faveur notamment du changement d’axe qui se produit  peu après. Les difficultés économiques manquent d’abattre le groupe PSA qui va couper la branche Talbot. À Poissy, le nouveau conflit qui s’ensuit en décembre 1983 est marqué par des traits très différents. Les ateliers sont plus divisés, il arrive qu’on y crie : « Les arabes à la Seine »…Les ouvriers immigrés avaient commencé à s’imaginer un avenir en France, leurs enfants organisaient cette année-là la Marche des Beurs : bientôt,  le rendez-vous serait manqué ».

Télécharger

Ambroise Croizat et la sécurité sociale

Bien des rues portent son nom, et bien peu savent qu’il y eut près d’un million de petites gens à ses obsèques en 1951. Surnommé le « ministre des travailleurs », ce Savoyard est l’un des fondateurs des lois relatives à la sécurité sociale, de l’organisation administrative des caisses aux régimes et conventions collectives. C’est un de ces personnages qui ont fondé à la force du poignet une part de notre bien-être actuel.

« Jamais nous ne tolérerons que ne soit renié un seul des avantages de la sécurité sociale. Nous défendrons à en mourir et avec la dernière énergie, cette loi humaine et de progrès... »

Dernier discours d’Ambroise Croizat à la tribune de l’Assemblée Nationale, en octobre 1950.

Émission de Là-bas si j’y suis, sur France Inter (23 décembre 2011) Télécharger ici. Écouter :

Émission 2 : télécharger (44 Mo) – Écouter :

Émission 3 : télécharger (39Mo) – Écouter :

Émission 4 : télécharger (41Mo) – Écouter :

Quand les céréaliers s’unissent : naissance des coopératives agricoles dans les années 30

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Documentaire d’Emmanuel Laurentin, réalisé par Christine Robert pour La fabrique de l’histoire, sur France Culture (26 avril 2004).

Depuis la fin du XIXème siècle, la forme coopérative s’était développée dans les milieux ouvriers et dans certaines activités agricoles. Cependant les petits et gros cultivateurs céréaliers étaient restés en dehors de ce type d’organisation, continuant à vendre leur blé aux petits négociants éparpillés sur tout le territoire. La crise des années 30 se double dans les milieux ruraux d’une chute des prix du blé sur plusieurs années. Les agriculteurs saisissent alors la nouvelle loi sur la coopération, votée une dizaine d’années plus tôt, pour s’unir face à la chute des cours. En quelques années, la France va se peupler de centaines de petites coopératives cantonales ou départementales qui pour beaucoup vont transformer le paysage rural en construisant de grands silos de béton, cathédrales de la nouvelle organisation agricole. Ce documentaire plonge dans les milieux coopératifs du Loir-et-Cher et des agriculteurs de la Vienne, à la recherche des derniers témoins vivants de cette aventure de la coopération.

Écouter ici.

Tous au Larzac, de Christian Rouaud (2011)

Christian Rouaud avait déjà fait le magistral documentaire « Lip, l’imagination au pouvoir » en 2007. Il récidive ici avec ce documentaire, en ce moment sur les écrans.

En octobre 1970 est divulgué le projet d’extension du camp militaire du Larzac, construit en 1902 et installé sur la commune de La Cavalerie sur une superficie confortable de 3 000 hectares. Cet agrandissement prévoit pourtant de porter sa surface à 17 000 hectares et d’empiéter sur douze communes environnantes. Le projet se heurte d’emblée à une levée de boucliers de la part des paysans de la région, qu’ils soient natifs de cette terre ou nouveaux arrivants. Pour en savoir plus.

Destruction massive, géopolitique de la faim

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Jean Ziegler

Avec Jean Ziegler, extrait de Là-bas si j’y suis, France Inter, 3 février 2012.

Il y est question  de l’article signé Ziegler « Quand le riz devient un produit financier », Le Monde Diplomatique, février 2012

Télécharger– Écouter :

La complainte d’un paysan ardéchois

Les pieds sur Terre, France Culture, 22 février 2011

Une journée avec Roland, paysan du plateau ardéchois, en zone de montagne trop basse pour les sports d’hiver et trop haute pour l’agriculture.

Télécharger – Écouter

Luttes contre l’aéroport de Notre-Dame des Landes

CorteX   Notre Dame des Landes

Émission du 7 mai 2011 de Terre à terre, France Culture. Reportage autour du projet d’aéroport du Grand-Ouest à Notre-Dame des Landes, et des luttes populaires qui s’y opposent – narrées sur ce blog-ci.

Merci à Jean-Noël Plauchu.

Télécharger – Écouter :

Luttes contre le puçage électronique des troupeaux

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Terre à terre, France Culture émission du 14 mai 2011.

Avec l’appel du collectif Faut pas pucer, ainsi qu’un article du journal CQFD, La puce à l’oreille (n°87 mars 2011) par Marie Ghis Malfilatre.

Télécharger – Écouter :

Les Hommes et le loup

Avec Jean-Marc Moriceau, La marche de l’Histoire, sur France Inter, 18 mai 2011.

Conflagration entre divers intérêts, différents champs scientifiques autour de la question du loup à travers les âges.

Télécharger – Écouter :

À lire : Jean-Marc Moriceau et Philippe Madeline, Repenser le sauvage grâce au retour du loup. Les sciences humaines réinterrogées, Presses universitaires de Caen (2010).

Vous avez des émissions à proposer ? Écrivez à contact [at] cortecs.org.

CorteX_Yasmine_Hegot

Sociologie, genre – Atelier Publicité & stéréotypes en 1ère ES, par Yasmine Hégot

Yasmine Hégot est enseignante de sciences économiques en lycée dans le Lot. Elle a construit une séquence de sociologie autour de la question du genre et des stéréotypes pour des 1ères ES.Elle raconte.


J’ai réutilisé l’analyse de N. Gaillard sur la campagne de recrutement de l’éducation nationale lors d’ un cours de sociologie avec une classe de première ES (26 élèves). Sur les 26, 15 sont des filles et 11 des garçons. La répartition est donc plutôt représentative d’une filière générale en Lycée (même en milieu rural) et satisfaisante pour cet atelier.

Dans le cadre d’un cours sur la socialisation différentielle (selon le milieu social d’abord puis selon le sexe), j’ai travaillé sur les stéréotypes féminins et masculins pendant une heure.

