Rapport ostéopathie crânienne – réponses aux réactions

Voici une compilation des réactions au rapport produit pour le Conseil national des masso-kinésithérapeutes sur l’ostéopathie crânienne. Nous mettrons l’article à jour au fur et à mesure des réceptions ; la dernière mise à jour date du 19 février 2017 (voir en toute fin de page).

Il y a différents types de questions (ou d’invectives, mais nous les prenons pour des questions) et remarques.

1. Les questions épistémologiques

(…)  Lors des commissions ministérielles dès 2002, j’avais prôné le fait que l’osteo soit reconnue à l’identique des psychologues cliniciens ; c’est-à-dire que cela ne peut être du domaine des sciences dures, et la nécessité de créer nos propres outils. En effet si les uns travaillent avec le verbe, nous en plus, c’est avec le toucher et les mains qui « parlent et écoutent ». Difficile de l’évaluer ! (…)  J.L., février 2016

Que chaque discipline ait des outils d’évaluation un tantinet différents selon les objets étudiés est évident. Si on considère la science comme une activité de production de connaissances « communisables » sur le monde (cf. notre dialogue  La science (complet) – Base d’entraînement pour les enseignants qui voudraient parler de science) alors il n’existe plus de dichotomie sciences dures / sciences molles : il n’est que des champs de connaissances plus ou moins solides. Enfin, les méthodes de gynécologie par exemple sont des méthodes éprouvées, reposant sur le toucher, et faisant partie des méthodes reposant sur les faits. Si l’on récuse l’évaluation des méthodes ostéopathiques, cela signifie que le choix de chaque thérapeute sera subjectif – auquel cas, ce n’est plus un statut de scientificité qui est recherché, mais celui d’un art. Peu probable que quelqu’un cherchant un soin souhaite avoir affaire à (seulement) un artiste.

« C’est l’éternel débat entre empirisme et positivisme ,au demeurant fort intéressant car l’un contribue à faire progresser l’autre ». J.L., février 2016

Nous allons être pointilleux sur les termes philosophiques, puisqu’il s’agit de l’un de nos violons d’Ingres. Que l’empirisme nourrisse la connaissance, certes, moyennant recoupement et reproduction de cet empirisme. On « sent » que quelque chose marche, on n’est pas très sûr, alors on le soumet à ses pairs, qui valident objectivement ou récusent la méthode. Lorsque l’empirisme est répété sans examen collectif, on appelle ça une tradition, voire une superstition.

Quant au positivisme, ce mot est ambigu dans votre phrase. Si vous faites appel au programme positiviste d’Auguste Comte, il  n’est évidemment pas le nôtre. Sur ce que ce terme sous-tend, voici une excellente lecture de J. Bricmont dans la revue DOGMA, Comment peut-on être  » positiviste  » ?

(…)  et comment s’il vous plaît, pourrions-nous reproduire un acte qui par nature est relationnel c’est-à-dire qui engage l’entièreté de deux personnes (corps, mental et être) ? (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

La description du coït est très bien décrite scientifiquement, n’est-ce pas ? 🙂 Nous prenons cet exemple à dessein : on peut souhaiter une part de mystère dans l’acte charnel si on le veut, c’est un choix subjectif. Mais si quelqu’un souhaite une efficacité à l’acte (pour ce qui est du plaisir, ou de la fécondation, ou autre) la part de mystère n’a guère sa place.

Toute la psychologie sociale, les sciences politiques, s’élaborent sur des théories basées sur les faits. Si un acte ostéopathique a une validité en soi, une « efficacité propre » (à bien dissocier pour la discussion de l’efficacité globale qui comprend les effets contextuels ; voir sur ce point la conférence de N. Pinsault) alors elle doit pouvoir être reproduite. Ce débat a déjà eu lieu en sciences biologiques, et même en sciences médicales, il y a plus de cinq siècles, pourquoi le reprendre ici ?

Mais, s’il vous plaît, retournons les choses : ce travail montre effectivement que l’ostéopathie crânienne (mais aussi je pense, l’ostéopathie en général) ne parvient pas à s’inscrire dans le cadre scientifique que l’on voudrait lui imposer. Mais il montre surtout que le cadre scientifique qu’on voudrait lui imposer ne lui convient tout simplement pas ! Et du coup, ce travail considérable (merci de l’avoir fait à notre place) montre qu’utiliser un outil inadéquat pour analyser quelque chose donne des résultats fantaisistes. (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Nous supposons, à tort peut être, que vous faites une erreur classique sur le plan épistémologique. De tout temps, lorsqu’une hypothèse n’était pas corroborée par les faits, les défenseurs de celle-ci ont toujours résolu leur dissonance cognitive en incriminant les critères de scientificité. Pourtant ces critères, qui s’agrémentent avec le temps, ne sont pas pris en défaut, tandis que le cimetière des hypothèses rejetées est lui plein à craquer. Si la science était un simple jeu, assisterions-nous stoïquement à la renégociation des règles du football par une équipe de 5ème division étrillée au dernier match ? Que nous nous fassions bien comprendre : que les ostéopathes crâniens viennent avec tout ce qu’ils ont comme prémisse de phénomène, tentent de caractériser celui-ci pour que de manière inter-subjective on en fasse l’étude, et là on verra s’il faut de nouveaux critères de scientificité. En attendant, sans plus d’éléments que ce que nous avons trouvé, il n’y a pas de raison de donner du crédit aux techniques (nous disons bien aux techniques, pas au soin global, plus complexe) ostéopathiques crâniennes. Si nous en donnions, il faudrait en donner aux magnétiseurs, aux révérends prédicateurs évangéliques, qui eux non plus n’ont pas de corpus de preuve – et eux aussi, contestent les critères de scientificité. De ce fait, votre profession deviendrait une pratique ésotérique, et vous n’auriez guère à y gagner.

« Et le grand tort des ostéopathes est d’avoir cherché (pour des raisons de reconnaissance) à s’inscrire dans un cadre ne leur convenant pas au lieu de faire le nécessaire pour se doter des outils épistémologiques adaptés à leur approche. (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Nous sommes navrés de vous contredire. Tout notre rapport montre que justement, les ostéopathes crâniens n’ont semble-t-il pas souvent souhaité s’inscrire dans le cadre de la recherche scientifique, même à prémisse empirique (sur ce point voir plus haut, courrier de J.L). La preuve en est la somme d’études indigentes sur le plan méthodologique.

C’est que même si les preuves ne sont pas apportées à la satisfaction des critères « scientifiques » exigés, l’ostéopathie crânienne a, de toute évidence, aidé et continue d’aider des millions de personnes de par le monde. Cela est un fait. (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Certes. Ne s’agit-il pas d’un sophisme du pragmatisme ?

En tous les cas la question change : que des personnes soient aidées par les soins de l’ostéopathie crânienne, c’est très probable. Il en est qui sont aidés par les religions, d’autres par la détestation d’une autre caste, race, culte, tribu, région, et tant d’autres versions de se faire du bien. La question est de savoir s’ils sont aidés :

1) parce que vous êtes très agréable humainement ?

2) parce qu’ils parlent d’eux pendant la consultation ?

3) parce que vous avez un fort argumentaire d’autorité ?

4) parce que la méthode est efficace en propre ? 

5) etc. ou la somme de tout cela ? Nous ne pouvons que vous renvoyer à la conférence de N. Pinsault sur le sujet, ou dans l’ouvrage « tout ce que… » sur la différence entre efficacité globale et efficacité propre.

Je ne vois pas pourquoi elle continuerait d’exister si elle n’était pas utile ! (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Sans vouloir vous déprimer, il est beaucoup de choses qui remplissent une fonction, sans pour autant avoir d’efficacité propre – la religiosité en est une (et on sait étude à l’appui que l’efficacité des prières d’intercession est nulle).

Le fait qu’elle ne puisse le « prouver » selon certains critères très précis ne suffit pas à prétendre qu’elle est inutile. Et je m’attriste toujours devant l’incapacité à accepter qu’une pratique puisse être efficace et utile bien qu’elle échappe aux moyens d’investigation d’un système. Et si c’étaient le moyen d’investigation et les critères retenus qui devaient être remis en cause, plutôt que la technique ? (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Une fois encore nous n’avons jamais prétendu l’inutilité de la discipline puisque l’utilité présente des caractères bien plus vaste que l’efficacité. L’utilité peut-être sociale par exemple, mais c’est un autre débat que nous n’auront pas ici.

Nous attendons toutes propositions, que ce soit sur un phénomène isolé, un « effet », une « efficacité », ou même sur de nouveaux critères d’évaluation. Nous saurons faire amende honorable le cas échéant.

L’absence de preuve scientifique concernant l’efficacité de la pratique n’est pas une nouveauté en soi. Ce fait est connu et c’est pourquoi des études sont toujours en cours pour essayer de démontrer un effet et une indication de ce type de thérapie (Raithet al, 2016, Haleret al, 2015, Elden et al, 2013) avec des protocoles plus ou moins bien bordés. Les résultats sont mitigés en fonction des études mais certains semblent montrer un effet intéressant ainsi qu’une absence d’effets secondaires gênants. Actuellement, il n’y a que 2 articles relevés par les auteurs qui montrent un résultat intéressant sur les cervicalgies et le syndrome douloureux pelvien gravidique. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Concernant les études de Haller et al et de Elden et al, comme vous l’avez lu dans notre rapport nous ne partageons pas votre interprétation. Nous écrivions :

« Les deux preuves méthodologiquement valables que nous avons trouvées présentent de modestes résultats qui, pour diverses raisons que nous avons évoquées, peuvent raisonnablement s’interpréter en terme d’efficacité non spécifique des traitements. »

Bien sûr, cette interprétation est longuement argumentée dans notre rapport et ne tombe pas du ciel.

Pour l’étude de Raith et al nous n’avons rien exprimé et pour cause ! Cette publication est postérieure à notre revue de littérature.

Ce rapport est référencé à partir d’articles pour leur grande majorité « vieux » de 20 et 100 ans (Seulement 14,5% des ouvrages cités et 23% des articles tirés de revues scientifiques ont moins de 5 ans) Comment déduire des conclusions scientifiques crédibles avec une telle bibliographie ? C’est vraiment dommage de ne pas considérer la littérature récente qui remet en cause le MRP pour se faire un avis au sujet de l’ostéopathie crânienne ! (Ostéopathes Plus)

Pour information, l’ancienneté d’un travail expérimental ne permet en rien de juger de sa valeur. Dans l’histoire de la médecine par exemple, il existe des essais cliniques anciens qui ont fait date. C’est par exemple le cas du tout premier essai contrôlé randomisé en double aveugle sur la streptomycine dans le cadre de la tuberculose à la fin des années 1940 [Streptomycin in Tuberculosis Trials Committee, « Streptomycin treatment of pulmonary tuberculosis. A Medical Research Council investigation, Br Med J,  v.2(4582),‎ pp. 769–82 ]. On trouve aussi moult études récentes à la méthodologie défaillante. C’est malheureusement la règle en ostéopathie crânienne. Mais s’il existe des études récentes et méthodologiquement rigoureuses qui nous ont échappé, rien ne vous empêche de nous les faire parvenir, bien au contraire ! Contrairement à beaucoup d’interlocuteurs plus ou moins amènes dans ce débat, nous ne serions pas gênés de changer d’avis. Si ces études n’existent pas, alors, vous ne pouvez en tenir rigueur qu’aux acteurs/actrices du champ de l’ostéopathie crânienne de ne pas avoir réalisé plus d’expérimentations rigoureuses ces dernières années. Pas à nous.

2. Les questions de procès d’intention

(…) C’est bien que ce rapport soit fait, il a aussi ses limites dans la mesure où il fait preuve de scientisme (…) J.L., février 2016

Le scientisme ne fait pas partie de notre programme intellectuel. Nous ne souhaitons pas, comme écrivait Renan, « organiser scientifiquement l’humanité », juste évaluer la validité, la reproductibilité et l’inter-subjectivité d’un corpus scientifique. Nous pourrions faire la même chose sur une théorie sociale, une théorie politique, une théorie physique ou mathématique (dans la limite de nos compétences additionnées).

[sur la biodynamie] (…) Là, on sent que les auteurs se sont vraiment fait plaisir ! On sent qu’ils font un très gros effort pour masquer leur bienveillance vis-à-vis du concept. (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Nous avons une posture neutre sur le plan philosophique, c’est-à-dire une suspension de jugement, comme les sceptiques Grecs anciens, qui se résume ainsi : donnez-nous de bonne raison de penser ce que vous pensez, et on le pensera aussi. En attendant, les affirmations sans preuves peuvent être réfutées sans preuves (voir à ce sujet nos articles Rasoir d’Occam, etc).

Et pour conclure, la méthode ne présente finalement « aucune efficacité prouvée » (p. 244). Chapeau bas, Messieurs Dames, voilà du travail de pro ! Il a dû prendre beaucoup de temps, coûter beaucoup d’investissement personnel et sans doute financier.(…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

C’est effectivement du travail de pro. Il a pris de nombreux mois, à plusieurs (comptons entre 600 et 800 heures), il a effectivement coûté beaucoup d’investissement personnel, et sur le plan financier nous ne souhaitons pas nous substituer au CNOMK pour vous répondre : sachez seulement qu’on est bien loin d’un SMIC horaire.

« Je suppose que, sous couvert d’objectivité, le but était dès le départ de démontrer que l’ostéopathie crânienne, c’est de la foutaise. L’objectif est atteint. » (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Convenons que nous sortons là d’un débat scientifique. Il suffit juste de savoir que si l’ostéopathie crânienne avait des bribes de validité, nous l’aurions écrit de la même façon. Que le résultat vous déplaise, c’est en faire une affaire personnelle. Nous, nous faisons de ce rapport une chose publique, qu’il vous appartient de prendre en défaut.

« N’étant pas prescripteurs de recommandations, nous nous sommes limités à une analyse impartiale… » Impartiale ? Il semble que ce mot n’ai pas pour les rédacteurs le même sens que pour le dictionnaire… Ce qui est écrit ci-dessus à propos de la biodynamique est en contradiction flagrante avec une telle affirmation. (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Dire que la Terre n’est pas plate, qu’il n’y a pas d’ether et que le complot Illuminati est une vue de l’esprit serait aussi partial ? Méfions-nous de l’effet bi-standard. Nous ne voyons pas où serait la partialité dans ce paragraphe cité.

Nous ne savons pas vraiment comment et pourquoi ça fonctionne, mais ça fonctionne !

Alors montrons-le. Montrez-le, c’est votre métier, cela devrait rendre les choses plus faciles.

Refuser cette évidence revient à se moquer des millions de gens qui ont été aidés par cette technique et qui, Dieu merci, le seront encore demain.

Vous usez ici d’une technique de l’épouvantail. C’est dommage.

Elle revient à prendre tous les patients pour des « gogos extatiques » pour reprendre les mots outrageants de J-M Abgrall dans son livre Les charlatans de la santé.

Même technique. Nous n’avions aucun lien avec J-M. Abgrall – non qu’on ne le souhaite pas. Nous connaissons ses livres. Le ton n’y est effectivement pas le nôtre.

Quel manque de respect pour les patients que de les considérer comme de gogos incapables de juger ce qui est bon pour eux ! (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

C’est de votre plume. Nous n’avons pas écrit ce genre de chose.

Quelle suffisance, quel mépris d’autrui de la part de gens se prétendant thérapeutes ! Cette incapacité à observer et à accepter l’évidence, même lorsqu’on ne peut pas l’expliquer est une maladie mentale grave et hélas, incurable.  (…) (Pierre Tricot, Le crânien, ça vaut rien !)

Gagez que là, la teneur de la discussion ne permet plus le questionnement collectif. C’est dommage.

Ici, c’est Alain Andrieux sur www.enfantsdestill.com qui nous éreinte dans

Ceux qui se cachent derrière un tel acronyme, sans doute mûrement réfléchi,

Vous semblez prompt à juger nos intentions, nous ne nous risquerions pas à en faire de même pour les vôtres. Pourtant nous ne nous cachons de rien, l’ensemble du processus est transparent, nos écrits signés, nos liens d’intérêt déclarés, nos photos disponibles et nos contacts faciles d’accès.

[…] ne pouvaient avoir qu’une seule intention : passer pour des gens intelligents voire supérieurement intelligents. Des gens qui ne plaisantent pas avec la science, enfin, leur façon d’envisager la science. Des gens qui… chez ces gens-là Monsieur on ne sort pas de la doxa même si celle-ci est extrêmement rhumatisante et en très mauvais état pour défiler de façon convaincante au moins sur le fait qu’on sait marcher. (Alain Andrieux)

Doxa, gens intelligents… Nous avons fait le travail demandé, avec des canons scientifiques que nous n’avons pas inventés, et qui ne tombent pas du ciel. Ce n’est pas parce que les résultats qu’ils donnent ne vont pas dans le sens de ce que vous pensez qu’il faut jeter la démarche scientifique critique.

Des gens qui ont consacré deux cent quatre-vingt-six pages à la compilation de tous les textes possibles et imaginables pour tenter de détruire un pan de la pratique ostéopathique auquel ils n’ont pas accès, car vous pouvez en être certains aucun praticien digne de ce nom n’a participé à ce travail de démolition, car chez ces gens là Monsieur on bave, mais on ne pratique pas. (Alain Andrieux)

Heureusement que nous ne sommes pas faciles à vexer. Baver sur 286 pages, c’est long, il ne suffit à vous lire que de quelques lignes. Par ailleurs vous faites erreur, il y a trois praticiens sur quatre qui ont rédigé ce rapport. Ne faisons pas d’erreur d’attribution : ce n’est pas nous qui détruisons un édifice, c’est plutôt vos collègues qui ne l’ont pas construits. Alors construisez-le, et notre rapport sera changé. Et comme vous semblez féru de citations de Jacques Brel, vous ne découvrirez certainement pas celle-ci : dès qu’il y a des gens qui bougent, les immobiles disent qu’ils fuient.

Et bien ce bref moment d’humeur ne m’entrainera pas vers la rédaction d’une seule page pour dénoncer une telle médiocrité aussi besogneuse soit-elle. Bon courage aux kinésithérapeutes qui vivent sous la protection d’un tel ordre qui, comme d’autres ordres, montre à quel point la zone des ouïes ( figurées parait-il par le sphénoïde ! ) a été terriblement comprimée. – mais le choc vint de la contemplation d’un crâne de la collection de Still et de l’analogie qu’il fît entre la forme de l’os sphénoïde et celle des ouïes de poissons, « indiquant une mobilité pour un mécanisme respiratoire- ».(cortes.org) (Alain Andrieux)

Pourriez-vous mettre la bonne adresse s’il vous plait ?

Pour ces gens-là, pour ce groupe-là, même pas capables de reproduire une citation correctement, l’intention d’apparaître comme une personnification de l’intelligence et de la raison est débusquée mais pour ce qui est du but à atteindre, il est totalement raté. Nous attendons avec impatience d’autres productions du Cortecs sûrement toutes porteuses de cette ouverture d’esprit qui va jusqu’à créer des courants d’air dans cette production mal cortiquée. (Alain Andrieux)

Là, nous ne savons pas quoi dire. Il n’y a rien d’autre dans l’article.

Le site Osteopathes Plus, quant à lui, tente de déverser du poison dans l’eau du puits à notre sujet :

Le rapport CORTECS n’a aucune légitimité et objectivité scientifique vu qu’il a été demandé par le CNOMK pour évaluer l’ostéopathie crânienne et réalisé sous la direction de son vice-président Mr Vaillant. Mr Vaillant, personne très influente, est également directeur de L’IFMK de Grenoble où il encadre une équipe pédagogique constituée entre autre des auteurs du rapport CORTECS. Peut-on parler de conflit d’intérêts ?

Ostéopathes Plus adjoint à ces quelques lignes un schéma intitulé « Le rapport « indépendant » du CORTECS commandé par le CNOMK est-il réellement dénué de conflits d’intérêts ? ».

L’article et le schéma, malgré leur brièveté, regorgent d’erreurs que nous énumérons ci-dessous :

– le rapport n’a pas été réalisé sous la direction de M.Vaillant ;

– seul un des quatre auteur.e.s, Nicolas Pinsault, faisait partie de l’équipe pédagogique de l’IFMK de Grenoble en tant que cadre de santé au moment de la rédaction du rapport. Son traitement est administré par le CHU Grenoble-Alpes et provenait d’une enveloppe du Conseil Régional (comme pour toutes les formations sanitaires et sociales) ;

– Richard Monvoisin n’est actuellement pas chargé de cours à l’IFMK de Grenoble (il a seulement fait quelques heures de cours entre 2009 et 2012) ;

– les deux autres auteur.e.s (Nelly Darbois et Albin Guillaud) enseignent ponctuellement à l’IFMK de Grenoble en tant que vacataire (moins de 10 heures par an) sur des thèmes sans lien avec l’ostéopathie ;

– les auteur.e.s n’ont reçu aucune rétribution financière à titre individuel pour la rédaction du rapport par le CORTECS ou le CNOMK. L’argent versé par le CNOMK au CORTECS permet à cette structure de financer des bourses d’étudiant.e.s et du matériel pédagogique, en l’occurrence des livres critiques, prêtés gratuitement à toute personne qui en fait la demande.

