alt

Dérives sectaires – Entrevue avec Didier Pachoud

CorteX_Didier_Pachoud_Didier Pachoud est le président du Gemppi (Groupe d’Etude des Mouvements de Pensée en vue de la Prévention des Individus), association qui fait un travail plus que salutaire dans l’information et la prévention touchant aux dérives sectaires.
Il a très gentiment accepté de répondre à quelques-unes de nos questions, et nous en avons profité pour le filmer : Didier apporte un certain nombre de réponses, toutes concises et claires permettant de donner quelques pistes de réflexions concernant les sectes, l’emprise mentale, l’engagement dans ces dérives ou bien encore les solutions que le Gemppi tente d’apporter aux personnes.


Dans cette première vidéo, Didier revient sur certaines définitions, notamment concernant la différence entre sectes et dérives sectaires :

Dans cette deuxième vidéo, Didier rappelle que toute personne peut être une victime possible de ces dérives, et il précise dans quelle mesure :

On pourra apprécier l’analogie faite par Didier pour parler de l’engagement et des étapes qui sont au coeur de toute emprise mentale à caractère sectaire. C’est en effet une question qui revient souvent : mais comment peut-on aller si loin ?

Dans cette quatrième intervention, il est question des médecines non conventionnelles et de leurs liens avec les dérives sectaires, notamment en tant que porte d’entrée privilégiée :

Didier nous donne quelques conseils pour aider des personnes qui seraient soumises à une influence mentale de type groupe sectaire :
[dailymotion id=xj87vk]

Une vidéo dans laquelle il est question d’indices permettant de repérer certaines pratiques pouvant amener à une dérive sectaire :
[dailymotion id=xj87zg]

En 2008, le Gemppi lançait la charte des « praticiens et acteurs du corps et de l’esprit« . Quel en est son but et pourquoi la mettre en place :
[dailymotion id=xj882g]

Toujours question de la charte dans cette vidéo : Didier revient sur le « risque » de validation des pratiques de certaines thérapies par cet engagement :
[dailymotion id=xj886k]

Pour terminer, des conseils de lectures de Didier, à consulter ici.


Merci à encore à Didier pour son temps et sa disponibilité !

Denis Caroti

Documents filmés le 7 juin 2011

Ateliers Science, zététique, esprit critique pour collèges / lycées

Denis Caroti au collège Stéphane Mallarmé de Marseille et Richard Monvoisin, au Collège et Lycée Elitaire Pour Tous (CLEPT) à Grenoble, travaillent pour 2011-2012 à la mouture de leurs Ateliers Science, zététique, esprit critique.
En voici la description.

Descriptif

L’atelier Science, zététique, esprit critique a pour but de mobiliser des compétences critiques sur des sujets « bizarres », donc pédagogiquement stimulants, afin de construire un outillage scientifique de recherche des données chez des élèves souvent submergés par un flux permanent d’information.

Compétences visées

  • Savoir distinguer avis personnel / expertise
  • Se méfier du « bon sens » et de l’intuition
  • Apprendre à chercher sur le net, dans les revues
  • Savoir recouper les sources
  • Se remettre en cause sur les idées reçues
  • Acquérir de la démarche scientifique
  • Oser s’adresser à des experts
  • Comprendre les mécanismes de rumeur dans les médias et sur le net
  • Eventuellement monter un protocole expérimental rigoureux.

Méthode

Proposer à tous les élèves quelques recherches communes, ensemble, afin d’apprendre les biais de raisonnement / d’interprétation classiques, puis les faire travailler par binôme/trinôme sur la recherche de sources de quelques affirmations extraordinaires et considérées communément comme vraies.

Exemples :

  • sommes-nous si sûrs que la Terre est ronde ?
  • Les images de l’Humain sur la Lune sont-elles truquées ?
  • Un crapaud explose-t-il quand on le fait fumer ?
  • Les cheveux poussent-ils plus vite quand on les coupe à la pleine lune ?
  • Dort-on vraiment moins bien les nuit de pleine lune ?
  • Les ongles poussent-ils encore sur les cadavres ?
  • L’humain a-t-il un ancêtre commun avec le singe ?
  • Peut-on trouver de l’eau avec des baguettes de sourcier ?
  • N’utilise-t-on que 10% de son cerveau ?
  • A-t-on réellement 5 sens ?
  • Y a-t-il des chats qui sentent venir la mort ?
  • Combien de piqûres de frelon tuent un humain ?
  • Einstein a-t-il vraiment dit « Si l’abeille disparaissait de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre  » ?
  • Les dents de sagesse / l’appendice / le lobe de l’oreille / le petit orteil vont-ils disparaître ?

Etc.

Déroulement possible

Atelier hebdomadaire de 3h dans une salle informatique, avec guide et encadrement par l’enseignant. Programme d’enquête par semaine. Les élèves pourront bien sûr suggérer leurs propres sujets de recherche (à la seule condition que l’affirmation centrale à vérifier soit de type scientifique).

CorteX_acupuncture1

Décortiqué – Un mystère de l'acupuncture expliqué par la science ?

Cela fait plusieurs années que je garde un oeil attentif sur les recherches concernant l’acupuncture. Il y a deux mois, j’ai eu l’occasion de co-présenter une conférence sur ce thème : des dizaines d’articles compilés plus tard, j’ai pu me faire (enfin) un avis en connaissance de cause. Dans le lot des études analysées, il y avait celle dont traite l’article du Figaro.fr. Point amusant dans cette histoire, mon ami, l’inénarrable et truculent Richard Monvoisin, avait déjà senti que quelque chose clochait dans ce papier : pas directement avec la publication scientifique d’origine mais avec l’utilisation qui en était faite par Tristan Vey. Voici le résultat de mon analyse qui, bien entendu, pourra être étoffée par vos diverses remarques et réflexions.