Voici la progression en trois points :

 1) A partir de la pub Moulinex ci-contre (1961), il s’agit pour eux de répondre aux deux questions suivantes (voir manuel de Sciences économiques et sociales 1ère, CorteX_Moulinex-libere-la-femme-robot_1961- éditions Belin) :

a. Illustrer les notions de stéréotype, de rôle et de statut

b. Quelle représentation a-t-on aujourd’hui de la femme au foyer ? 

2) Pendant qu’ils réfléchissent cinq minutes, je récolte des publicités qu’ils étaient chargés d’amener (seule contrainte : qu’elles représentent une femme ou un homme).

3) Enfin, nous mettons en commun des réponses.

Pas de problème pour la question a ; au statut de femme est rattaché le rôle de la ménagère (porté au rang de modèle social) et au statut d’homme celui de la protection matérielle…

Pour la seconde question b : à l’unanimité, les élèves répondent que le modèle de la femme au foyer est dépassé et que ce stéréotype est désuet. La femme est libérée, indépendante, autonome.. Au passage, je donne quelques bonnes raisons d’y croire (allongement des études, taux d’activité féminin qui a explosé, contraception…)

4) Retour sur leurs publicités. Sur 26 élèves, je récupère 24 publicités représentant une femme ! C’est déjà bon signe, car le but est de les exposer à une prévisible contradiction entre les déclarations de valeurs et les faits : les publicités recherchées reflètent un usage de l’image féminine très majoritaire d’une part, et que d’autre part, les élèves (quel que soit leur sexe justement) dirigent spontanément leur recherche vers ce genre de publicité. J’ouvre le débat.

  • Sur quels produits portent les publicités ?

  • Quel semble être le stéréotype féminin aujourd’hui ?

  • Est-ce signe d’émancipation ?

 Résultats évidents :

  • Les produits sont axés autour du soin du corps, maquillage, parfums..

  • Hormis dans une publicité mettant en scène une femme métisse, on retrouve partout la blonde, grande, mince, à l’allure séductrice, sensuelle voire provocante, et dénudée ou presque.

La seule publicité masculine apportée, quant à elle, met en scène un rugbyman tout « défoncé ».

  • La question de l’émancipation leur paraît un peu moins évidente ; passer de la femme au foyer à la bombe à poil n’est pas vraiment signe d’indépendance.

5) C’est là qu’intervient le boulot de Nicolas Gaillard (pour enfoncer le clou). J’ai repris son analyse de l’image (le femme blonde, dans son intérieur, nonchalante, consacrée à sa lecture et l’homme dans une ambiance bleue plus professionnelle, face à son portable..) et des accroches (Laure a trouvé le poste de sesrêves / Julien a trouvé un poste à la hauteur de ses ambitions).

6) Conclusion : la construction du genre féminin et masculin est fortement conditionnée par des stéréotypes. Le stéréotype féminin varie de l’image de la femme d’intérieur à celle de la bombe sexuelle. On peut élargir la réflexion sur les conséquences de l’intériorisation de ces stéréotypes sur la perception de soi (image dévalorisée pour qui ne correspond pas au stéréotype).

La prochaine fois : j’essaierai de visionner des publicités/réclames audiovisuelles car c’est encore plus significatif (sur les dialogues et la mise en scène des corps) mais c’est tout de même intéressant qu’ils recherchent eux-même les supports pour les confronter ensuite à leurs propres stéréotypes.

Yasmine Hégot

Un autre atelier de Yasmine Hégot sur sociologie, travail et anomie est disponible ici.

CorteX_images_chiffres

Le football comme base d'outillage critique en mathématiques en classe de seconde

Julien Pinel, enseignant de Physique-chimie au lycée Doisneau (Lyon) et contributeur du CorteX, nous a invité dans sa classe de seconde pour animer un atelier sur les chiffres dans les médias. Je saisis l’occasion pour rappeler que la formation à l’esprit critique fait partie du programme.
J’ai donc monté un atelier qui avait pour objectifs généraux :
– de démontrer qu’il suffit de sélectionner certaines données chiffrées pour « fabriquer » de l’extraordinaire ;
– d’apprendre à questionner les chiffres pour repérer ces petites (ou grandes) manipulations.

Nous racontons ici comment les statistiques de la ligue 1 de football et les performances du buteur B. Gomis, mais aussi la momie Ötzi, les guérisons miraculeuses de Lourdes ou le triangle des Bermudes nous ont permis de faire sentir aux élèves qu’il est parfois nécessaire de confronter les chiffres.
Cet atelier a été repris dans la foulée par un autre enseignant du lycée Doisneau, Ludovic Arnaud. Il raconte son expérience ici.


Nous avons mené cette séance le 12 Janvier 2012 avec deux demi-classes de seconde.

Compétences critiques visées

  • placer son curseur de vraisemblance
  • questionner les chiffres, les confronter
  • savoir repérer les données chiffrées manquantes

Objectifs de la séance

  • repérer les chiffres dans un document et les classer selon le critère valeur absolue / valeur relative
  • reconstruire une valeur relative à partir de données extraites d’un document
  • faire sentir aux élèves que la seule donnée d’une valeur absolue (et même d’une valeur relative) ne permettent pas forcément de construire un savoir

Description de la séance

  • Durée
    Deux fois la même séance d’1h30, une pour chaque demi-classe
  • Effectifs
    La classe de seconde était scindée en deux groupes de 15 et 16 élèves.
  • Encadrement
    Nous étions deux pour animer l’atelier (Julien Pinel, l’enseignant de physique-chimie de la classe, et moi-même) mais  une petite surprise nous attendait : un autre enseignant de physique-chimie et collègue de Julien, un peu curieux de ce qui allait se passer, s’est joint à nous et a laissé traîné ses oreilles. Un observateur discret et inattendu dont nous attendons avec impatience les retours.
  • Déroulement de la séance
    Le groupe de 16 élèves était scindé en 4 groupes de 4 élèves qui travaillaient chacun sur un sujet différent (voir ci-dessous).

Étape 1 – chaque petit groupe visionne son document (le n°1) puis discussion libre en petit groupe

Étape 2 – Chaque élève énonce en moins d’une ligne l’idée développée dans le document puis place son curseur de vraisemblance ;
Chaque groupe explique rapidement aux autres groupes le sujet de son document.

Étape 3 – Les élèves vont chercher les données chiffrées qui viennent étayer l’idée principale ;
Ils placent leur curseur de vraisemblance ;
Chaque groupe donne rapidement aux autres la liste des chiffres recueillis.

