L'équipe du Cortecs au REC

« La science est-elle politique ? » 1/2 – On pose des questions tabous aux REC, et ça se passe bien !

L'équipe du Cortecs au REC

Le Cortecs était-il aux REC 2023 ?
Quatre membres – Vivien, Sohan, Nicolas et David – ont pu faire le déplacement, donc on peut dire que oui ! Mais officiellement, rien n’a été décidé quant à l’implication de l’association dans l’événement. Nous n’avions rien à proposer, en tant que structure, comme stand ou activité. Sohan est intervenue sur la table ronde « Dérives thérapeutiques : un business juteux » alors que Vivien, Nicolas et David ont animé des ateliers sous la bannière de leurs collectifs (respectivement Cinétique, Rasoir d’Oc et Les Dubitaristes). Nous laissons ici Nicolas et David raconter les ateliers qu’ils ont animés en commun.
La seconde partie de cet article disponible ici exposera notre opinion sur une des questions débattues pendant les ateliers : « La science est-elle politique ? »

Des ateliers, pourquoi ?

Pourquoi proposer des activités dans un événement déjà si grand et si riche ? De quoi avions-nous envie de parler ? Comment mettre en forme cette envie ? Avions-nous déjà, tout simplement, quoi que ce soit d’intéressant à dire ?
Peut-être pas. En tout cas nous avions un grand intérêt à discuter d’esprit critique, de doute réflexif et du rapport entre science et politique.

Pour susciter ces discussions dans de bonnes conditions, rien de mieux selon nous que de bons vieux outils d’éducation populaire !
Sans prétention aucune, il s’agit de mettre en place un cadre qui favorise toute prise de parole et l’écoute active. On y expose nos expériences vécues, nos réflexions propres et nos opinions (nos « savoirs chauds »), on y convoque des références scientifiques, des théories et des figures faisant autorité (les « savoirs froids »), ce qui donne un joyeux mélange de pratiques illustrant la théorie et de théories nourrissant la pratique (quoi que ça donne, ça ne s’appelle pas « savoirs tièdes », bien essayé).

Il ne s’agit pas de dire qu’on va reconstruire des savoirs universitaires en causant pendant une heure. À travers nos discussions, on se confronte à des visions auxquelles on n’aurait jamais eu accès autrement. Notre esprit critique est mis à rude épreuve.

C’est aussi l’occasion de proposer une alternative au format conférences/tables rondes qui sont majoritaires au REC1. Que retire réellement le public de ce genre de format ? Après un jour, après une semaine ou après un mois quelle quantité d’information est retenue ? C’est une vraie question. 
Le risque serait que ce soit la passivité confortable de ces formats couplée à la satisfaction d’entendre un sujet et/ou un·e intervenant·e famillièr·e qui fasse le succès de ces formats plutôt que leur pertinence pédagogique.
Au contraire, il nous semble que les ateliers participatifs permettent davantage de bousculer les participant·es et demandent un vrai travail actif. Évidemment c’est plus coûteux (en énergie, en temps, en ressource cognitive…) et on imagine difficilement un week-end entier à faire des ateliers sans finir avec le ciboulot fondu.
Les deux formats sont probablement complémentaires et nous militons pour que les seconds ne soient par trop relégués au second rang et finissent dans des placards à balais (avec tout le respect qui se doit pour la salle dans laquelle nous animions).  

Voici un déroulé des ateliers proposés. Faciles à mettre en place, nous encourageons à s’en saisir pour exercer nos esprits critiques à peu de frais !

Des ateliers, comment ?

Atelier « débats et discussions »

Dans ce premier atelier l’idée était d’expérimenter différentes modalités de débat. En l’occurence nous en avons testé trois : le débat mouvant, le débat mouvant en deux dimensions et le groupe d’interviews mutuelles.

Commençons par un débat mouvant. Nous lançons à nos participant·es une affirmation clivante, aux termes volontairement polysémiques et non définis, limite malhonnête. Dans un premier temps, ils et elles doivent se positionner spatialement dans la zone « d’accord » ou dans celle « pas d’accord », sans possibilité de nuance. Le doute n’est pas permis !
Une fois dans leurs groupes, les participant·es ont quelques minutes pour construire ensemble les arguments qui soutiennent leur accord ou leur désaccord avec l’affirmation. C’est l’occasion de réfléchir au sens qu’on met derrière chaque mot de l’affirmation.
Enfin, le débat commence et chaque « camp » a l’opportunité, à tour de rôle, de donner un argument.
À n’importe quel moment, toute personne est libre de changer de camp : elle entend un argument qui la touche, elle change d’avis radicalement, elle admet qu’un argument était bien tourné, elle rumine ses propres pensées, elle entend une aberration dans son propre camp, etc. Pas besoin de se justifier, ici le fait de passer d’un camp à l’autre n’est à interpréter que comme la manifestation d’une réflexion. Et montrer qu’on réfléchit, voire qu’on est prêt·e à se remettre en question, c’est quand même la grande classe.

Pour lancer le débat mouvant, nous avions proposé plusieurs affirmations, et c’est la dernière que nos participant·es ont choisie :
– La science recherche la vérité
– Il y a des questions bêtes
– Il faut prouver ce qu’on dit
– On a besoin de croire
La science est politique

Remarquons l’honnêteté intellectuelle de certaines personnes, qui ont systématiquement argumenté en se plaçant dans le même camp, mais qui ont su rejoindre le camp opposé quand des arguments pertinents leur étaient exposés. Les débats se sont fait de manière très sereine et le cadre ludique permet probablement cette légèreté. Tout le monde s’écoute, que l’on soit zététicien·ne troisième dan ou visiteur·euse d’un jour. L’idée principale qui est revenue régulièrement au cours du débat c’est que la réponse dépend ce que l’on entend par « science » et par « politique » (voire de ce qu’on entend par « est »).
Nous revenons plus en détail sur ce débat dans la seconde partie de l’article.

Nous enchaînons avec un second débat mouvant, mais avec une variante.
Nous avons proposé l’affirmation « Il faut douter de tout » qui commencait de la même façon : deux camps, des arguments, du mouvement.
Après quelques prises de paroles, nous introduisons une dimension supplémentaire en faisant remarquer que certains arguments énoncés jusqu’ici nous semblaient plutôt commenter l’affirmation « On peut douter de tout ». Ainsi, si certain·es avaient pu interpréter la phrase dans un sens prescriptif/normatif, d’autres l’avaient fait dans un sens plutôt descriptif (que leur acception de « pouvoir » soit celle de la capacité ou du droit).
Nous proposons alors qu’au lieu de deux camps, les participant·es se placent à présent dans quatre cases :
– Il faut douter de tout, mais on ne peut pas le faire
– Il faut douter de tout, et on peut le faire
– Il ne faut pas douter de tout, et de toute façon on ne peut pas le faire
– Il ne faut pas douter de tout, mais on pourrait le faire

La parole circule de case en case, les participant·es aussi au gré des arguments. À chaque argument énoncé, c’était un sens différent de « pouvoir », « falloir » et « douter » qui était mobilisé.

Le plus difficile, finalement, c’est de terminer le débat : c’est frustrant parce qu’on imagine encore plein d’arguments, on ne sait pas où se placer, et la question demeure en suspens.

Dernière activité, le groupe d’interviews mutuelles. Nos participant·es se groupent par trois et nous leur demandons de raconter, chacun·e leur tour au sein du groupe, une expérience de vie ou une anecdote.
Chaque personne dispose de cinq minutes tandis que les autres ne peuvent pas l’interrompre ou engager la discussion. Elles et ils écoutent attentivement et relancent.
Nous leur avons demandé de raconter un changement d’avis, quel que soit le sujet ou le temps que ça a pris.

Pour conclure, nous avons exposé quelques expériences en plénière pour capter la diversité de ce que nous considérions comme des changements d’avis.
Cela a été l’occasion de se demander ce qui occasionnait le changement d’avis.

Atelier « Petite histoire / Grande histoire »

Le second atelier que nous avons animé s’intitule « Petite histoire / Grande histoire » et est aussi un classique d’éducation populaire.
Dans un premier temps, les participant·es disposent de petits papiers sur lesquels elles et ils doivent écrire deux « petites histoires » et une « grande histoire ». La petite histoire est personnelle, c’est une expérience vécue qui ne concerne que soi-même. La grande histoire est aussi une expérience vécue, mais dans le cadre d’un événement plus large : un événement politique, sportif, une catastrophe, voire un événement du millénaire dernier mais qui constitue une référence culturelle.
Ces histoires avaient pour contrainte de raconter « le rôle que la science a pu jouer dans votre engagement ». Là aussi, tous les termes sont à comprendre aussi largement que possible.

Impossible de résumer la diversité des histoires racontées, en tout cas on a eu de tout ! Notamment, beaucoup de rencontres de scientifiques et de discussions ont manifestement contribué à changer les visions du monde de nos participant·es (et de nous-mêmes, car nous participions !)