Après mûre réflexion, j’ai décidé de présenter mon analyse sous forme de plan, afin de bien distinguer ce qui relève de l’utilisation d’arguments fallacieux et autres effets de manches, des questions scientifiques relatives à l’étude en question.

1. Sophismes et autres effets

  • Un carpaccio sauce mystère

Soyons fantasques et subversifs, et commençons par le titre.

« Un mystère de l’acupuncture expliqué par la science ?« 

Ca, c’est un effet de mise en scène de l’information typique : sorte de mise en bouche pour le lecteur, ces premiers mots, écrits bien en gras (un titre quoi…), permettent d’achalander le lecteur. A quoi puis-je m’attendre avec un tel titre ? A être initié, sorti de mon ignorance : puisque mystère il y a, c’est qu’aliboron** j’étais.

Par chez nous, on appelle ça la technique du carpaccio. Ici, on parlera de carpaccio mystère. Mais si, vous savez bien, la tranche de jambon cru sur son lit de salade verte agrémentée d’une sauce balsamique au sel de Guérande (= une assiette jambon-salade) le tout pour 18 €. Sisi, c’est ça le carpaccio : l’art de présenter, d’enrober, de scénariser l’information pour la rendre plus attrayante, plus sexy, plus digeste peut-être – mais est-ce là l’objectif premier de l’auteur ? De la pub en quelque sorte. Sauf que là, on est dans le cadre de la vulgarisation scientifique, et qui dit technique du carpaccio, dit méthode addictogène à l’image, l’émotion, le simple, le mystérieux, l’énigmatique, le sensationnel, etc. Comprendre la science, ses savoirs qu’elle construit, ça demande au contraire du temps, de la réflexion, des efforts. Un peu comme apprendre une autre langue : lire votre Dictionnaire de voyage franco-thaïlandais pour savoir dire « Bonjour » et « Où sont les toilettes » c’est certes utile, mais ça ne fera pas de vous un bilingue. Je n’en dis pas plus, ayant déjà longuement parlé de ça ici.

Au final, on le verra, rien de nouveau sous le soleil comme dirait l’autre.

** Si comme moi vous ignoriez le sens de ce mot jusqu’à ce jour, vous serez certainement heureux d’en apprendre la définition ici

  • Vieux comme Hérode : et alors ?  Il ne faut pas confondre « l’épreuve du temps » et « l’épreuve des faits » (qui dure longtemps)

Première phrase du papier :

« L’acupuncture a beau être une science orientale vieille de plus de 4000 ans, ses mécanismes restent largement méconnus. »

Un rappel tout d’abord : l’argument d’historicité ou plus précisément, argument de « la nuit des temps », cet appel à l’ancienneté revient régulièrement lorsqu’il est question d’acupuncture. Et pourtant, l’ancienneté d’une pratique/technique n’atteste en rien de son efficacité. La récence non plus d’ailleurs.

C’est un argument puissant car basé sur ce fameux bon sens : si ça fait des centaines d’années qu’on l’utilise et que ça existe en encore, c’est bien qu’il y a quelque chose de vrai dans tout ça ? Pas sûr, et il faudra se rappeler que la saignée d’Hippocrate et Galien était encore pratiquée au XIXe siècle avec les conséquences que l’on sait.

Certes, dans cette phrase l’auteur ne dit rien sur l’efficacité de l’acupuncture explicitement, il n’y a donc pas usage explicite de l’argument d’historicité. Mais retenons que recourir à l’origine multimillénaire de celle-ci induit chez le lecteur ce même effet que les bonnes confitures de ma grand-mère ont sur mes amis : quand la technique est ancienne, elle ne peut qu’être bonne.

  • Pars pro toto, où comment prendre la partie pour le tout

Dans la phrase suivante de l’article :

« C’est tout un pan de la médecine chinoise qui est d’ailleurs souvent méprisé par les scientifiques occidentaux. (…) »

Vous aussi vous avez remarqué non ? Un « homme de paille » et une « généralisation abusive » : on travestit la position et on prête des intentions aux scientifiques qualifiés d’occidentaux, scientifiques qui formeraient une communauté homogène. Tout d’abord, faut-il rappeler que « les scientifiques » et encore moins « les scientifiques occidentaux » ne sont pas tous du même avis ? Vous imaginez : en disant cela on range les frères Bogdanoff, Axel Kahn, Hubert Reeves, et Guillaume Lecointre dans le même panier. Pas sûr que leur opinion soit la même et encore moins qu’elle soit méprisante. Avec cette technique, l’auteur présente la médecine chinoise comme une victime, position qui permet de déplacer l’analyse vers l’émotionnel, sans rendre compte d’arguments objectifs.

Rappelons également que le concept d’occident est lui aussi plus que nébuleux (voir ici), imprécis, entérinant une cloison culturelle entre certaines populations (orientales et occidentales).

Comme je ne voudrais pas être taxé de mauvais foi, j’ajoute que, bien entendu, certaines personnes – et les scientifiques n’y échappent pas – ont une attitude méprisante vis-à-vis des médecines non conventionnelles. Mais cela ne justifie en rien la phrase de Tristan Vey.