Quant au qualificatif de « personne très influente » adossé à la personne de M. Vaillant, nous ne comprenons pas à quoi il renvoie.

Le terme de conflit d’intérêt est utilisé à deux reprises par Ostéopathes Plus. Il est utile de rappeler qu’une rétribution financière pour un travail rendu n’entraîne pas nécessairement un conflit d’intérêt, comme cela est questionné par Ostéopathes Plus. Dans le cas qui nous intéresse, il pourrait y avoir conflit d’intérêt si les conclusions du rapport allaient dans un sens qui servait les intérêts du CNOMK, du CORTECS ou des auteur.e.s. Quels seraient donc ces intérêts ? Dans l’article et d’Ostéopathes PLUS il n’est nullement expliqué en quoi les liens d’intérêt des auteur.e.s, déclarés de manière transparente à la fois sur le site du CORTECS et sur celui de l’ordre, seraient sources de conflit d’intérêts.

En résumé, Ostéopathes Plus ne donne aucun argument pour justifier en quoi le fait que le CNOMK soit le commanditaire de notre rapport entraverait notre légitimité, et plus encore notre objectivité scientifique à travailler sur l’ostéopathie crânienne.

Et pour la petite histoire, c’est parce que Vaillant, directeur, connaît bien la qualité du travail du CORTECS qu’il a suggéré au CNOMK de le contacter pour des rapports scientifiques. Il faut en outre savoir que ce rapport a entraîné des débats au sein du CNOMK lui-même, de même qu’au CORTECS quand le CNOMK a émis ses avis

Avec une phrase comme « Peut-on parler de conflit d’intérêts ? », il est facile d’instiller du doute gratuit et fallacieux. Nous pourrions répondre par « Peut-on diffamer tranquillement chez Ostéopathes Plus ? », mais nous préférons renvoyer ses auteurs aux leçons des grands classiques, comme Francis Bacon dansDe la dignité et de l’accroissement des sciences (1623), livre VIII, chapitre II  : « Va ! calomnie hardiment, il en reste toujours quelque chose (audacter calumniare, semper aliquid haeret).

À aucun moment les auteurs n’ont eu envie de remettre en cause leur jugement bien dommage pour des « scientifiques ». (Ostéopathes Plus)

Cette affirmation est assez gratuite. Ne serait-ce pas tout simplement parce que la conclusion ne va pas dans le sens que vous auriez souhaité ? Rappelez-vous : nous n’avons aucun problème à changer d’avis preuves à l’appui. Et vous ? Changerez-vous d’avis en l’absence de preuve ?

Le Cnomk se contente de l’avis de mk opposés à l’ostéopathie (Richard Monvoisin, Nicolas Pinsault « La kinésithérapie piégée par les mages » http://www.monde-diplomatique.fr/2015/12/MONVOISIN/54379. (Ostéopathes Plus)

− Précisions d’abord que l’un des auteurs n’est pas kiné, ni même professionnel de santé ;

− il n’y est pas question de l’ostéopathie dans son ensemble ;

− s’il y a des raisons d’être rétifs à certaines de ses branches, c’est que les professionnels de celles-ci n’ont pas fait le travail requis ; ce n’est pas une critique a priori, et encore moins une querelle de chapelle – même si c’est, cela se comprend, plus facile pour vous de scénariser de cette façon.

− Vous conviendrez que l’article que vous citez est publié dans un journal dont la portée est bien plus politique que scientifique ou technique. Or si nous pensons qu’il n’y a pas de raisons a priori de s’opposer à des pratiques thérapeutiques comme celles de l’ostéopathie, nous sommes en revanche opposé à un modèle de politique de santé non redistributif et au saccage permanent des acquis sociaux de 1946. Si l’ostéopathie est mentionnée dans cet article, c’est parce qu’elle offre un exemple de l’évolution des politiques que nous dénonçons.

Karine Krzeptowski est une des premières a avoir réagi à la sortie du rapport :

Ce rapport ne peut être considéré par l’Ordre et par les pouvoirs publics car il y a faute grossière de procédure dans le choix du profil de ses auteurs, (tous kinésithérapeutes connus pour leur position négative à l’égard de l’ostéopathie). (Karine Krzeptowski sur le Site de l’Ostéopathie)

Il y a là une erreur et une confusion. Tout d’abord, seulement 3 des 4 auteur.e.s sont diplômés en kinésithérapie. Il vous revient d’expliquer en quoi la formation initiale de ces auteurs constitue un critère douteux quant au choix de leur confier une tâche d’évaluation scientifique de l’ostéopathie crânienne. Ensuite, vous confondez « position négative » et scepticisme. Ce dernier est consubstantiel de la démarche scientifique et implique un doute préalable à toute investigation. Nous n’avions pas de position de départ morale ou affective sur le sujet, et quand bien même, une démarche méthodique s’abstrait des préalables subjectifs lorsqu’elle est bien menée. Ce n’est pas parce que les conclusions ne vont pas dans le sens que vous souhaitez qu’il faut déligitimer artificiellement les compétences des auteurs.

Quand on est à la recherche de preuve d’efficacité ou de justification d’un concept, il faut s’adresser aux personnes directement concernées, ici les ostéopathes et non aux détracteurs. (Karine Krzeptowski sur le Site de l’Ostéopathie)

L’efficacité d’une technique ou la validité scientifique d’un concept n’est pas une affaire de personnes mais de données expérimentales. Nous nous sommes tournés vers les auteurs, ostéopathes ou non, « détracteurs » ou non, qui ont contribué à la connaissance sur le sujet.

De surcroît, le mot détracteur n’est pas très heureux : s’il y a des détracteurs, c’est qu’il y a des promoteurs. Nous ne nous inscrivons pas dans ce débat : que nous soyons détracteurs ou promoteurs de la gravitation, elle fonctionne, quel que soit notre avis. Que nous soyons détracteurs ou promoteurs des humeurs d’Hippocrate, elles n’existent pas. La connaissance scientifique s’abstrait du point de vue personnel.

Ce rapport ne peut être retenu et présenté décemment aux pouvoirs publics car il y a conflit d’intérêt dans le choix même des auteurs. (Karine Krzeptowski sur le Site de l’Ostéopathie)

Voir notre réponse aux rédacteurs du site Ostéopathe Plus dans la présente section, ci-dessus.

Les auteurs eux-mêmes auraient dû refuser cette mission qui ne leur revenait pas, ils terminent la conclusion de leur rapport CORTECS : « Avec le soutien du CNOMK, nous avons accepté de faire le travail laborieux qui revenait logiquement aux prétendants. De fait, alors que nous pensions qu’il n’y avait pas a priori de raison scientifique de défendre cette discipline, désormais nous le savons. »
Cette phrase dans les conclusions en dit long ! Ils partaient d’un a priori négatif et ne trouvaient pas logique eux-mêmes que cette tâche leur fut demandée à eux plutôt qu’aux ostéopathes ! (Karine Krzeptowski sur le Site de l’Ostéopathie)

Peut-être devons-nous insister sur ce qui est pourtant une évidence : le travail scientifique est une remise en question permanente de ce qu’on croit acquis. La posture de départ est « méfiante », sceptique. Au fond, vous faites la même chose : si nous affirmons guérir le cancer par massage du cou, vous serez sceptique au premier abord. La charge de la preuve incombe d’ailleurs à celui qui prétend. Donc en tout état de cause, c’était aux ostéopathes de démontrer leur théorie, mais ils ne l’ont pas fait. On a demandé à des sceptiques (non détracteurs, donc) de regarder de près, pour voir si quelque chose tenait tout de même. Si la conclusion vous déplaît, refaites nos recherches, ou produisez de nouvelles données. Alors seulement, s’il y a lieu, nous changerons nos conclusions.

Je pose la question au CORTECS : Pourquoi avoir accepté cette mission si d’emblée elle n’était pas honnête sur le plan éthique ? Ceci est une première erreur qui fausse votre approche et vous vous targuez d’avoir l’esprit scientifique ! (Karine Krzeptowski sur le Site de l’Ostéopathie)

Votre question est un plurium interrogationum. En nous sollicitant pour y répondre, vous posez comme prémisse que la mission du CORTECS concernant l’ostéopathie crânienne n’était pas « éthique » (ou décente, comme vous l’avez glissé plus tôt) S’il vous plaît, essayez de juger de notre esprit scientifique à la méthode que nous avons utilisée. Ne laissez pas la colère de votre lien d’intérêt avec le sujet chercher à s’évacuer par des vindictes gratuites.

L’Ordre finance des rapports mal ciblés dès le départ. De manière pragmatique, Si l’Ordre des MKDE souhaite encore dans l’avenir s’éclairer sur le thème de l’ostéopathie, ne serait-il pas plus sain d’instauré au sein de l’Ordre un conseil représentant des MKDE-D.O. qui pourrait dès lors œuvrer positivement lorsqu’il s’agit de faire comprendre les spécificités et l’actualisation des compétences de leur métier d’ostéopathe ? (Karine Krzeptowski sur le Site de l’Ostéopathie)

Il ne faut pas confondre démarche de communication (« œuvrer positivement ») et démarche d’évaluation scientifique. Mais si vous substituez la communication à la science, ce seront les meilleurs lobbies qui imposeront leurs vues, et c’en sera fini de la science. Un lobby de la Société de la Terre Plate pourrait imposer ses vues à tous les géologues. Nous pensons que ce n’est pas souhaitable.

3. Les questions méthodologiques

Malheureusement, ce ne sont pas là les seules sources sur le concept. Il manque l’ouvrage de Nicette Sergueef , sans parler de celui d’A Croibier sur le diagnostic général ostéopathique (qui reste un livre important pour étudier en partie le fonctionnement du raisonnement ostéopathique) aux éditions Masson ou un ouvrage de référence de T Liem aux éditions Maloine. Il faut noter que certains ouvrages apparaissent sur le site de l’ostéopathie en fouillant les articles sur les ouvrages ou avec des termes comme « crâne », « crânienne », « crânien ». (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Nous vous encourageons à lire ou relire en détail la méthodologie suivie dans cette partie du rapport pour comprendre pourquoi ces références n’apparaissent pas. En effet, nous avons relevé uniquement les concepts élaborés par le fondateur et les continuateurs de l’ostéopathie crânienne, identifiés dans la partie précédente du rapport ; Nicette Sergueeg, A Croibier et T Lien ne font pas partie de ces personnes. Ce choix méthodologique, qui a ses limites, permet de rendre notre méthode reproductible et incrémentale. Nous ne travaillons plus directement sur ce sujet, mais rien n’empêche qu’une autre équipe aille plus loin en exploitant d’éventuels points aveugles de notre méthodologie..

Je suis étonné que, les auteurs du rapport ayant l’occasion d’échanger avec des ostéopathes (c’est noté dans les remerciements), ces sources n’aient pas été évoquées. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Elles n’ont effectivement pas été suggérées par les différentes personnes contactées – mais il est difficile de leur en tenir grief. Il est probable qu’autant de contacts, autant de sources possibles. Cela corrobore notre impression que si le « feuillage » de l’ostéopathie crânienne est partout, il est assez difficile de bien distinguer un tronc solide.

De même, puisqu’utilisant un moteur de recherche généraliste qui est probablement google (on peut le supposer étant donné que google scholar est cité plus tard dans le rapport), les auteurs auraient pu utiliser google books où toutes les références citées plus haut ressortaient.(Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Détrompez-vous : ces références ne ressortent pas si l’on suit de manière précise la méthodologie décrite dans le rapport, qui cherchait à identifier les sources bibliographiques du fondateur et des continuateurs (voir supra). Maintenant, rien ne vous empêche de changer de méthodologie et de refaire le travail.

Poussons un peu plus loin et soyons indulgents sur le fait qu’ils ne connaissent pas les ouvrages d’ostéopathie en dehors des éditions Sully (car n’étant pas du métier).(Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Merci de votre indulgence – au sens canonique, l’indulgence est une rémission de la peine encourue du fait d’un péché. Ouf !

Vous faites assurément un effet paillasson en mélangeant « ne connaissent pas » et « ne jugent pas majeurs selon la méthodologie employée »

Et comme vous pouvez le constater vous-même les ostéopathes avec lesquels nous avons échangé semblent eux non plus soit ne pas connaître, soit ne pas juger majeurs les ouvrages que vous évoquez. Pensez-vous réellement qu’il suffit d’« être du métier » pour connaître tous les ouvrages pertinents en rapport avec ce métier ? Appliquer cela à de nombreux métiers, de boulanger à prêtre, de cordonnier à prostitué, suffit à en douter.

Ils préviennent que ce sera succinct, sauf que même en suivant leur méthode, il y a une part du concept plus récente (basée la tenségrité) qui n’est pas prise en compte comme l’ouvrage de Gilles Boudéhen qui fait partie du catalogue des éditions Sully. Alors comment ont-ils vraiment fait leur recherche bibliographique?  (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Si vous lisez le rapport, vous saurez comment notre recherche méthodologique a été faite. Il vous appartient de l’améliorer si vous le jugez nécessaire. A toutes fins utiles, vous pouvez agglomérer toutes les études qui vous paraissent manquer et contacter le Conseil national de l’ordre ici pour pousser plus loin notre rapport. Mais la question reste celle-ci : ces « nouvelles » publications vont-elles infléchir les conclusions de notre rapport ? Croyez bien que si nous le redoutons par pur péché d’orgueil, nous le souhaitons à l’ostéopathie crânienne – et c’est ça qui compte.

Celle-ci est vraiment limitée, comment juger objectivement de l’aspect scientifique d’un concept en étudiant la partie qui n’a pas été mise à jour au niveau des connaissances scientifiques actuelles? (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

L’ostéopathie crânienne n’est pas un concept mais un champ (une « sphère » disait Sutherland) recouvrant plusieurs concepts (MRP, membrane de tension réciproque, etc.) S’il est toujours possible que nous soyons passés à côté d’un concept particulier – encore faut-il nous le montrer – en quoi cela remet-il en question le reste de notre analyse ? Vous savez, la connaissance fonctionne par parcimonie des hypothèses depuis Aristote, puis William d’Occam. Il s’agit d’essayer de comprendre au moyen du moins grand nombre d’entités possibles une gamme de faits. Le problème majeur de votre discipline, l’ostéopathie crânienne, c’est qu’elle prend des concepts un peu flous, pour nimber de mystère une gamme de faits que personne n’a réellement objectivé. Avant de faire des châteaux de sable en Espagne, aurait dit R. Mianajbaro, penseur du XIXe siècle, vérifions d’abord qu’il y a bien du sable. Et Fontenelle l’a très bien décrit ici .

Au sujet de la tenségrité, non seulement ça n’est pas un concept spécifique à l’ostéopathie crânienne mais encore moins à l’ostéopathie tout court. C’est une notion d’abord architecturale (créée par Buckminster Fuller), puis importée en biologie avec une définition relativement précise puis, devenant concept nomade, a été adapté à de nombreuses sauces (dont celles des héritiers du mystique Carlos Castaneda, qui en firent un agglomérat de prétendus exercices spiritualistes et magiques sinon toltèques, au moins venus des pratiques des natives américains.). Encore une fois, si l’on suit notre méthode scrupuleusement décrite, il est normal que ce concept n’apparaisse pas puisqu’il n’a pas été émis par un des fondateur et continuateurs identifiés.

D’autre part, nous nous interrogeons sur la pertinence d’évaluer a posteriori ce concept puisque vous dites vous-même dans la conclusion de votre article :

Le concept étudié est amputé de sa partie la plus récente basée sur d’autres principes que le MRP. J’ai cependant quelques réserves sur ce nouveau concept qui ne fait pas davantage preuve de sa véracité dans le cadre de l’ostéopathie crânienne que l’ancien concept. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

(…) Cette erreur rédactionnelle met aussi en évidence qu’il est sans arrêt question de manipulation crânienne sans jamais que soit défini ce terme. C’est embêtant d’évaluer l’ostéopathie dans le champ crânien sans définir le geste que ça implique. Si on fait une recherche dans le document avec les termes « manipulation crânienne », jamais le terme n’est associé à une quelconque définition. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Le principe juridique de l’onus probandi s’applique aussi et surtout en science : la charge de la preuve incombe à celui qui prétend. Il est difficile de nous en vouloir de ne pas avoir défini la « manipulation crânienne » alors que Sutherland lui-même n’a pas pris soin de le faire de manière claire. Cela ressemble aux discussions sceptiques vs. théologiens : des théologiens reprochent souvent aux sceptiques de critiquer la notion de Dieu sans le définir. Mais lorsqu’il s’agit de prendre l’avis des théologiens sur ce qu’est Dieu, personne n’est d’accord. Finalement, de quoi parle-t-on ?
D’ailleurs, dans les textes identifiés se rapportant à l’ostéopathie crânienne,  « manipulation crânienne » n’est jamais présentée comme un concept central. Il y a comme qui dirait un bug dans l’épistémologie de votre discipline.

[Concernant la partie Fondement physiopathologique de l’ostéopathie crânienne]La méthodologie est décrite et semble avoir essuyé quelques écueils. Il semble que ces difficultés ne leur aient pas permis de faire une revue de littérature dans les « règles de l’art ». (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Nous avons tenu précisément le propos suivant : « Nous avons rencontré des difficultés pour mener, dans les « règles de l’art », une revue de littérature systématique compte-tenu principalement : […] », et les raisons sont listées pages 58 et 59. En fait, l’expression « règle de l’art » est mal choisie car contrairement à d’autres disciplines, , il n’existe à notre connaissance pas de « règle de l’art » pour réaliser une revue systématique de littérature sur des concepts physiopathologiques, surtout issues d’une littérature essentiellement non-indexée ! Ce qui montre que bien plus urgent que la critique de la méthodologie que nous avons prise, serait de faire de la littérature scientifique indexée ! En gros, faire de la recherche d’objectivation. C’est ce qui aurait dû être fait depuis plus d’un siècle. Par conséquent, vous pourriez tout aussi bien dire que ce que nous avons réalisé est une première et ajouter « bravo au CORTECS d’avoir essayé de démêler l’écheveau d’une discipline éparpillée et peu scrupuleuse sur la méthode expérimentale, et d’avoir construit un bon socle méthodologique (probablement améliorable) à quiconque souhaiterait entreprendre un travail similaire » N’est-ce pas ?

Sachant qu’un certain nombre d’ouvrages de référence dont nous avons parlés précédemment ne seront pas cités davantage dans cette partie, il va donc manquer un pan entier des modèles physiopathologiques. Néanmoins, concernant les modèles étudiés, il est évident que leurs conclusions sont valides: (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Rappelons-nous : avant de multiplier les modèles, il faut des faits. C’est un des critères de pseudoscientificité que de faire des modèles sans fait caractérisé (il y a même des modèles de physiologie des « vivants dans l’au-delà », à la suite des EVP de Konstantin Raudive). Si malgré tout vous estimez qu’émerge ou ont émergé des concepts spécifiques à la sphère crânienne que nous n’aurions pas traité, n’hésitez pas à nous transmettre les références des études expérimentales qui les soutiennent. Et si vraiment vous argumentez que ces concepts ont leur place dans l’historique de l’ostéopathie crânienne, vous pouvez en faire une synthèse et la rendre publique (car un des critères scientifiques de la connaissance est la connaissance partagée). Nous pourrions ainsi la publier dans un addendum du rapport grâce à vous.

[Sur la fiabilité et la validité des tests ostéopathiques employés dans le champ crânien] Cette analyse repose sur l’utilisation d’une grille d’analyse QUAREL (qui en fait s’écrit correctement QAREL). C’est un outil d’une bonne qualité (Lucas et al, 2013)pour évaluer la reproductibilité de certains tests dans un contexte de revue systématique. Il a cependant quelques limites surtout quand le test en question n’a pas de moyen d’évaluation fiable disponible (une sorte de gold standard). Les Items 9 et 10 sont notamment source de biais pour cet outil où les questions sont subjectives. Ces limites sont soulevées par les auteurs qui pointent notamment :

  • L’absence d’un gold standard,
  • Pour évaluer la constance de la mesure dans le temps, il manque la preuve du MRP et de mesures fiables.
  • L’absence d’interprétation des résultats par les évaluateurs (pour savoir si le test a été fait correctement).

En conséquence, les auteurs font un questionnaire simplifié mélangé à celui du groupe Cochrane (risk of bias tool). Ils procèdent à l’ajout d’un item crée pour l’occasion. Ce choix peut être discutable dans le sens où le mélange et la modification de questionnaires valides ne créent pas forcément un outil exempt de biais. Néanmoins, en l’absence d’outils standardisés pour la situation en question, cet outil permet une première approche.

Mais pour faire simple :

  • Un risque de biais est quasiment jugé élevé à chaque fois car le contenu d’un item est non décrit dans l’article (souvent les deux derniers items).
  • Les scores de corrélation ICC inter-observateurs sont en général assez faibles signant un manque de reproductibilité des tests ostéopathiques.
  • Les scores ICC intra-observateurs peuvent être parfois élevés en revanche avec un risque de biais non négligeable.