CorteX_Gomis

Étape 4 – Je lance une discussion collective autour de la question suivante : « Gomis (ou tout autre attaquant de leur club préféré) est-il un bon buteur ? » Pour cela, je demande aux férus de football d’essayer de convaincre les autres du fait que B. Gomis est, selon eux, un bon (ou un mauvais) buteur.

Très rapidement, pour justifier leur point de vue, les élèves évoquent :

  • Le nombre de buts marqués par Gomis (en l’occurrence, 7 buts en Ligue 1 au 12 janvier 20011) mais les « non-experts » ne semblent pas convaincus
  • Le nombre de buts marqués + nombre de matchs (7 buts sur 19 matchs, ce qui fait à peu près 1 but tous les 3 matchs ) mais même cette valeur relative ne parle pas beaucoup aux « non-experts » : il leur manque un point de comparaison
  • Ils en arrivent à dire qu’il leur faudrait pouvoir comparer aux résultats des autres buteurs de Ligue 1 (seuls deux buteurs de Ligue 1 ont marqué plus de buts que Bafetimbi Gomis. Il s’agit d’Olivier Giroud – 13 buts sur 19 matchs – et Kevin Gameiro : 9 buts sur 19 matchs)

Ceci nous a permis de mettre en évidence que, si nous ne sommes pas spécialistes d’un sujet, nous avons besoin de points de repères.
Or nous ne sommes en général spécialistes ni en miracles, ni en disparition d’avions, ni en fraude sociale, ni en taux de mortalité chez les scientifiques…

Étape 5 – Les élèves classent les chiffres recueillis selon les critères valeur absolue / valeur relative

Étape 6 – En groupe, ils essaient de reconstruire, si possible, une valeur relative, éventuellement à l’aide du document n°2 si le n°1 ne le permet pas. Ils placent leur curseur de vraisemblance

Étape 7 (de loin la plus difficile) – En groupe, ils essaient de répondre à la question : quel(s) autre(s) chiffres nous auraient été utiles comme point de comparaison  ?

Étape 8 – Julien leur demande, pour le prochain cours, de ramener une valeur absolue et une valeur relative issue du journal télévisé du soir.

Documents utilisés

Nous avions envie de faire travailler les groupes sur des sujets différents pour mettre en évidence le fait que le même processus est très souvent utilisé. Le paranormal est toujours très attractif et a donc motivé mon choix des trois premiers sujets. Julien avait exprimé l’envie de sortir de ce cadre pour montrer que cette manière de faire pouvait aussi être utilisée dans des domaines plus politiques, où la manipulation de l’opinion a des conséquences plus importantes. J’ai donc choisi un document sur la fraude aux prestations sociales.
Il fallait aussi que les documents soient courts, et qu’ils contiennent peu de chiffres pour ne pas noyer les élèves. Voici donc notre récolte :

Poste 1 : Lourdes

Poste 2 : Momie Ötzi

Document 1

{flv}CorteX_TSD_mom1{/flv}

Document 2

{mp4-flv}CorteX_TSD_mom2{/mp4-flv}

Remarque : les données chiffrées récoltées dans les deux documents ne permettent pas de calculer de valeurs relatives. En effet, on nous donne le nombre de victimes depuis 15 ans dans une certaine catégorie de personnes (scientifiques + cameramen + guides de hautes montagnes), le nombre de scientifiques qui sont en contact avec Ötzi aujourd’hui et le nombre de visiteurs du musée en 2007. Ces chiffres ne peuvent être comparés et nous sommes plutôt satisfaits de voir que plusieurs élèves qui ont travaillé sur ce sujet s’en sont rendus compte, même si une petite aide fut nécessaire pour le formaliser.

Poste 3 : Triangle des Bermudes

Document 1

Document 2

CorteX_Chiffres_bermudes_flux_trafic_maritime_2007

En 2007, on peut supposer qu’un porte-container a une capacité moyenne de 2 300 EVP (source : wikipedia, 10 Janvier 2012 – La flotte mondiale comprenait 3 500 porte-conteneurs au début 20061, pour une capacité totale de 8,1 millions d’EVP).

Avec le deuxième document, les élèves sont censés estimer le nombre de bateaux qui traversent la zone du triangle des Bermudes sur une année. Il a fallu les aider un peu à lire cette carte en leur posant quelques questions préliminaires : que représente cette carte ? Où est le triangle des Bermudes, Que représentent les disques ? Ensuite, ils ont pu seuls donner une première estimation du nombre de bateaux ayant traversé le triangle.

Poste 4 : La fraude aux prestations sociales

Document 1

Document 2

Document 1 (extrait de l’article)

Document 1 (extrait de l’article)

Remarque : nous avons supprimé le poste 4 pour la deuxième séance car le document était difficile d’accès et moins attrayant que les trois autres. L’article de journal est vraiment long et donner les extraits sans l’article n’a pas beaucoup de sens, puisque cela revient à faire le travail d’extraction des données chiffrées, travail que les élèves sont censés faire eux-mêmes. Pendant la pause, nous avons décidé de supprimer ce poste pour la deuxième séance, en espérant avoir le temps de le traiter collectivement à la fin ; cela nous aurait donné l’occasion de réinvestir les outils vus en petit groupe, mais nous avons été pris par le temps.
Cela reste un bon outil pour un public plus à l’aise avec l’écrit (je l’ai déjà testé sur un format conférence avec des éducateurs spécialisés).
En conséquence, les groupes de travail sont passés à 5 personnes, ce qui a nui à la qualité des échanges. Il faudra trouver un autre document pour les prochaines fois, par exemple un reportage vidéo issu d’un journal télévisé sur la fraude sociale.

Bilan

Dans l’ensemble, tous les groupes ont bien avancé et nous avons pu aborder tous les points. Ceci dit, l’étape 7 est un peu subtile et aurait mérité qu’on s’attarde un plus longtemps dessus mais le temps nous a un peu manqué. Julien nous dira ce que ses élèves en ont pensé et ce qu’ils ont retenu. En attendant, voici le tableau rempli par la deuxième demi-classe – désolée pour la mauvaise qualité de l’image, je l’ai réalisée avec les moyens du bord. Nous n’avions pas pensé à mettre en place cet outil lors de la première séance, c’est dommage, nous aurions pu comparer les deux productions.

CorteX_Atelier_chiffres_lycee_Doisneau_Tableau_recapitulatif_1
CorteX_Atelier_chiffres_lycee_Doisneau_Tableau_recapitulatif_2

Ce que nous modifierons la prochaine fois

 1. Dans le souci de ne pas trop guider la réflexion des élèves en anticipant sur certaines questions, je n’avais pas prévu de fiche « papier » pour cadrer la séance, mais plutôt un diaporama qui me permettait de faire défiler les questions au fur et à mesure.