  • Scénario de réconciliation

A la fin du premier paragraphe, la dernière phrase :

« Ces résultats établissent un pont intéressant entre médecines orientale et occidentale. »

Ici l’auteur parle d’un pont, reliant deux rives bien séparées : la médecine occidentale et la médecine orientale. Sont-ce des rives bien nettes ? Médecines orientale et occidentale ne correspondent à rien si l’on ne précise pas : ce sont des termes flous. Mais jouons le jeu : dans la perception commune de ces médecines, l’une est vue comme scientifique, froide et autoritaire, l’autre comme sympa, introspective, préventive, douce et traditionnelle.

En parlant d’un pont entre elles, l’auteur met en scène une forme de réconciliation entre deux approches considérées comme opposées, mais compétitives : c’est sous-entendre qu’il y a, à l’origine, une opposition de principe, une opposition philosophique en quelque sorte, entraînant une équivalence implicite sur le plan des approches et/ou de l’efficacité thérapeutique. Présenter deux méthodes comme alternatives implique qu’elles sont des alternatives d’efficacité.

Là est l’effet rhétorique car rien ne permet d’affirmer à ce jour que la médecine traditionnelle chinoise ait des effets spécifiques établis, contrairement à la médecine basée sur les preuves, la médecine scientifique comme on l’appelle également.

2. De l’acupuncture sur des souris

  • Acupuncture ou puncture ?

Passons à présent au fond.

« (…) Maiken Nedergaard a donc bien montré qu’il était possible, dans le principe, d’améliorer l’acupuncture en l’assistant par la médecine occidentale. »

Pour faire comprendre en quoi cette phrase est le noeud du problème, faisons un petit rappel : l’acupuncture consiste à insérer des aiguilles1 à différents endroits du corps CorteX_Points_acu_rat(des points), situés sur les méridiens, des sortes de canaux de circulation du Qi – prononcer Tchi – qui traversent tout le corps. Ces méridiens n’ont, à ce jour, aucune existence avérée. Vous me direz : on s’en fiche pas mal de la réalité des méridiens, tant que ça marche ! On va en parler plus loin justement…

Il n’empêche que, conformément aux enseignements de la médecine traditionnelle chinoise, pour que ça marche, il faut piquer (ou chauffer, ou appuyer) réellement à certains endroits, les fameux points.

Alors qu’en est-il de cette étude et que nous dit-elle ? L’hypothèse de départ est la suivante : l’acupuncture pratiquée sur des souris augmente la sécrétion d’adénosine, une molécule aux propriétés anti-nociceptives (qui empêche la transmission du message nerveux lié à la douleur). Les protocoles sont assez bien décrits, plusieurs expériences sont réalisées pour déterminer si c’est bien cette molécule qui permet une réduction de la douleur lorsque les aiguilles sont insérées. Par exemple, les chercheurs ont utilisé des souris génétiquement modifiées et dont les récepteurs de l’adénosine (lui permettant de s’exprimer) étaient inexistants. La conclusion de l’équipe de Maiken Nedergaard est la même que celle de l’auteur de l’article du Figaro : c’est l’acupuncture qui est responsable de l’augmentation du taux d’adénosine chez les souris, permettant ainsi une réduction significative de la douleur.

Qu’y-a-t-il de bizarre ou d’erroné dans cette conclusion me direz-vous ? Je vous laisserai bien chercher tiens… mon côté taquin ça.

Faisons simple : si je vous dis que que pour faire pousser un pied de tomates, il faut planter la graine le mardi à 12h et bien arroser. La preuve ? J’ai fait l’expérience et j’ai obtenu de superbes tomates. Que me répondez-vous ? Certainement que planter un mardi à 12h n’est pas le facteur déterminant. C’est de mettre la graine en terre et de l’arroser qui déclenchent le processus. Pour le prouver, c’est très simple : reproduire l’expérience les autres jours de la semaine, à différentes heures.

Alors qu’en est-il pour notre étude ? Eh bien pour conclure à une action de l’acu-puncture sur la sécrétion d’adénosine, il ne suffit pas de piquer sur les points traditionnels et reconnus (pour la souris dans ce cas) et de mesurer la taux d’adénosine. Non. Il faut aussi planter les aiguilles ailleurs, sur des « non points », faire de la simple puncture pour le dire autrement. Sinon, comme pour mes tomates, conclure à une action spécifique du mardi-midi (l’acu-puncture) n’est pas possible : on a oublié les autres jours de la semaine…(les « non points »)

Faite ainsi – pratiquer une puncture de contrôle sur des « non points » – cette expérience aurait pu permettre de conclure, certes avec précaution mais sans biais évident, que c’est bel et bien l’acu-puncture qui augmente la quantité d’adénosine et non pas simplement la puncture.

C’est ici un effet paillasson que l’utilisation du terme d’acupuncture, puisque l’on conclut indûment à un effet de cette technique spécifique, alors qu’en réalité cette expérience ne montre au mieux qu’un effet de la puncture2.

  • L’effet placebo

La dernière phrase de l’article du Figaro :

« Elle aura aussi démontré par la même occasion qu’il était réducteur d’invoquer constamment l’effet placebo, comme le font les sceptiques, pour expliquer certaines réussites de l’acupuncture. »

CorteX_placeboAvant de revenir sur l’effet placebo, vous aurez compris que cette étude n’est pas propice pour trancher la question de l’efficacité spécifique de l’acupuncture. Je ne reviens pas sur le paragraphe précédent, mais j’insiste sur le fait que ces travaux sont réellement intéressants sur le plan du mécanisme lié à la puncture. Ils ne disent cependant rien sur l’acu-puncture en tant que telle (aiguilles placées en des points précis).