En résumé, l’analyse faite pour cette partie est intéressante mais l’outil employé pour l’analyse des biais est discutable du fait de ses modifications par rapport à l’outil validé et de l’attribution d’un biais élevé systématique par manque de description du protocole. Les scores ICC parlent d’eux-mêmes, et sans analyser le biais, la reproductibilité est de toute façon faible. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Permettez-nous de récapituler le premier argument de ce paragraphe (que nous étoffons d’une prémisse glanée dans le troisième paragraphe de cette partie « La fiabilité et la validité des tests ostéopathiques employés dans le champ crânien » ; nous intitulerons cette dernière « prémisse (1) »). Si nous vous comprenons bien, cela donne la chaîne logique suivante :

Prémisse (1) – « […] le mélange et la modification de questionnaires valides ne créent pas forcément un outil exempt de biais. »

Prémisse (2) – L’outil utilisé pour l’analyse des biais des études de reproductibilité a été modifié par rapport à l’outil validé ; 

Prémisse (3) – Il a été attribué un risque de biais élevé systématique par manque de description du protocole ; 

DONC

Conclusion – L’outil pour l’analyse des biais des études de reproductibilité est discutable.

Discutons d’abord de la prémisse (1). Nous sommes d’accord avec vous. Comme vous le faites vous-même remarquer dans le texte à la suite de cette prémisse : « Néanmoins, en l’absence d’outils standardisés pour la situation en question, cet outil permet une première approche. ». C’est ce que nous nous sommes dit lors de la création de l’outil.

Abordons maintenant la prémisse (2). Comme vous l’avez vous-même pointé (voir prémisse (1)), notre outil compile deux outils existants (QAREL et Cochrane risk of bias tool). Ce n’est donc pas qu’une simple modification d’un outil particulier comme vous le dites ici. Nous fondrons donc cette prémisse avec la prémisse (1) dans la suite de l’analyse.

Considérons enfin la prémisse (3). Cette prémisse n’est vrai que pour un item sur sept (l’item n°6). Pour tous les autres items, quand le protocole était insuffisamment décrit, nous avons attribué une incertitude sur le risque de biais. Autrement dit, la prémisse (3) de votre propos est fausse pour 6 items sur 7. Nous avons développé largement l’argumentaire de la création de l’outil qui s’étale pour mémoire de la page 155 à la page 159 du rapport.

Examinons enfin la conclusion de votre argument et tentons de voir dans quelle mesure les prémisses la justifie. Vous dites que notre choix méthodologique est discutable. Certes, mais tout choix méthodologique étant discutable per se, donc ce propos est trivial et il vous appartient d’en choisir un autre. Outre la trivialité de cette critique, il pourrait y avoir quelque chose d’intéressant à en tirer tout de même, moyennant de par exemple (a) pointer le type de biais émergeant de l’application de l’outil ; (b) expliquer comment tel ou tel type de biais influence ou modifie les résultats ; (c) faire des suggestions qui permettraient soit d’améliorer l’outil en question pour éviter ou diminuer ces biais, soit de le remplacer par un autre outil existant plus adapté qui ne serait pas venu à notre connaissance. Sinon, cette phrase ne sert à rien.

Quant à la prémisse 3, elle est fausse dans 6 cas sur 7. Pour l’item 6, nous avons justifié notre choix méthodologique page 159 du rapport que nous citons à nouveau ici :

« À propos de l’item 6 « Est-il prévu un dispositif pour empêcher les évaluateurs d’avoir accès à des indices additionnels sur les sujets (tatouage, taille, genre, etc.) et qui ne faisaient pas partie du test ? » : étant donnée l’importance que prend le dispositif nécessaire à sa réalisation (voir par exemple l’étude d’Halma et al. de 2008) nous considérerons qu’une absence d’information au sujet de cet item équivaut à l’absence de dispositif, c’est-à-dire à un risque de biais élevé. En toute honnêteté, ce choix pourrait être fait pour d’autres items. Seulement celui-ci nous apparaît très particulier car le dispositif nécessaire, sur le plan logistique, est tellement important que nous pressentons peu crédible le fait qu’aucun mot n’en soit dit dans la publication à cause de contraintes éditoriales ou par simple oubli. »

N’est-ce pas suffisant ?

C’est une chose assez facile de dire qu’une méthodologie est discutable. C’est une autre paire de manche que de la discuter de manière circonstanciée. Mais peut être le ferez-vous, à notre grand plaisir.

Venons-en maintenant à votre dernier énoncé de cette partie : 

« Les scores ICC parlent d’eux-mêmes, et sans analyser le biais, la reproductibilité est de toute façon faible. »

Oui, vous avez raison. La volonté de procéder à une analyse des biais relève de plusieurs motifs. Nous n’en évoquerons ici qu’un seul en citant un passage de notre rapport : 

« La majorité des études existantes et disponibles échouent à mettre en évidence ces reproductibilités pour tous les paramètres considérés, cela malgré des risques de biais souvent favorables à l’émergence de résultats positifs. » p. 195 (nous surlignons)

Autrement dit, ce que nous apprend l’analyse des biais, c’est que même en utilisant des méthodologies biaisées favorables à l’obtention de résultats reproductibles, les chercheurs échouent à mettre en évidence la reproductibilité des techniques crâniennes utilisées par les praticiens. Ceci est selon nous un indice majeur en faveur du fait que même en améliorant la méthodologie, il est probable que les chercheurs continuent malheureusement à échouer. Pour quiconque souhaiterait entreprendre une étude de reproductibilité d’une technique d’évaluation issue de l’ostéopathie dans le champ crânien, ce fait nous parait essentiel à considérer. Avant l’élaboration de ce rapport, nous avons rencontré des ostéopathes motivés pour faire ce type d’étude avec nous. Dès lors, nous leur avions proposé de nous recontacter quand nous aurions terminé le rapport, ceci pour que d’une part nous puissions éventuellement saisir des contraintes méthodologiques inhérentes à la pratique que nous aurions sous-estimées, et que d’autre part les ostéopathes intéressés puissent aisément accéder aux travaux déjà réalisés ainsi qu’aux difficultés s’y rattachant pour mesurer l’ampleur de la tâche.

[Concernant l’efficacité thérapeutique]

Les auteurs ont mis en évidence 4 revues de littérature sur les sujets :

Nous observerons que ces quatre revues convergent toutes vers un défaut de preuve de l’efficacité des techniques et stratégies thérapeutiques issues de l’ostéopathie crânienne.
Rapport CORTECS p204

Les auteurs, devant le fait qu’il y ait eu depuis la dernière revue d’autres publications, vont effectuer eux-mêmes leur propre revue de littérature.

Ils relèvent qu’un protocole en triple aveugle (patient, praticien, analyste) n’est pas applicable en thérapie manuelle pour le praticien, mais que les protocoles qui tentent de le faire pour les deux autres acteurs vont dans le bon sens.

Les auteurs vont utiliser l’outil de cochrane cité précédemment, mais seul (sans le QAREL, non adapté à l’analyse).

En résumé, il y a en général un grand risque de biais du fait de l’absence de données sur l’aspect aveuglement des trois acteurs de la recherche, soit sur la randomisation dans le protocole, soit sur les données manquantes. Les articles ne sont donc pas assez détaillés pour que les résultats puissent être correctement analysés, et quand ils le sont, il y a des manques qui portent préjudice aux résultats.

Seuls 2 études sortent du lot avec un risque de biais raisonnable (Elden et al., 2013, Haller et al., 2015).

(…)

L’utilité même d’un tel rapport (dont la responsabilité incombait à ceux qui pratiquent l’ostéopathie crânienne d’après les auteurs) est discutable du fait que des travaux de revue de littérature sur le sujet ont déjà été faits (Jackel & Von Hauenschild, 2012, Jackel & Von Hauenschild, 2011, Green et al, 1999), de même que la remise en question du concept existe depuis longtemps et a toujours cours (Gabutti & Draper-Rodi, 2014,Tricot, 2000, Roger & Witt, 1997). Enfin, parfois les outils d’évaluation choisis et modifiés peuvent être discutables. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Comme précédemment, il nous faut pour ne pas perdre l’éventuel lecteur, décortiquer l’argument de ce paragraphe.

Prémisse (1) – Des revues de littérature ont déjà été réalisées sur le sujet.

Prémisse (2) – « […] la remise en question du concept existe depuis longtemps et a toujours cours. »

Prémisse (3) – « […] parfois, les outils d’évaluation choisis et modifiés peuvent être discutables. »

DONC

Conclusion – L’utilité du rapport CORTECS sur l’analyse scientifique de l’ostéopathie crânienne est discutable.

Concernant la prémisse (1), nous n’y trouvons rien à redire puisque effectivement, des revues de littérature ont déjà été réalisées sur le sujet. Non seulement nous les mentionnons dans le rapport mais en plus nous en faisons la synthèse.

Au sujet de la prémisse (2), nous sommes au courant qu’il existe des divergences d’opinions chez les ostéopathes concernant les différents concepts (voir par exemple la page 59 du rapport qui concerne le MRP).

Quant à la prémisse (3), nous en avons déjà discuté : propos trivial et sans fondement (voir ci-dessus).

Regardons maintenant la conclusion et observons dans quelle mesure les prémisses la justifie.

Prémisse (1) À propos des revues de littérature déjà réalisées sur le sujet et sur l’intérêt d’en réaliser de nouvelles nous l’avons expliqué dans le rapport en deux endroits. Pour la revue sur la reproductibilité nous avons écrit ceci : 

« Nous constatons que ces trois revues convergent toutes sur le défaut de preuve de la reproductibilité intra et inter-observateurs des tests et procédures diagnostiques issus de l’ostéopathie crânienne. Cependant, nous allons pousser plus loin notre enquête car :

1) de nouvelle études ont été publiées depuis les travaux de Green et al. et Hartman & Norton ;

2) nous avons recensé dans notre recherche systématique un document que le travail de Fadipe et al. n’incluait pas;

3) il n’existe pas de travail similaire au nôtre en français ;

4) enfin, il en va de notre légitimité que de réaliser sa propre analyse, la plus attentive possible. »

Pour la revue sur l’efficacité nous précisons : 

« Nous observons que ces quatre revues convergent toutes vers un défaut de preuve de l’efficacité des techniques et stratégies thérapeutiques issues de l’ostéopathie crânienne. En dépit de cette convergence, nous avons tout de même fait notre propre investigation pour des motifs similaires à ceux évoqués lors de notre revue sur la reproductibilité des procédures diagnostiques. »

Nous constatons qu’il est nécessaire d’apporter quelques précisions supplémentaires pour la revue sur l’efficacité : 

(a) depuis la parution des revues les plus récentes en 2012 (les revues de Jäkel et Von Hauenschild et celle de Ernst de 2012), il y a eu 5 nouvelles publications ; 

(b) ces revues n’ont pas les mêmes critères d’inclusion et de non-inclusion que la nôtre. La conséquence est que notre revue ne comporte en commun avec ces revues que 3, 3 et 4 publications respectivement (sur les 8 publications que nous avons analysées hors celles publiées après 2012).

Pour conclure sur cette articulation prémisse (1) / conclusion (B), encore une fois ici vous faites une critique à laquelle nous avons déjà donné des éléments de réponse . Nous faisons l’hypothèse que ces passages vous ont échappés.

Prémisse (2) – « […] la remise en question du concept existe depuis longtemps et a toujours cours. »

D’expérience, nous savons malheureusement que même quand la critique d’un concept est ancienne elle gagne toujours à être réactualisée et maintenue (l’astrologie, la chiromancie pour ne prendre que des exemples « faciles », la psychanalyse freudienne pour prendre un exemple plus complexe, etc.).

Prémisse (3) – « […] parfois, les outils d’évaluation choisis et modifiés peuvent être discutables. »

Nous y sommes déjà venu. Dans votre commentaire, c’est un propos trivial et sans fondement qui ne peut justifier en rien la conclusion de votre argument.

En résumé, nous dirons encore une fois que c’est une chose de dire que quelque chose est discutable mais que s’en est une autre de la discuter sérieusement. L’analyse de vos arguments démontre que ceci n’est, hélas, pas le cas.

3. Concernant la phrase « Les critères de qualité n’étant pas mentionnés, nous ne pouvons exclure un tri sélectif, volontaire ou non des données », nous avons écrit dans notre publication (page 166 du JAOA) :
Descriptive statistics. Twelve subjects participated in the study. Of these, 11 provided high-quality data for analysis. For subject 12, the signal-to-noise ratio observed in the laser-Doppler (time-domain) output was too low for precise quantitative measurement. However, the Fourier transform (frequency-domain) record of subject 12 included all of the features observed for the other 11 subjects.
(Statistiques descriptives. Douze sujets ont participé à l’étude. Parmi ceux-ci, 11 ont fourni des données exploitables pour l’analyse. Pour le douzième, le rapport signal-bruit observé dans la production du laser-Doppler (domaine-temps) était trop bas pour une mesure quantitative précise. Pour autant, la transformation Fourier de l’enregistrement du sujet 12 contenait toutes les caractéristiques observées chez les autres onze sujets).
Les auteurs du rapport n’ont-ils pas compris cette partie ?
S’ils ne comprennent pas le rapport signal-bruit, nous les renvoyons à notre chapitre “Physiological Rhythms/Oscillations”, page 182, paragraphe « additional observations » et fig 11-18. Ils y trouveront l’interprétation du rapport signal-bruit dans nos travaux.
(“Physiological Rhythms/Oscillations”, Glonek, Sergueef, Nelson. chapt. 11. In: Chila A, ed., Foundations of Osteopathic Medicine. Baltimore, MD: Lippincott, Williams & Wilkins; 2011;162-190.) (Courrier de Nicette Sergueef, Kenneth E Nelson, Thomas Glonek adressé au CNOMK et mis en ligne sur osteopathie-france.net.)

Merci de vous préoccuper de notre compréhension du rapport signal-bruit. Cette publication devrait en tout état de cause délivrer tous les éléments permettant de comprendre et d’analyser la méthode suivie. Toutefois, notre remarque concernant l’absence de mention des critères de qualité s’appliquait en cas d’exclusion de sujets évalués, ce qui n’est pas le cas (voir infra).

Dans une seconde partie, les auteurs ont étudié les articles parlant de la fréquence du rythme crânien et la restriction de mobilité des os du crâne. Selon eux, on ne retrouve pas de reproductibilité inter et intra observateur sur le plan scientifique à ce sujet (exclusion des études ayant des résultats positifs pour un risque de biais important). Dans une dernière partie, les scientifiques ont évalué 12 études sur l’efficacité thérapeutique des techniques crâniennes. Ils en ont exclu 10 présentant des résultats positifs pour risques de biais élevé. 2 études sérieuses ont été conservés. Une concerne les syndromes douloureux pelviens de la femme enceinte (Elden et al 2013. Acta obstetricia et gynecologica Scandinavia). Les résultats positifs de cette étude sont modérés par les auteurs qui encouragent la poursuite des recherches en ce sens. (Ostéopathes Plus)

[Autre citation] Les études référencées ayant un risque de biais élevé ont été analysées de manière bien différentes tout au long de ce rapport. Elles ont été qualifiées de non sérieuses et employées pour remettre en cause l’ostéopathie crânienne (ex : concept de la mobilité suturale) Ou alors elles ont été purement exclues des résultats lorsqu’elles étaient favorables à l’ostéopathie crânienne. (ex: le chapitre sur l’efficacité thérapeutique de l’ostéopathie crânienne). (Ostéopathes Plus)

Nous pensons que votre problème vient du terme « exclusion », nous entendons « exclusion avec critères », en l’occurrence une méthodologie bien construire. Par ailleurs, il est inexact de dire que les études présentant un risque de biais élevé ont été exclues. Ceci n’est méthodologiquement pas possible dans la mesure ou l’évaluation du risque de biais des études survient après et non avant l’application des critères d’inclusion et de non-inclusion.

[…] MAIS… « en science on publie plus facilement les résultats positifs que ceux négatifs » il s’agit d’un biais de publication. « Il faut donc considérer la proportion des études positives par rapport aux négatives » ils utilisent également le principe de symétrie « si un très petit nombre d’études existe avec des résultats positifs il existe également un petit nombre d’études avec résultat négatif, cela doit nous encourager à ne rien conclure de favorable à travers ces études. » (Ostéopathes Plus)

Cela fait plusieurs fois que vous faites de fausses citations de nous. Nous vous serions reconnaissant d’utiliser des citations réelles pour alimenter la discussion.

À aucun moment l’avis d’un organisme de formation en ostéopathie agréé ou formateur écrivant des livres de références actuelles en ostéopathie crânienne n’a été consulté (Tricot, Boudehen, Gehin etc.). (Ostéopathes Plus)

La seule façon permettant à un organisme de formation ou une quelconque personne de nous aider eut été de nous fournir des comptes-rendus de travaux expérimentaux. Nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir pour récolter un maximum de ces compte-rendus. Pour mémoire, nous avons contacté :

  • L’Upledger Institute Belgium
  • L’Upledger Institute International
  • La Biodynamic Craniosacral Therapy Association of North America
  • La Sutherland Cranial Teaching Foundation
  • La Sutherland Cranial Academy of Belgium
  • La Société Française d’Ostéopathie
  • Association Française de Thérapie Cranio-Sacrale
  • La Société Suisse de Thérapie Cranio-sacrale
  • Le Collège d’Ostéopathie Sutherland Atlantique
  • La Société Européenne de Recherche en Ostéopathie Périnatale et Pédiatrique
  • Le Collectif de Développement de l’Ostéopathie Périnatale
  • L’Académie d’Ostéopathie de France
  • L’Académie Sutherland d’Ostéopathie du Québec
  • L’European Federation of Osteopaths
  • Le Forum for Osteopathic Regulation in Europe
  • L’Osteopathic Cranial Academy

Aucune de ces organisations ne nous a fourni de référence que nous n’ayons pas trouvée par d’autres moyens. Il est certes toujours possible que nous soyons passés à côté de travaux importants mais le problème reste le même : où sont-ils ? Montrez-nous ces fameuses études essentielles et fantomatiques à côté desquelles nous aurions pu passer. La charge de la preuve incombant à celui qui prétend, ce n’est théoriquement pas à nous, mais aux auteurs dont vous parler de fournir matière à leur discipline, et cela ne devrait pas être à nous de parcourir la Terre entière à la recherche de la potentielle publication en wano ou en espéranto que nous aurions pu manquer.

4. Les questions sur nos sources

Ailleurs, il est fait référence à un projet de loi sur l’ostéopathie initié par le professeur Debré, projet de loi particulièrement contesté à l’époque et qui n’a jamais été discuté à l’Assemblée nationale et encore moins en commission. Pourquoi les auteurs font-ils référence à ce projet Debré, qui n’a ni queue ni tête ? (6): « Pour un rappel historique de l’évolution du cadre législatif de l’ostéopathie, nous renvoyons à la proposition de loi portant sur la création d’un Haut Conseil de l’ostéopathie et de la chiropraxie enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 septembre 2011 (dite proposition de loi Debré). Elle rappelle notamment que jusqu’en 2002, « l’exercice de l’ostéopathie et de la chiropraxie était réservé aux seuls médecins, toute autre personne pratiquant ces disciplines relevait de l’exercice illégal de la médecine » (p. 52-53 du Rapport). (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Il vous revient d’expliquer en quoi ce projet n’a « ni queue ni tête ». Comme nous l’avons précisé dans le texte que vous citez, nous avons fait référence à ce projet de loi car il décrit l’historique de l’évolution du cadre législatif de l’ostéopathie. Sur ce point précis il s’avère tout à fait pertinent.

Mais pourquoi n’ont-ils pas noté dans leur rapport que les manipulations dites d’ostéopathie et de chiropraxie ne sont devenues réservées qu’aux seuls médecins par un arrêté du 6 janvier 1962 :

« Article 2 : Ne peuvent être pratiqués que par les docteurs en médecine, conformément à l’article L. 372 (1°) du code de la santé publique, les actes médicaux suivants : 1° Toute mobilisation forcée des articulations et toute réduction de déplacement osseux, ainsi que toutes manipulations vertébrales, et, d’une façon générale, tous les traitements dits d’ostéopathie, de spondylothérapie (ou vertébrothérapie) et de chiropraxie. Arrêté du 6 janvier 1962 fixant liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoires d’analyses médicales non médecins. » (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Nous vous remercions pour votre complément à la partie législative du rapport. Nous n’avons effectivement pas été exhaustif sur la législation au sujet de l’ostéopathie car cela nous éloignait de notre sujet de départ, la validité scientifique et l’efficacité thérapeutique de l’ostéopathie crânienne. Nous avons donc préféré renvoyer à un document synthétique, cf. réponse ci-dessus.