Comme me l’a fait remarqué Julien, cette manière de faire a un gros défaut puisque les élèves ne produisent rien et perdent parfois le fil. Il suggérait donc d’utiliser quand même un support écrit. Après discussion, nous proposons de commencer de la même façon jusqu’à l’étape 4 comprise (c’est l’exemple du football) puis de leur distribuer une fiche qui ressemblerait à ça :

1) Quelle est l’idée principale développée dans votre document (une ligne maximum) ?
2) Indépendamment de votre avis sur la question, les arguments développés dans votre document vous paraissent-ils convaincants ? (5 lignes)
3) Quels sont les chiffres avancés pour argumenter en faveur de cette idée ?
4) Après avoir observé l’exemple de Gomis, remplissez la ligne du tableau qui correspond à votre sujet :

  Valeur(s)
absolue(s)
Valeur(s)
relative(s)
Quels chiffres auraient été utiles
comme point de comparaison ?
Exemple de Gomis 7 buts 7 buts sur 19 matchs
≈ 0,37 buts/matchs
Résultats des autres buteurs de la Ligue 1
Momie Ötzi
Lourdes
Triangle des Bermudes
Fraude au RSA

5) Après ce travail sur les chiffres, que répondriez-vous à quelqu’un qui vous affirmerait, après avoir vu ce document, que Ötzi est une momie maudite ? Ou que Lourdes est une ville miraculeuse ? Ou qu’il y a des disparitions étranges dans le triangle des Bermudes ? (5 lignes maximum)
6) Que retenez-vous de cette séance ? (5 lignes maximum)

Remarque de Julien : il faut garder du temps pour la dernière étape, celle de la conclusion, afin que les élèves s’interrogent eux-mêmes sur ce qu’ils peuvent conclure (ou non) des données présentées dans leur document.
Nous n’avons pas eu le temps non plus de faire en sorte que chaque groupe présente son travail aux autres.

 2. Visiblement, les deux demi-classes ont eu le temps de discuter pendant la pause, ce qui est peut-être à l’origine de réactions très différentes du deuxième groupe par rapport au premier (tous les curseurs de vraisemblance étaient à zéro). Il aurait fallu faire en sorte que les groupes ne se croisent pas ou animer les deux séances simultanément.

 3. A chaque étape, je souhaitais « mesurer » si les débats avait un impact sur l’avis que se faisaient les élèves sur la thèse présentée dans leur document. Je leur ai donc demandé très régulièrement de positionner leur curseur de vraisemblance. A posteriori ce choix ne nous paraît pas très judicieux : nous nous sommes demandés s’il n’y avait pas un phénomène de conformisme qui empêchait certains élèves de placer ce curseur en fonction de leur ressenti personnel. En effet, même si la consigne précisait qu’il n’y avait pas de bonnes ou de mauvaises réponses, comme les groupes étaient petits, chacun pouvait voir où les autres mettaient leur curseur et pouvait se sentir « bête » d’adhérer à telle ou telle idée. Nous n’avons pas les moyens de mesurer cet effet, mais peut-être pourrait-on essayer de mesurer autre chose que leur propre adhésion en leur demandant si l’argumentaire leur paraît pertinent plutôt que de leur demander s’ils y croient. Une autre piste suggérée par Richard Monvoisin est de contrebalancer la crainte d’être ridicule par une crainte plus grande de perdre. Pour cela, on pourrait leur demander : « seriez-vous prêt à miser 100 euros sur le fait que c’est vrai ? Que c’est faux ? »
Si vous testez ce procédé ou si vous avez essayé autre chose, racontez-nous !

4. Notre présence est un élément perturbateur des discussions dans les groupes. Difficile donc d’évaluer cette séance. C’est d’autant plus frustrant que le collègue de Julien, qui a réussi à se fondre dans le paysage, nous a raconté que leurs échanges étaient passionnants. La prochaine fois, on pourrait tenter d’enregistrer leurs échanges à l’aide de dictaphones laissés sur chaque poste, avec l’accord des élèves, bien entendu.

Logistique

Cet atelier repose sur les moyens informatiques, très souvent à l’origine de déconvenues de dernière minute. Quelques précautions sont toujours bonnes à prendre :
– prévoir d’installer les postes quelques jours avant
– s’assurer que tous les ordinateurs sont équipés de logiciels permettant de lire les documents
– s’assurer que tous les ordinateurs ont du son ou s’équiper de casques si besoin
– vérifier que tous les documents sont lisibles en intégralité,
– avoir de toutes façons tous les documents très rapidement accessibles sur son propre ordinateur, des baffles, un vidéoprojecteur, une rallonge et une multiprise pour pouvoir, en cas de pépin, animer la séance en collectif.

Merci à tous les élèves de 2de 5 du lycée Doisneau qui ont travaillé avec enthousiasme.
Merci également à Julien Pinel et à notre invité surprise qui m’ont donné de nombreuses pistes pour améliorer cet atelier.

Guillemette Reviron

Entraînez-vous ! Réactions à l'entrée du genre dans les programmes de 1ère

Voici un petit échantillon de réactions médiatiques à l’entrée du genre dans les programmes de première (sections L et ES) en septembre 2011. Les hommes et femmes politiques et les journalistes se sont questionnés, indignés, énervés, disputés autour de la notion du genre, réactivant par là-même de nombreuses idées reçues et confusions sur les différences Homme/Femme, mais aussi sur la distinction sciences dures/sciences humaines et sur les notions nature/culture. Une occasion rêvée de mettre en pratique nos ressources sur le genre (ici et ), mais aussi sur la science ou sur la notion de nature, ainsi que notre outillage critique.


Le mode d’emploi est simple : il suffit de choisir sa cible, de l’analyser ou d’en faire un TP et de nous faire part de vos trouvailles ! Notre analyse est ici.