CorteX_effet_placeboL’effet placebo3 serait donc invoqué par les sceptiques (nouvelle généralisation abusive, les sceptiques ne forment pas une communauté homogène, ni même d’ailleurs une communauté quelconque) pour expliquer certaines réussites de l’acupuncture. Cette phrase induit le lecteur dans une direction subtilement péjorative : l’effet placebo, habituellement entendu comme effet purement psychologique d’une thérapie ou d’un médicament factice ou inerte, serait la seule cause des effets de l’acupuncture. C’est, premièrement, oublier que bien d’autres causes permettent d’expliquer l’effet d’un acte thérapeutique, comme l’évolution « naturelle » de la maladie par exemple. Deuxièmement, c’est réduire l’effet placebo à un effet psychologique : on se sentirait mieux mais en fait, les effets physiologiques seraient toujours présents. Or, si l’effet placebo est actuellement toujours étudié pour en cerner ses actions réelles, on a pu mettre en évidence qu’il existait des effets physiologiques quantifiables lié à une stimulation psychologique, ne serait-ce que dans les fameuses expériences de conditionnement de Pavlov.

Rappelons également que l’effet placebo fonctionne aussi sur les animaux (travaux de MacMillan, ci-dessous), et que, sans une procédure en double aveugle, cette étude ne pourrait toujours pas conclure à une action spécifique de l’acupuncture.

En conclusion

Que dire d’un tel article ? Imprécisions, sophismes, raccourcis et scénarisation de l’information se mêlent à un manque d’analyse critique de l’étude d’origine. Mon opinion personnelle ? Ce n’est pas un cas isolé, plus je zieute les papiers traitant d’une information à caractère scientifique, plus je découvre ce type de mécanismes de publicitarisation de la science.

Au final, c’est la question du temps disponible et nécessaire aux journalistes pour faire une telle analyse qui doit être posée et par là même celle des conditions de fabrication de l’information.

Denis Caroti


Notes

1 En fait, de la moxibustion en passant par l’acupressure ou encore l’utilisation du laser, différentes techniques peuvent être utilisées pour stimuler les points.

2 Effet pour autant très instructif sur le mécanisme probable de l’acupuncture. On peut tout à fait imaginer un traitement réellement efficace (spécifiquement donc) basé sur cette découverte, en s’éloignant des présupposés philosophiques de la médecine traditionnelle chinoise (Qi, Yin&Yang, Tao, etc.)

3 Ce terme de placebo est lui encore un effet paillasson : objet placebo, effet placebo, effet du placebo, évolution naturelle, effet psychologique, etc. ? On pourra recommander de parler d’effet contextuel à la place, tel Jean Brissonnet l’évoque dans cet excellent article : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1604


Références  

Goldman N, Chen M, Fujita T et Als. Adenosine A1 receptors mediate local anti-nociceptive effects of acupuncture, Nature Neuroscience, 2010, 13, 883–888. (ici)

McMillan, FD.  The Placebo Effect in Animals.  J Am Vet Med Assoc 1999;  215(7):  992-9. 

Conférence "Qu'est-ce que l'efficacité thérapeutique spécifique ? Le cas de l'acupuncture"

La médecine traditionnelle chinoise englobe un grand nombre de pratiques et de techniques, toutes fondées sur des bases philosophiques telles le Tao, le Yin et le Yang ou encore le Qi. L’acupuncture, en tant que médecine pratiquée dans de nombreux pays et enseignée dans plusieurs facultés de médecine en France, a retenu notre intérêt, notamment concernant son efficacité thérapeutique.

On tentera ainsi de préciser ce que l’on entend par efficacité d’une pratique thérapeutique en général, en questionnant plus spécifiquement l’acupuncture. Il sera également question de science en tant que démarche, mais aussi de ce fameux « effet placebo », de son champ d’action ainsi que de certaines idées reçues à son sujet. Un tour d’horizon des études cliniques menées à ce jour et leur impact médiatique seront aussi abordés.

Ce sera également l’occasion de parler des dérives liées à certaines pratiques extrêmes et se servant d’un langage pseudo-scientifique, pour lancer le débat sur les risques de dérives sectaires et d’emprises mentales.

Denis Caroti

CorteX_ptolemee

Conférence "L'astrologie est-elle scientifique ?"

Quel repas famililal, quelle discussion devant la machine à café, quelle rencontre amoureuse sans la fameuse question « Et toi, tu es de quel signe au fait ?« 

CorteX_ptolemee

CorteX_astrologie

Si l’astrologie est aussi présente dans notre quotidien, ce n’est pas pour autant que nous la prenons forcément au sérieux. Et puis, qu’y a-t-il de mal à regarder son horoscope de temps en temps ? La question devient intéressante et commence à nous interpeler lorsque l’on sait que des entreprises louent les services d’astrologues pour leurs recrutements, quand une astrologue prétend soigner grâce à un thème astral, ou bien encore quand un député affirme publiquement consulter le signe de ses collaborateurs. Nous pouvons alors légitimement nous interroger sur la validité et l’efficacité de cette pratique.

Quels sont les fondements de l’astrologie ? Quelles différences entre astronomie et astrologie ? Qu’est-ce qu’un signe ? Les astres ont-ils une influence sur nous ? L’astrologie est-elle simplement un art ? Une mancie ?

Dans cette conférence, nous présenterons quelques bases pour mieux comprendre la démarche scientifique et en tirer les outils nécessaires à une critique argumentée des revendications scientifiques de l’astrologie.