5. Les (fausses) erreurs relevées

Un exemple : la critique des travaux de Jean-Claude Herniou, du moins le résumé qui en est fait va totalement à l’encontre de ce que j’ai lu de son article publié sur le Site de l’Ostéopathie par mes soins : « Le mécanisme respiratoire primaire n’existe pas ». Son étude sur le mouton cherchait : « à évaluer et à comparer la mobilité de la suture et de l’os frontal du mouton soumis à faible contrainte (p.99 du rapport). Or de cette étude, il en est ressorti pour Herniou que le MRP n’existait pas ! En effet, dans l’interview qu’il donne à la revue Æsculape (2) Herniou précise parfaitement ceci: « Depuis 1987, j’ai la preuve que le liquide céphalo-rachidien (LCR), très cher à mes confrères ostéopathes, n’est pas le moteur de la mobilité crânienne. Le LCR n’est le moteur de rien du tout. Et, plus important encore, j’ai la preuve que le « mécanisme respiratoire primaire », tel qu’il est habituellement décrit en Ostéopathie, n’existe pas. Quand je lis ce qui est écrit à ce niveau je suis, pour le moins, perplexe !… Il me semble que de nombreux auteurs, par culte de Sutherland, perpétuent une erreur grossière. Cette idée bien explicable pour l’époque est aujourd’hui totalement obsolète. À mon avis, elle décrédibilise l’ostéopathie. » Fallait-il donc tout cela pour démontrer ce qui est déjà démontré ? (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Nous écrivons page 59 que « D’autres ostéopathes crâniens, certes isolés comme l’ostéopathe français Jean Claude Herniou, contestent l’existence-même du MRP. ». Le résumé et l’analyse de son étude sont insérés dans la partie relative à la mobilité des os du crâne et non à l’existence du MRP. Donc il n’y a pas de contradiction entre ce que vous dites et ce que nous avons rédigé.

En ce qui concerne votre question : « Fallait-il donc tout cela pour démontrer ce qui est déjà démontré ? », nous ne prétendons pas avoir démontré que le MRP n’existait pas (On ne peut pas démontrer l’inexistence d’un phénomène, grande injustice épistémologique), mais démontré qu’il n’y a aucune preuve de l’existence du MRP, ce qui est différent. Ensuite, rappelons-le, nous n’avons pas fait cela uniquement pour le présumé phénomène « MRP » mais aussi pour la mobilité des os du crâne, la mobilité involontaire des articulations sacro-iliaques, le rôle des membranes de tension réciproque, le souffle de vie et enfin la reproductibilité des procédures diagnostiques de l’ostéopathie crânienne ainsi que l’efficacité de ses techniques thérapeutiques. En outre, vous conviendrez que d’un point de vue scientifique, si nous nous étions contentés au sujet du MRP de renvoyer aux travaux de Herniou, il est assuré que certains de vos confrères-sœurs auraient trouvé cela quelque peu insatisfaisant, et entre nous ils ou elles auraient eu raison.

Bien que le concept d’ostéopathie crânienne soit fort bien exposé dans ces pages, les auteurs ont du mal – il faut les comprendre – pour bien analyser ce qu’est le MRP et ce qu’est l’IRC ou l’impulsion rythmique crânienne (4) au point, semble-t-il, parfois de les confondre : « Le fait de percevoir un phénomène rythmique et de pouvoir caractériser sa fréquence ne permet pas de conclure quant à l’existence du phénomène rythmique, encore moins quant à l’existence d’un MRP ou IRC. » (p.73 du Rapport).(Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Effectivement, il est difficile de s’y retrouver dans ces dénominations tant elles varient selon les auteur.e.s et les époques. Cependant, nous avions bien précisé page 59 du rapport les liens et confusions possibles entre MRP et IRC : « Lorsqu’il s’agit de quantifier ce qui s’apparente au MRP, une majorité d’ostéopathes emploient le terme d’impulsion rythmique crânienne (IRC). En fait, la nomenclature employée est très diverse pour qualifier ce mouvement qui en théorie parcourt le crâne et probablement le corps. Pour certains ostéopathes, IRC et MRP sont sensiblement la même chose, l’IRC étant la manifestation du MRP, mais il existe des voix divergentes. »

S’il existe des certitudes en ostéopathie crânienne, c’est celle du sens que les ostéopathes donnent à l’abréviation MRP et notamment au « M » : c’est un mécanisme et non un mouvement. Même si cela est faux, au sens où le mécanisme n’est pas démontré scientifiquement, le MRP est et reste un mécanisme et en tant que tel il est impossible de soutenir que c’est un phénomène rythmique que l’on pourrait palper… (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Certes, nous lisons et entendons souvent « mécanisme » plutôt que « mouvement » pour le M du MRP, mais les deux appellations co-existent. Une recherche avec Google books l’illustre : « mouvement respiratoire primaire » donne 90 occurrences contre 194 pour « mécanisme respiratoire primaire ». La certitude du sens du « M » de « MRP » pour les ostéopathes n’en est donc pas une. Comme nous l’avons rappelé plus haut, il est très difficile de s’y retrouver dans le fouillis des nomenclatures ostéopathiques, entretenu par les ostéopathes eux et elles-mêmes. Quant au fait que : « il est impossible de soutenir que c’est un phénomène rythmique que l’on pourrait palper… », c’est pourtant ce que font de nombreux et nombreuses ostéopathes, à l’image de celles et ceux que nous citons dans la partie relatant les études ayant essayé de mettre en évidence ce phénomène rythmique supposé.

Et plus loin encore : « Il est important de préciser que dans cette étude [Frymann 1971] n’est pas évoqué un mouvement des os du crâne entre eux, mais un mouvement crânien global, de type MRP ou IRC » (p.93 du Rapport). Le MRP pas plus que l’IRC ne sont des mouvements globaux. Le MRP est un essai d’explication donné par Sutherland, une sorte de formalisation explicative, d’hypothèse liée à la palpation qu’avait Sutherland, mais n’a jamais été donné par son créateur comme une vérité scientifique absolue. (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Il s’agit de votre interprétation des écrits de Sutherland. D’autres explicitent les choses autrement. Nous avons préféré ne pas qualifier le MRP de « vérité scientifique absolue », pas plus que de « formalisation explicative ».

Ce sont ses élèves qui en ont fait une théorie qui se voudrait scientifique pour essayer d’expliquer ce que ressent un ostéopathe quand il met les mains sur le crâne. Le Dr Dominique Bonneau a essayé d’éclairer ce phénomène de palpation dans un article publié dans la revue de Médecine Manuelle Ostéopathie (5). Mais le fait d’avoir voulu en faire une théorie scientifique pure et dure a amené les ostéopathes crâniens à s’enfermer dans une conception qui ne devrait plus avoir cours, même si leur palpation pourrait avoir un sens… (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Là encore, il s’agit de votre interprétation et de votre compréhension de l’histoire de l’ostéopathie. Peut-être est-ce une discussion qu’il faudrait avoir entre ostéopathes pour fixer clairement les terminologies employées ? Les choses en seraient grandement facilitées.

Une autre imprécision surprenante pour des scientifiques, c’est d’associer le new âge avec la Société de théosophie : « … Passé par la Société théosophique de Helena Blavatsky, association ésotérico new-ageuse empruntant nombre de ses concepts à l’Hindouisme, à l’occultisme et à l’astrologie, Steiner fonda ensuite la Société anthroposophique… » (p.136 du Rapport). Je reste confondu devant cette assimilation, non pas que je sois un adepte de la Société théosophique, mais parce que je me suis posé la question de la date de création de cette société. Si on en croit Wikipédia, la Société théosophique a été « fondée à New York le 17 novembre 1875, par Helena Petrovna Blavatsky, ainsi que par le Colonel Henry Steel Olcott et William Quan Judge ». Mais qu’allait donc faire le new âge en cette affaire même si ses adeptes ont cherché dans les écrits anciens des références et des appuis ? (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Nous nous faisons fort de ne pas vous laisser trop longtemps confondu : le New Age, avec un petit R marque déposée, comme courant étiqueté comme tel, n’existe pas vraiment : il est généralement présenté comme le fuit des « travaux » de Ferguson, années 1970, sur l’aquarian conspiracy, on est d’accord., mais ses racines, ainsi que le concept d’un nouvel âge à venir, viennent du XIXe, de la convergence entre la société anthroposophique, les courants type Lebensreform, retour à la Nature avec des gens comme Adolf Just, la Naturphilosophie dans ses différentes formes, etc. avec des soupçons de millénarisme, de maîtres ascensionnés pris à l’hindouisme et de retour du Christ-roi d’Alice Bailey – on est dans les années 20 à ce moment-là. Mais le New Age est tellement éclectique qu’on pourrait -certains auteurs le font – remonter à Swedenborg. Donc nous sommes raccord avec un bon nombre d’historiens en faisant naître la mouvance New Age dans le brouet spiritualiste de la fin du XIXe. En 1864 par exemple, le très swedenborgien Warren Felt Evans publia The New Age and its Message, ; en 1907 Alfred Orage and Holbrook Jackson firent paraître un hebdo mélange de socialisme et de libéralisme chrétien intitulé The New Age. Ensuite, il y aura Disciplineship in the New Age (1944) and Education in the New Age (1954), d’Alice Bailey.

Donc oui, le New age a des racines très profondes, et l’anthroposophie n’en fut pas l’une des moindres.. Pour cette filiation, vous pouvez lire en anglais Sarah M. Pike, New Age and Neopagan Religions in America. Columbia University Press, ou Sutcliffe, Steven J. Children of the New Age: A History of Spiritual Practices. London and New York: Routledge (2003) ainsi qu’en français Marhic et Besnier, le New age, son histoire ses pratiques ses arnaques, Castor Astral 1998.

6. Les (vraies) erreurs relevées

Concernant le côté du résumé du cadre législatif, il y a un petit problème avec ce paragraphe
C.3 Pratique
Les ostéopathes n’ont pas le droit de pratiquer un certain nombre d’actes s’ils ne sont pas « soumis à diagnostic médical préalable de non contre-indication ». Parmi ces actes, on note les « manipulations du crâne ».
Rapport CORTECS, p53
Or, dans les décrets qui auraient pu être cités en entier, il était fait mention d’un élément supplémentaire qui change le champ d’application de la restriction de prise en charge. Premièrement ça ne rajoutait pas beaucoup plus de lignes et surtout, deuxièmement, ça évitait une erreur factuelle:

Article 3
(…)
Décrets du 27 mars 2007
On voit que cette restriction concerne la prise en charge des nourrissons. Il existe donc un risque de confusion. (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Vous avez raison, il aurait fallu préciser que cette contre-indication s’appliquait uniquement pour la prise en charge des nourrissons. Nous nous sommes nous aussi rendus compte de cette imprécision hélas peu de temps après le rendu du rapport. Nous sommes ravis que vous l’ayez pointé du doigt. Même si cette erreur ne change rien aux conclusions, nous ferons un addendum au rapport en vous remerciant.

« Cette analyse repose sur l’utilisation d’une grille d’analyse QUAREL (qui en fait s’écrit correctement QAREL). » (nous surlignons). (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Exact ! Coquille qui s’est subrepticement insinuée puis répliquée dans l’intégralité du document. Nous avons probablement fondu QUAREL, quarrel en anglais (la querelle ou dispute oratoire), et peut être même squirrel, l’écureuil. Merci pour cette remarque.

Suite à la lecture du rapport sur l’ostéopathie crânienne rédigé par le Collectif de recherche transdisciplinaire esprit critique et sciences (Cortecs), en date du 26 janvier 2016, à la demande du Conseil National de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes, nous voudrions apporter quelques remarques.

Dans ce rapport, nous nous sommes particulièrement intéressés à la revue des publications que nous avons réalisées au Chicago College of Osteopathic Medicine, Midwestern University, Downers Grove, Il, USA. (Nelson KE, Sergueef N, Glonek T).

1. Page 69 du rapport du Cortecs, les auteurs évaluent notre étude : « Cranial rhythmic impulse related to the Traube-Hering-Mayer oscillation: Comparing laser-Doppler flowmetry and palpation”. Nelson, Sergueef, Lipinski, Chapman, Glonek. JAOA March 2001:163-73.
Ils écrivent : « Pour se faire, l’oscillation de THM était mesurée chez 20 sujets en bonne santé par le biais d’une sonde Doppler positionnée sur le lobe de l’oreille gauche de chaque sujet ».
Page 70 : « En analysant cette publication, on sera étonné que seulement 12 sujets sur les 20 initiaux font l’objet d’un traitement statistique, du fait de la mauvaise qualité d’acquisition des autres enregistrements, selon les auteurs. Les critères de qualité n’étant pas mentionnés, nous ne pouvons exclure un tri sélectif, volontaire ou non des données ».

2. En fait, dans cette étude, nous avons mesuré l’oscillation de THM chez 12 sujets, et non 20 comme l’auteur de ce rapport le mentionne. Il est donc évident que nous ne pouvions traiter les données statistiques de 20 personnes. On peut lire dans notre publication (page 163 du JAOA) : « Twelve healthy subjects over 18 years of age (6 males; 6 females, none pregnant) were recruited from the faculty and students of the Chicago College of Osteopathic Medicine ».
(Douze sujets en bonne santé, de plus de 18 ans (6 hommes, 6 femmes, aucune enceinte)ont été recrutés parmi les professeurs et les étudiants du Collège de Médecine Ostéopathique Chicago) (Courrier de Nicette Sergueef, Kenneth E Nelson, Thomas Glonek adressé au CNOMK et mis en ligne sur osteopathie-france.net.)

Nous vous remercions d’avoir relevé cette coquille qui s’est subrepticement glissée dans le rapport et a ensuite échappé à notre vigilance lors des relectures. Effectivement, il s’agit d’une erreur factuelle importante de notre part – probablement une confusion twelve / twenty. Nous vous remercions de nous l’indiquer, et déplorons vivement notre erreur. Les données ont pu être recueillies de manière satisfaisante pour 11 sujets sur les 12 inclus dans l’étude, et non 20.
Précisons cependant que, vous en conviendrez que, cela ne remet pas en cause nos remarques ultérieures concernant les limites intrinsèques de l’étude. Nous écrivions :

« En outre, compte tenu du faible nombre de sujets analysés l’analyse statistique se révèle insuffisamment détaillée pour conclure à sa validité. Enfin, notons que quand bien même il y eut coïncidence entre les deux ondes, il faudrait plus de contrôles dans la méthodologie utilisée pour que l’onde palpée puisse effectivement être reliée au MRP. »

4. Les auteurs du rapport décrivent ainsi la prise utilisée par le praticien … »L’examinateur presse légèrement de dehors en dedans, de manière à provoquer une rotation externe des deux os pariétaux ». Il s’agit d’une extrapolation, car nous avons écrit : « the examiner, at the head of the table, palpated the CRI using light touch with the hands in a biparietal-hold position » (le praticien à la tête de la table, palpait l’IRC avec un toucher léger et une prise bipariétale). La prise bipariétale n’implique pas une induction de mouvement. (Courrier de Nicette Sergueef, Kenneth E Nelson, Thomas Glonek adressé au CNOMK et mis en ligne sur osteopathie-france.net.)

Merci d’apporter plus de précisions concernant les modalités des techniques appliquées qui ont pu nous échapper.

5. L’étude référencée en bas de la page 72, n’a rien à voir avec les remarques qui sont faites dans ce paragraphe. (Courrier de Nicette Sergueef, Kenneth E Nelson, Thomas Glonek adressé au CNOMK et mis en ligne sur osteopathie-france.net.)

Vous relevez aussi une erreur de notre part de référencement. L’étude correspondant à l’analyse figurant en p72 est celle-ci : Sergueff N., Nelson K. E., Glonek T., The effect of cranial manipulation upon the Traube-Hering-Mayer oscillation as measured by Laser-Doppler flowmetry, Alternative Therapies. (2002) Nov/Dec ; 8(6) que l’on retrouve citée en page 267 et 285.

Nous sommes heureux que les auteurs aient pris le temps d’examiner notre travail, mais déçus par la fausse représentation qu’ils en ont faite. Les auteurs n’ont manifestement pas lu notre étude attentivement, et leurs conclusions ne peuvent être validées par le fait des erreurs d’interprétation qu’ils ont faites. (Courrier de Nicette Sergueef, Kenneth E Nelson, Thomas Glonek adressé au CNOMK et mis en ligne sur osteopathie-france.net.)

Nous partageons sincèrement votre déception concernant les erreurs que nous avons commises concernant cette publication. Cependant, nos conclusions ne nous semblent pas affectées par ces erreurs, comme nous l’avons précisé précédemment lorsque nous avons rappelé les autres limites intrinsèques de cette dernière.

Il reste à dire quelques mots de l’orthographe. Je suppose que le clavier n’avait pas toujours les accents français car de très nombreuses fois nous trouvons ou au lieu de ce qui perturbe momentanément la lecture. Et que dire alors de cette confusion de verbe : « Nous considérons que l’expérience minimale est le fait d’avoir terminé une formation spécifique à la pratique. Il nous semble en effet indispensable, en tant que patients, de ne pas devoir attendre qu’un praticien est (sic au lieu de ait) plusieurs années d’expérience pour pouvoir fonder ces choix thérapeutiques sur des examens reproductibles » (p.158 du Rapport). Finalement c’est bien peu de choses, et je me suis même posé la question de savoir : fallait-il le signaler ? (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Question qui ressemble à une prétérition, puisque finalement vous avez choisi de le faire. On pourrait dire trois choses sur ce point : primo, c’est un angle de critique assez pauvre, vous en conviendrez. Secundo, sans relecteur professionnel à rémunérer, c’est impossible sur un aussi long travail de relever toutes les coquilles. Enfin, dernier point, il y a une façon plus élégante de nous aider : au lieu d’exposer en public en les citant nos fautes d’orthographe, ce qui manque un peu de… style… Vous auriez pu les noter, nous les envoyer, et nous permettre de remettre en ligne une version expurgée, avec nos remerciements et l’impression d’une collaboration, pas d’un tir au pigeon.

7. Les extrapolations

A l’aide de la littérature, ils concluent : […] – la circulation du LCR est admise mais il n’existe aucune preuve de lien de cause à effet entre fluctuation du LCR et mobilité du crâne ; […] (Ostéopathes Plus)

Vous nous amenez ici hors de notre sujet. La question d’un lien entre fluctuation du LCR et mobilité du crâne n’est abordée nulle part dans notre travail et pour cause : aucune donnée expérimentale consistante pour soutenir l’hypothèse d’une mobilité des os du crâne entre eux n’a été découverte.

[…] – aucune étude au sujet des membranes de tensions réciproques et toujours ce même raisonnement « vu qu’on a montré que le MRP n’est pas démontrable, il n’est pas soutenable de lier les membranes de tensions réciproques à la mobilité crânienne ». (Ostéopathes Plus)

Notre citation exacte est substantiellement différente de celle que vous rapportez. La voici :

« Le concept de MRP n’étant pas lui non plus démontré, il n’est pas soutenable de penser que les membranes de tension réciproque jouent un rôle dans la mobilité des os du crâne et de la face (elle non plus infondée scientifiquement) ou dans la mobilité involontaire du sacrum (idem). » (page 132)

En fait, l’imbroglio est un peu de notre faute car faire apparaître le MRP ici était dilatoire. S’il nous appartenait de changer notre phrase, nous mettrions : « Il n’est pas soutenable de penser que les membranes de tension réciproque jouent un rôle dans la mobilité des os du crâne ou dans la mobilité involontaire du sacrum dans la mesure où ces deux types de mobilité ne sont pas démontrées. »

Le dernier article étudie les techniques crâniennes sur les cervicalgies chroniques. Les auteurs reconnaissent l’efficacité de l’ostéopathie crânienne dans ce cadre […] (Ostéopathes Plus)

Vous allez vite en besogne ! Nous vous encourageons à nous relire : ce que nous reconnaissons, c’est la valeur de l’étude de Haller et al. en tant que données expérimentales pour soutenir l’efficacité de l’ostéopathie crânienne dans le cadre des cervicalgies chroniques. Ceci n’est pas la même chose que de dire que nous reconnaissons l’efficacité de l’ostéopathie crânienne dans ce cadre. Pour cela, il nous faudrait plusieurs études épurées des biais méthodologiques présents dans l’étude de Haller et al. En gros, ostéopathes, retroussez vos manches !

8. Les redites

Rappelons également que Sutherland s’est largement servi des écrits de Swedenborg (1688-1772) pour inventer son MRP. Et quitte à être iconoclaste, Sutherland a simplement rajouté le mouvement des os du crâne et celui du sacrum entre les iliaques à la théorie de Swedenborg exposé dans son livre « The Brain ». (Jean-Louis Boutin sur le Site de l’Ostéopathie)

Oui, nous évoquons cela page 17 du rapport : « Swedenborg est un philosophe et théologien suédois du XVIIIe siècle. Deux travaux d’ostéopathes ont suggéré que Sutherland connaissait les idées de Swedenborg concernant la physiologie et l’anatomie cérébrale et crânienne et s’en est inspiré pour élaborer son modèle du mécanisme respiratoire primaire. Jordan T., Swedenborg’s influence on Sutherland’s ‘Primary Respiratory Mechanism’ model in cranial osteopathy, International Journal of Osteopathic Medicine.(2009) Sept ; 12(3):100–105, et Fuller D.D., A Comparison of Swedenborg’s and Sutherland’s Descriptions of Brain, Dural Membrane and Cranial Bone Motion, The new philosophy. (2008) Oct–Dec ; 619-650. » Swedenborg apparaît même dans notre tableau page 46 où nous faisons la synthèse des principaux concepts et pratiques associées, développés par Sutherland et ses continuateurs.