Petits bonus sur l’éducation populaire

Un petit éclaircissement sur l’éducation populaire est certainement le bienvenu.
Comme introduit plus haut, l’éducation populaire convoque à la fois les savoirs « chauds » de nos vécus et les savoirs « froids » théorisés. On ne se prive d’aucun savoir, ni d’aucune source source possible de savoir, qu’il s’agisse de savoir-connaissance, de savoir-faire, de savoir-être ou de savoir-penser.
On retrouve là deux acceptions de l’éducation qui correspondent à deux étymologies latines possibles2 : educere, qui signifie « conduire hors de », et educare, qui signifie « nourrir ».
L’éducation peut ainsi se concevoir comme une transmission de savoirs et/ou comme un processus collectif amenant d’un état à un autre.

Un contre-sens possible est de penser que l’éducation populaire, c’est de l’enseignement pour les pauvres.
On vient de voir que l’éducation populaire ne se limitait pas à l’enseignement. En théorie elle n’utilise même pas cette notion. Les savoirs issus d’une expertise, d’une théorisation, sont toujours convoqués en contexte pour éclairer des situations précises, ce qui correspond davantage à la notion d’apprentissage. Ce n’est pas le maître qui vient donner, c’est l’apprenant qui vient chercher.
Si « populaire » est synonyme de « pauvre » dans certains contextes, ici c’est au sens large de « tout le monde » qu’il faut le comprendre. Gardons en tête que ce « tout le monde » fait aussi débat3, car employé naïvement il risque de gommer les inégalités de classe, de genre, de race, d’âge, de capital, etc.

Qu’on pratique l’éducation populaire ou non, on court souvent le risque d’inverser les moyens et les fins, en cantonnant l’éducation populaire à ses « outils ». « Débats mouvants« , « Groupes d’interviews mutuelles », « Petite histoire grande histoire« , sont des noms d’outils qui circulent dans les associations. Ils sont séduisants mais peuvent faire perdre de vue leur finalité.
L’éducation populaire est avant tout un processus, qui passe parfois par des outils. Mais il ne suffit pas d’organiser un débat mouvant pour produire un échange émancipateur de savoirs ni pour engager une réflexion de long terme. Il faut veiller à la pertinence de l’organiser dans le contexte, à son animation, à la façon dont on se saisit collectivement de ce qui en sort. Sinon on se contente de passer un bon moment (ce qui est déjà pas mal !).

C’est pour ça que l’éducation populaire n’est pas neutre. Qu’on mobilise ses outils ou non, son objectif est de produire de la transformation sociale. Par essence, cette transformation sociale bénéficie aux personnes dominées4 et aux groupes minorisés, mais pas aux dominants qui eux n’ont aucun intérêt à ce que le monde change.

Il me semblait important d’apporter ces quelques notions pour éviter des incompréhensions fâcheuses à propos de l’éducation populaire. Il convient de se poser sérieusement les questions, avant de prétendre la pratiquer : Est-ce le bon endroit ? Pour qui on le fait ? Qu’est-ce qu’on souhaite collectivement ? Quels sont les rapports de domination en jeu ?

Pour aller plus loin et développer tous ces aspects, voici quelques ressources :

Le blog d’Adeline de Lepinay, intervenante en éducation populaire. Ce site regorge de théorie et d’outils pratiques.
L’autrice a également écrit le livre « Organisons-nous ! », qui est d’une très grande richesse concernant la réflexion sur les luttes sociales et la place de l’éducation populaire en leur sein. Elle y aborde l’histoire de l’éducation populaire et les différents courants qui existent, les limites du concept, les risques de dérive et de récupération. Elle analyse et catégorise différentes méthodes d’action et d’organisation de collectifs, notamment en les mettant en relation avec leur place vis-à-vis du pouvoir contre lequel ils luttent.

Sans l’avoir lue, je conseille la thèse d’Alexia Morvan, souvent citée dans les milieux d’éducation populaire.

La conférence gesticulée de Hugo Fourcade est un entremêlement de témoignages et de théorie, qui montre, entre autres à travers l’histoire de l’Université Populaire de Bordeaux, là où peut mener la volonté de diffuser les savoirs librement.

Feu la SCOP Le Pavé a publié plusieurs petits cahiers, issus de processus d’éducation populaire. Ils incarnent donc magnifiquement leur propos. Celui sur La Participation offre témoignages, typologies, histoire, outils, réflexions incarnées… Il est un indispensable pour penser ce qui se passe dans n’importe quelle association.

Le Petit manuel de discussion politique part du constat que le fond des discussions politiques dépend beaucoup de la forme de celles-ci. Il questionne l’objectif de la discussion et son contexte, pour proposer différentes manières de l’organiser, toujours en cherchant à garantir de l’horizontalité, de la prise en compte de tous les points de vue, et d’engager des perspectives collectives à partir des propos tenus.

Enfin le Petit manuel critique d’éducation aux médias (qui ne parle pas un seul instant de fake news ou de théories du complot, quelle fraîcheur bienvenue !) alterne entre réflexions d’universitaires, récits d’associations œuvrant dans l’éducation aux médias, et pastiches de « fiches pratiques ». On y voit différentes manière d’éduquer aux médias « par le faire », en partant des pratiques réelles et des volontés des participant·es.

Dessin par Maja Visual au Camp Climat Grenoble 2020. Représentant la formation de Nicolas et Valentin sous une serre végétalisée

Esprit critique au Camp Climat

Depuis 2016, les Camps Climat rassemblent chaque été des militant·e·s dans le but d’accélérer les mobilisations face à l’urgence climatique et sociale. On s’y rencontre, on s’y forme, on s’y serre les coudes et on y chante (c’est important). Pour la troisième édition d’affilée, j’y ai proposé des formations autour de l’esprit critique. Pourquoi ? Comment ? Je fais un petit retour ici.

Le contexte

Il n’est peut-être pas nécessaire de rappeler ici que la situation climatique et environnementale actuelle est extrêmement préoccupante. Les activités humaines menacent les conditions de vie sur Terre de l’ensemble du vivant.

Cette situation et le défi qu’elle pose à l’humanité font appel – peut-être pour la première fois à une telle ampleur – à une vaste palette d’outils utilisés dans la pensée critique : méthode scientifique, communication, médias, cognition, mécanismes sociaux, éthique, sciences politiques…
Le grand défi pour l’humanité consiste à réagir suffisamment rapidement face à l’inertie au changement qui nous menace à toutes les échelles : cognitive, sociale, culturelle, médiatique, politique… Il nous semble alors qu’une bonne partie de ces enjeux réside dans notre manière de traiter l’information, de la produire, de l’interpréter, de la transmettre… d’où l’intérêt de la pensée critique dans cette tache-là.

Dessin par Maja Visual au Camp Climat Grenoble 2020 lors de notre première formation (à l’époque masquée)

C’est à partir de cette idée que nous avons décidé en 2020 avec Valentin Vinci de proposer une première formation au Camp Climat de Grenoble. Concrètement l’objectif était de fournir des outils de pensée critique aux participant·e·s afin de :

  • Comprendre l’inaction et les forces réactionnaires qui s’opposent au changement. Déconstruire les rhétoriques climato-négationnistes, analyser les discours médiatiques ou politiques, comprendre l’inertie sociale…
  • Comprendre les pièges qui pourraient nuire au militantisme écologiste. Les biais cognitifs et sociaux auxquels nous sommes sujets, les arguments fallacieux, les croyances pseudo-scientifiques… et comment il est possible de les contourner.

Ce double objectif – tourné à la fois vers l’extérieur et vers l’intérieur du mouvement – est resté une constante dans les différentes formations que l’on a proposées. Il est évidemment bien ambitieux et dépasse largement nos compétences. Mais c’est un cap que l’on s’est fixé.

Notons que, lors de cette édition, les organisateur·ice·s avaient pris le parti d’interdire tout support numérique pour les ateliers et de mettre l’accent sur l’éducation populaire. Un très chouette défi vers lequel on essaie toujours de tendre.

D’abord dubitatif sur la manière dont serait reçue notre formation, les retours se sont avérés plutôt positifs1 et demandeurs de ce genre de contenu.
De cette première expérience germa l’idée de publier un document reprenant ces idées (qui est enfin sorti !) et surtout l’envie de continuer ces formations.

L’année suivante c’est au Camp Climat de Toulouse que nous avons proposé une formation avec Jean-Lou Fourquet, journaliste et créateur du blog Après la bière. Encore une fois les retours ont été relativement positifs.

Le Petit manuel d’esprit critique pour le militantisme écologiste distribué gratuitement au Camp Climat de Toulouse 2022

Enfin, en 2022 j’ai participé pour la troisième fois au camp climat en proposant, accompagné de Lo Pimfloìd2 mon compère du Rasoir d’Oc’3, deux formations : « L’esprit critique pour le militantisme » et « L’argumentation pour le militantisme » que je présente dans la dernière partie. En plus de cela, j’y ai amené quelques exemplaires du Petit manuel d’esprit critique pour le militantisme écologiste (oui, celui que l’on avait imaginé après notre première formation).

Quelques conseils que l’on peut extraire de cette expérience

Avant de présenter les deux formations proposées cette année, quelques conseils généraux que l’on a pu dégager de cette petite expérience.