  • Vidéos 1 et 2 Montages de réactions sur le genre réalisés par Arrêt sur Image (émission du 9 septembre 2011)
  • Vidéo 3 Trouvée sur le site Liberté Politique, dans un article intitulé L’idéologie du gender à l’école et à l’université (15 juin 2011) 
  • Document 1Article  du Figaro.fr du 01/06/2011
  • Document 2 Lettre ouverte de Christine Boutin à Luc Châtel, 3 Juin 2011
  • Document 3 Article du Nouvel Observateur du 30 août 2011 
  • Document 4 Article de France catholique du 30 Mai 2011

Vidéos 1 et 2 – Montages de réactions sur le genre réalisés par Arrêt sur Image (émission du 9 septembre 2011) :

Vidéo 2 bis – Intégralité de l’interview du député Lionel luca sur M6 Bonus.fr tronquée dans la vidéo 2 :

Vidéo 3 – Trouvée sur le site Liberté Politique, dans un article intitulé L’idéologie du gender à l’école et à l’université (15 juin 2011) :

Document 1 – Article  du Figaro.fr du 01/06/2011

Lire l'article

Les catholiques mobilisés contre les manuels de biologie.

La direction de l’enseignement catholique s’inquiète de l’introduction en première de la «théorie du genre», contestant les différences homme-femme.

Après que les associations familiales catholiques ont envoyé une lettre à Luc Chatel et organisé une pétition de protestation, l’enseignement catholique s’alarme à son tour des nouveaux programmes de sciences de la vie et de la terre (SVT) en classe de première, applicables à partir de septembre 2011.

Son secrétaire général adjoint, Claude Berruer, a envoyé vendredi une lettre à l’ensemble des directeurs diocésains qui vont la transmettre aux chefs d’établissement de l’enseignement catholique pour les tenir « en alerte». C’est la partie concernant la sexualité humaine dans les programmes qui les inquiète. Le chapitre intitulé «devenir homme ou femme» fait «implicitement référence à la théorie du genre, qui privilégie le “genre” considéré comme une pure construction sociale, sur la différence sexuelle», est-il affirmé dans la lettre. «L’identité masculine ou féminine, selon cette théorie, n’est donc pas une donnée anthropologique mais une orientation.» Les manuels qui commencent à arriver dans les établissements exploitent, «selon des modalités diverses», cette partie du programme, affirment-ils. Le manuel Bordas indique ainsi: «Si dans un groupe social, il existe une très forte valorisation du couple hétérosexuel et une forte homophobie, la probabilité est grande que la majorité des jeunes apprennent des scénarios hétérosexuels.»

«On est loin de l’anthropologie chrétienne», commente-t-on au sein de l’enseignement catholique. Mahin Bailly, la responsable des éditions Bordas, reconnaît «une certaine maladresse dans l’élaboration d’un passage» mais insiste sur le fait que le livre est conforme aux programmes: «on nous demande d’évoquer l’influence du contexte sur le comportement sexuel. Il n’y a là rien de choquant», estime-t-elle, s’appuyant sur une étude sociologique évoquée ensuite par le manuel. À Hambourg, en 1970, dans les années de la révolution sexuelle, 18% des adolescents avaient ainsi des activités homosexuelles alors qu’en 1990, avec le sida et les changements culturels, ils n’étaient plus que 2%.

Les programmes font le point sur des connaissances scientifiques clairement établies pour le directeur de l’enseignement scolaire, Jean-Michel Blanquer. «Il ne s’agit pas de favoriser telle ou telle théorie sociologique particulière. S’il y a une extrapolation de certains manuels, ce n’est pas de la responsabilité du ministère. Les établissements et les professeurs sont libres dans leur choix d’ouvrages. Cela dit, le fait qu’il y ait une dimension biologique et sociale du sexe est établie depuis longtemps.»

Cette analyse n’est pas partagée par tous. Selon Claude Berruer, «on naît fille ou garçon, on n’est pas un être indifférencié sexuellement à la naissance. Ce n’est pas rendre service à des jeunes de leur dire que tous les possibles sont équivalents. Le choix des manuels n’est pas anodin. Nous recommandons de faire preuve de vigilance, sans pour autant dramatiser.»

Thibaud Collin, professeur de philosophie en classe préparatoire au lycée catholique Stanislas, et auteur d’essais sur ces questions, va plus loin: «La prime à l’indifférenciation sexuelle promeut en fait l’homosexualité. Ces théories sont une tête de pont pour un changement radical de société.» Autant d’assertions qui, pour Françoise Milewski, à l’origine du programme «genre» à Sciences Po (voir encadré ci-dessous) défendent un «point de vue rétrograde qui rejette tout ce qui n’est pas dans la norme de l’hétérosexualité».

L’enseignement catholique ne refuse pas le débat pour autant. La lettre envoyée aux directeurs diocésains indique que «la théorie du genre se diffuse dans notre environnement. Il est assurément indispensable d’ouvrir un débat avec les lycéens sur cette question, qui ne concerne pas que les enseignants de SVT.»

Pour ce faire, la lettre recommande aux équipes éducatives deux ouvrages, un document de l’épiscopat et un essai du philosophe Xavier Lacroix De chair et de parole. Soucieux de faire respecter sa spécificité depuis quelques années, l’enseignement catholique n’hésite pas à prendre position sur les sujets les plus délicats. Un document de 50 pages voté par le comité national de l’enseignement catholique à l’automne 2010 sur «l’éducation affective, relationnelle et sexuelle dans les établissements catholiques d’enseignement» mettait déjà «en garde» contre les théories du «genre».

Document 2 – Lettre ouverte de Christine Boutin à Luc Châtel, 3 Juin 2011

Lire la lettre

Paris, le 31 mai 2011

Monsieur le Ministre,

Je tiens à vous exprimer mon indignation et ma vive inquiétude face au contenu des nouveaux livres de « Sciences de la Vie et de la Terre » des classes de premières ES et L. Je constate en effet que les élèves de ces classes recevront dans cette matière un enseignement directement et explicitement inspiré de la théorie du genre.

Comment cela est-il possible ? Comment ce qui n’est qu’une théorie, qu’un courant de pensée, peut-il faire partie d’un programme de sciences ? Comment peut-on présenter dans un manuel, qui se veut scientifique, une idéologie qui consiste à nier la réalité : l’altérité sexuelle de l’homme et la femme ? Cela relève de toute évidence d’une volonté d’imposer aux consciences de jeunes adolescents une certaine vision de l’homme et de la société, et je ne peux accepter que nous les trompions en leur présentant comme une explication scientifique ce qui relève d’un parti-pris idéologique.

Monsieur le Ministre, nous ne pouvons accepter que l’école devienne un lieu de propagande, où l’adolescent serait l’otage de préoccupations de groupes minoritaires en mal d’imposer une vision de la « normalité » que le peuple français ne partage pas.