9. Les questions concernant l’intérêt du rapport

D’où ma question sur ce rapport, où est la surprise? Il n’y a rien d’étonnant sur les résultats, il y a seulement 79 publications sur pubmed dont la majorité date d’avant 2000. Comment le niveau de preuve aurait pu changer du tout au tout avec si peu d’études récentes? Y avait-il vraiment besoin d’un rapport pour nous faire l’historique incomplet du concept et nous livrer des conclusions que des revues de littérature datant de 2012 et 1999 nous avait déjà apprises (quasi-absence de preuves, manque de reproductibilité de tests, besoin de recherche)? (Laurent Marc, Rapport de Cortecs sur l’ostéopathie cranienne : où est la surprise?)

Votre dernier paragraphe nécessite quelques réponses.

1) Personne (et certainement pas le CorteX) n’avait promis de surprise ou quelque chose d’étonnant. Nous ne sommes pas des producteurs de sensationnel.

2) Vous dites :

« […] seulement 79 publications sur pubmed dont la majorité date d’avant 2000. Comment le niveau de preuve aurait pu changer du tout au tout avec si peu d’études récentes? »

Cinq nouvelles publications sont parues depuis les dernières revues de 2012. Libre à vous de juger que cela fait peu. En attendant, pour des raisons redondantes, nous ne pouvions pas nous contenter de citer les revues existantes en ignorant les publications récentes sous prétexte qu’il y en avait peu. Et bien nous en a pris car les études présentant les plus faibles risques de biais font partie des études récentes.

3) Concernant les revues de littérature, nous en avons déjà discuté.

4) Vous jugez l’historique incomplet ? Voir nos réponses précédentes. Nous estimons qu’aucun des auteurs et concept que vous avez évoqués ne peuvent être cités (aujourd’hui en tout cas) dans un historique spécifique de l’ostéopathie crânienne. Et il est très probable qu’ad nauseam, quand bien même nous aurions eu la chance de citer vos auteurs, seraient venus d’autres professionnels nous notifiant d’avoir manqué tel ou tel nom. Sans vouloir être cinglant : peut être n’y avait-il pas besoin d’un rapport comme le nôtre, certes. Mais posons le problème autrement : comment se fait-il que sans réelle avancée majeure de la discipline en dépit des rapports précédents, les ostéopathes crâniens dans leur majorité ont continué à professer, sans tressaillir, sans faire des « assises » urgentes de leur discipline ? Comment se fait-il qu’il n’y ait pas eu urgence dans votre profession, devant un « bazar » épistémologique et scientifique pareil ? C’est cette question à laquelle il faudrait répondre.

L’équipe du rapport

Plus d’un an après la mise en ligne de notre rapport, des réactions nouvelles surviennent encore. Voici la dernière en date d’Eric Goyenvalle : ici et notre réponse ici. Cette réponse sera la dernière de notre part, notre temps étant hélas limité. Dorénavant, nous répondrons uniquement aux critiques qui, en apportant des éléments nouveaux (nouvelles études expérimentales ou études que nous aurions pu manquer) mettraient en cause nos conclusions concernant l’efficacité ou la validité de l’ostéopathie crânienne.

Manifeste des 100 intellos à lunettes qui ont besoin du Postillon pour travailler

Ce manifeste a été produit en soutien à la seule presse alternative du bassin grenoblois. C’est une tribune, et à ce titre, elle déroge un peu à la charte de publication du CorteX. Mais il s’agit ici de mettre un peu les mains dans le cambouis. Les intellectuel.les ont le devoir accru de descendre de leurs hautes sphères et de se concerner pour la vie publique et le paysage médiatique, un devoir plus grand que pour quelque autre profession car leur métier est de penser, de réfléchir, et s’ils/elles ont appris à faire ça par les services et les deniers publics, il est légitime qu’ils/elles rendent au public un peu la monnaie de leur pièce. Comme l’écrivait Michel Audiard, deux intellectuels assis vont moins loin qu’une brute qui marche.

Lettre ouverte à Christophe Ferrari, président de la Métro, et Yveline Denat, directrice de cabinet de la Mairie de Pont-de-Claix

Monsieur Ferrari, Madame Denat,

Nous sommes enseignant.e.s, chercheur.euses, journalistes, éducateurs et éducatrices, maniant plus facilement la cervelle que la truelle. De fait, nous sommes des intellectuel.les. Par conséquent les faits scientifiques, les études, les livres et le journalisme d’investigation sont nos nourritures, notre matière première de travail, notre glaise. Vous ne pouvez pas l’ignorer, en particulier vous Monsieur Ferrari, scientifique universitaire que vous êtes.

Le contexte actuel ne vous est pas étranger : la presse caustique a les dents limées, la presse satirique se prend du plomb dans la tête, la presse d’investigation n’existe presque plus, et l’aide à la presse, censée « contribuer au pluralisme du paysage médiatique et offrir un choix réel au lecteur », subventionne plus volontiers les mastodontes et les programmes télévisés que les petites feuilles de chou locales1.

Une presse alternative décapante est essentielle à l’alimentation de la réflexion des citoyens de la métropole, réflexion qui avait tendance à s’habituer au ronron anxiolytique du Dauphiné Libéré, pourtant subventionné à près de 5 millions d’euros par an.

Tuer cette presse, c’est enlever le ciment au maçon, c’est acidifier la terre de l’agriculteur. C’est pisser dans le seau à champagne. Tuer cette presse, c’est retirer le matériel de réflexion dont nous nous servons pour former à la réflexion critique nos chères têtes blondes, bouclées et crépues.

Et il s’agit bien ici de non-assistance à presse en danger. En laissant le Postillon et son directeur de publication être déclarés « coupables » et condamnés à verser « 2 000 euros d’amende, dont 1 000 avec sursis »,puis « 2 000 euros de dommages-intérêts à Yveline Denat », plus « 1 500 euros de dommages-intérêts à Christophe Ferrari », plus « 1 200 euros chacun pour le remboursement de leurs frais de justice », vous savez bien, Monsieur Ferrari, Madame Denat que vous faites couler la barque, fabriquée par des personnes précaires qui ne proposent ce canard que par conviction.

Le caractère diffamatoire ou non est de notre point de vue très secondaire dans cette affaire.

Entendez notre appel : retirez votre plainte !

D’abord par calcul personnel : car cette plainte vous rend antipathiques, comme Goliath, comme Polyphème. Elle fait de vous une botte militaire qui écrase la seule fleur d’un bocage. Elle signifie flinguer la seule presse alternative grenobloise existante, pour simplement laver votre plumage. Vous allez torpiller un enjeu d’utilité publique pour un petit honneur confit dans une surestime de soi.

Surtout, pour l’Histoire. Vous n’êtes pas dupes : cela relève de notre boulot de documenter, de garder trace, de consigner. Les encyclopédies du présent et du futur sauront garder votre fait d’armes, et il est assez probable que nos descendants auront grand mal à revendiquer votre héritage. Il est prévisible que votre action en justice fasse pouffer nos petits-enfants, comme nous pouffons devant les censures de l’ORTF ou de l’abbé Béthléem.

Nous faisons le pari que vous n’aviez pas vu les choses sous cet angle, et que comprenant tout l’enjeu qu’il y a rapporté à ce que vous essayez de sauver, vous allez annoncer le retrait de votre plainte. Les enjeux collectifs, nous en sommes sûr.es, dépassent et subsument nos égos, n’est-ce pas ?

Bien cordialement

Les signataires

Alban BOURGE, nanotechnologies

Albin DE MUER, physique

Albin GUILLAUD, épidémiologie

Anaïs GOFFRE, agriculture

Anne DIDELOT, anglais, français langue étrangère

Anne VILAIN, sciences du langage

Anne-Laure DAUB, santé

Aurélien BARRAU, astrophysique

Aurore AUDRAIN, informatique

Aymeric SOLERTI, agriculture

Bastien LETOWSKI, génie électrique

Benjamin VIAL, sciences sociales

Brunelle DALBAVIE, construction

Caroline BORDIN-GOFFIN, santé

Caroline ROSSI, anglais

Cécilia DUPRÉ, nanotechnologies

Cédric TAILLANDIER, science des matériaux

Célia GUILLAUD, ressources humaines

Céline DALLA COSTA, mesures physiques

Claire MARYNOWER, histoire

Clara EGGER, science politique

Clément DEBIN, mathématiques

Cyril TRIMAILLE, sociolinguistique

Cyrille DESMOULINS, énergies alternatives

Denis CAROTI, sciences physiques

Dominique BOCHER, sciences physiques

Edwin HATTON, politique

Elise BOURGES, musique

Élodie BIDAL, biophysique

Elora MOURGUES, technologie

Eric DUMAS, mathématiques

Euxane ESPIAU, géotechnique

Fanny BASTIEN, audiovisuel et multimédia

Fanny VUAILLAT, urbanisme

Félix SIPMA, agriculture

Francis LAZARUS, informatique

Francis TROULLIER, sciences physiques

François BLAIRE, graphisme

François BOUX, informatique

Gaëtan BOUILLARD, médecine

Gilbert MARMEY, électrotechnique

Grégoire CHARLOT, mathématiques

Grégory HERBINSKI, médecine

Guillaume ALLÈGRE, informatique

Guillaume LAGET, mathématiques

Guillemette REVIRON, mathématiques

Haithem GUIZANI, sciences de gestion

Héléna REVIL, sciences sociales

Hélène PINSON, médecine

Irène FAVIER, histoire

Isabelle KRZYWKOWSKI, littérature générale et comparée

Ismaël BENSLIMANE, philosophie

Jean RESSIOT, informatique

Jean-Yves TIZOT, histoire et civilisation britannique

Jennifer BUYCK, urbanisme

Jérémy GARDEN, ethnomusicologie

Josua GRÄBENER, sciences politiques

Julien LÉVY, sciences sociales

Julien PECCOUD, sciences de la vie et de la Terre

Laure SAMBOURG, mathématiques

Laurence BUSON, sciences du langage

Laurent HUSSON, géologie

Lucas FLORIN, éducation populaire

Madeleine MIALOCQ, sciences humaines

Manon ÉLIE,ingénierie

Marie GARDENT, géomorphologie

Marine PONTHIEU, sciences de la matière

Marinette MATTHEY, sciences du langage

Marlène JOUAN, philosophie

Murielle FRANVILLE, sciences de la communication

Nelly DARBOIS, santé

Nicolas PINSAULT, santé, neurosciences

Nicolas VIVANT, indépendant

Olivier KRAIF, informatique pédagogique

Olivier RAZAC, philosophie

Olivier TOSONI, technologies industrielles

Pascale LAZARUS, musique

Pascale GUIRIMAND, éducation populaire

Pierre BADIN, parole et cognition

Pierre GENEVOIS, mécanique

Pierre LABREUCHE, physique

Pierre MAZET, sciences sociales

Pierrick BONNASSIEUX, ingénierie

Raul MAGNI BERTON, science politique

Rémi CLOT-GOUDARD, philosophie

Richard MONVOISIN, didactique des sciences

Robin ROLLAND, électronicien

Romain VANEL, mathématiques

Sarah MEKDJIAN, géographie

Sébastien BERGER, pollution

Serge BONDIL, informatique

Simon PONTIÉ, électronique

Simon VARAINE, science politique

Stéphanie GUINARD, agriculture

Thierry SOUBRIÉ, sciences du langage

Thomas BASILE, santé

Thomas VAN OUDENHOVE, informatique

Vincent BOURY, ressources humaines

Yves BONNARDEL, indépendant

Pour en savoir plus : Condamné, Le Postillon fait appel

Extrait de « un taxi pour Tobrouk« , de Denys de La Patellière (1961).

Éditions Matériologiques alimentent ton esprit critique

Il est possible de développer son esprit critique de différentes manières. La confrontation méthodique à des matériaux issus des théories et champs controversés est particulièrement efficace pour cette fin. C’est pourquoi au CorteX nous affectionnons travailler à partir des phénomènes réputés paranormaux, des théories essentialistes, des médecines dites « alternatives », des scénarios complotistes et d’autres choses encore. Une autre voie possible est de s’acoquiner avec les problématiques philosophico-scientifiques en cours. Le lecteur notera que là où nous aurions pu dire philosophiques et scientifiques, nous avons à dessein rapproché les deux termes. En effet, nous ne pensons pas qu’il puisse y avoir de réflexion philosophique efficace qui ne prendrait pas appui sur le réel, et quelle meilleure voie d’accès à ce réel que la démarche scientifique ? D’un autre côté, nous doutons qu’il puisse y avoir une démarche scientifique en apesanteur de toute réflexion philosophique2. Il existe en France une maison d’édition qui s’inscrit pleinement dans un arrière-plan de ce type : les Éditions Matériologiques (EM). Nous annoncions la naissance de ces éditions en 2011 ici et nous en reparlions . Aujourd’hui, nous avons sollicité Marc Silberstein, l’un des cofondateurs, afin de mieux comprendre leur travail à travers une brève histoire des EM et un court entretien.

Une brève histoire des Éditions Matériologiques

En 1998, Marc Silberstein commença par éditer des livres de sciences et d’épistémologie dans une maison d’édition parisienne au sein d’une collection appelée « Matériologiques » – qui rend hommage au matérialisme scientifique revendiqué par Mario Bunge. Durant près de dix ans, la collection se développe doucement et d’autres auteurs se lancent dans l’aventure. Les livres rencontrent un succès convenable qui permet à la collection d’atteindre les 21 titres (dont des traductions de Bertrand Russell, Mario Bunge, Jaegwon Kim). Parmi ces ouvrages, deux semblent avoir fait un peu de bruit dans les milieux concernés : en 2000, Intrusions spiritualistes et impostures intellectuelles en sciences, dirigé par Jean Dubessy et Guillaume Lecointre, et en 2004, Les Matérialismes (et ses détracteurs), sous la même direction avec Marc Silberstein en plus. Ces deux pièces constitueront les piliers d’une série de livres traitant de l’imposture intellectuelle en sciences ainsi que d’une défense et illustration du matérialisme en tant que matériaux des sciences1.

En 2008, émergent de fortes divergences idéologiques entre Marc Silberstein et cet éditeur. Selon lui, un des éléments déclencheurs de cette divergence fut la traduction de l’ouvrage de Bunge (version anglaise en 1981) dans lequel ce dernier exerce une critique serrée du matérialisme dialectique, position philosophique qui avait alors le vent en poupe dans la maison d’édition en question.

En juin 2009, Marc se voit contraint de quitter la maison d’édition et la collection « Matériologiques » est supprimée dans les semaines qui suivent. De nombreux projets de livres lancés des mois, voire des années auparavant sont annulés. Ne souhaitant alors pas laisser ces ouvrages et leurs auteurs dans le néant, il a l’idée de créer une nouvelle maison d’édition pour faire aboutir ces projets. Les Éditions Matériologiques ont été formellement fondées en 2010 par Marc Silberstein et deux de ses amis philosophes spécialistes du matérialisme des Lumières françaises, Pascal Charbonnat2 et François Pépin, sous la forme d’une association loi 1901. Les ont rapidement rejoint un groupe d’amis qui constitue peu ou prou l’équipe actuelle et le conseil d’administration de l’association3.

Les débuts des EM sont difficiles. La construction dune maison d’édition professionnelle coûte cher à tout point de vue. La recherche initiale de mécènes et de diffuseurs n’est pas simple, ce qui conduit l’équipe des EM à la décision de s’affranchir du support papier et de devenir un éditeur d’ebooks exclusif. C’est ainsi que les premiers livres parurent, en partie en reprenant des titres de l’ancienne collection abandonnés par l’éditeur initial, en partie des livres originaux que des auteurs, malgré un contexte éditorial particulier pour l’époque, ont bien voulu leur confier. Cependant, en dépit de la levée de ces premières difficultés, d’autres survinrent par la suite. La faible popularité du support ebook, les piratages, ainsi que des thématiques à lectorat restreint firent partie de ces difficultés. Il a pu être malgré tout publié plusieurs livres importants durant cette période, ceci grâce à des auteurs confiants dans le travail éditorial des EM et grâce aux réseaux académiques des amis des membres du Conseil d’administration, écoutés par leurs pairs. Deux ans plus tard, en 2014, avec divers facteurs dont le retour au livre papier, l’augmentation du chiffre d’affaires, le nombre des manuscrits reçus et l’augmentation de la notoriété des EM, celle-ci arrive enfin à maturité.

Depuis cette période, les EM se développent sans cesse, en termes de titres, de création de nouvelles collections, d’exploration de nouveaux domaines scientifiques ou philosophiques dans la lignée des préoccupations initiales des fondateurs des éditions. Le catalogue des EM compte aujourd’hui plus de 50 ouvrages (livres et revues), près de 30 titres à paraître en 2016-2017.

Quelques questions à Marc Silberstein

Que signifie le terme « Matériologiques » dans « Éditions Matériologiques » ?

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Je rappelle que c’est la reprise du nom d’une collection que j’avais créée en 1998 dans une autre maison d’édition. C’est la contraction et inversion de « logiques du matérialisme ». Il faut ajouter que nous avions fondé une revue d’épistémologie matérialiste/du matérialisme dont le titre est Matière première (dont je recommande vivement le numéro consacré au déterminisme, paru aux EM en 2012). On a ainsi voulu affirmer par ce nom notre adhésion au matérialisme en dépit des connotations péjoratives qui obèrent ce terme. D’ailleurs, au début de notre activité, il n’était pas rare qu’on nous en fasse le reproche en comprenant cette désignation d’une façon péjorative (malgré nos avertissements, nos parcours et un catalogue qui parlaient pour nous). Bien que tous nos livres ne soient pas porteurs d’une revendication matérialiste, nous tenons sans retenue à cette estampille, surtout quand sont souvent assimilés à tort voire à dessein matérialisme, darwinisme, stalinisme, nazisme et d’autres choses encore. Pour clarifier notre position ontologique, s’il en était besoin sur le site du CorteX, je la résumerais ainsi : nous ressentons, nous souffrons, nous aimons, nous sommes conscients de notre conscience, nous sommes si différents de la matière inerte, comment tout cela peut-il être le résultat d’un embrouillamini de molécules, bref de cette physico-chimie qui d’inerte donne le vivant, qui de non-sensible donne le sensible, qui de non-consciente donne la conscience ? Telles sont les questions traditionnelles sur lesquelles insistent toutes les doctrines idéalistes et spiritualistes. Refuser ce hiatus, cette barrière entre ces mondes et ne les concevoir que dans une relation de continuité, que dans un rapport de modifications qualitatives déterminées par les innombrables combinaisons d’éléments plus simples, et cela sans finalisme, sans intervention d’une cause hors de la nature (le matérialisme est avant tout un antisurnaturalisme). Le matérialisme ne dit rien d’autre : que nos affects, notre art, nos émotions, notre sentiment même du divin (pour ceux qui l’éprouvent), notre sollicitude vis-à-vis d’autrui ou nos aberrations, nos déviances, notre grandeur comme nos bassesses ne sont que (mais ô combien de phénomènes complexes dans ce « que ») les résultats des aléas et des déterminations de la matière la plus humble.

À quels manques souhaitent répondre les EM ?

Commençons en citant Guillaume Lecointre : « Les EM comblent une lacune dans le paysage intellectuel français : dans un pays où l’épistémologie reste trop éloignée des laboratoires, il était urgent que des scientifiques y prennent part, accompagnés de philosophes et d’historiens des sciences. Elles proposent un lieu de rencontre entre les scientifiques qui réfléchissent à leurs pratiques et les philosophies qui travaillent avec les sciences. » Sans se hausser du col bien sûr, je crois qu’on peut dire que les EM comblent un vide en France : nous sommes un éditeur « à manifeste » résolument attaché à la production d’ouvrages en sciences, histoire et philosophie des sciences (c’est d’ailleurs le sous-titre des EM), pas un éditeur généraliste sans ligne directrice. Nous avons une ligne éditoriale bien spécifiée – ce que j’appelle notre manifeste (matérialisme, laïcité, rationalisme, athéisme4, etc.), c’est-à-dire des idées rectrices qui fondent notre identité et notre projet. Ceci nous distingue des éditeurs qui peuvent certes publier des sciences et de la philosophie des sciences tout en ayant à leur catalogue des ouvrages aux positions diamétralement opposées.

Plus secondairement, car la frontière est plus difficile à définir, nous sommes assez différents des quelques éditeurs francophones spécialisés dans les sciences existant encore : la dimension épistémologique n’y est pas prépondérante, comme chez nous, tandis que manuels et ouvrages techniques sont privilégiés chez ces éditeurs (bien sûr, il faudrait nuancer tout cela, prendre des exemples.) Une autre différence, qui a l’air plus terre à terre mais qui a son importance, est à considérer : je pense que nous sommes le seul éditeur français, sur ces sujets, à pouvoir publier de gros, voire très gros, ouvrages. La tendance lourde dans l’édition du même type est de réduire très fortement les paginations, de demander des réécritures tendant à des simplifications excessives, bref à des dénaturations des textes préjudiciables à l’entendement de sujets qui ne peuvent se satisfaire de telles amputations… Un des enjeux pour les EM est d’essayer de combiner un arrière-plan social progressiste et une ligne éditoriale pleinement ancrée dans la promotion des idées émancipatrices issues de la rationalité (pour aller vite) et des sciences de la nature (c’est vrai, en revanche, pour les sciences humaines et la philosophie, Agone ou Le Croquant, Raisons d’agir, par exemple).