  • Ne pas oublier que l’esprit critique et la démarche scientifique ne sont pas une fin en soi, ils fournissent des outils qui permettent de mieux appréhender le monde et en l’occurrence le militantisme. Nous ne sommes pas là pour expliquer comment bien penser/lutter et faire la police de la raison, nous sommes au service d’une cause qui nous semble primordiale.
  • Éviter les sujets « chauds » : Parler de sujet comme le nucléaire, les OGM ou la spiritualité sur lesquelles les participant·e·s peuvent avoir un a priori fort risque d’être contre-productif. Dans la tradition de la technique de la spatule, il parait plus efficace de prendre pour exemple des sujets légers (au moins dans un premier temps).
  • Préférer une approche d’éducation populaire en partant de l’expérience des participant·e·s pour discuter puis synthétiser avec des apports théoriques. Plusieurs jeux/ateliers peuvent être utilisés dans ce cadre-là : Groupe d’Interview Mutuel, ateliers Jigsaw, débat mouvant, concours de mauvaise foi…
  • Certains éléments nous paraissent plus pertinent à transmettre, parmi lesquels : la démarche scientifique et des éléments d’épistémologie, l’argumentation, les risques de biais de raisonnement, le rôle des médias…

Formation « L’argumentation pour les militantisme »

Cliquer pour télécharger le document

Cette formation s’inspire en grande partie d’une formation aux arguments fallacieux déjà présentée ici sur notre site. Elle s’est déroulée en quatre partie [Diaporama] :

  1. Introduction à l’argumentation.
    En particulier on commence par parler d’argumentation formelle : une construction qui part de prémisses et qui aboutit à une conclusion. On précise ensuite que dans la vie de tous les jours, l’argumentation est bien plus informelle : certaines prémisses sont implicites et la construction n’est pas clairement exposée.
  2. Atelier Jigsaw (pour plus de détails voir ici).
    – Première étape : Les participant·e·s sont réparti·e·s en groupes de 4. Les membres du groupe reçoivent chacun·e une « fiche expert·e » différente et disposent de 5 minutes pour la lire. Les 4 fiches décrivent chacune trois arguments fallacieux différents. [Fiches]
    – Deuxième étape : Les groupes de départ se séparent et tous·te·s les expert·e·s ayant la même fiche se retrouvent. Iels discutent ensemble des arguments fallacieux, de ce qu’iels ont compris ou pas. Iels doivent également imaginer de nouveaux argument fallacieux à travers des petits exercices. Durée : 20 minutes.
    – Troisième étape : Chaque membre des groupes d’expert·e·s revient à son groupe d’origine fort de ses nouvelles connaissances. Tout le monde partage alors son expertise avec le reste du groupe. Chacun·e des 4 membres ayant découvert 3 arguments fallacieux sur sa fiche, le but est que tout le monde soit familier des 12 arguments fallacieux. Leurs connaissances communes leur seront utiles dans la prochaine partie ! Durée : 20 minutes.
  3. Concours de mauvaise foi
    À partir des connaissances accumulées dans la deuxième partie, chaque groupe va devoir construire un argumentaire moisie en utilisant les arguments fallacieux étudiés. J’ai proposé à chaque groupe deux sujets plus ou moins absurdes4 au choix et une liste de 5 arguments à placer.
    Chaque groupe travaille sur un texte et une petite mise en scène avant de venir le présenter devant tout le monde. Le but pour les autres est d’identifier les arguments fallacieux employés.
  4. Comprendre l’argumentation fallacieuse
    Après avoir bien manipulé ces notions, je propose une explication quant à l’origine de ces arguments fallacieux : ceux-ci ne sont pas simplement des erreurs faites au hasard dans un sens quelconque. Ils peuvent plutôt être vus comme des moyens rhétoriques pour aboutir à une conclusion préétablie. On introduit alors la notion de raisonnement motivé et de consonance cognitive via l’histoire de « l’échec d’une prophétie ».
  5. Améliorer son argumentation
    Partant du point de vue précédent, on établit qu’argumenter efficacement revient à rendre moins coûteux, pour notre interlocuteur·ice, de changer d’opinion que de persévérer dans son opinion pré-établie. Pour mettre cela en œuvre, on peut jouer sur différents éléments : le fond des arguments, la forme, le contexte de la discussion, l’affect…
    Sans apporter davantage de réponses, la formation se termine par une discussion sur les différentes méthodes qui peuvent être utilisées dans cet objectif. On a évoqué entre autres la maïeutique, l’entretien épistémique, la communication non violente…

/!\ On n’oubliera pas de rappeler au long de la formation les implications éthiques de l’argumentation : sur les questions de manipulation ou sur la détection des arguments fallacieux chez soi et chez les autres.

Formation « L’esprit critique pour le militantisme »

Cliquer pour accéder au diaporama

Pour cette formation, les participant·e·s sont d’abord invité·e·s à répondre à un petit questionnaire dont les réponses seront utilisées plus tard. Entre temps, un atelier Jigsaw est également mis en place. [Diaporama]

1. Questionnaire
Il y avait en réalité deux questionnaires légèrement différents distribués aléatoirement composé chacun de trois questions (en réalité quatre, mais la première ne servait qu’à brouiller les pistes). Il y avait une petite trentaine de personnes à l’atelier donc chacun des deux questionnaires a reçu autour de 14 réponses.
– La première avait pour objectif de mettre en avant le biais d’ancrage. Il s’agit d’une réplication d’une expérience faite par Strack et Mussweiler 5. Dans un premier temps, je demandais si « Malpolon monspessulanus« , le plus grand serpent des Pyrénées, était 1) plus grand que 30cm (1er groupe) ; 2) plus petit que 4m (2ème groupe).
Dans un second temps, je demandais à tout le monde d’estimer la taille de ce serpent.
– Dans la deuxième question, je demandais si iels pensaient que les publicités pour la viande seraient interdites 1) comme la cigarette et l’alcool (1er groupe) ; 2) sans exemple (2ème groupe).
– Dans la troisième question, je demandais si dans une forêt attaquée par un parasite, iels préféraient plutôt une nouvelle méthode très efficace avec des effets secondaires incertains ou ne rien faire 1) comme depuis 10 ans (groupe 1) ; sans précision sur la situation actuelle (groupe 2).
Les résultats arrivent plus tard.

2. Atelier Jigsaw : Les altérations de l’information
Ici, le but est de familiariser les participant·e·s avec les différents pièges qui menacent le traitement de l’information. On répète les trois étapes présentées dans la formation ci-dessus.
Les fiches expert·e·s, créées pour l’occasion (et probablement à améliorer), sont au nombre de 5 : Biais cognitifs, biais sociaux, biais mnésiques, pièges du langage, manipulations graphiques. On pourrait aisément en imaginer d’autres sur ce thème-là.

3. Résultat des questionnaires
Les résultats sont affichés plus bas.
Pour la première question, l’effet est relativement visible. Les personnes ayant été exposées à la plus petite référence donnent ensuite une réponse plus petite. Cela met en relief un biais d’ancrage : une information reçue préalablement influence notre jugement.
Pour la deuxième question, l’effet est moins évident, mais il semble que les personnes ayant un exemple similaire en tête ont plus de facilité à imaginer ce scenario. Il s’agit d’une sorte de biais de disponibilité, où notre jugement est influencé par les éléments qui nous sont cognitivement disponibles.
Pour la dernière question, aucun effet n’est clairement visible. Elle était censée mettre en avant l’effet de statu quo (préférence pour la situation actuelle).

4. Synthèse sur le traitement de l’information
À partir du résultat des questionnaires ainsi que des connaissances acquises lors de l’atelier Jigsaw, on essaie de dégager quelques généralités. On propose que, à différentes échelles et dans différentes mesures, le traitement de l’information par défaut consiste à privilégier ce qui existe déjà, à favoriser notre cohérence interne et sociale. On illustre cela avec des illusions d’optiques où notre interprétation est influencée par ce que l’on connaît déjà du monde. Enfin, on conclut avec ces mots de Bertrand Russell

La grande masse des croyances qui nous guident dans notre vie quotidienne sont tout bonnement une expression du désir, corrigées de-ci de-là, en des points isolés, par le rude choc de la réalité. 

Bertrand Russell, Essais sceptiques

5. Groupe d’Interview Mutuel
Ainsi, par défaut, le régime de traitement de l’information est celui de la confirmation. Mais, ce n’est pas toujours le cas : il existe des moments où notre opinion évolue, où l’on change d’avis. Dans cet atelier, les participant·e·s se sont mis·e·s par groupes de trois au sein desquels chacun·e devait évoquer un cas où son avis avait changé sur un sujet. Chaque groupe devait ensuite identifier des éléments qui avait fait perdurer sa croyance initiale de la personne et des éléments qui l’ont faite changer d’avis.

6. Quelques principes de l’esprit critique
On voit alors que face au régime de confirmation, il existe un autre régime de traitement de l’information permettant plus efficacement de produire de la connaissance robuste : le régime critique promouvant l’altérité, le doute, la prudence… Ceci est illustrée par l’histoire du voyage de Hécatée de Milet à Thèbes en Égypte.

Un grec, devant les statues égyptiennes qui contredisent spectaculairement son orgueilleuse vision du monde, a peut-être commencé  à penser que nos certitudes peuvent aussi être mises en doute.
C’est la rencontre avec l’altérité qui ouvre nos esprits, en ridiculisant nos préjugés.

Carlo Rovelli, La naissance de la pensée scientifique

On propose alors trois principes généraux allant dans ce régime critique : 1) Le doute initial ; 2) Penser l’alternative ; 3) Comparer méthodiquement les alternatives. Par manque de temps, cette partie n’a pas pu être développée.