Denis Caroti

Denis Caroti, l'Aristote de la méthode scientifique

5 mai 2011- Formation IUFM Science & pseudosciences – Denis Caroti

Formation Science et pseudosciences, IUFM d’Aix-Marseille (Unimeca, Technopôle de Chateau Gombert)

Le jeudi 5 mai se déroulera le stage Science et pseudosciences, organisé dans le cadre du Plan Académique de Formation et à destination des enseignants de science  de l’académie d’Aix-Marseille.
Denis Caroti

Présentée par Denis Caroti depuis 3 ans, cette formation regroupe les professeurs de mathématiques, sciences naturelles et physique-chimie qui en ont fait la demande en s’inscrivant sur le site du rectorat (G.A.I.A). Durant cette journée,  l’accent est mis sur  les outils d’analyse critique, quelques bases d’épistémologie ainsi que la découverte de moyens concrets pour les utiliser avec les élèves. L’organisation de la journée est assez dense et se présente en général ainsi : le matin,  quelques mots sur la zététique puis sur la difficile mais indispensable distinction entre science et pseudosciences. Après la pause, une expérience visant à présenter un protocole expérimental complet est proposée aux enseignants : l’occasion pour eux de revenir sur des points parfois méconnus. Enfin, la matinée se termine par une introduction aux outils d’autodéfense intellectuelle illustrés par de nombreux exemples.

Le début d’après-midi est consacré à la mise en pratique de certains de ces outils : analyse de documents, de vidéos ou de revues de vulgarisation. S’en suit un débat sur l’enseignement de l’esprit critique en sciences : quelles sont les prescriptions en la matière ? Comment y répondre ? Quels risques et quels pièges à éviter ?


Stage Science et pseudosciences : le jeudi 5 mai, à Unimeca, boulevard Joliot-Curie, 13013 Marseille (début 9h, fin 16h30)

unimeca

CorteX_SV_la_vie_serait_quantique

Atelier Science & Vie – La vie serait-elle quantique ?

Les magazines de vulgarisation scientifique offrent très régulièrement (pour ne pas dire systématiquement) un large choix de thèmes à disposition du lecteur. La manière dont sont traités ces sujets, proposés la plupart du temps de façon alléchante, dramatique, mystérieuse ou même révolutionnaire, donne une image de la science tronquée, raccourcie et parfois même fausse. Que ce soit en véhiculant des affirmations inexactes sous prétexte de scénariser l’information scientifique comme tout autre type d’information, ou en jouant sur l’ambiguïté et la soi-disant soif de mystère et de scoop des lecteurs, nous ne pouvons que déplorer cet état de faits.
Quelles sont les techniques utilisées par ces « diffuseurs de science » ? Comment les identifier et s’en méfier ? Un décorticage du dernier numéro de Science et Vie va aujourd’hui nous servir de support.

Analyse de la couverture

Création du scoop – effet impact

 

Ici, un événement est proposé au lecteur. Pas à lui seulement d’ailleurs puisque le quidam qui passera devant l’affiche publicitaire du magazine sera lui aussi soumis à ce scoop : « la vie serait quantique ». On aura le temps de lire certainement le sous-titre qui parle de « révélations » et de « l’ADN », tout pour créer l’événement, événement au sens d’inattendu puisque l’on nous parle de révélations. Arrêtons-nous pour commencer sur ce terme qui figure à la une de la revue : qu’évoque-t-il exactement ? Plus précisément, comment est-il connoté ? Si sa définition (ce qu’il dénote) est aisée à trouver (porter à la connaissance une information inconnue), on s’aperçoit qu’il va également activer tout un champ lexical lié à ce qu’il connote, comme la révélation divine (Dieu communique la connaissance à l’Humain), la découverte miraculeuse d’une information dissimulée, ou bien encore une donnée nouvelle et qu’il a fallu extraire de haute lutte pour la porter aux oreilles du public.

Si en lisant ces lignes vous vous dîtes que c’est une interprétation personnelle et exagérée de ce terme, imaginez simplement dans quels contextes le mot révélation est habituellement utilisé. Affaire judiciaire : les révélations du présumé coupable. Contexte religieux : la révélation faite aux prophètes par le Tout Puissant. Ambiance Gala/Voici/Paris Match : les révélations sur les fréquentations de Johnny. Politique : la vérité sur le 11 septembre : les révélations des autorités américaines. Etc.

La connotation de ce mot est puissante et évoque sans qu’on s’en rende compte un fait caché, qui doit être porté à notre connaissance. On pourra ainsi parler d’effet impact pour ce terme avec un fort penchant pour le mystérieux et le sensationnel.

Mais l’effet impact le plus fort est sans doute celui du mot quantique. Pour exprimer ce que l’on peut ressentir en lisant ce terme – qui plus est accolé au mot « vie » – nous n’avons pas trouvé mieux que ce qu’écrivait notre ami Richard Monvoisin :

La mécanique quantique est actuellement la théorie scientifique qui crée le plus fort complexe d’infériorité intellectuelle. Il y a bien la Relativité, qui n’est pas mal non plus, tout comme la Théorie du Chaos, mais aucun autre terme ne conjugue autant science, mystère et complexité intellectuelle que le mot quantique.

Mécanique quantique. Il faut le dire dans un murmure, avec un air un peu mystérieux et les yeux plissés. En susurrant « méca-Q », comme les initiés, ou en l’écrivant MQ comme je le ferai dans la suite de cet article, on pense à Einstein, on pense aux Bogdanoff, on se dit qu’on pénètre là dans le temple de Delphes, dans la sacristie de la connaissance où tout est tellement obscur qu’il est difficile d’y distinguer un authentique prix Nobel de physique d’une paire de jumeaux russes médiatiques.