Comment le travail des EM est-il perçu par le milieu scientifique ?

Le fait est que nous sommes surtout connus d’une partie assez modérée du milieu scientifique, pour au moins quatre raisons :

1) nous avons publié surtout des livres sur la biologie5 (pour des raisons d’affinités directes avec le domaine, des raisons de réseaux d’auteurs potentiels, etc.) et c’est là, principalement, que nous sommes connus ;

2) très souvent ces livres comportent une composante épistémologique (philosophique donc) substantielle, alors que trop de scientifiques n’en voient pas l’utilité, voire tendent à déconsidérer la philosophie dans son ensemble ;

3) nos livres sont en français, or le milieu scientifique français est très anglocentrique, pensant bien souvent que c’est uniquement dans les livres en langue anglaise que se trouvent la quintessence et la pointe avancée du savoir ;

4) nous sommes encore trop petits… Une notoriété se construit au long cours, il faut patienter, nous développer, publier davantage en physique, explorer des domaines moins familiers, etc. C’est largement en cours car, d’après ce qu’on entend, ces milieux-là nous connaissent et reconnaissent notre travail. Plus prosaïquement, cette reconnaissance ne se transforme pas encore suffisamment en résultats commerciaux. Mais je pense qu’on va arriver en 2016 à une masse critique, si je puis dire, qui va nous rendre assez incontournable pour qui veut publier sérieusement un livre non expurgé, dans des domaines de moins en moins considérés par les acteurs traditionnels de la filière « Livres sur la/de sciences ».

Qu’en est-il du milieu philosophique ?

C’est très divers. Autant en sciences, nous sommes pluriels quant à nos centres d’intérêt (comme je disais, la biologie est centrale mais c’est contingent, et toutes les sciences nous intéressent), autant en philosophie, nous sommes plus restrictifs. On peut faire l’hypothèse raisonnable qu’une partie importante du milieu philosophique nous voit comme des scientistes ou nous ignore tout simplement. Mais les épistémologues, les philosophes de telle ou telle science, les philosophes analytiques, ou ceux issus de la tradition dix-huitièmiste, nous connaissent. À tel point que nous allons développer un projet d’histoire de la philosophie qui concerne des doctrines éloignées du matérialisme, mais qui, faisant partie de l’histoire des idées, intéresse un éditeur érudit comme nous. Ce qui nous importe beaucoup, c’est de nous faire admettre par les professeurs de philosophie du secondaire. Je crois que nos livres d’interdomaines sciences/philosophie sont utiles dans ce cadre.

Et pour le grand public ?

Difficile à dire. Mais je crois très sincèrement qu’on n’est pas connus du grand public (cependant, quel est son périmètre ?), qu’on ne peut l’être. Premièrement, nos livres, sauf exception, ne sont pas grand public, ne leurrons personne en ayant une telle illusion. Deuxièmement, pour l’être, y compris avec des livres difficiles, il faudrait bénéficier de deux soutiens dont nous sommes largement privés : primo des médias de masse qui parleraient de nous ; secundo des librairies qui, suite à de tels appuis médiatiques, accueilleraient nos livres sur les présentoirs et vitrines les plus en vue. Comme je dis souvent, nous ne promettons ni merveilleux ni extraordinaire dans nos livres ; pour prendre un exemple récent, nous évoquons un nouveau regard sur les cellules souches, là où un éditeur plus soucieux du marketing aurait titré un truc comme Les cellules souches et la fin du cancer… Cependant, force est de constater que la majorité de nos lecteurs ne sont pas scientifiques ou philosophes professionnels ; ce sont des gens cultivés, dotés notamment d’une culture scientifique et/ou philosophique forte, soucieux de contenus de haut niveau. Bien sûr, on ne peut pas regrouper ces lecteurs sous le terme « grand public », mais tout de même l’assimiler au lectorat, assez vaste et divers, d’une revue comme Pour la science (que je ne cite pas au hasard, cette revue est une des rares à avoir publié des recensions développées à propos de plusieurs de nos livres, reconnaissant ainsi notre place dans le paysage éditorial scientifique6

Quels ouvrages attendez-vous avec impatience ?

bunge
Mario Bunge

Il y en a plusieurs… En tout premier lieu, une édition revue et augmentée du livre cité plus haut, Intrusions spiritualistes et impostures intellectuelles en sciences. Il portera un autre titre, sera dirigé par Olivier Brosseau (spécialiste des créationnismes) et Guillaume Lecointre (biologiste au MNHN). On aimerait avec ce livre inaugurer une nouvelle collection dédiée à ces problématiques, en un mot cortecsiennes. D’ailleurs, il y a des projets communs en discussion, ou en tout cas avec des membres du Cortecs, et, espère-t-on, avec la SFR « Pensée critique ». Il y a aussi l’autobiographie de Mario Bunge, Entre deux mondes. Mémoires d’un philosophe-scientifique, traduite bénévolement par un ami, le biologiste Pierre Deleporte. Bunge est un personnage hors normes, méconnu en France. On espère que ce livre, moins technique que ceux qu’il écrit généralement, sera un moyen (bien tardif, il a 97 ans !, et n’a jamais reçu en France l’attention qu’il mérite, malgré quelques traductions ces dernières décennies) de rendre justice au plus important penseur matérialiste actuel ; et d’autres encore, mais pas assez avancés pour que j’en parle maintenant.

Quelles thématiques aimeriez-vous développer ?

Deux domaines capitaux pour nous sont pourtant très lacunaires aux EM. Versant sciences : la physique. Versant philosophie : l’athéisme. Pour les raisons déjà évoquées, nous avons moins de lien avec le milieu des physiciens, et surtout cette science a des débouchés éditoriaux bien plus nombreux que d’autres sciences. J’ai des idées pour tenter de débloquer cette situation (la physique est le domaine scientifique que je trouve le plus passionnant), mais pas le temps de les mettre en œuvre… Quant à l’athéisme, il faut trouver de bons textes, et pas des exégèses d’exégèses sur la vie (ou l’inexistence) de Jésus, par exemple. Certes, il y a eu ces dernières années quelques rares autres traductions de bon livres sur l’athéisme. La piste que j’entraperçois, c’est une collaboration avec Éric Lowen, le principal animateur de l’Université populaire de philosophie, à Toulouse. On en a parlé quand j’y ai donné une causerie sur le matérialisme, en 2014. Ses cours sur l’athéisme sont remarquables, les rassembler en un ou plusieurs volumes serait important pour lancer une telle collection. Mais c’est un gros travail, il faut trouver le temps… (J’en profite pour signaler aux lecteurs de cet entretien que s’ils sont en région toulousaine, il faut fréquenter cette UP, son programme de conférences, d’ateliers, de cours est sensationnel.)

Quelle est la demande d’ouvrages des EM de la part des bibliothèques universitaires ?

Difficile de savoir si c’est dû à un manque de notoriété qu’il faut donc régler ou si ce sont les conditions économiques des BU qui priment, mais disons que nos livres ne sont pas suffisamment achetés par les BU. Là encore, peut-être que le fait que beaucoup de nos livres soient des interfaces disciplinaires ne facilite pas l’acquisition d’ouvrages qui ne rentrent pas dans les cases des nomenclatures, je ne sais pas, je réfléchis tout haut… Mais j’ai bon espoir qu’il en soit autrement dans quelques années, à condition bien sûr que l’université ne soit pas saccagée par le prochain gouvernement et les fossoyeurs du service public.

Où peut-on trouver les ouvrages des EM ?

C’est un peu le principe « Directement du producteur au consommateur » : donc principalement sur le site des EM pour les livres papier. Chez Eyrolles à Paris, on trouve une partie du catalogue, un peu chez Vrin. Chez les libraires, sur commande. Un gros tiers, si ce n’est plus, de notre chiffre d’affaires est réalisé avec les libraires, même si nous ne sommes pas distribués en librairies, au sens classique du terme. Pour les ebooks, sur de nombreuses librairies en ligne, et surtout sur Cairn.org, portail de revues et livres de sciences humaines, bien connu des milieux universitaires. On est à l’affût de tous circuits de vente, alternatifs ou pas, qui pourraient faire l’affaire. On regarde, on évalue. La vente de livres, a fortiori de livres de niches, est beaucoup moins standardisée qu’il y a encore cinq ans. Cela demande adaptation et réactivité.

qu-est-ce-que-la-technologie-

Nous te remercions Marc pour ces nombreuses précisions.

Si nous rêvons de parcourir l’intégralité des ouvrages des EM, nous pouvons en attendant recommander  quelques spécimens supplémentaires à ceux évoqués ci-dessus tels l’émergence de la médecine scientifique dirigé par Anne Fagot-Largeault en 2013, La morale humaine et les sciences dirigé par Alberto Massala & Jérôme Rava en 2011 et enfin Qu’est-ce que la technologie ? de Dominique Raynaud en 2015 (avec une mention spéciale pour ce dernier). Autant de matériaux pour alimenter la chaudière de ceux qui souhaitent faire carburer leur esprit critique !

AG

Rapport CORTECS CNOMK : l'ostéopathie crânienne à l'épreuve des faits

En 2014, nous avions réalisé un rapport à la demande du Conseil national de l’ordre des kinésithérapeutes (CNOMK) portant sur le niveau scientifique de la biokinergie. Nous avons par la suite de nouveau été sollicités par le CNOMK afin d’évaluer le niveau scientifique de l’ostéopathie. Devant l’ampleur de la tâche, et  de par les ramifications souvent mal définies de cette pratique, nous nous sommes penché.e.s dans un premier temps sur l’évaluation de l’ostéopathie dite « crânienne » : Rapport CORTECS – Ostéopathie crânienne. Voici un résumé de ce  document de 286 pages pour lequel nous nous sommes efforcé.e.s de décrire le plus précisément et rigoureusement possible les méthodologies de recherche et d’analyse déployées. Pour plus de détails techniques, se rapporter directement au rapport. Des remarques, des questions ? Nous vous invitons à lire la partie QFP à la fin de cet article. 

Résumé

Dans les années qui suivirent l’ouverture des premières formations en ostéopathie par Andrew Taylor Still en 1892, certains praticiens élaborèrent à leur tour des enseignements et furent à l’origine de nouveaux concepts et courants ostéopathiques, dont on retrouve trace dans le paysage ostéopathique actuel, notamment dans les contenus des programmes de formation en France et dans le monde. L’ostéopathie crânienne est le nom d’un de ces courants, donné par son fondateur, William Garner Sutherland (1873-1954). C’est dans les années 1920 qu’il commença à élaborer les concepts et techniques crâniens à partir de l’observation minutieuse des os du crâne et de la face de son squelette Mike, de l’œuvre d’Andrew Taylor Still, et notamment l’importance que celui-ci accordait au rôle du liquide céphalo-rachidien (LCR) ; mais le choc vint de la contemplation d’un crâne de la collection de Still et de l’analogie qu’il fît entre la forme de l’os sphénoïde et celle des ouïes de poissons, « indiquant une mobilité pour un mécanisme respiratoire ».

William Garner Sutherland (1873-1954), fondateur de l'ostéopathie crânienne (Source : Wikipedia, image libre de droit)
William Garner Sutherland (1873-1954), fondateur de l’ostéopathie crânienne. ( Source : Wikipédia )

De là naquît le concept central de l’ostéopathie crânienne, repris par tous les principaux continuateurs de Sutherland (Viola Frymann, Harold Magoun, John Upledger etc.) : le mouvement respiratoire primaire. Actuellement, deux grandes approches conceptuelles des pratiques crâniennes se distinguent, tant à l’échelle française qu’internationale et s’inscrivent dans la continuité des enseignements de Sutherland :

– une approche que l’on pourrait qualifier de « biomécanique » et qui tend à valider scientifiquement ses concepts ;

– une approche qui se qualifie elle-même de « biodynamique » et qui ne tend pas ou très peu à valider scientifiquement ses concepts et fait régulièrement appel à des concepts mystiques, tels que celui de souffle de vie initialement décrit par Sutherland.

Sutures d'un crâne humain qui rendraient possible une mobilité intrinsèque, interne, inhérente à l'intérieur du crâne, qui créerait des mouvements infimes, mais détectables, entre les différents os.
Sutures d’un crâne humain qui rendraient possible une mobilité intrinsèque, interne, inhérente à l’intérieur du crâne, et qui créeraient des mouvements infimes, mais détectables, entre les différents os.

À partir de la lecture des textes des fondateurs et des continuateurs de l’ostéopathie crânienne, puis de la fréquentation des documents issus des principales institutions enseignant ou promouvant la discipline, et enfin de l’analyse de notre synthèse sur les différents concepts du champ crânien, le tout, enfin, assorti des revues de littérature antérieures portant sur ce sujet, nous avons dégagé les hypothèses relevant de l’anatomie, de la biomécanique, de la physiopathologie et de la physiologie humaine sur lesquelles reposent ces pratiques. Aucune des hypothèses qui font la spécificité des fondements physiopathologiques de l’ostéopathie crânienne n’est vérifiée. Les hypothèses dont la vérifiabilité est totalement ou partiellement avérée à l’issue de nos revues de littérature systématique sont en fait des hypothèses non spécifiquement ostéopathiques – c’est le cas par exemple de la circulation du LCR dans l’encéphale.

À l’issue de notre revue systématique de littérature sur les procédures d’évaluation issues de l’ostéopathie crânienne, nous n’avons trouvé aucune preuve en faveur des reproductibilités intra et inter-observateurs de ces procédures. La majorité des études existantes et disponibles échouent à mettre en évidence ces reproductibilités pour tous les paramètres considérés et ce malgré des risques de biais souvent favorables à l’émergence de résultats positifs.

À la clôture de notre revue de littérature sur ce thème, nos résultats montrent que les preuves méthodologiquement valables et favorables à une efficacité spécifique des  techniques et des stratégies issues de l’ostéopathie crânienne sont pratiquement inexistantes. Ces résultats convergent avec toutes les revues de littérature déjà menées sur le sujet.

En définitive, les résultats de nos différentes revues et analyses de la littérature scientifique indiquent clairement que les thérapies s’y rapportant sont à ce jour dépourvues de fondement scientifique. On aurait pu le subodorer dès leur invention, puisque très rares sont les concepteurs de « théories » cranio-sacrées ayant pris le soin élémentaire d’étayer leur pratique d’un quelconque élément de preuve. Cela montre une évidente défaillance épistémologique des fondateurs, mais également des continuateurs qui ont continué d’empiler des briques plus ou moins mal façonnées sur un marécage sans point d’appui.

Souscrivant à l’Onus probandi, un thérapeute quelque peu scientifique aurait assurément pu, à l’instar de Christopher Hitchens, réfuter sans preuve ce qui était affirmé sans preuve. Avec le soutien du CNOMK, nous avons accepté de faire le travail laborieux qui revenait logiquement aux prétendants. De fait, alors que nous pensions qu’il n’y avait pas a priori de raison scientifique de défendre cette discipline, désormais nous le savons. N’étant pas prescripteurs de recommandations, nous nous sommes limités à une analyse impartiale, et c’est cette analyse qui mène à l’énoncé suivant : rien n’encourage aujourd’hui à la mise en place de ces thérapies dans le cadre d’une prise en charge raisonnée de patients.

QFP (questions fréquemment posées)

Ce rapport a été relayé sur différents sites et réseaux sociaux, certains d’entre-eux permettant l’édition de commentaires. Nous ne sommes pas en mesure de lire et répondre à tous ces commentaires mais nous répondrons bien volontiers aux remarques et questions qui :

– concernent strictement le contenu de ce rapport (l’évaluation scientifique de l’ostéopathie crânienne) ;

– nous parviennent directement ( contact@cortecs.org ) ;

– ont un ton courtois et ne font pas d’attaque à la personne ;

– sont étayées avec des références précises et accessibles ;

– ne sont pas déjà traitées dans le rapport.

9 étudiant·es menacé·es – Le CORTECS dénonce les dérives autoritaires de l'UQAM

Après les grands mouvements étudiants de 2013, et suite au lancement d’une nouvelle grève étudiante d’envergure de plusieurs dizaines de milliers d’étudiant·e·s québécois·e·s, le conseil exécutif de l’UQAM (l’Université du Québec à Montréal) a convoqué devant leur comité disciplinaire neuf étudiant·e·s militant activement dans l’université en vue de les expulser. Les actions qui leur sont reprochées, fumeuses et parfois datées, s’inscrivent pourtant dans ce qu’on est en droit d’attendre d’un·e étudiant·e critique et conscient·e des enjeux socio-économiques. Aussi le CORTECS apporte-t-il son soutien à ces personnes, et mobilise son réseau en ce sens.  Au jour d’élaboration de cet article (10 avril 2015), des étudiants et des enseignants de l’UQAM exigeaient la démission du recteur Robert Proulx, suite à l’intervention du Service de police de la Ville de Montréal pour évacuer les occupants sauvages d’un bâtiment de l’université*. Pour se faire une idée des enjeux, nous reproduisons ici un texte co-élaboré par une cinquantaine de collègues de l’UQAM, ainsi que la lettre que nous avons signée.

 

CorteX_UQAMDès les débuts de l’Université en Europe, les étudiants se sont mobilisés pour des questions pédagogiques ou sociales, comme le prix des loyers. Le militantisme étudiant n’est donc pas nouveau. Grèves, occupations et perturbations d’évènements ont ponctué la vie universitaire, y compris à l’UQAM. Très souvent, ces mobilisations ont été à l’avant-garde de causes progressistes pour la justice sociale : féminisme, pacifisme, écologisme, entre autres.

 Historiquement, les directions d’établissements d’enseignement étaient relativement tolérantes face aux actions militantes, dont les occupations, certaines se prolongeant jusqu’à six semaines, comme à l’École des Beaux-Arts en 1968. Dans les années 2000, ces directions ont changé d’approche, appelant rapidement la police qui est intervenue brutalement, y compris à l’UQAM (sans oublier l’UQO – NdCORTECS : Université du Québec en Outaouais – et l’Université de Montréal en 2012, entre autres). Cette mutation volontaire s’inscrit dans une tendance générale de la part des autorités à être de plus en plus répressives face aux mouvements sociaux et à saisir l’occasion de quelques cas isolés pour justifier une généralisation des mesures répressives. S’inscrivant dans cette tendance, la direction de l’UQAM privilégie de plus en plus la répression sous forme d’intimidation et de violence institutionnelles. Cela entraine d’importantes dépenses (caméras et agents de « sécurité » supplémentaires) et contribue à la dégradation du climat social sur un campus bien connu pour sa vie associative et militante. Pourtant, il n’y a pas de consensus dans les publications savantes au sujet des effets de la répression sur les mouvements sociaux. Certaines études démontrent qu’elle provoque un affaiblissement de la mobilisation, d’autres qu’elle provoque un élargissement de la mobilisation et une radicalisation militante.

 Or il y a quelques semaines, une poignée de professeurs de l’UQAM et des membres de la haute direction ont dénoncé dans les médias la violence et l’intimidation étudiantes (échos tardifs du Jean Charest de 2012). Cette opération de communication lancée dans la phase de préparation de la grève étudiante maintenant en cours a offert l’occasion à un député de la CAQ – NdCORTECS :  la Coalition Avenir Québec – de prétendre que règne à l’UQAM une « culture radicale d’anarchie » (sic.) et de demander à la ministre de la Sécurité publique comment elle comptait y rétablir « la sécurité ». Les collègues écorchaient au passage la démocratie étudiante, s’inscrivant ainsi dans une curieuse tendance médiatique qui consiste à critiquer le fonctionnement des assemblées lorsqu’elles votent la grève, mais ne rien dire lorsqu’elles rejettent la grève.

 Rebondissement vendredi 20 mars 2015. Neuf étudiantes et étudiants ont reçu un courrier recommandé les convoquant devant le Comité exécutif pour répondre de mesures disciplinaires. Le Service de sécurité recommande lui-même dans certains cas la suspension pour un an, dans d’autres l’expulsion définitive. Les faits reprochés ? Turbulence lors de levées de cours et perturbation d’événements publics. Le débat reste ouvert quant à l’attention qu’il convient d’accorder à de tels faits isolés, à ce qui est réellement survenu et à l’importance que s’exprime à l’UQAM le débat politique, y compris parfois par des actions militantes.

Ce n’est pas la première fois que la direction cherche à bannir des activistes du campus et cela n’a jamais eu d’autres effets que de punir quelques personnes ciblées, alors que les actions sont collectives. Problématiques en soi, ces mesures apparaissent cette fois-ci particulièrement douteuses :

Absence de proportionnalité : pourquoi imposer l’expulsion définitive sans avoir commencé par donner de simples avertissements ? Le recours aux mesures extrêmes est cruel pour des étudiantes et des étudiants puisqu’il ruine leur projet universitaire et compromet leurs projets professionnels (sans compter la destruction de leurs relations sociales).

Absence d’urgence : certains des faits reprochés se sont déroulés au printemps 2014 et même en janvier 2013, soit il y a plus de deux ans ! Pourquoi sévir maintenant ?