6. Petit jeu et discussion
Arrivant à la fin de cette partie théorique nous avons fini par un petit jeu l’alternative est féconde. Le but est de trouver, pour chaque situation une explication/solution alternative à celle suggérée.

Enfin, nous avons fini par une discussion sur les liens entre pensée critique et militantisme, puisque ce dernier doit nécessairement se dégager d’un scepticisme trop pointilleux qui empêcherait toute action. Et ce, d’autant plus, dans la situation urgente que nous vivons.

Dessin par Maja Visual au Camp Climat Grenoble 2020 lors de notre première formation (à l’époque masquée)

Former l’esprit critique : ressources pour enseignant·e·s

Depuis juillet 2020, je participe à une rubrique consacrée à l’esprit critique dans la revue Sciences & Pseudosciences éditée par l’Association Française pour l’Information Scientifique (AFIS). J’y explore notamment les différentes facettes de la formation à l’esprit critique des enseignant·e·s ainsi que les questions en lien avec l’éducation à l’esprit critique. Vous trouverez ici l’ensemble des articles déjà publiés et mis en ligne par l’AFIS, ainsi qu’une présentation de ceux-ci, facilitant leur lecture et la compréhension générale de ce travail.

Pourquoi enseigner l’esprit critique ?

Dans ce premier article, je présente le cadre général de l’éducation à l’esprit critique, ses objectifs et enjeux, la définition de l’esprit critique et ses différentes dimensions. J’aborde également la question des formations à l’esprit critique pour les enseignant·e·s. En effet, si depuis 2015 celles-ci se développent fortement, certaines sont ancrées dans le travail du Cortecs et abordent spécifiquement la question de l’épistémologie, des démarches scientifiques, de la zététique et de l’autodéfense intellectuelle.

Former les enseignant·e·s à enseigner l’esprit critique

Dans ce deuxième article, je présente plus spécifiquement le contenu des formations à l’esprit critique pour les enseignant·e·s. En insistant d’abord sur le sens et les objectifs que l’on donne à ces formations, je reviens sur le juste équilibre à trouver entre un contenu ciblant des ressources pédagogiques à destination des enseignant·e·s et des activités permettant avant tout de former des individus. En effet, si l’on souhaite que soit transposée en classe cette éducation à l’esprit critique, il faut d’abord et avant tout que nos collègues s’approprient et trouvent un intérêt à aborder ces thématiques. Je présente également les différents « modules » que contient cette formation et décris rapidement un premier temps de « remue-méninges » pour travailler sur la délicate distinction entre science, croyances, connaissances et pseudosciences.

Croire et savoir

Cet article développe ce qui a été décrit à la fin du précédent : comment aborder la question de la distinction entre croyances et connaissances ? Comment, en tant qu’enseignant·e, s’y retrouver et être capable de poser clairement les choses face aux élèves ? J’y évoque quelques « astuces » et mises en œuvre pour travailler sur ce sujet : d’abord, en distinguant la capacité à remettre en question (ou pas) nos croyances et connaissances, puis en relevant les différences entre nos croyances (et connaissances individuelles) et les connaissances scientifiques. L’idée est de sortir d’une vision simpliste de la distinction entre croyances et connaissances, tout en donnant des moyens aux enseignants de répondre concrètement aux élèves sur ces questions.

La hiérarchie des niveaux de preuve

Pour continuer sur le lien entre épistémologie et esprit critique, cet article aborde la difficile tâche d’évaluer la fiabilité des preuves étayant une affirmation. En effet, parvenir à ajuster notre niveau de confiance face à une information passe par différents aspects, dont notamment notre capacité à savoir si les éléments fournis pour l’étayer sont suffisants. J’y présente d’abord ce qu’est une preuve puis j’y discute l’intérêt et les limites d’utiliser une échelle des niveaux de preuve, ainsi que les différentes manières d’aborder ces aspects au niveau pédagogique.

Bases théoriques et indications pratiques pour l’enseignement de l’esprit critique

Dans cet article, j’ai le plaisir d’interviewer Elena Pasquinelli, chercheuse, formatrice et membre du Conseil Scientifique de l’Éducation Nationale, ayant en charge les travaux du groupe n°8 consacré à l’esprit critique. Elle revient notamment sur la publication et contenu du rapport produit par ce groupe en 2021 et fournissant pour la première fois un corpus théorique et pratique pour l’enseignement de l’esprit critique. Cet article permet ainsi d’avoir un bon résumé du contenu du rapport qui, si l’on devait le résumer en une phrase, précise l’importance d’identifier certains critères opérationnels et concrets, permettant aux enseignants de savoir comment orienter efficacement leur cours dans l’objectif d’y incorporer des éléments propres à l’éducation à l’esprit critique.

Le niveau d’étude peut-il aggraver les préjugés ?

Une question souvent posée en lien avec l’esprit critique et son enseignement concerne le rôle des connaissances. Celui-ci est indéniable : l’esprit critique ne s’exerce pas à vide. Mais ces connaissances ne suffisent pas pour évaluer l’information et reconnaître si l’on est en face d’un contenu biaisé ou frauduleux. Parfois, elles peuvent même entretenir nos préjugés erronés. Dans cet article, je reviens sur les travaux conduits par différents chercheurs étudiant le lien entre le niveau de connaissances générales (ou même le niveau d’études) et les capacités cognitives ainsi que le niveau de croyances non fondées. Par exemple, certaines recherches suggèrent que, sur des sujets médiatiquement controversés ou très contestés (réchauffement climatique, théories de l’évolution, recherche sur les cellules souches), le niveau d’études, même s’il s’agit d’études scientifiques, est corrélé à un renforcement des préjugés idéologiques. Il ne fait qu’aider à confirmer les opinions préexistantes des individus, même lorsqu’elles sont fausses…

Une partie de l'excellente équipe de la médiathèque d'Aubagne et des services jeunesse et prévention

Ateliers Esprit critique et autodéfense intellectuelle

Une partie de l'excellent équipe de la médiathèque d'Aubagne

Depuis 2019, le Cortecs travaille avec la médiathèque d’Aubagne et les services jeunesse et prévention de la Mairie d’Aubagne pour élaborer et construire des ateliers sur la thématique de l’esprit critique et de l’autodéfense intellectuelle à destination des élèves des collèges et lycées de l’académie d’Aix-Marseille. Après plusieurs journées de formations, les animateurs sont intervenus régulièrement auprès des classes sur différentes thématiques. Ce travail a permis de repenser, actualiser, mais aussi de créer des ateliers permettant d’aborder des « classiques » de la zététique : effet Barnum, principe de parcimonie, échelle des preuves ou coïncidences, autant de sujets que les élèves ont pu découvrir grâce à toute l’équipe qui partage aujourd’hui ses productions et ressources avec nous. Un grand merci et surtout bravo à eux pour tout cela !

Présentation du projet

Objectifs, compétences travaillées, organisation des séances : ce document présente le projet dans son ensemble.

Description des ateliers

Vous trouverez ci-dessous les différents ateliers proposés ainsi que tous les contenus utilisés et que toute l’équipe partage avec plaisir. Le dossier complet est ici. Merci à eux !

Jouer à débattre

Jouer à débattre (atelier créé par L’arbre des connaissances). Le thème choisi a été l’humain augmenté. Le but étant d’amener les élèves à argumenter et à prendre conscience de la complexité insoupçonnée des sujets de société.

Atelier philo

S’exercer à réfléchir, apprendre à discuter, écouter, raisonner et respecter l’autre avec cet atelier philo.

Fake news

Cet atelier correspond à l’atelier « Le vrai du faux » (créé par le CRIJ). L’objectif est d’appréhender la complexité à évaluer la fiabilité des informations et de se poser les bonnes questions pour y parvenir.

Test de personnalité : l’effet Barnum

Un « classique » de la zététique où l’on va reproduire l’expérience de Bertram Forer sur l’effet qui porte son nom (mais aussi celui d’effet Barnum) : un atelier mettant en scène un faux test de personnalité à évaluer par les élèves. Vous retrouverez dans ce dossier les fiches, vidéos et autres documents utilisées pour mener à bien cet atelier.

Principe de parcimonie et rasoir d’Occam

Comment travailler sur le principe de parcimonie avec les élèves ? Comment faire découvrir cet outil de tri des hypothèses et ses limites ? Le dossier avec tous les éléments se trouve ici !

Échelle des preuves et curseur de confiance

Un atelier repris de l’activité proposée dans l’excellent ouvrage publié par nos collègues de La main à la pâte, et qui permet de travailler avec les élèves sur la notion de preuves et de confiance. Tout le dossier est à retrouver ici.

Coïncidences…

Un atelier sur la notion de coïncidences : y a-t-il forcément un sens à donner à ces conjonctions d’événements intrigants et qui nous paraissent si étranges…? Le dossier complet ici !

Bilan

Voici quelques retours concernant les ateliers

Au niveau de l’enchainement des ateliers, commencer par Jouer à débattre permet de créer une bonne relation avec les élèves qui se retrouvent dans une situation de jeu qui les change de leur quotidien. L’atelier sur les fake news comme les suivants sont un peu plus scolaires, contenant plus d’explications (un peu plus descendant) : les élèves sont mis en activité, mais cela demande toujours une implication de leur part qui dépend bien entendu de beaucoup de paramètres.