Je vous appelle également à entendre l’inquiétude de nombreux parents d’élèves qui voient l’Etat tenter d’inculquer à leurs enfants une conception particulièrement contestable de l’homme, de la sexualité et de la société. L’Education nationale ne doit pas outrepasser sa mission, qui est d’instruire dans la neutralité des valeurs républicaines et le respect des croyances des élèves et de leurs familles, et non d’enseigner, en leur conférant un statut pseudo-scientifique, des théories sur l’être humain et sa sexualité.

Au nom du respect de la liberté de conscience des familles et de la responsabilité des parents en matière d’éducation affective et sexuelle de leurs enfants, je vous demande donc d’intervenir et de faire en sorte que la théorie du genre ne soit pas enseignée dans des cours de sciences.

Aujourd’hui, je demande que les nouveaux livres de SVT soient retirés et corrigés pour être en conformité avec les instructions que vous aviez vous-même données dans le Bulletin Officiel de l’Education Nationale du 30 septembre 2010 : « Dans une optique d’éducation à la santé et à la responsabilité, il s’agit de comprendre les composantes biologiques principales de l’état masculin ou féminin, du lien entre la sexualité et la procréation. »

Monsieur le Ministre, je souhaite que nous puissions nous rencontrer rapidement afin d’aborder ce sujet ensemble. Je ne manquerai pas de me faire l’écho de votre position sur ce sujet capital : vous conviendrez que celle-ci aura une influence déterminante sur les choix que les citoyens français seront amenés à poser lors des scrutins qui s’annoncent dans quelques mois.

Comptant sur votre attachement au respect de la liberté de conscience, je vous remercie pour votre réponse et vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération.

Christine Boutin, Ancien Ministre

Document 3 – Article du Nouvel Observateur du 30 août 2011 :

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Quatre-vingt députés UMP ont demandé mardi au ministre de l’Education nationale, Luc Chatel, le retrait de manuels scolaires qui expliquent « l’identité sexuelle » des individus autant par le contexte socio-culturel que par leur sexe biologique.

Ces parlementaires, conduits par Richard Maillé, député des Bouches-du-Rhône, font ainsi écho aux critiques exprimées sur le même sujet au printemps par la direction de l’enseignement catholique.

Dans une lettre au ministre, ils estiment que ces manuels de SVT (Sciences et vie de la terre) de classe de première font référence à « la théorie du genre sexuel ».
« Selon cette théorie, les personnes ne sont plus définies comme hommes et femmes mais comme pratiquants de certaines formes de sexualités: homosexuels, hétérosexuels, bisexuels, transsexuels », écrivent-ils. Il s’agit selon eux d’une « théorie philosophique et sociologique qui n’est pas scientifique, qui affirme que l’identité sexuelle est une construction culturelle ».

Les signataires citent un passage d’un manuel publié par Hachette: « Le sexe biologique nous identifie mâle ou femelle mais ce n’est pas pour autant que nous pouvons nous qualifier de masculin ou de féminin. Cette identité sexuelle, construite tout au long de notre vie, dans une interaction constante entre le biologique et contexte socio-culturel, est pourtant décisive dans notre positionnement par rapport à l’autre ».

Jugeant « du devoir de l’Etat de mieux contrôler le contenu des manuels scolaires » et ajoutant que « la +théorie du genre sexuel+ n’apparaît pas stricto sensu dans les programmes d’enseignement de SVT » définis par le ministère, les députés concluent à l’adresse de Luc Chatel: « Nous comptons sur votre action afin de retirer des lycées les manuels qui présentent cette théorie ».
Dans une circulaire du 30 septembre 2010, le ministère indiquait que les programmes de SVT de première devaient comporter un chapitre intitulé « devenir homme ou femme ». « Si l’identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l’orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée », précisait la circulaire.

La lettre est notamment signée par Christian Vanneste, Lionnel Luca et Jacques Myard, fondateurs du collectif de la Droite populaire, Bernard Debré, Eric Raoult et Hervé Mariton.

Document 4 – Article de France catholique du 30 Mai 2011

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La nouvelle est tombée ces jours derniers, sans avoir été reprise encore par les grands moyens d’information. Pourtant son importance morale la situe au niveau des enjeux supérieurs de civilisation dont parlait le cardinal André Vingt-Trois à propos de la révision de la législation sur la bioéthique. Que la théorie du gender soit inscrite dans les programmes officiels de SVT (Sciences de la Vie et de la Terre) en classe de Première constitue une agression caractérisée de nos consciences de pères et mères de familles, d’éducateurs et, tout simplement, d’êtres humains. Il s’agit, en effet d’imposer une idéologie fabriquée aux États-Unis et dont le caractère philosophique, militant, voire intrusif, est patent. L’Éducation nationale veut faire avaliser, sous le biais de la science, un échafaudage intellectuel qui s’oppose aux grandes traditions de l’humanité, à l’aune d’un constructivisme généralisé qui fait de l’arbitraire la clé de notre humanité.

Il s’agit d’abord d’une arme à déconstruire l’identité sexuelle. Nous ne sommes plus définis comme hommes et femmes mais comme pratiquants de certaines formes de sexualités  : homosexuels, hétérosexuels, bisexuels, transsexuels. Les libéraux-libertaires ont fait une propagande effrénée dans le monde entier pour banaliser cette conception et délégitimer les représentations communément admises jusque-là. Ce qu’on ne sait pas encore en France, c’est que la théorie des genders se trouve actuellement en crise et provoque des remises en cause de la part de ses concepteurs, comme Judith Butler. En effet, on finit par s’apercevoir que c’est la structure morale fondatrice de notre humanité qui se trouve finalement détruite par l’arbitraire. Le refus des interdits les plus structurants débouche sur un nihilisme absolu qui permet toutes les transgressions, notamment celles qui se sont produites sous la férule totalitaire au XXe siècle.

La décision du ministre de l’Éducation nationale d’imposer cette idéologie irrationnelle et inhumaine à des adolescents est un scandale considérable. Seule la mobilisation des consciences fera reculer ce qu’il faut dénoncer sans relâche comme un crime contre l’Esprit, d’autant plus odieux qu’on prend la jeunesse en otage.

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Psychologie sociale, dérives sectaires – utilisation de célèbres expériences de psychologie sociale

Pour l’UE Zététique & autodéfense intellectuelle de l’Université Joseph Fourier, ainsi que pour mes ateliers Esprit Critique pour collège-lycée, j’ai monté un cours consacré aux dérives sectaires et aux techniques d’engagement. Mon objectif est de montrer que les techniques d’embrigadement sectaires et les aliénations en temps de guerre n’ont rien de très différent des techniques de manipulation classiques dans la vie de tous les jours. Aussi j’utilise des exemples tirés du quotidien, du marketing en particulier, pour les illustrer (j’en donnerai dans un prochaine article). 
Je me concentrerai ici sur les trois expériences majeures de psychologie sociale auxquelles je fais référence presqu’à chaque fois.