Au lycée, avant que je l’étudie pour de bon, le mot quantique était pour moi ce que le feu rouge des Humains est pour Louie, le roi des singes dans Mowgli : j’y voyais un pouvoir qu’il fallait acquérir à tout prix. J’avais envie de m’approcher, de pénétrer des connaissances interdites, mais avec cette peur de me brûler, de devenir fou, de savoir ce qu’il ne faut pas savoir, même d’approcher Dieu et de vérifier si effectivement il joue ou non aux dés.

Je n’avais pas du tout compris que je devais essentiellement cette fascination à un bon plan médiatique.

Quantoc : l’art d’accommoder le mot quantique à toutes les sauces. Richard Monvoisin, 2011

 

On peut toujours rétorquer que, bien entendu, si tout ceci est un peu exagéré dans la présentation, l’important est le sens de ce titre ! Eh oui, la vie serait quantique… que nous dit donc S&V sur ces « révélations » ? 

Analyse du contenu

Effet Pangloss

Jetons un œil à la première page, celle qui présente le dossier en question. Dans ce cas, voici ce que nous avons trouvé :

Depuis l’avènement de la science expérimentale, et plus encore depuis la découverte de l’ADN, les biologistes ont toutes les raisons de considérer que la vie est le fruit de réactions chimiques. Mais placez le vivant sous le regard et les instruments des physiciens de l’infiniment petit, ils vous diront tout autre chose. A Berkeley, Toronto, Londres, Singapour, et ailleurs encore, des équipes de physiciens sont en passe d’acquérir la conviction que les plus grand mystères de la vie peuvent être élucidés grâce… à la physique quantique ! Seules les étonnantes propriétés de la matière aux plus petites échelles semblent à même d’expliquer l’extrême efficacité de la photosynthèse, l’intense activité enzymatique, la miraculeuse stabilité de l’ADN, et même les sens de l’orientation et de l’odorat… La physique quantique au cœur de la vie ? Après tout, le vivant, qui a eu tout le temps de sélectionner le meilleur, aurait été bien sot de ne pas se servir dans la prodigieuse boîte à outils de la physique quantique. (p.3)

 

Il faut s’arrêter sur la dernière phrase. Le vivant aurait eu, d’après ce qui est écrit,  tout le temps de sélectionner le meilleur. On imagine que l’auteur de cette phrase a voulu parler de l’évolution à travers ces mots. Malheureusement, comme beaucoup, il est tombé dans les pièges d’un finalisme naïf : l’idée que l’univers aurait un but (ici, le vivant), une signification, que toute chose serait faite à dessein. On entend par exemple que l’œil est fait pour voir, que l’aile a pour but de voler, que les animaux inventent des ruses pour survivre, que la nature ne fait rien en vain, que la sexualité a été sélectionnée dans le but de créer de la diversité, que l’Humain est l’aboutissement de l’évolution ou, comme l’écrivait Voltaire à travers son personnage de Pangloss : « que les choses ne peuvent être autrement : car tout étant fait pour une fin, tout est nécessairement pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes, aussi avons-nous des lunettes. »

Le vivant n’a rien sélectionné du tout, et encore moins le meilleur (1). Dire cela équivaut à valider les thèses de H. Spencer et sa « sélection des plus aptes », dont le darwinisme social en est une application, avec les conséquences sur les dérives colonialistes, eugénistes et fascistes que l’on sait. Il faut bien admettre que la théorie de l’évolution n’est pas forcément bien maîtrisée par l’individu lambda, qui parlera de la girafe qui étire son coup pour aller chercher à manger ou de la sélection natturelle comme d’une sélection des plus forts. Il nous semble donc d’autant plus important, dans un journal qui se veut scientifique, de ne pas faire ce genre d’erreurs dans le but d’écrire une phrase qui présente bien.
(1) Comme dirait Florence Foresti : « Quand tu regardes l’être humain tu te rends compte qu’ils ont arrêté en plein chantier c’est n’importe quoi… » (Extrait du sketch La nature est mal faite)

CorteX_sc_et_vie_73

N’oublions pas la fin de la phrase où il est question d’aller piocher dans la prodigieuse boîte à outils de la physique quantique. Là encore, on fait croire que le vivant a un but et « aurait été bien sot » (anthropomorphisme) de ne pas faire appel à la mécanique quantique…

Malheureusement, ce genre d’erreurs est reproduit dans le reste des articles. Vous pouvez les retrouver assez facilement en repérant les passages où il est question d’évolution et de nature. N’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires qui pourront ainsi se rajouter au présent cours.