On a pu remarquer que les ateliers Jouer à débattre, effet Barnum et rasoir d’Occam ont très bien fonctionné : le mélange entre travail de groupe, débat et effet de surprise motive toujours les élèves et retient leur attention.

Concernant l’atelier sur l’effet Barnum, il faut bien penser à faire attention aux contacts possibles entre élèves pour éviter qu’ils comprennent le truc.

L’atelier sur l’échelle des preuves est aussi à améliorer sur la manière de l’animer : nous proposons d’y ajouter davantage de moments d’interactions variées.

Loïc Massaïa, imperturbable mais toujours pertinent !

Un merci très spécial à Loïc Massaïa pour le soutien, l’expertise et l’aide apportée tout au long de ces ateliers, mais également pour le partage des documents !

Physique-chimie, esprit critique et EMI

Julien Machet est professeur de Physique-Chimie dans l’académie de Lyon, et exerce au collège Saint André de Corcy. Il est également membre du Groupe de ressources académique « Esprit critique ». Julien a déjà publié son travail sur le tri de l’information (voir ici) et il nous propose à présent de partager une séquence entière, à destination des élèves de 5ᵉ, et qui vise à comprendre comment la médiatisation de contenus scientifiques, notamment sur les notions de risque et de danger, peut servir l’enseignement de savoirs disciplinaires (ici, l’électricité et la chimie). Bravo et merci (encore) à lui pour ce travail précieux !

Présentation rapide

La séquence abordée ici mélange des objectifs de transmission de savoirs disciplinaires d’électricité et de chimie avec des objectifs propres à l’enseignement de l’esprit critique et de l’éducation aux médias et à l’information. Elle est enseignée en classe de 5e.

Déroulé des activités et descriptifs des objectifs (cliquer sur l’image pour voir tout le document)

Lever la confusion entre danger et risque est présenté ici comme un véritable objectif, en soi, de l’enseignement de l’esprit critique. En effet, de nombreux débats de société liés aux questions de santé sont perturbés par les confusions communes entre l’existence d’un danger avéré et l’évaluation d’un risque (fort ou faible) et par la non-priorisation de traitement des risques forts face aux risques faibles.

Positionnement dans une progression pédagogique

Ce chapitre s’intitule, pour les élèves de 5e concernés : « Les scientifiques parlent au grand public ; exemple des dangers et des risques en physique chimie », il est inclus dans un thème intitulé « Communiquer en science » et répond à un autre chapitre centré sur un exemple de langage « de spécialistes » lui-même intitulé « Les scientifiques parlent aux scientifiques ; exemple de la schématisation en électricité ».

Documents à télécharger

Julien met à disposition l’ensemble de ses documents utilisés pour cette séquence, en format modifiable et pdf.

  • Le document de présentation de toute la séquence :

Pour tout contact : julien.machet-at-ac-lyon.fr

Tri de l'information et enseignement de l'esprit critique : une carte pour s'y retrouver

Julien Machet est professeur de Sciences Physiques et Chimiques dans l’académie de Lyon. Travaillant en collaboration avec le CORTECS et notamment notre collègue Denis Caroti depuis plusieurs années, il forme également les enseignants sur la thématique « Analyse de l’information et esprit critique ». Par ailleurs, il développe dans ses cours un enseignement de l’esprit critique incorporé à ses contenus disciplinaires. Julien a ainsi créé une carte conceptuelle à destination des élèves (et des enseignants), permettant de visualiser rapidement les outils méthodologiques d’analyse de l’information. Il nous présente ici la genèse de cette carte, ses objectifs ainsi que son contenu et ses réflexions sur ce sujet. Bien entendu, cet outil mérite d’être encore amélioré et adapté, mais c’est une base utile, fruit d’essais et erreurs fertiles. Bravo et merci à lui pour ce travail précieux !

Mise à jour (avril 2021)

Les cartes méthodologiques d’analyse de l’information ont été mises à jour et sont téléchargeables en format modifiable (voir dernière partie Enseigner l’esprit critique)

Objectifs

Deux grilles de lecture, sur deux plans différents : analyse de l’information et construction des connaissances & enseignement de l’esprit critique

  • Premièrement, cette carte présente différents axes de questionnement permettant de se positionner (ou non) face à une information, quelle qu’elle soit. De plus, elle permet de présenter en quoi la construction méthodologique et collective du savoir en sciences doit prendre en compte ces axes d’analyse de l’information, et les risques spécifiques qui y sont associés.
  • Deuxièmement, elle peut permettre à l’enseignant d’expliciter aux élèves en quoi les activités faites en classe permettent de se donner des outils de tri de l’information, de construction du savoir. Elle peut donc servir de base à la conception d’un enseignement de l’esprit critique à travers des enseignements disciplinaires classiques.

J’évoquerai donc ces différentes utilisations de la carte et j’en donnerai ensuite une version pour les élèves.
Précaution : j’utilise ici une définition large du mot information, je n’ai pas choisi de circonscrire ce mot à un fait vérifié qui intéresse un grand nombre de personnes comme cela est fait, par exemple, sur l’activité «  Qu’est-ce qu’une info ?  » publiée sur le site du CLEMI. Ainsi analyser une information signifie ici analyser une donnée, une affirmation qui nous parvient, quelle que soit sa forme.

Introduction

Cette carte conceptuelle (ou gros schéma…) à destination des enseignants intéressés par le tri de l’information et son enseignement est née d’un échange avec ma collègue Cécile Dussine (Sciences Physiques) qui a créé une activité d’introduction aux cours de sciences physiques en 6ème. Une version de cette activité devrait être publiée en 2019 dans l’ouvrage «  Développer l’Esprit critique : Outils et méthodes », aux éditions CANOPÉ, mais je vais en décrire les principales étapes sans entrer dans le détail.

  • Le professeur donne tout d’abord aux élèves deux résumés de deux textes issus de sites web existants. L’un porte une information vraie (validée par un consensus scientifique), l’autre une information erronée (sans que l’on sache si c’est intentionnellement ou non).
  • Les élèves sont ensuite amenés à se positionner face à ces affirmations. Le professeur met en lumière les désaccords au sein de la classe : certains élèves doutent du contenu de ces textes
  • Le professeur apporte ensuite une information dérangeante : un des deux textes donne une information erronée ! Plusieurs questions se posent alors :

Lequel est faux ? Comment faire pour le savoir ? Quelle(s) méthode(s) appliquer ?

  • S’ensuit la distribution des documents complets ainsi que leur étude selon différents axes. On demande alors aux élèves de se positionner à nouveau, de manière bien plus argumentée, cette analyse conduisant à un avis quasi-unanime sur le contenu des deux textes.

La carte suivante est donc née de cette dernière question (Quelle(s) méthodes appliquer ?) et de la volonté de clarifier et d’organiser les réponses possibles pour moi, pour les enseignants mais aussi pour les élèves.

CorteX_Carte_Analyse_information_Méthodologie_Enseignants
Carte méthodologique : analyse de l’information pour enseignants, par Julien Machet

Première utilisation : ANALYSER une information ou une affirmation : des axes de questionnement

Question préalable : a-t-on bien compris quelle était cette information ?

Pour cela un bon exercice est de voir si on arrive à résumer l’information en une phrase ou deux. Attention à ne pas se fier au titre (s’il y en a un) : il ne constitue pas forcément un résumé fiable.