Instrumentalisation politique : seule la situation présente, soit la grève qui commence, peut expliquer la volonté de neutraliser des militantes et militants du mouvement étudiant. Il s’agit d’une instrumentalisation politique des mesures disciplinaires (qui rappelle les arrestations préventives du groupe Germinal deux jours avant le Sommet des Amériques en 2001, des 17 « chefs » anarchistes à Toronto en 2010 et d’une douzaine d’activistes le matin du Grand Prix Formule 1 à Montréal en 2012). Alors que les actions au cœur des accusations étaient menées par plusieurs dizaines d’étudiantes et d’étudiants, la direction a choisi de cibler des personnes qui occupent des postes dans les associations étudiantes et même qui siègent aux plus hautes instances de l’UQAM. Il est bien pratique, en temps de grève et de négociations de conventions collectives, de faire taire la voix étudiante dans les lieux de pouvoir de notre établissement.

Frapper fort pour faire peur : parallèlement, la direction a envoyé à l’ensemble du corps étudiant un courriel mettant en garde contre toute perturbation pendant la grève, y compris de simples levées de cours, adoptant ainsi un ton menaçant inédit à l’UQAM. Les expulsions des neuf relèvent donc aussi de la peine exemplaire pour effrayer l’ensemble des grévistes, sans compter le déploiement de nouveaux effectifs d’agents de « sécurité » qui fouinent partout (y compris dans des assemblées syndicales), suivent et intimident un peu tout le monde, refusent de révéler leur identité et se permettent des propos sexistes à l’endroit d’étudiantes (« Salut, bébé ! »).

Il est consternant de constater que la direction adopte cette approche autoritaire contraire à la tradition de l’UQAM, qui a su préserver jusqu’ici un espace plus libre que ce que nous propose en général notre société disciplinaire. Nous nous dissocions totalement de la campagne de relations publiques clamant que le chaos règne sur le campus et nous demandons à la direction de l’UQAM de garder son sang-froid, de favoriser le dialogue (même laborieux) plutôt que la répression et dans tous les cas de revenir à une attitude d’ouverture face au militantisme étudiant. Ainsi, l’UQAM se démarquerait positivement d’une tendance de plus en plus répressive des diverses autorités québécoises. Cela nécessite, bien sûr, de faire le deuil d’une certaine volonté de puissance et d’une cruauté qui ne réjouit jamais que les puissants et les partisans de la loi et l’ordre, aux dépens de personnes plus vulnérables (ici, nos étudiantes et étudiants).

 Pour terminer, soulignons un paradoxe politique : la direction réprime des étudiantes et des étudiants qui se mobilisent présentement contre une politique d’austérité qui menace réellement notre établissement.

*Texte signé par une cinquantaine de professeurs et chargés de cours de l’UQAM, dont Marcos Ancelovici, Rémi Bachand, Isabelle Baez, Dany Beaupré, Marrie-Pierre Boucher, Rachel Chagnon, Line Chamberland, Jawaher Chourou, Marc-André Cyr, Anne-Marie D’Aoust, Martine Delvaux, Stall Dinaïg, Francis Dupuis-Déri, Alain-G Gagnon. Consulter la liste complète des cosignataires (NdCORTECS : même si regarder les cosignataires ne devrait avoir rationnellement aucun impact intérêt direct sur le choix de signer ou non).

 

Voici la lettre que nous avons signée.

Support letter from European academics for the nine student activists facing expulsion from Université du Québec à Montréal, Canada

The Executive Council of Université du Québec à Montréal (UQAM) has taken steps to evict nine students from the University who took part in demonstrations or strikes in the past two years. Their political commitment seems to be the only reason justifying these extreme measures and these unprecedented disciplinary sanctions are therefore considered as intimidation attempts. Indeed, this is the first time that the University has taken such actions regarding political activities. The praxis for which the Executive Council declared the activists guilty are:

  • The protest against the Orwellian security drift at UQAM on January 30th 2013, an authoritarian response to Quebec’s historical student strike of 2012

  • The Application of legitimate strike mandates voted in general assembly by the student community by cancelling classes on April 2th and 3th 2014, and on October 8th 2014

  • The demonstration that took place in the University organized by the student and employees union (SETUE) on April 2nd 2014

  • The disturbance of Frank Des Rosiers’s (assistant deputy minister in the federal government) conference on January 20th 2015.

The fact that these convocations arrive all at the same time, even if those events took place separately in a large time scale between several months and years, raises some serious doubts about the true intentions of the Executive Council. Moreover, these are non-urgent situations and concerned students do not pose a threat to the university community. Why such a hurry? Why such reactions? As it has been stated in the support letter of De Nieuwe Universiteit of Amsterdam “[c]uriously, they [the Executif Council actions] coincide with the beginning of a new student strike against austerity measures and budget cuts in social services.” The current situation suggests that these disciplinary sanctions are purely political and meticulously calculated to annihilate the cultural activism of UQAM student community, whereas 60 000 students around Québec are triggering strike movements.

The concerned students are left helpless since the student representative on the Executive Council is aimed by three different accusations such as “having blocked a corridor” or “having raised the tone of voice.” Her appearance in front of the Executive Council and her possible suspension before the other students de facto eliminates the only student representative of the Council, leaving the other students alone before the university’s administration. Furthermore, the expulsion, which is the most severe sanction that could be used on students, should only be applied in severe cases of aggression threats or repetitive plagiarism. Even in these cases, students must first pass through committees at the departmental level and faculty before being heard by the Executive Council. The fact that the University bypass these normal procedures will have disastrous consequences on the concerned students, since they have invested hundreds of hours and thousands of dollars in their studies only to see their efforts swept away.

On the behalf of freedom of expression and freedom of opinion, the UQAM administration’s political repression shall end and the disciplinary sanctions on the nine concerned students shall be removed. The outrageous power abuses demonstrated by the administration represent a worrying discriminatory treatment that will have tremendous consequences for the concerned students.

L’équipe CORTECS, Collectif de recherche transdisciplinaire esprit critique & sciences. www.cortecs.org

* Fin de l’occupation de l’UQAM après l’intervention du SPVM, Radio Canada.

Photo des grèvistes de France Culture

Le CORTECS exige du matériel critique audio de qualité (et soutient donc la grève de Radio France)

Le CORTECS est un grand consommateur de ballado-diffusion.En vélo, aux toilettes, à la vaisselle, durant le ménage oeurs dizaines de milliers d’étudiant·e·s québécois·e·s, le conseil exécutif de l’UQAM (l’Université du Québec à Montréal) a convoqu au jardin, nos oreilles profitent de trésors radiophoniques parfois méconnus, qu’il nous arrive, lorsque le temps nous le permet, de mettre à votre disposition (voir pour cela l’onglet Audiotex). Parmi les principaux fournisseurs de podcasts de qualité, il y a France Culture, du groupe Radio France. France Inter, dont nous avons déjà pointé la baisse de qualité, a perdu pratiquement toute émission critique correcte (à l’exception notable de L’Afrique enchantée et de Comme un bruit qui court). C’est justement en lutte contre cette médiocrisation que Radio France orchestre son plus important mouvement social depuis 10 ans. Le CORTECS soutient cette grève. En voici les enjeux, narrés par les acteurs eux-mêmes.

Nous sommes les voix qui, chaque jour, s’adressent à vos oreilles. A travers nos interviews, chroniques, reportages, documentaires, nous tentons au mieux de faire vivre les missions de la radio publique : « informer, éduquer, divertir ».

Nous, équipes de production des émissions de Radio France (animateurs, reporters, collaborateurs, chroniqueurs…) partageons les inquiétudes de l’ensemble des personnels de Radio France mobilisés depuis le 19 mars. Ce mouvement de grève a pour objet de défendre les radios de service public, et non des intérêts particuliers ou corporatistes. L’engagement budgétaire non tenu par l’État entraîne aujourd’hui un déficit grave qui menace l’existence de la radio telle que vous l’aimez et que vous la financez à travers la redevance audiovisuelle.

Nous sommes consternés de voir les travaux de rénovation de la Maison de la Radio si mal encadrés et si mal gérés (NdCORTECS : voir à ce sujet les articles du Canard Enchaîné sur les frais somptuaires de Mathieu Gallet), occasionnant le surcoût exorbitant que vous connaissez. Vos impôts, vos programmes et vos oreilles, doivent-ils payer pour cette incompétence ?

Le service public n’a ni la vocation, ni la possibilité d’être rentable. Or, cela semble être aujourd’hui la logique insidieuse de la Présidence de Radio France et au-delà, celle de sa tutelle, le Ministère de la culture. Et le silence jusqu’à présent de la tutelle (ministre de la Culture) semble accréditer une telle logique.

Conscients du contexte de crise économique et des efforts nécessaires, nous soulignons que de lourds sacrifices ont déjà été réalisés (en témoigne la baisse de 87,5 millions d’euros du budget entre 2010 et 2014). Une idée fausse voudrait que Radio France soit un lieu de gabegie, de privilèges et d’intérêts corporatistes. Savez-vous pourtant que la majorité des voix que vous entendez quotidiennement (à Radio France on les appelle les « producteurs ») travaille dans le cadre de contrats saisonniers et précaires ?

Comment continuer à produire de la radio de qualité quand les moyens matériels (studios, salles de montage, camions-régie…) sont constamment rognés ? Comment faire entendre les réalités d’un pays quand la plupart des émissions ne peuvent plus, faute de budget, envoyer de reporters au-delà du périphérique parisien ? Comment conserver notre indépendance – celle à laquelle vous avez droit – quand se multiplient sur les antennes des partenariats ou des publicités plus ou moins déguisées ? Si l’on suit la logique actuelle, la radio de demain ce sera : moins de reportages, moins de documentaires, moins de débats vraiment critiques, moins de concerts… Bref, une radio standardisée, calquée sur l’actualité ou sur les goûts majoritaires, une radio au rabais.

Nous aimons passionnément nos métiers et, au nom de la confiance dont vous nous témoignez, nous nous efforçons de travailler avec le plus de sérieux et d’esprit de responsabilité. Toutefois, dans ce climat de travail en constante détérioration, nous estimons de notre devoir de vous informer des risques qui pèsent sur la radio publique française. Radio France est un patrimoine à défendre, bien davantage que les boiseries d’un bureau présidentiel.

Les sociétés de producteurs de France Culture, France Inter et France Musique.

Pour aller plus loin :
Pourquoi la grève à Radio France ?
Émission sonore sur la grève à Radio France

Caisse de Grève

Chèques de soutien aux grévistes à l’ordre de « CCE radiofrance dons ». Adresse postale : CCE de Radio France — 116 av du Président Kennedy — 75220 Paris CEDEX 16

Entrevue politique – corrigé de décorticage

CorteX_SeilliereVoici une proposition de corrigé pour l’exercice de décorticage présenté ici. Nous avons trouvé 71 moisissures argumentatives. Et vous ?

1) « L’analyse selon laquelle il existe une économie réelle d’un côté et la finance de l’autre n’est pas du tout une analyse objective. L’économie réelle, c’est-à-dire la production des biens et des services, fonctionne – c’est le corps, avec un système nerveux, je dirais même un flux sanguin. Et le système nerveux et le flux sanguin c’est ce qu’on appelle la finance ».

métaphore organique (cf point 7)

2) « la finance »

notion-valise : la finance recouvre beaucoup de choses très diverses telles que les entreprises du CAC 40, les places boursières, le système bancaire, etc.

3) « Il peut y avoir en effet, dans le corps, une maladie »

métaphore organique (cf point 7)

usurpation de connecteur logique

« En effet » introduit une relation de causalité. Il n’en est rien ici puisque le terme « en effet » ne sert qu’à renforcer la métaphore organique en introduisant les pathologies du système capitaliste.

4) « et il y a eu une maladie avec la crise des subprimes. Elle a d’ailleurs failli compromettre la santé du corps »

métaphore organique (cf point 7)

plurium affirmatum

« failli » veut dire qu’en réalité elle ne l’a pas compromise.

  5)  » d’ailleurs tout le monde, n’est-ce-pas… »

argumentum ad populum

inclusion abusive

couplés à un discours ralliateur

Le fait que « tout le monde » se soit jeté au « secours » du capitalisme ne prouve pas que le capitalisme soit le meilleur système possible. Par ailleurs, cet argument est faux et relève de l’inclusion abusive, car il ne prend pas en compte toutes les institutions ou personnes qui se sont opposées au sauvetage du capitalisme (notamment parmi les économistes non keynésiens).

« N’est-ce-pas » est une locution visant à rallier l’adhésion de l’interlocuteur.

6) « gauche-droite »

notion-valise issu d’une analogie douteuse

Le clivage « gauche-droite » qui est censé structurer la vie politique française est une analogie douteuse dont le sens n’est plus évident. En effet, elle fait référence historiquement à la position des différents partis politiques lors de la première assemblée nationale post-révolutionnaire (août-septembre 1789). Aujourd’hui, il y a autant de diversité au sein de la « gauche » et au sein de la « droite », qu’entre partis de gauche et partis de droite.

7) « s’est jeté au secours de ce capitalisme en crise pour essayer de lui faire reprendre santé. C’est bien ça qui s’est produit »

concept flou

« Se jeter au secours » du capitalisme est un argument flou recouvrant plusieurs types d’actions (prêts à taux zéro, nationalisation des banques, capitalisation des banques privées par l’Etat,…)

effet paillasson sur le mot crise

Le mot « crise » ici n’est pas défini. Or ce terme est employé pour qualifier des phénomènes très différents (crise au Mali, crise d’adolescence, crise de la quarantaine, crise des dettes souveraines, crise de la représentation…).

métaphore organique

La métaphore organique sur les crises du système capitaliste est ancienne. On retrouve un vocabulaire clinique sur les spasmes de folies du système capitaliste dans les Manuscrits de 1857-1858 de Karl Marx. Ici, Ernest Antoine Seillère l’emploie pour signifier que la crise est un phénomène pathologique exceptionnel chez un capitalisme, conçu comme un système économique en santé. Cette vision est contestée, notamment par les économistes qui critiquent rationnellement le modèle capitaliste.

Cette métaphore organique fait aussi office de deus ex machina, qui introduit l’idée qu’il est « naturel » que le capitalisme soit malade quand par ailleurs il est généralement en bonne santé. L’étude des responsabilités et l’analyse de ce processus de crise sont complètement évacuées. Voir l’article de Guillemette Reviron sur les arguments naturalistes.

8) « Vous n’avez pas d’alternative aujourd’hui à un capitalisme qui règne dans le monde entier »…

faux lemme 

Dire qu’il n’y a pas d’alternative au capitalisme est une sorte spécifique de faux dilemme, le faux lemme (plus qu’il n’y a aucune alternative).

généralisation abusive

argumentum ad populum

Ceci revient à ignorer les critiques rationnelles existantes sur le capitalisme et les systèmes économiques concurrents existants dans le monde (autogestion, coopérative, communisme). En outre, avancer que le capitalisme règne dans le monde entier ne prouve pas qu’il s’agisse du meilleur système possible.

notion-valise

personnification du capitalisme

Quand Ernest-Antoine Seillère parle d’un capitalisme, de quel capitalisme parle-t-il ? Le capitalisme est ici un notion-valise puisqu’il demeure peu défini. Or le capitalisme anglo-saxon diffère du capitalisme chinois, danois et français. Il existe des capitalismes très différents les uns des autres. 

9) « des milliards d’hommes l’ont choisi comme système actuellement, en Inde, en Chine »

argumentum ad populum 

sexisme 

généralisation abusive

Ce n’est pas parce que des « milliards d’hommes » (qu’en est-il des femmes ?) ont choisi ce système que cela en fait un bon système économique. De plus cet argument est faux : il existe des alternatives en Argentine, en Islande et en France au niveau local.

10) « – L’ont-ils vraiment choisi ?
– Ecoutez si ce sont les communistes chinois qui l’ont choisi pour eux, c’est encore plus extraordinaire « 

homme de paille : la position de l’interlocuteur (ont-ils vraiment choisi le capitalisme ?) est ici travestie pour la rendre ridicule.

11) « mais la réalité est celle-là le capitalisme règne dans le monde »

généralisation abusive 

notion-valise 

personnification du capitalisme (cf  point 8)

12) « Sauf peut-être, en effet, Cuba et la Corée du Nord qui ne sont pas des exemples particulièrement flagrants de réussite »

déshonneur par association 

effet cigogne

plurium affirmatum

Les exemples de Cuba et de la Corée du Nord sont utilisés comme des repoussoirs. Par ailleurs, le fait que Cuba et la Corée du Nord ne soient pas des réussites n’est pas uniquement dû à la nature du système économique mais également à des circonstances politiques particulières (mesures de rétorsion et d’embargo internationaux, autoritarisme en Corée du Nord).

L’argument suppose également que Cuba et la Corée du Nord ne sont pas des réussites sur le plan économique et social. Cet argument mérite d’être discuté dans la mesure où, par exemple, les systèmes éducatif et de santé cubains sont de très bonne qualité. Il est bon également de rappeler que l’avortement est totalement libre à Cuba, jusqu’à 10 semaines de grossesse et ce, depuis 1965 (soit 10 ans avant la France !) 

usurpation de connecteur logique

L’utilisation de « en effet » est ici dévoyée : ce connecteur sert à introduire une causalité qui est factice ici car le terme est choisi pour introduire des exemples.

13) « Donc regardons les choses en face »

technique de l’engluement

Ce discours englue l’interlocuteur en emportant son adhésion de façon spécieuse. Si vous êtes responsable et ne vous voilez pas le face, vous savez que le capitalisme est le meilleur système possible.

14) « Le capitalisme existe, il n’y pas d’alternative »

faux lemme (cf point 8)

15) « Cette crise est en voie, espérons-le, de solution »

mot fouine

Le terme « espérons-le » vide la phrase de son sens. L’information donnée est nulle.

16)« il faut vivre avec ce capitalisme »

faux lemme (cf point 8)

17) « parce que je viens ici comme auteur et non plus comme ex-patron du Medef »

argument d’autorité 

En citant, en passant, son statut actuel et ses occupations passées Ernest-Antoine Seillère se place en position d’autorité. Or ni son statut d’auteur, ni celui d’ex-patron du Medef ne garantit ses compétences en économie. Voir le jeu des 20 pièges pour débusquer les arguments d’autorité.

18) « Je crois que nous avons à regarder en face le monde qui vient »

nous inclusif

deus ex machina

Cette phrase introduit une explication fataliste. Un monde viendrait et s’imposerait à nous.

19) « est-ce que ce monde qui vient est un monde dans lequel il faut en être? »

plurium interrogatum

Cette question est purement rhétorique et conduit à avaler une couleuvre : l’idée qu’un monde vient fatalement à nous et qu’il faut s’y adapter.

20) « Ça va valoir le coup d’y vivre et est ce que ça vaut le coup notamment de passer un quinquennat d’efforts pour s’assurer en effet nous Français »

faux dilemme

usurpation de connecteur logique

nous inclusif

essentialisme

Cette phrase combine les sophismes. Une fois encore, le connecteur logique « en effet » y est mal employé. Il introduit un faux lemme : il n’y a pas d’alternative aux efforts pour vivre dans un monde meilleur à venir. Les Français sont, par ailleurs, essentialisés comme un groupe homogène.

21)« monde qui vient dont j’estime en effet qu’il est porteur d’une incroyable et formidable réussite potentielle »

→  usurpation de connecteur logique

mots fouine

Le connecteur logique « en effet » est ici dévoyé puisqu’il n’introduit aucune causalité. Les mots-fouine « j’estime » et « potentielle » vident la phrase de son sens : la réussite du monde qui vient paraît très incertaine.

22) « par la convergence de forces que je vous résume à l’extrême »

instillation de causalité

deus ex machina

Le terme « forces » a une forte connotation fataliste : des forces s’exerceraient pour nous amener vers un nouveau « monde » de façon inévitable. Cette phrase introduit une explication causale fataliste.

23) « d’une part en effet la mondialisation qui s’organise, d’autre part le capitalisme qui règne, système unique dans le monde et qui va faire réussir le monde »

personnification de la mondialisation et du capitalisme

usurpation de connecteur logique

notion-valise

Le terme « mondialisation » recouvre de multiples acceptions. La « mondialisation » désigne, tantôt, l’intégration des marchés internationaux ou les stratégies de développement des firmes multinationales. On parle aussi de mondialisation commerciale, culturelle, politique. Le terme est parfois utilisé comme synonyme de globalisation, un terme tiré de l’anglais globalization au sens voisin de mondialisation.

généralisation abusive

Le capitalisme n’est pas un système unique dans le monde, puisque, de l’aveu même d’Ernest-Antoine Seillère, des systèmes alternatifs existent.

24) « et troisièmement alors un troisième facteur qui est considérable c’est-à-dire la menace climatique et la menace de développement sur le développement durable »

notion-valise 

Les termes « développement » et  « développement durable » recouvrent également de multiples acceptions. Parle-t-on ici de développement économique, social, culturel ou politique ? Quels sont les acteurs qui vont se développer ? Les populations, les firmes multinationales, l’élite ?

Le terme « développement durable » date d’un rapport publié par les Nations Unies en 1987, le rapport Bruntland, qui lui donne un sens très imprécis. Selon ce document, le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins.

oxymore

Enfin, les économistes théoriciens de la décroissance jugent que tout développement est, par essence, non durable puisqu’il implique l’idée d’une croissance basée sur la consommation de ressources rares et finies.

phrase insensée

La phrase « la menace de développement sur le développement durable » ne veut rien dire.