Technique du carpaccio et de la peau de chagrin

Mais d’ailleurs, quels sont ces outils prodigieux que le vivant exploiterait ? Rendons-nous quelques pages plus loin et lisons attentivement. On y trouve là encore tout un tas de phrases données au lecteur pour aiguiser son appétit, phrases qui soulèvent à chaque fois une forte charge de sensationnel, de mystère et/ou de merveilleux., en donnant ainsi une vision déformée de la réalité. Tout est « superlativisé », voire scénarisé. R. Monvoisin parle de technique du carpaccio pour caractériser cette mise en scène de l’information scientifique avec pour seul effet de la rendre séduisante, accrocheuse, mais bien souvent vide de sens :

« […] nous parlerons de carpaccio pour désigner les processus d’exposition de connaissance dont le seul intérêt réside dans leur scénarisation, bien souvent stéréotypale. Un carpaccio est à la connaissance scientifique ce que le lieu commun est à l’information classique, ce que la romance est au film hollywoodien : un apparat séduisant, mais vide, qui façonne à la longue le goût des consommateurs de vulgarisation scientifique. Le carpaccio a semble-t-il des vertus apéritives, pour ne pas dire publicitaires.» (*p.272)

Quelques-uns de ces carpaccios trouvés en vrac :

–          « A commencer par l’étonnante efficacité de la photosynthèse, qui voit les végétaux convertir en énergie 100% de la chaleur du soleil. Un rendement prodigieux… que les biologistes ne s’expliquent pas ! » (carpaccio mystère)

–          « Par quel prodige des effets quantiques parviennent-ils à émerger au cœur du vivant ? » (carpaccio énigme. On peut aussi repérer le terme prodige, qui s’inscrit dans le même champ lexical que celui de révélation avec toute la connotation qu’il dégage, voir ci-dessus)

–          « Une superposition quantique qui permet au célèbre chat de Schrödinger, enfermé dans une boîte, de narguer les physiciens en présentant à leurs équations comme à la fois mort et vivant[1]. »

–          « Sens de l’odorat. Sa subtilité tiendrait aussi à l’effet tunnel ! »

–          « Dépositaire de la mémoire du vivant, la molécule d’ADN se doit de rester stable. Comment ? L’intrication quantique serait ici la clé de l’énigme. » (carpaccio énigme)

Attention, il n’est pas question ici de dénigrer ou critiquer les recherches tout à fait intéressantes et passionnantes que des scientifiques mènent sur ces sujets. Il est question de la façon dont on traite l’information scientifique qui s’y rattache. Et force est de constater qu’on est plus proche d’une mise en forme publicitaire de celle-ci que d’une vulgarisation à visée pédagogique et rigoureuse.

On peut notamment vérifier cela en prêtant attention à la sensation laissée après lecture des articles du dossier, comparée à l’appât que constitue la couverture du magazine. Rappelons que le titre parlait de la vie qui serait quantique et des révélations des physiciens. Mais qu’apprend-t-on dans les pages à l’intérieur ? Par exemple, p.54, au tout début du dossier :

CorteX_sc_et_vie_54

« Les biologistes l’ont amplement démontré, la vie est un prodige de réactions chimiques. Mais pas seulement ! […] Jusqu’où la vie est-elle quantique ? La question est posée. »

On comprend tout de suite que les fameuses révélations dont il était question ne vont finalement pas être une révolution mais simplement des pistes de recherches puisque « la question est posée ».

Quelques pages plus loin, concernant la photosynthèse, si le titre évoque une réponse,

« Comment les végétaux peuvent-ils convertir 100% de la lumière ? Une propriété quantique – la superposition d’états – apporte enfin une réponse ».

CorteX_sc_et_vie_58

on apprend que « la réponse a commencé à se dessiner en 2007. » (p.58). Puis que cette « expérience [de Flemming] ne permettait pas de l’affirmer [le phénomène quantique responsable de la conversion d’énergie lors de la photosynthèse] : elle fut réalisée à une température peu propice à la vie de…-196°C. » (p.60)

Même page, on lit qu’une autre expérience, équivalente, aurait été conduite à température ambiante. Mais là encore on apprend que « ce résultat doit encore être validé« .

Bref, c’est ainsi pour chaque thème abordé, de la photosynthèse en passant par l’ADN et les enzymes : on nous fait miroiter des « révélations » pour au final nous servir des études en cours et qui méritent réplication et confirmation.

Cette technique d’effritement du contenu après une mise en bouche mirobolante porte le nom de peau de chagrin (voir bibliographie) et désigne la tendance des médias à « gonfler la marchandise », quitte à ce que la conclusion de l’article n’ait plus grand-chose à voir avec le titre d’accroche de départ.

 

En conclusion

On pourrait répéter ce type de décryptage sur bon nombre de médias s’occupant de vulgarisation scientifique, ou, comme l’indique R. Monvoisin, s’occupant de la publicitarisation de la science. Il relève ainsi trois points importants et récurrents :

– le remplacement de la raison par la sensation
– la séduction par la simplicité
– la création de l’ « événementiel »

Nous avons tenté de donner quelques pistes concernant ce dernier volet en prenant un exemple parmi tant d’autres. Laissons à Richard le mot de la fin, illustrant le deuxième aspect de cette publicitarisation :