Premier axe d’analyse : ÉTUDE DU CADRE

  • Une information nous arrive dans un cadre donné, qu’on le veuille ou non : elle n’arrive de facto pas seule. Elle ne peut être isolée de son contexte présent et de ce que l’on sait déjà. J’entends par cadre tout d’abord le cadre médiatique. On peut ainsi penser qu’une information aura un impact ou une réception différente si elle nous parvient en période électorale ou non, si elle suit ou en précède une autre, si elle est très médiatisée ou non. Je distingue ici le cadre médiatique de la source de l’information, qui mérite un travail approfondi en soi.
  • Lien avec nos connaissances initiales : une information vient s’imbriquer plus ou moins bien avec l’ensemble de nos connaissances actuelles. Il est donc intéressant de se demander si cette information remet en question des savoirs que l’on a déjà considéré comme acquis, et si elle remet en question des actes ou des choix que nous avons faits ? On pense évidemment à éviter le plus possible le biais de confirmation dont nous sommes toutes et tous victimes.
  • J’ai également placé sous cet axe de l’étude du cadre, un grand point un peu fourre-tout intégrant les liens personnels ou relationnels, sans se limiter aux relations affectives, et que l’on peut avoir avec la source de cette information, son auteur, avec le cadre en général ou encore avec la thématique, le sujet de l’information. En effet, avant même de savoir ce qui est dit, il faudrait avoir conscience de notre état émotionnel et affectif, et de ses effets sur le jugement que l’on porte sur l’information reçue. Ne sommes-nous pas déjà un peu d’accord ou pas avec le contenu de l’information avant même d’avoir lu son contenu, du simple fait du cadre médiatique ? Avoir en tête que notre avis va dépendre en partie de notre « proximité » idéologique avec le média qui transmet l’information est déjà un pas de côté nécessaire pour analyser celle-ci. À noter que ce lien au cadre n’est pas forcément un lien affectif et qu’il peut aussi être une confiance que l’on accorde à un cadre donné : si je choisis d’aller suivre un cours dans telle université réputée, il peut être efficace d’accorder au départ du crédit à ce qui va être dit.
  • Cas particulier d’une information reçue « à l’école » : l’étude du cadre scolaire et du cadre de la classe en particulier me semble un axe de travail inévitable. En effet, donner aux élèves un texte contenant une information fausse, ou simplement une information dont la fiabilité doit être étudiée est un acte qui bouscule le cadre « de ce qui se fait en classe » (au moins aux yeux des élèves). De plus, le professeur peut se sentir en difficulté, ou peut estimer prendre des risques, en incitant les élèves à adopter un regard critique sur l’information reçue. En effet il est possible, et souhaitable, que l’élève continue à avoir ce regard critique après l’activité … Notre cours passera-t-il l’examen de ce regard ? Et celui d’un autre collègue ? Avons-nous, en tant qu’enseignant·e, le temps et l’envie de tout justifier ? En sommes-nous capables ? Est-ce souhaitable ?
    Il convient donc à mes yeux d’utiliser simplement la grille d’analyse de la pensée critique pour améliorer et transformer nos cours (évidemment) mais aussi pour apprendre à justifier, à légitimer la confiance que les élèves peuvent avoir dans le contenu des enseignements (cf. conclusion de l’article). Si la parole donnée par l’enseignant·e n’est pas égale à celle de l’élève en ce qui concerne l’expression de faits scientifiques, c’est qu’elle se fait l’écho d’une démarche de construction des savoirs, démarche collective, exigeante et régulée.  La confiance que peut avoir l’élève est donc raisonnée et raisonnable. A ce titre, on est loin du registre de l’obéissance aveugle ou de la révélation.
    La démarche de construction de la connaissance est une démarche où seules la validité des preuves et la pertinence des arguments sont censées entrer en compte. Par conséquent, travailler et expliciter cette démarche en classe c’est aussi installer un cadre collectif où l’humilité, l’honnêteté, l’exigence et la bienveillance sont des valeurs qui guident les propos tenus et les relations humaines. Il faut donc jongler entre, d’une part le fait d’apprendre à être dans un cadre collectif, où chacun se doit d’être à l’écoute et respectueux de la parole de chacun (et cela ne se fait pas spontanément), et d’autre part le fait que l’enseignant·e « fasse autorité » dans la transmission du savoir.
    Au delà de l’équilibre que chacun doit trouver, au delà des évolutions nécessaires de notre système éducatif, il apparaît indispensable que l’élève puisse faire la différence entre un argument imposé via un biais d’autorité, et la parole d’un consensus d’expert·e·s dont on peut accepter raisonnablement qu’il fasse autorité. La limite est souvent subtile, mais les situations où les mécanismes de dominations et les positions d’autorités sont utilisées pour simplement clore la réflexion ou la discussion sont, elles, monnaies courantes.
    Il serait dommage que l’école soit un lieu où l’enfant prenne l’habitude de subir et d’arrêter de réfléchir… Travailler sur le cadre de la classe et la démocratie scolaire est certainement un point indispensable d’un réel enseignement de l’esprit critique. Vaste chantier !

Deuxième axe d’analyse : ÉTUDE DE L’ENJEU

Si cette information est vraie ou fausse, qu’est-ce que ça change pour moi, pour mes proches ou pour le monde en général ? Le principe journalistique de la loi de proximité, permet de relativiser, si cela était nécessaire, le fait que l’on juge spontanément et correctement l’enjeu d’une information. Si l’on ajoute à cela la complexité de notre monde et de son fonctionnement, il peut être très difficile de cerner l’enjeu (ou l’importance) de certaines informations. À noter tout de même que l’on peut émettre l’hypothèse suivante à peu de frais : plus on connait et on comprend notre monde, plus on est à même d’évaluer correctement l’enjeu d’une information.
Ainsi, de façon plus ou moins consciente, nous évaluons certainement l’enjeu (et donc l’intérêt) de l’information reçue : si celui-ci nous semble suffisamment faible, alors il est fort probable que nous n’en fassions pas une analyse poussée. Étant donné le nombre d’informations qui nous parvient chaque jour, il serait bien entendu utopique de s’interroger sur chacun d’entre elles, ce mode de fonctionnement (le tri par intérêt) est donc assez habituel. Pour autant, il est nécessaire d’en avoir conscience : nous laissons bien souvent de côté l’analyse d’informations que nous jugeons sans intérêt.
Par contre si l’enjeu est grand, si cette information nous parait importante, si l’affirmation n’est pas ordinaire alors nous devrions pousser plus loin notre analyse. Ceci fait écho à la maxime de Hume souvent résumée en zététique par « une affirmation extraordinaire nécessite des preuves plus qu’ordinaires ».
Dans notre vie quotidienne nous ne passons souvent pas le cap d’une analyse grossière et plus ou moins consciente du CADRE et de l’ENJEU. Il est probable que nous décidions à ce stade, la plupart du temps, de prendre en compte ou non une information. Or il faudrait, par souci « d’hygiène mentale », réaliser ces deux analyses plus finement et, si l’enjeu potentiel est important, décider alors de pousser l’analyse plus loin avant de se positionner ! Et dans ce cas, la suspension du jugement chère aux sceptiques ne devrait-elle pas être que provisoire ? C’est pourquoi même si je ne vois pas d’ordre chronologique évident selon lequel on devrait appliquer ces différents axes d’analyse, commencer par travailler à conscientiser ces deux là me semble un préalable tout à fait raisonnable et justifié.

Troisième axe d’analyse : Étude de LA SOURCE

Je ne m’étendrai pas sur le sujet, non pas qu’il ne soit pas important, mais il est très souvent traité quand on parle d’analyse de l’information. On peut facilement trouver des méthodes sur ce sujet. Par exemple le 3QPOC pour les sites internet. Il faut évidemment penser à vérifier si l’on peut recouper l’information, trouver d’autres sources (à évaluer également) qui disent la même chose.

Quatrième axe d’analyse : Étude de la FORME

On devrait dire étude des formes, car derrière chaque format de communication (texte écrit, discours oral, image, graphique et tableau, graphisme et mise en page, vidéos, etc.) se cachent des règles de langage, des registres, des styles, des codes culturels explicites ou implicites, des sous-entendus  et parfois des moyens de manipuler le futur récepteur de l’information ! L’étude de la FORME du support de l’information, des langages utilisés et de leur réception est évidemment une source infinie de créativité et d’analyse critique. Quelques exemples d’outils permettant de décrypter cela : effet puits, effet Impactimages mensongères, cadrage en photo, graphiques. On ne manquera pas d’ailleurs de noter que l’étude succincte de la forme de la carte donne quelques indices sur les talents graphico-informatiques de l’auteur de ses lignes. Ce qui n’arrêtera cependant pas le lecteur perspicace parcourant ces lignes…

Cinquième axe d’analyse : Étude du FOND, du propos, du sens

Je décompose ici l’étude du FOND en trois points :

  • L’étude du sens des mots utilisés, des concepts manipulés : sommes-nous d’accord sur leur définition ? Sur leur connotation ? Sont-ils utilisés de façon rigoureuse ? Les concepts manipulés sont-ils sortis abusivement de leur champ disciplinaire ?
  • L’étude des preuves, des références : à quoi se réfère l’affirmation ? Quelles sont les preuves explicites ou sous-jacentes qui viennent appuyer cette information ? Pour cela il est utile de se référer à l’échelle du niveau de preuve en science, illustrée avec talent ici.
  • L’étude des raisonnements, la logique : une fois les mots et les preuves posés, comment sont-elles ou sont-ils mis en rapport ? Comment les arguments sont-ils construits ? À noter que dans le Petit recueil de 25 moisissures argumentatives, on dénombre 5 erreurs classiques de logique « pure » (biais de généralisation, raisonnement panglossien, etc). De manière plus générale, la liste des biais cognitifs qui nous poussent à penser que quelque chose de faux est vraisemblable est très longue, voir par exemple ce codex fait en 2016 et résumant ceux-ci.

Ces axes d’analyse nous permettent de nous positionner de façon argumentée sur la vraisemblance de l’information reçue. Afin de mieux visualiser une échelle allant de l’information assurément fausse à l’information assurément vraie en passant par plusieurs niveaux de doute plus ou moins favorable à l’information, on peut utiliser une sorte de « curseur de vraisemblance » (l’original par Henri Broch ici) comme proposé sur la carte. L’important à mes yeux est de pouvoir se positionner de façon argumentée, et ce, en invoquant des résultats, plus ou moins poussés, des études précédentes sans forcément avoir étudié en détail tous les axes d’analyse !
Exemples de positionnement :

  • La source me semble fiable (auteur connu et respecté qui s’exprime sur son sujet) mais la forme est un peu bizarre (le graphique n’a pas d’axes clairs), et sur le fond il y a un mot qui me semble mal utilisé. Je trouve l’info plutôt fiable, au niveau 4/5.
  • L’enjeu est faible et j’ai plutôt confiance dans l’auteur (qui a écrit tel livre que je juge très bon): je vais considérer ça comme fiable : 3/5
  • Cette affirmation est en contradiction totale avec ce que je sais de la physique de base : information pas du tout fiable : 0/5.