25) « qui, lui, est susceptible de créer aujourd’hui bien entendu par le travail des ingénieurs une véritable révolution industrielle porteuse de croissance et d’emploi »

mot fouine : « est susceptible »

technique d’engluement

La locution « bien entendu » vise seulement à emporter artificiellement l’adhésion de l’interlocuteur.

effet impact 

Le terme « révolution industrielle » est un terme à fort effet impact reposant sur un argument historique faux. En effet, l’industrialisation a été un processus lent et graduel plutôt qu’une révolution.

effet puits

Cette phrase a pour effet de noyer l’interlocuteur dans des concepts peu définis et flous.

26) « Donc j’ai une vision de ce qui vient, non pas la campagne présidentielle mais de ce qui vient qui est tout-à-fait optimiste »

deus ex machina (cf point 18)

27) « et j’aimerais bien que la France en soit « 

essentialisme

La France est posée comme une et homogène.

28) « Et ce monde-là, il profiterait à tout le monde ? Il profiterait au plus grand nombre Ernest-Antoine Seillère ou seulement à ceux qui font partie des happy few ?

– Eh bien écoutez, le capitalisme qui a donc en effet forgé l’Europe »

usurpation de connecteurs logiques

C’est le sophisme préféré d’Ernest-Antoine Seillère. « En effet » est ici combiné à « donc » : la combinaison de deux connecteurs causaux rend la causalité artificielle.

argument d’historicité faux

notion-valise

Rien ne prouve que la capitalisme ait forgé l’Europe. La terme est ici imprécis : de quelle Europe parle-t-on ? Des membres de l’Union européenne ? Des membres du Conseil de l’Europe ? De l’Europe de l’Ouest ? De l’Europe de l’Est ?

29) « est-il pour vous un système qui a conduit à un appauvrissement général de la population européenne »

renversement de la charge de la preuve

concept flou

homme de paille

Ernest Antoine Seillière renverse la charge de la preuve tout en travestissant de manière ridicule la position de son interlocuteur.

L’appauvrissement général des populations est un concept flou : quels sont les critères permettant d’évaluer l’appauvrissement général des populations? Des critères économiques? sociaux?

essentialisme

La population européenne n’est nullement définie mais posée comme homogène et une.

30) « à l’évidence non »

absence de preuve

Ernest Antoine Seillère balaie la remarque sans donner d’arguments précis qui invalideraient la position de son interlocuteur.

31) « le capitalisme a apporté l’innovation, le progrès, la croissance des niveaux de vie. C’est la modernité. »

effets cigogne

Il y a une confusion entre corrélation et causalité : on déduit de la présence d’une cause (le capitalisme) ses effets observés (innovation, progrès, croissance) alors que d’autres variables peuvent expliquer ceux-ci. Il est tout à fait possible que, par exemple, le capitalisme entraîne des effets contraires mais compensés par d’autres causes n’ayant aucun lien avec le capitalisme (le développement des connaissances scientifiques par exemple).

notions-valises

Le capitalisme n’a pas apporté à lui seul l’innovation, le progrès et la croissance des niveaux de vie. Ces trois termes sont par ailleurs des notions-valises non définis et souffrant de multiples acceptions. Parle-t-on d’innovation technologique, économique, sociale ? Quel est le progrès retenu ici ? Le progrès scientifique ? L’accroissement des connaissances médicales ? Les conquêtes sociales ? La façon de mesurer la croissance des niveaux de vie n’est pas par ailleurs précisée. Doit-on retenir le seuil de pauvreté? l’accroissement du PIB par habitant ? Le salaire moyen ? Médian ?

théorie pseudo-scientifique ethnocentrée

effet repoussoir 

« Le capitalisme, c’est la modernité » : rien ne prouve que le capitalisme se soit imposé en vertu de sa modernité, comme s’il s’agissait d’une évolution naturelle et bénéfique de l’économie. Dire que « le capitalisme, c’est la modernité » revient à adopter une posture ethnocentré sur les systèmes capitalistes et à qualifier tous les autres systèmes d’archaïques.

32) « – Oui. Mais aussi un accroissement des inégalités.
– Alors ça si vous voulez: c’est tout-à-fait en effet au centre de notre problème français »

explication creuse

La combinaison de « si vous voulez », « tout-à-fait » et  « en effet » ne produit aucune relation logique entre les arguments. Au contraire elle introduit une certaine confusion.

« notre » inclusif

Le « notre » inclusif conduit le lecteur à adhérer à la thèse qu’il y a un problème spécifique en France

Vous aussi vous disséquez de façon critique des extraits? Faites-le nous savoir!

 

Évaluation des pratiques utilisées par des kinésithérapeutes : la biokinergie

indexImpressionné par deux travaux de Master 1 encadrés par des membres du CORTECS, le Conseil national de l’ordre des kinésithérapeutes (CNOMK), a émis deux avis déontologiques sur les pratiques de soins non conventionnelles que sont la fasciathérapie méthode Danis Bois et la microkinésithérapie. En novembre 2013, le CNOMK a commandé un rapport au CORTECS sur le niveau scientifique de la biokinergie : Rapport CORTECS – Biokinergie. Vous en trouverez ci-dessous un résumé.

Résumé

La biokinergie est une pratique de soin inventée au début des années 80 par le kinésithérapeute et ostéopathe français Michel Lidoreau. La biokinergie s’inspire principalement de trois domaines thérapeutiques qui sont la médecine traditionnelle chinoise, l’ostéopathie et la masso-kinésithérapie. Elle dispose également d’un concept de base nommé enroulement biokinergétique.  Les formations en biokinergie proposées par le CERB (Centre d’Enseignement en Biokinergie) s’adressent essentiellement aux médecins, kinésithérapeutes, ostéopathes, éthiopathes et chirurgiens-dentistes.

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Hypothétique enroulement biokinergétique (vue d’artiste)

L’analyse de la documentation scientifique relative à la biokinergie montre qu’il n’est pas possible de conclure aujourd’hui sur son efficacité thérapeutique. En outre, son concept de base, l’enroulement biokinergétique, est à ce jour dénué de fondement scientifique.

Une évaluation scientifique rigoureuse de la biokinergie, à l’aide d’un protocole expérimental, est selon nous réalisable. Comme spécifié il y a plusieurs années lors de l’encadrement d’un mémoire étudiant, nous restons à disposition des thérapeutes biokinergistes pour les aider à évaluer scientifiquement leur pratique.

Suite à ce rapport, le CNOMK a émis un avis déontologique le 25 juin 2014 sur la biokinergie.

Le CORTECS

Journalisme, éthique – Outils pour un débat sur la liberté d'expression

Parmis les Midis critiques créés sur le campus de Grenoble depuis 2007, l’un d’eux eut lieu le 7 octobre 2009 et porta sur la liberté d’expression. Voici une manière,  parmi bien d’autres, d’incrémenter un débat sur ce sujet au moyen de ressources médiatiques disponibles facilement. La séquence dura 1h15, et « pirata » du temps de cerveau disponible aux étudiants durant la pause déjeuner.

Le Midi critique tel que je l’ai instauré est un petit détournement du temps de pause déjeuner. Il s’adresse aux étudiants à qui je n’avais pas le temps de montrer toutes les ressources que j’avais à disposition durant mes enseignements sceptiques. J’avais deux règles :

1. préparer la carte mentale d’un sujet que je maîtrise.

2. choisir des séquences de films, documentaires, radios, réclames me permettant, presque sans trop de commentaires de ma part, de faire incrémenter le débat le long de ma carte mentale.

Le seul maître mot était : faire en sorte que, sans que jamais personne ne se sente idiot, les étudiants repartent avec l’idée qu’un sujet peut s’avérer plus complexe qu’il n’y paraît.

Pour cet atelier, j’avoue avoir eu un public, disons, amical et bon enfant : 75 personnes, dont 40 étaient des étudiants que j’avais en classe, une trentaine étaient des étudiants « touristes », et une poignée de copains travailleurs qui venaient casser la croûte en même temps. Ce n’est pas toujours aussi intimiste, et j’ai déjà vu d’autres publics réagir assez violemment sur  l’intervenant-e (prise à partie, déplacement du sujet sur des revendications ethniques, confessionnelles, etc.). Ce sujet-ci se gère donc différemment selon les milieux, avec plus ou moins de mises au point préalables notamment sur la prise de parole.

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J’ai démarré cette présentation-débat en parlant des restrictions légales en vigueur de la liberté d’expression en France. Elles sont au nombre de sept :

  • La menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes (art. 222-17 du Code pénal).

  • La provocation à commettre un crime ou un délit (art. 23 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse).
  • La propagande ou la publicité en faveur de produits, d’objets ou de méthodes préconisés comme moyens de se donner la mort, punie de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende (art. 223-14 du Code Pénal).
  • L’atteinte au secret professionnel (art.226-13 du Code Pénal).
  • La diffamation et l’injure (art. 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse).
  • La lutte contre les contestations des crimes contre l’Humanité 3 (loi Gayssot de 1990 en France),
  • La protection de droits ou de catégories de personnes spécifiques (protection de l’enfance, défense de droits de propriété intellectuelle (soit droit d’auteur, soit copyright), etc.
  • Le secret « défense » (loi n° 2009-928 du 29 juillet 2009, Code de la Défense).

Mon procédé était d’engager le débat de manière douce, en partant de supports populaires drôles autant que possible, afin de poser une ambiance propice à la discussion. J’ai pioché dans mon stock de matériel filmique et opté pour trois extraits de films :

  1. Double extrait d’Ali, de Michael Mann (2002) : morceau où au téléphone Muhammad Ali joué par Will Smith refuse la conscription (avec le célèbre « aucun viet cong ne m’a jamais traité de sale nègre »), suivi du passage devant la commission lui retirant sa licence de boxe.
  2. Double extrait de Larry Flint, de Milos Forman (1997), réuni en un seul document : premier morceau lors duquel Flint, joué par Woody Harrelson, argumente sur la photographie du vagin, second morceau sur son discours sur l’obscénité, avec mise en parallèle (sous forme de faux dilemme) guerre / sexe.
  3. Extrait de Good night and good luck, de George Clooney (2006), sur le discours célèbre de Edward R. Murrow du 9 mars 1954 lors de l’émission très risquée See It Now intitulée « A Report on Senator Joseph McCarthy » (extrait que je n’utiliserai finalement pas faute de temps). Murrow est joué par David Strathairn.

Pour tous les extraits, j’ai choisi la version française (malgré mon aversion pour elle) car à l’époque je ne savais pas faire de beaux sous-titres, et je ne voulais pour rien au monde créer un sas linguistique infranchissable aux plus jeunes étudiants (les autres étant plus susceptibles de maîtriser un semblant d’anglais scientifique qui ferait, certes, se retourner Byron dans sa tombe). Fort heureusement, j’ai réussi à trouver une version sous-titrée de l’extrait de Good night… au dernier moment. Depuis ce temps, je m’arrange pour avoir presque toujours les deux versions : la version originale sous-titrée aux étudiants, la version doublée pour un public plus large.

L’extrait Ali illustre l’objection de conscience, et l’idée était d’en faire un support pour emmener le débat sur la restriction d’expression au nom du patriotisme, comme aux États-Unis le Patriot Act.

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Le groupe La Rumeur

J’avais également préparé une interview du chanteur Hamé, du groupe de rap La Rumeur, dans l’émission de F. Taddeï Ce soir ou jamais du 4 novembre 2008. Il y expliquait l’acharnement dont les ministères de l’Intérieur successifs ont fait preuve sur un article de Hamé voulu factuel et jugé diffamant pour la police. J’ai pris soin bien entendu de regarder où en était l’affaire au moment du débat, le 7 octobre 2009, et j’ai pu constater que l’acharnement était manifeste, avec un nouveau pourvoi en cassation. Il est bon de savoir que, depuis, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi le 25 juin 2010 estimant « qu’ayant exactement retenu que les écrits incriminés n’imputaient aucun fait précis, de nature à être, sans difficulté, l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire, la cour d’appel en a déduit à bon droit que ces écrits, s’ils revêtaient un caractère injurieux, ne constituaient pas le délit de diffamation envers une administration publique » (Cour de cassation, assemblée plénière, arrêt n° 585 du 25 juin 2010 (08-86.891). Cette décision met fin a une procédure de huit ans (voir « La Rumeur relaxé : Une gifle monumentale pour Sarkoland » rue89, juin 2010). Je recommande pour d’aucun-es souhaitant refaire cet atelier de se procurer le texte de l’article, au cas où une question soit posée dessus.

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Quant à Flint, il était le support rêvé pour discuter de la notion caduque d’obscénité, et de la forte composante morale de l’évaluation de cette obscénité qui fait la censure ou la restriction, par exemple par le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel). Au cas où lors du débat, quelqu’un avance que des restrictions sur l’obscénité n’existent plus au-delà de 18 ans, je gardais en stock les deux extraits de Le secret de Brokeback Moutain, d’Ang Lee (2005) coupé par la chaîne Raï en Italie en décembre 2008 [ref]La RAI italienne censure des scènes gay de « Brokeback Mountain », Le Monde, 9 décembre 2008.[/efn_note].

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L’humoriste Dieudonné dans son sketch « à scandale ».

J’avais ensuite choisi de présenter la « censure » la plus connue du moment, celle de l’humoriste Dieudonné, et de la replacer dans un questionnement : peut-on tout caricaturer, et si non, pourquoi ? J’avais en stock :

  • « Dieudonné au pilori », montage prélevé sur la toile que j’ai utilisé car il permettait de retracer la genèse de l’affaire – mais que je suis incapable de retrouver !
  • « Dieudonné la bête noire », bonus du DVD, dont j’avais prévu un extrait que je n’ai finalement pas utilisé (à regarder ).
  • Et surtout ce magistral document mettant en parallèle le discours bi-standard de Thierry Ardisson sur la liberté d’expression selon qu’il parle à l’humoriste Dieudonné ou au judoka Djamel Bouras.

Pour élargir ensuite le débat sur le caractère absolu ou non de la liberté d’expression, j’ai gardé pour la fin l’extrait du film Chomsky, les médias et les illusions nécessaires, de M. Achbar & P. Wintonick (1993) portant sur l’affaire Faurisson.

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Noam Chomsky, se défendant d’avoir écrit une préface à R. Faurisson, mais ayant défendu sa liberté à s’exprimer librement.

J’avais gardé sous le coude les extraits des spectacles de Dieudonné sur Jacky, son technicien habillé en déporté juif, et sur la remise du prix de l’infréquentabilité à Robert Faurisson en 2008, mais je n’ai pas eu le temps nécessaire pour les développer – et il en faut, du temps ! 10

On pourra actualiser ce Midi critique avec les affaires plus récentes de censure ou de menace de censures (affaire des caricatures du prophète notamment, pièce de théâtre de Castellucci, etc.), ou en reprendre de plus vieilles, autour de chansons interdites ou tronquées, de films voués aux gémonies (comme Afrique 50 de René Vautier, réédité d’ailleurs récemment par Les Mutins de Pangée) et tant d’autres. On pourra également documenter et critiquer les « délits » d’expression chez les révisionnistes/négationnistes, comme l’a fait Jean Bricmont dans son excellent petit ouvrage La république des censeurs. Pour aborder l’affaire Faurisson – Chomsky, je recommande le documentaire Chomsky & Cie, d’Olivier Azam et Daniel Mermet, paru depuis, qui y consacre un moment.

Je recommande toutefois à qui voudrait se prêter à l’exercice de d’autant plus le préparer que son public lui est mal connu. Ce sujet, par ses ramifications, doit être fortement cadré pour ne pas déborder et, éventuellement, emporter tout sur son passage. Si je devais pondérer mes 50 midis critiques environ, je mettrais celui-ci (ex-æquo avec celui sur le voile et celui sur la liberté à disposer de son corps) comme celui nécessitant le plus d’expérience, car probablement l’un des plus difficiles à mener.

Matériel pédagogique : un disque de stockage ayant rendu l’âme, je n’ai plus mes montages. Ils sont cependant assez faciles à reproduire avec les références suivantes.

  • Ali, de Michael Mann (2002)
  • Larry Flint, Milos Forman (1997)
  • Le secret de Brokeback Moutain, d’Ang Lee (2005)
  • Good night and good luck, de George Clooney (2006)
  • Chomsky, les médias et les illusions nécessaires, de M. Achbar & P. Wintonick (1993), avec extrait sur la liberté d’expression quant à l’affaire Faurisson ici.
  • Montage Ardisson ()
  • Ce soir ou jamais, de F. Taddéï, 4 nov 2008.

Richard Monvoisin

Vous aurez certainement relevé la coquille dans l’affiche, vous aussi, n’est-ce pas ?

Couverture du livre Le crépuscule d'une idole de M. Onfray

Psychologie, philosophie – L'illusion freudienne, par Michel Onfray

Cycle d’émissions « L’illusion freudienne », par Michel Onfray.
Derrière le mot psy se cache un certain nombre de réalités très différentes, et on comprend d’autant mieux l’historicité et la récence des disciplines scientifiques quand on prend conscience qu’un édifice comme la psychanalyse truste encore une place que sa scientificité n’explique pas (en philo de terminale, dans les premières années de licence psychologie ou dans les études d’éducation spécialisée ou d’infirmerie).

Que la psychanalyse et son attirail d’outils soient attrayants, certes. Qu’ils permettent une introspection personnelle, pourquoi pas. Que la cure psychanalytique par contre prétende à une efficacité thérapeutique largement surestimée est déjà un problème. Que les preuves de ce manque d’inefficacité soient enterrées sous le tapis par un ministre (Douste-Blazy et le rapport Inserm) pose des questions.
Mais surtout, surtout : que le corpus de preuves sur lequel se bâtit la psychanalyse freudienne soit si pauvre, les faits si bidonnés, les guérisons sinon inventées du moins « gonflées », que la théorie soit irréfutable au sens de Popper, que sa grille d’analyse soit fortement sexiste, homophobe, et dépolitisante – c’est-à-dire cette tendance à imputer le mal-être de quelqu’un à l’étiologie sexuelle des névroses et à des perturbations refoulées dans la petite enfance, alors qu’il s’agit souvent d’un contexte social violent -, autant de points qui font de la psychanalyse freudienne un excellent sujet d’étude de pseudoscience.
On connaît les attaques classiques envers les critiques de la psychanalyse (déni, antisémitisme, etc.) (1). Qu’une chose soit bien claire : si Freud était Breton, ou Moldave, la critique serait la même, et si la psychanalyse était réellement efficace à la hauteur de la place qu’elle usurpe, on le dirait. Les critiques sont nombreuses, la bibliographie critique commence à être dense, et la netographie outillée (voir par exemple leCorteX_Michel_Onfray site « Mythes Freudiens » de notre ami Jean-Louis Racca). Mais il est un exercice réalisé par Michel Onfray en 2009-2010, dans la ligne de son ouvrage « Le crépuscule d’une idôle » qui offre une bel outil pédagogique : le cycle de conférences « Illusion freudienne » dans le cadre de l’Université populaire de Caen, et diffusé sur France Culture, en 25 épisodes. C’est d’autant plus intéressant à écouter qu’un certain nombre de demandes d’annulation de ce cycle arrivèrent sur France Culture, ce qui valut à la radio de se fendre d’un courrier. Téléchargeables pour les écouter en ballade, en voiture, ou en faisant du sport (certaines anecdotes sont tellement énervantes que c’est propice à la performance). Merci à M. Onfray pour ce travail d’orfèvrerie intellectuelle.

Il est possible d’acheter ces émissions dans les volumes 15 et 16 de la Contre-Histoire de la philosophie, consacré à Freud.

1. Une exégèse du corps freudien (26 juillet 2010)

 
2. Déni soit qui mal y pense (27 juillet 2010)

3. Le conquistador et les philosophes (28 juillet 2010)

4. Autobiographie philosophique (29 juillet 2010)

5. Questions-réponses (1) (30 juillet 2010)

7. Une vie sous le signe d’Oedipe (3 août 2010)

8. Un mythe scientifique (4 août 2010)

9. Un labyrinthe thérapeutique (5 août 2010)

10. Questions-réponses (2) (6 août 2010)

12. Inconscient et déni du corps (10 août 2010)

13. Un monde de causalités magiques (11 août 2010)

14. Les ressorts du divan (12 août 2010)

15. Questions-réponses (3) (13 août 2010)

16. L’affabulation freudienne (1) (16 août 2010)

17. L’affabulation freudienne (2) (17 août 2010)

18. Un verrouillage sophistique (18 août 2010)

19. Un pessimisme ontologique radical (19 août 2010)

20. Questions-réponses (4) (20 août 2010)

21. Masturbation, femmes, petites filles (23 août 2010)

22. Dolfuss, Mussolini, politique (24 août 2010)

23. Les raisons d’un succès (1) (25 août 2010)

24. Les raisons d’un succès (2) (26 août 2010)

25. Pour une psychanalyse non freudienne (27 août 2010)

Richard Monvoisin

[1] Pour approfondir les trames argumentatives développées envers les critiques de la psychanalyse, l’article de Jacques Van Rillaer : Analyse d’affirmations d’Élisabeth Roudinesco dans Mais pourquoi tant de haine ?.