« Deuxième volet de la publicitarisation de l’information scientifique : le mythe de la simplicité. La vulgarisation scientifique (VS) dans son ensemble tend à faire croire que grâce à elle, la connaissance savante sera apportée au profane, par son entremise, et cela sur un plateau. Nous ne nous appesantirons pas sur le caractère assujettissant d’une telle démarche, le profane attendant la becquée que le vulgarisateur, tel l’évangélisateur du XIXe siècle en Afrique sahélienne, viendra aimablement lui délivrer : celui qui ne « sait » pas est campé dans un rôle de quémandeur d’aumône, et il n’y aura pas grand monde pour l’encourager à s’aventurer sur les chemins rocailleux de la formation scientifique et à réellement se former, en reprenant des études par exemple. La VS entretient aimablement ce mythe de la simplicité, en persistant à faire croire aux exclus de la connaissance scientifique que par son entrefaite, par quelque docufiction ou quelques pages imagées dans une revue, l’individu avide aura à peu de frais la substance de la connaissance en question. Le problème est qu’en guise de substance, il y a au mieux un aperçu, au médian une caricature, au pire une misconception.
Dans un océan de vulgarisation simplifiante, l’accueil réservé à un réel développement analytique est désormais perçu comme au mieux soporifique, au pire complexe, élitiste, voire snob, et des postures anti-intellectualistes naîssent. Au vu du nombre d’individus, étudiants ou non, qui lors des cours, des conférences ou sur les forums Internet, restituent des lieux communs sur la mécanique quantique par exemple, il y a quelque inquiétude à nourrir sur une « sciencesetavenirisation » de la connaissance scientifique populaire. Dans l’idéal, il faudrait rompre avec cette idée reçue que la science et l’information scientifique sont simples : elles sont difficiles, exigeantes et pleines de pièges. Quiconque souhaitant se forger une opinion sur la relativité restreinte, l’algèbre, la théorie du chaos ou le néo-darwinisme ne pourra éviter de compulser les bases, le vocabulaire, les règles, au même titre que celui qui voudra apprendre une langue étrangère devra passer par les fondamentaux. Il y a généralement autant de différence entre un champ scientifique et sa vulgarisation qu’entre une pratique maîtrisée d’une langue et le petit lexique de voyage des Guides du Routard. Nous ne disons pas que ces lexiques ne sont pas utiles, ou que cette VS simplifiante ne devrait pas exister : nous demandons à ce qu’il soit précisé à ses consommateurs que cette connaissance est simplifiée à outrance, non suffisante pour avoir une opinion éclairée, et crée du « sens » ou du « rêve » bon marché. Aussi sympathique soit-elle, ce n’est pas avec une fausse cape de Superman achetée en supermarché qu’on parviendra à voler. » (*p.119)

Denis Caroti

 


Bibliographie :
On retrouvera l’essentiel de ces critiques dans la thèse de Richard Monvoisin : Pour une didactique de l’esprit critique (2007), p.114, disponible ici

 


[1] Cette histoire du chat de Schrödinger qui narguerait les physiciens est ici, il faut l’avouer, très mal présentée. Ce chat ne nargue personne, c’est simplement une image pour illustrer ce que l’on nomme la superposition des états en MQ. Or, cette superposition n’a lieu qu’à des dimensions proches de celles de l’atome. Le chat, comme illustration de ce phénomène, est intéressant mais laisse souvent le lecteur dans un état pour le moins dubitatif sur les mystères de cette physique si étrange…voir ici pour plus de détails.

alt

Zététique – Enseignement de Denis Machon

Denis Machon est physicien, enseignant-chercheur à l’université Lyon 1 et propose, depuis 3 ans, un enseignement zététique intitulé « Paranormal, pseudo-sciences et esprit critique ». Il a la gentillesse de mettre à disposition ses cours pour le réseau. N’hésitez pas à consulter l’ensemble de son travail que nous avons regroupé ici.

L’enseignement « Paranormal, pseudo-sciences et esprit critique » de l’université Lyon 1 s’adresse aux étudiants de licence (L2 et L3) dans le cadre de l’enseignement de « transversales » « Sciences Humaines et Société ». Ce cours, sous forme de stage d’une semaine, permet à une quarantaine d’étudiants de s’initier à la zététique et à l’autodéfense intellectuelle.

Denis y balaye tous les domaines traités habituellement avec un éclairage personnel et intéressant. Des outils critiques en passant par les statistiques, les pseudo-sciences, des études de cas ou bien des exemples de ce que l’on appelle la « science pathologique », il est essentiellement question de souligner l’importance de la démarche critique dans le domaine des sciences. Vous trouverez l’ensemble de ces présentations (volontairement denses pour que les étudiants puissent y récupérer le maximum d’informations) séparées en 5 cours :

Bonne lecture !

Denis Caroti
CorteX_EdB3

Janvier 2011 Le CorteX dans Esprit de Babel (Denis Caroti)

CorteX_EdB3La revue Esprit de Babel n°3, éditée par l’association Les Bancs Publics et sortie en janvier 2011, aborde le thème de la diffusion de la culture scientifique, de l’enseignement des sciences et du regard porté par les élèves. Un sujet intéressant et qui nous concerne bien entendu au Cortecs. Vous pourrez y trouver un article de Denis Caroti où il est question d’esprit critique et de zététique.
.
Bonne lecture !

A consulter ici
A télécharger ici.
DC

Remarque : en début d’article il est question de Truzzi et de sa primauté concernant l’utilisation du terme zététique pour désigner l’investigation des phénomènes « paranormaux ». Il semblerait d’après nos sources que cette paternité revienne en réalité à Henri Broch. En effet, même si Truzzi fut le premier à l’utliser « publiquement » dans la revue Zetetic Scholar, Broch s’en servait déjà. A noter que le mot zététique était employé bien avant et par différents auteurs tels Montaigne ou encore Viète mais dans un sens différent de celui qu’on lui prête de nos jours.

Balado

Février 2011 Le CorteX sur le balado Scepticisme Scientifique (Denis Caroti)

BaladoL’épisode 90 du balado Scepticisme Scientifique est consacré au CorteX. Denis Caroti fut ainsi invité à répondre aux questions concernant notre réseau, son principe et ses objectifs.
Merci à Jean-Michel Abrassart pour cet épisode et plus généralement pour son travail d’information critique sur des sujets qui nous touchent souvent de près.

Note – Il avait déjà été question du CorteX dans l’interview de Richard Monvoisin, épisode 42.


DC pour le CorteX