En effet, au-delà de l’outil d’analyse individuelle, pouvoir se positionner de façon argumentée c’est pouvoir exposer sa pensée aux critiques (que l’on espère argumentées et bienveillantes) d’autres personnes, c’est donc pouvoir débattre de façon raisonnée et se laisser la possibilité de construire progressivement un avis plus construit, mieux argumenté et évitant ainsi d’autres erreurs de positionnement.
On peut également décider de suspendre son jugement, d’estimer que l’on n’a pas assez d’éléments pour se positionner, ou que les critères d’évaluation sont contradictoires. En cas de doute ou de suspension du jugement, si l’enjeu est important : il faudrait certainement entreprendre de se renseigner davantage sur le sujet.
On peut aussi dire qu’une information jugée fiable devient une nouvelle connaissance à condition d’avoir appliqué scrupuleusement tous les axes et les biais associés : la validation du savoir en science est une démarche collective, méthodique et exigeante. Apprendre à analyser une information c’est donc aussi se donner des outils méthodologique dont les principes sont les mêmes que ceux d’un chercheur.

Seconde utilisation : ENSEIGNER l’esprit critique. Expliciter les outils méthodologiques sous-jacents

Lors de l’activité menée en 6ème et évoquée en début de présentation, seuls trois axes d’analyse sont présentés aux élèves : la source, le sens des mots et les preuves. Les trois analyses convergent toutes dans le même sens mais c’est surtout l’étude du sens des mots qui nous permet de trancher, car le texte contenant de fausse informations utilise abusivement des concepts scientifiques de base.
Une fois la partie analyse de l’activité terminée, plusieurs points sont abordés en conclusion et apparaissent en général comme évidents pour élèves :

  • Se mettre d’accord sur le sens des mots est indispensable.
  • Il faut analyser la source d’une information.
  • Il va falloir déterminer quand une preuve est fiable ou non.

Et ce afin d’acquérir des savoir-faire, des techniques permettant de mieux trier l’information, de « ne pas se faire avoir ».
Ainsi, à chaque fois que de nouveaux mots de vocabulaire seront introduits, il sera pertinent de faire ressentir aux élèves (via la construction didactique de l’activité) l’aspect nécessaire de ces mots. Ceux qui ont plusieurs sens, ou dont le sens change en fonction du cadre (poids/masse par exemple) seront également présentés en lien avec cette activité introductive.
Pour le travail sur les sources, j’essaie de m’astreindre à deux règles en cours de sciences physiques :

  • Toujours citer la source, toujours évaluer sa fiabilité (même en se contentant souvent de : fiabilité du document selon le professeur : très bonne)
  • Donner parfois des documents aux sources douteuses et aux informations partiellement erronées.

Pour le travail sur les preuves, apprendre à évaluer une preuve et à construire des preuves via l’expérimentation est un travail continu en cours de sciences physiques.
En rajoutant l’étude de la FORME, des langages, j’obtiens une version de carte destinée à être collée dans les cahiers (l’utilité de ce document dans leur cahier est inconnue à ce jour) et surtout à être affichée en classe de manière à pouvoir s’y référer fréquemment en cours. Voici la version élève de cette carte :

Carte méthodologique : analyse de l’information pour les élèves par Julien Machet

J’ai choisi de ne pas détailler ici le CADRE et l’ENJEU mais de les laisser pour pouvoir m’y référer plus facilement, à l’oral, au besoin.

Une autre carte, destinée à rappeler les différentes postures à adopter face à l’information est, elle, affichée en classe

Carte méthodologique : analyse de l’information pour les élèves par Julien Machet (affiche)

Ces deux cartes sont à télécharger en version modifiable (ppt) ou pdf.

De la même manière, deux autres affiches sont présentes dans la classe : le curseur de vraisemblance (visible au centre de la carte) et l’échelle de la preuve en sciences.  Cette dernière affiche est très pratique pour aider à prendre l’habitude de distinguer une simple opinion d’une connaissance construite. De plus, par exemple, lors d’une démarche expérimentale si l’élève énonce une hypothèse ou une conclusion il peut dans les deux cas se positionner de façon argumentée sur le curseur de vraisemblance. L’expérimentation méthodique permet d’apporter (potentiellement) pour la conclusion une preuve plus solide que la simple opinion de départ.
Cette carte, comme la précédente, n’a pas la prétention de présenter une liste exhaustive. Il serait sûrement intéressant qu’elle soit déclinée à ce niveau de simplification (au minimum) dans toutes les matières.
Ce qui m’intéresse en produisant cette carte pour les élèves est d’essayer ainsi :

  1. de montrer que les savoirs, savoir-faire et savoir-être (en collectif) sont utiles voire absolument nécessaires pour trier correctement les informations ;
  2. de développer ainsi des attitudes, des savoir-faire et quelques savoirs propres à l’esprit critique ;
  3. de rendre explicite la méthodologie de la construction de connaissance en science dans l’enseignement des contenus habituels et surtout de justifier l’exigence d’honnêteté intrinsèque à cette méthodologie ;
  4. de tenter de faire toucher du doigt la montagne de travail rigoureux qui a été abattue avant nous et qui nous permet d’avoir toute cette connaissance à disposition. Et de les inciter à savoir également faire confiance de façon raisonnable et justifiée dans les connaissances enseignées.

Je développerai la manière d’intégrer ces différents axes d’analyses dans mes cours dans un prochain article.
Ces cartes et ces réflexions sont amenées à être modifiées et améliorées. N’hésitez pas à me contacter à ce sujet.

Julien Machet : julien_machet@hotmail.com

Conférence Esprit critique et sciences ( Lycée Fourcade – D.Caroti) : quelques extraits

Dans le cadre d’une conférence donnée en novembre 2019 au lycée Marie Madeleine Fourcade de Gardanne, notre collègue Denis Caroti avait été filmé… Mais l’enregistrement n’ayant pas les qualités attendues, nous lui avons demandé de publier certains extraits de celle-ci, en mode diaporama commenté, extraits que nous publions à présent. Cette conférence, organisée par Véronique Bianchi pour la « cafèt des sciences », était à destination des élèves et des enseignants et personnels présents. Merci à ces derniers pour leur accueil chaleureux en coulisse ainsi que pour toute l’attention des élèves pendant cette intervention.

Esprit critique ?

Cette première « pastille » présente ce que l’on peut entendre par esprit critique en lien avec l’enquête et l’analyse de l’information : qu’est-ce que l’esprit critique et pourquoi s’en inquiéter ?

Quelques références pour aller plus loin :

Évaluer les preuves

Dans cette vidéo, après avoir défini la notion de preuve, on présente l’échelle des preuves ainsi que les différents sens du mot science, l’importance de préciser les types de registres qui s’entremêlent dans un débat ainsi que les limites et forces de la science en tant que démarche d’enquête et ensemble de connaissances.

Quelques références pour aller plus loin :

Prendre conscience de la limite de nos sens

Dans la vidéo suivante, on aborde la question de la faillibilité de nos sens à travers quelques exemples d’illusions d’optique classiques : l’objectif n’est pas de faire douter systématiquement de nos sens mais plutôt de faire comprendre qu’ils ne sont pas infaillibles : si l’on souhaite gagner en fiabilité, il sera alors utile (et rationnel) d’avoir recours à des preuves plus solides que notre seule expérience personnelle.

Pour aller plus loin :

  • Doit-on encore présenter le délectable cours en ligne de notre collègue et Cortexien de la première heure Richard Monvoisin qui aborde de nombreux exemples sur la limite de nos sens ?

Comment évaluer un témoignage ?

Dans cette partie, il est question d’apprendre à placer son curseur de vraisemblance en fonction du contenu du témoignage que l’on reçoit : toutes choses égales par ailleurs, plus une affirmation sort de l’ordinaire et des connaissances que l’on a, plus on doit exiger des preuves solides soutenant celle-ci. C’est, entre autre, ce que le philosophe David Hume relevait déjà il y a trois siècles dans son Enquête sur l’entendement humain mais aussi Laplace quelques années plus tard en écrivant : « De ce qui précède, nous devons généralement conclure que plus un fait est extraordinaire, plus il a besoin d’être appuyé de fortes preuves ; car, ceux qui l’attestent pouvant ou tromper ou avoir été trompés, ces deux causes sont d’autant plus probables que la réalité du fait l’est moins en elle-même. » (Théorie analytique des probabilités, 2e édition, 1812, p.17)

L’effet cigogne (ou comment ne pas confondre corrélation et causalité)

Dans cette vidéo, on aborde la fameuse confusion corrélation-causalité, que notre collègue Henri Broch a nommé « Effet cigogne » il y a déjà plusieurs années : un lien statistique entre deux variables (corrélation) n’implique pas forcément un lien de causalité entre celles-ci… Attention, la conclusion sur l’établissement du lien causal n’est pas l’objet de cette vidéo : pour en savoir davantage, voir les références ci-dessous.

Pour aller plus loin :

Effet paillasson et impostures intellectuelles

Dans cette dernière vidéo, on présente ce qu’a nommé Henri Broch « l’effet paillasson » ainsi que les dérives qui y sont liées, notamment en termes d’impostures intellectuelles dans le champ du soin (avec le recours au verbiage pseudoscientifique).