1/ L’expérience de Solomon Asch (1951) sur le conformisme et la soumission au groupe.

2/ L‘expérience dite de Milgram (1967), menée par Stanley Milgram et son équipe sur la soumission à l’autorité.

Je ne vais donner que quelques lignes de description pour ces deux expériences.

L’expérience de l’influence majoritaire d’Asch 

Cette expérience simple est tout à fait adéquate pour questionner les étudiants sur les cas où ils ressentent une soumission au groupe, notamment dans les cas d’injustice : de l’injustice d’évaluation dans les notes au harcèlement sexuel, les exemples fleurissent dans les discussions où les étudiants s’accordent à dire que seuls, ils dénonceraient probablement plus volontiers l’injustice auprès de leurs représentants étudiants, élus syndicaux, ou auprès des enseignants, que lorsqu’ils sont noyés dans la masse.

CorteX_Solomon_AschSolomon E. Asch (1907 – 1996) amena un groupe d’étudiants de 17 à 25 ans à participer à un prétendu test de vision. Tous les participants étaient complices avec l’expérimentateur, sauf un, dont on observait l’indépendance vis-à-vis du comportement des autres. On demandait aux participants de juger la longueur de plusieurs lignes tracées sur une série d’affiches.  

À gauche, une ligne modèle, et à droite, 3 autres lignes.

CorteX_Segments_Asch

Alors que la réponse est évidente, les complices donnent à l’unanimité la même fausse réponse : le sujet testé allait-il être capable de dire sa vraie observation malgré la pression des réponses différentes du groupe ?

Beaucoup vécurent assez mal la chose et furent perturbés, et plus d’un tiers (37%) préférèrent se conformer aux mauvaises réponses soutenues à l’unanimité par les complices, alors que dans les groupes contrôles (lorsque le sujet n’avait pas la pression d’un groupe) les réponses étaient toujours bonnes.

Chose cocasse pour nous, moins pour les sujets : après l’annonce des résultats, les sujets tendaient à attribuer leur mauvaise performance à leur « mauvaise vue » (ce qu’on appelle résoudre sa dissonance cognitive à peu de frais !).

On peut :

– lire avec plaisir Asch S., « Studies on independance and conformity : a minority of one against an unanimous majority », Psychological Monographs, 1956, 70, p. 416 (en anglais).

– voir un film de cette expérience (en anglais, sous-titrée) :

Anecdote : Asch fut le directeur de thèse de Milgram, dont je parle ensuite.

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=7AyM2PH3_Qk]

L’expérience de soumission à l’autorité de Milgram

CorteX_expe_milgramTrès connue mais souvent mal racontée, elle crée un double choc : d’abord sur le fait de se rendre compte qu’une bonne proportion de gens « normaux » placés dans une situation agentique peuvent se soumettre à une autorité qui les intime à faire des choses révoltantes, comme faire souffrir un parfait inconnu. Ensuite sur la question éthique que soulève ce genre d’expérience, heureusement non reproductible aujourd’hui au vu des souffrances morales qu’elle engendre. Je donne quelques détails sur les différentes variantes de l’expérience (vue ou non du sujet soumis aux chocs électriques, toucher pour raccrocher l’électrode, présence ou non des représentants de l’autorité dans la salle, etc.) et je m’outille pour cela du livre de Milgram lui-même, Soumission à l’autorité. Il est également intéressant de rappeler le contexte de cette expérience, post-2ème guerre mondiale où la soumission à l’autorité aux fascistes italiens, et surtout au IIIe Reich donna les résultats que l’on sait. La question du procès d’Adolf Eichmann se posait alors crument, et les débats allaient bon train chez les psychologues US : des états-uniens auraient-ils pu eux aussi faire des choses aussi atroces ? Fallait-il faire de ce type d’individu des monstres de cruauté, ou au contraire, des humains somme toute assez ordinaires placés dans un contexte qui ne l’était pas ?CorteX_Stanley_Milgram

Je ne rentre pas dans le détail des variantes de cette expérience menée par Milgram (1933-1984) – mais il est bon de les connaître, ou de venir avec le livre. Il suffit de savoir qu’en 1961, date de l’expérience standard, 62,5% des sujets testés furent capables de mettre des décharges mortelles à une personne qui ne leur avait rien fait.

Je profite par contre d’avoir eu une réalisation filmique par Henri Verneuil mettant en scène l’essentiel des aspects de cette expérience dans I comme Icare, dont un extrait reproduit ici (et validé par Milgram lui-même) évite de nombreuses explications.

En 2010 eu lieu une reproduction télévisuelle très controversée appelée Zône extrême, réalisée par Christophe Nick. Elle ne remplit pas les standards méthodologiques mais met en scène une « expérience » du même genre. La participation de notre collègue Jean-Léon Beauvois (qui est déjà intervenu dans mon cours le 28 mars 2007 – conférence filmée ici) à ce coup médiatique nous a quelque peu laissés perplexe. Une critique (à télécharger ici) a été faite par notre autre collègue Laurent Bègue, du Laboratoire Interdisciplinaire de Psychologie de Grenoble.

Pour débattre avec des élèves, j’essaye de mener le débat en le rapportant à une perspective de non-reproduction des horreurs nazi, et en comparant démarche essentialisante et démarche psychologique. Diaboliser une catégorie d’individus, en l’essentialisant ne résout rien en soi, et permet de traiter les choses à court terme (comme condamner les auteurs des crimes) ; en revanche regarder les mécaniques de soumission de face, « l’ordinarité du mal », oblige à regarder la part de soumission à l’autorité qu’il y a en nous, et à réfléchir à la meilleure prévention pour les générations à avenir. (l’esprit critique faisant pour moi partie de cette prévention)

Pour aller plus loin, on pourra :

  • lire cet article gracieusement transmis par L. Bègue : Beauvois, Bègue, Courbet & Oberlé, Psychologie de la soumission à l’autorité
  • Voir les vraies images de cette expérience (en anglais, sur BBC4 – avec l’un des rares survivants de l’expérience)
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=XpIzju84v24]
  • Regarder un Zapping de Zone Extrême.
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=CobaPLs9H10]

Merci à mon collègue Nicolas Gaillard, qui vient parfois faire ce cours avec moi, ainsi qu’à Franck Villlard de l’Observatoire zététique, ancien président de l’Association de Défense de la Famille et de l’Individu 2 Savoie Isère, qui est souvent venu compléter mes propos d’exemples sur les dérives sectaires qu’il connait bien.

Merci également à Laurent Bègue, ainsi qu’à notre amie psychologue Virginie Bagneux.

Vous aussi, vous utilisez ces ressources ? Racontez-nous, partagez votre expérience et prodiguez vos conseils.

Richard Monvoisin

CorteX_homeopathie

Trame de cours – étude critique de l'homéopathie

Voici en partage la trame du cours que j’ai développée sur l’homéopathie au fil des années, en la testant sur des étudiants en sciences et en santé.


Diaporama du cours (pdf)

Le diaporama n’est pas complètement autonome, donc inutile de le faire circuler tel quel. Je le mets à disposition pour inspirer d’autres kamikazes (car c’est un sujet qui mérite tact, doigté et grande précision dans les informations données) à prendre cet objet conceptuel et social comme support pédagogique à l’esprit critique, et je suis à leur disposition pour un coup de main.
Attention : il faut bien insister sur le fait que prendre de l’homéopathie est un choix personnel. C’est seulement lorsqu’on découvre les mécanismes internes et les fondements de l’homéopathie que les questions germent : peut-on parler d’”alternative” et d’alternative à quoi ? On comprend alors que le débat ne se résume pas à Pour ou contre (voir faux dilemme) mais pour ou contre quoi ?

Alors seulement un débat serein peut s’ouvrir.

1ère étape – la pensée magique
 
a. Je donne des exemples alimentaires car ils ont l’avantage de bien marquer l’esprit
b. J’aborde ensuite les notions de pensée magique de contagion et de similitude :
– description du schème pensée magique par les sociologues Mauss et Frazer CorteX_Paracelse
– illustration par les expériences alimentaires de Rozin & Nemeroff
– illustration dans l’histoire des sciences (pharmacobotanique de Paracelse, « théorie » des signatures)
– introduction de la facette « le bizarre est probable »
 
c. Je prends des exemples de stratégies publicitaires et d’instrumentalisation du corps (occasion de pointer un publisexisme archaïque)
d. Je finis avec des exemples thérapeutiques comme les réflexologies, ce qui me permet d’aborder la question des preuves,  les arguments d’historicité ou le sophisme du pragmatisme
 
2ème étape – Homéopathie : histoire, preuve et questions posées

Tous les outils nécessaires ont été introduits en douceur. Alors seulement j’aborde l’homéopathie, sous l’angle double, historique et sources des preuves. Qui possède bien les effets et facettes de la zététique trouvera beaucoup de diapositives sur lesquelles les illustrer, et de nombreux points d’achoppement pour des réflexions sociopolitiques. J’aime bien pointer le mélange des genres et des institutions, scientifiques, académies, Sécurité sociale, Affsaps, etc. Qui dit quoi, et où ? Qui tranche ? C’est l’occasion également d’aborder les questions de conflit d’interêt.

J’ai pris pour principe de préciser que je n’ai aucun conflit d’intérêt, banalisant ainsi une loi applicable aux médecins et que je rêve de voir appliquée par tout conférencier, tout enseignant (voir à ce sujet Indépendance de la formation et formation à l’indépendance, de nos collègues du Formindep).

a. Hahnemann et l’Organon – contexte
b. Elaboration de la théorie
c. Piliers de la théorie
d. Examen de la théorie

e. Etude des effets contextuels (remarque : le terme placebo, mot valise trop ambigü, n’est plus utilisé qu’avec des pincettes)

f. Questions autour de l’efficacité de l’homéopathie sur les enfants, les animaux

Voici sur la questions des animaux les publications de McMillian

Télécharger les fichiers compressés :

g. Représentations sociales
J’utilise parfois, si j’ai le temps, un extrait du film La Crise, de Colline Serreau (voir Fictions, sous peu).

3ème étape : pour ou contre ? Pour ou contre quoi ?

C’est le moment d’introduire les questions sociopolitiques. Remboursement de la sécurité sociale, lobbying, AMM allégée, droit des patients, libre choix, information délivrée par les médecins etc. Je recommande de bien connaitre son sujet pour animer / modérer un débat sur l’homéopathie.

Pour aller plus loin : je choisis parfois entre deux prolongements du cours

  1. une analyse de discours médiatique (quand j’ai peu de temps)
  2. une analyse de la publication de la fameuse « mémoire de l’eau » (plus technique, et nécessite quelques bases de sciences et de statistiques) avec une analyse des stratégies des revues scientifiques et éventuellement un encart sur la notion de fraude scientifique.

 Dans la première option, il s’agit d’aborder la publication dans le Lancet en 2005 de la mammouthesque méta-analyse d’Aijing Shang & alde l’université de Bern (télécharger le fichier compressé ici), qui démontrait qu’aucune efficacité propre de l’homéopathie n’a été mise en évidence.

Les médias abordent le sujet de l’efficacité propre de l’homéopathie comme si cette méta-analyse n’apportait aucun élément nouveau sur le sujet. Pourtant, il conclue qu’aujourd’hui, en l’état actuel des connaissances et jusqu’à preuve du contraire, cette efficacité propre n’a pas été mise en évidence. C’est une donnée importante qui, nous semble-t-il, doit être prise en compte dans tout débat sur le statut de l’homéopathie : remboursement, AMM allégée, droit des patients à l’information, libre choix, etc…

L’analyse du journal télévisé de France 2 qui s’ensuit est un exercice de style pédagogique tout à fait stimulant (que je mettrai en ligne sous peu).

 Si vous choisissez la seconde option, vous pouvez télécharger le fichier compressé (contenant également l’édito) de la publication de Benvéniste & al. qui mit le feu aux poudres

Sont disponibles toutes les informations de base chez le Pr. Broch, moyennant quelques mises à jour.

Il est alors loisible d’aborder la critique des médias scientifiques, notamment de la stratégie de scoop choisie par la revue Nature en 1988, la manière de se « couvrir » puis de faire une investigation avec entre autres James Randi. 

Au gré des années, j’ai fait évoluer ce cours. Je dois entre autres une fière chandelle à H. Broch, J. Brissonnet, J-J. Aulas, ainsi qu’à la quinzaine de promotions de licence qui ont accepté de débattre parfois vigoureusement sur ces sujets

Je mets ce diaporama en source libre pour tous les enseignants. Soyez aimables de m’informer de vos utilisations
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Richard Monvoisin