Pour aller plus loin :

Activités Esprit critique et sciences au lycée et collège

Florian Stocker est professeur de Sciences de la Vie et de la Terre (SVT) dans l’académie de Grenoble. Il fait partie de ces collègues que nous avons eu la chance de rencontrer lors de nos formations pour enseignants et qui travaillent en toute discrétion (mais en toute efficacité) dans leurs classes pour développer l’esprit critique de leurs élèves à travers les cours de sciences. L’occasion pour nous de partager les activités qu’il a mises en place ces dernières années : des bases de la démarche scientifique en passant par la toxicologie ou la théorie de l’évolution, les cours de SVT sont l’occasion d’incruster des contenus critiques, la preuve s’il en fallait que « faire le programme » et éduquer à l’esprit critique est non seulement possible mais souhaitable. Merci et bravo à lui !

Voici les différentes activités proposées par Florian. Le titre, l’introduction et les objectifs présentent chacune d’entre elles. Des liens permettent de récupérer les différents documents utilisés.

Introduction à la démarche scientifique

Cette séance peut être réalisée en enseignement commun de 1ère ou de Terminale, sur un temps de 2h.

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Le programme insiste en effet sur la nécessité de former les élèves à la démarche scientifique et de son rôle fondamental dans la compréhension du monde.
Consacrer une séance entière pour parler sérieusement du concept de science peut être un plus.

Objectifs

Cette activité a pour buts :

  • d’apprendre à distinguer opinion, croyance, fait scientifique, science ;
  • de prendre conscience de l’existence de biais cognitifs ;
  • d’apprendre à hiérarchiser les preuves (expérience, étude, témoignage, etc…) ;
  • de comprendre que le travail du scientifique est de lutter contre (ou de valider) des idées préconçues et des préjugés à l’aide d’une démarche rigoureuse.

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Les dinosaures ont-ils existé ?

Cette activité peut être réalisée lors du cycle 3 au collège lors de l’étude des classifications des êtres vivants par groupes emboîtés, ou lors du cycle 4 lorsqu’on reparle d’évolution.

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Lorsqu’on enseigne des dans des milieux défavorisés, ces thématiques sont souvent très étrangères aux élèves qui présentent très spontanément une vision « fixiste », qu’elle soit guidée ou non par un milieu culturel spécifique. Très souvent, on se retrouve confronté à des élèves pour qui un dinosaure est plus une marque comme le seraient les Pokémon et autres franchises commerciales…
Comment se débrouiller quand un quart d’une classe vous affirme : « bien sûr que non, les dinosaures n’existent pas ! » ?

Objectifs

Cette activité a pour buts :

  • d’établir pour les élèves l’idée que notre point de vue peut évoluer sur un sujet en fonction des preuves apportées (curseur de vraisemblance…) ;
  • d’amener les élèves à comprendre qu’une posture d’esprit où on ne change jamais d’avis n’est pas rationnelle et peu efficace pour comprendre le monde qui nous entoure ;
  • de confronter les élèves à de vrais fossiles (et de faux éventuellement) ;
  • de déterminer quelles hypothèses sont nécessaires pour admettre l’existence de dinosaures.

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S’informer sur les méthodes de contraception naturelles et sur la pilule contraceptive

Cette activité peut être réalisée lors du cycle 4 au collège.
Elle peut s’inscrire dans les programmes de SVT à la fin de la partie sur le fonctionnement des organes reproducteurs ou après avoir étudié le rôle des hormones dans le contrôle du cycle menstruel.
Elle se divise en deux parties, qui occupent 2h entières :

  • Une première où les élèves travaillent en binômes sur à partir de sites internet
  • Une seconde où on met en commun les informations prélevées sur les sites, puis on établit une conclusion sur les critères de fiabilité de l’information et de présentation de la démarche scientifique
    Cette séance a été mise en place en salle informatique en collaboration avec la documentaliste de notre collège ; nous avons ainsi pu faire coanimation et mieux aider les élèves au travail, ainsi que nous répartir les phases magistrales en fonction de nos compétences respectives : correction et repérage des informations pertinentes sur les sites pour la documentaliste, et conclusion sur la démarche scientifique pour moi-même.
    Il existe deux versions de cette séance, une plutôt orientée pilule (plus simple d’accès) et un plutôt pilule vs méthodes naturelles (plus difficile d’accès).

Objectifs

Cette activité a pour buts :

  • d’apprendre à discerner les informations pertinentes de fond (arguments utilisés, sources…) et de forme (auteur, style, expression, volume…) qui permettent de juger du degré de confiance à accorder à un site internet ;
  • de s’informer des avantages et inconvénients de la pilule contraceptive et de discuter de l’importance ou non des risques liés à son utilisation, ainsi que de son efficacité ;
  • de s’informer sur l’efficacité discutable de méthodes contraceptives dites « naturelles » et de l’importance relative de leurs avantages et inconvénients ;
  • d’amener les élèves à découvrir comment sont produits des arguments à base d’études scientifiques et pourquoi la démarche scientifique reste plus fiable qu’une opinion ou une croyance.

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Les centrales nucléaires françaises de la vallée du Rhône sont-elles adaptées au risque sismique ?

Cette activité peut être réalisée lors du cycle 4 au collège.
Elle peut s’inscrire dans les programmes de SVT à la fin de la partie dédiée à la compréhension des notions de risque, d’aléa et de vulnérabilité.
J’indiquerai pour cette séance uniquement les éléments en « plus-value » par rapport à une séance classique, c’est-à-dire ce qui peut être ajouté à la fin de n’importe quelle activité sur ce thème pour compléter et remobiliser les notions abordées sur ce sujet. Entre 30 min et 1h sont nécessaires pour cette activité complémentaire.
On peut également envisager cette séance dans la partie « Choix énergétiques et impacts sur les sociétés » dans le programme d’enseignement scientifique de Terminale (plutôt en Physique-chimie), lorsqu’il est demandé de discuter des avantages et inconvénients de choix énergétiques comme le nucléaire.
Voici les liens vers les différents articles utilisés pour le cas où vous souhaiteriez les utiliser en entier :
https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/drome/seisme-du-11-novembre-centrale-nucleaire-du-tricastin-drome-presente-t-elle-danger-1755921.html
https://www.leparisien.fr/societe/seisme-dans-la-drome-la-centrale-nucleaire-de-cruas-arretee-pour-un-audit-11-11-2019-8191077.php
https://www.liberation.fr/checknews/2019/11/12/apres-le-seisme-en-ardeche-doit-on-s-inquieter-de-l-etat-des-centrales-nucleaires-de-cruas-et-tricas_1762771

Objectifs

Cette activité a pour buts :

  • d’étudier le traitement d’un séisme par différents médias, et de s’intéresser aux raccourcis qui peuvent être utilisés ;
  • de s’intéresser aux différents acteurs qui participent aux débats sur le nucléaire (associations, ONG, entreprises, organismes indépendants financés par l’état …) et leurs points de vue ;
  • de comprendre comment est construite une norme sismique, par qui… ;
  • de s’approprier mieux les échelles de magnitudes (puissance) de séismes, et souligner leur caractère logarithmique.

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Les pollutions médicamenteuses de l’eau – Introduction à la toxicologie

Cette activité prend place au cycle 4 au collège en SVT. Elle peut s’intégrer dans plusieurs parties du programme, avec notamment la gestion d’une ressource (l’eau), ou encore les interactions entre activité humaine et la préservation des écosystèmes.
Elle nécessite d’avoir préalablement abordé les notions du fonctionnement de la reproduction chez l’homme, et le rôle du contrôle hormonal dans la biologie reproductive. En physique-chimie, il est nécessaire de s’assurer que les élèves sont familiers avec les notions de concentration ; dans le cas contraire, il faut impérativement prévoir des exercices simples d’introduction à cette notion. Il est également nécessaire de s’entraîner à convertir les différentes unités, notamment celles peu utilisées (μg, ng…).
Il peut être intéressant de commencer la séance en distinguant pollution « chimique » et pollution biologique de l’eau, cette dernière causant bien plus de morts : c’est la cinquième cause de mortalité dans le monde (autour de 2 à 3 millions par diarrhées). Les pollutions toxiques ou cancérigènes sont bien moins nombreuses notamment car elles tuent au bout de nombreuses années et pas à coup sûr. Mais finalement, il s’agit d’une question de dose.

Objectifs

Cette activité a pour buts :

  • de comprendre les bases de la toxicologie, et notamment la notion de dose ; ainsi, un produit peut être présent mais si sa teneur est trop faible il peut ne pas causer de problèmes ;
  • de comprendre la notion de perturbateur endocrinien et le danger qu’ils représentent pour l’environnement voire l’homme par une action à très faible dose ;
  • d’alerter sur les risques encourus par les écosystèmes par la pollution, souvent oubliés par la préoccupation en termes de santé humaine ;
  • de comprendre la nécessité de surveiller la teneur en hormones de synthèse des cours d’eau et de l’eau potable ;
  • de comprendre que les stations d’épuration jouent souvent un rôle d’élimination des polluants chimiques ;
  • de discuter la qualité de l’eau dans les pays dits « développés » et les pays plus pauvres où la qualité de l’eau est bien plus discutable ;
  • de se rassurer quant à la consommation d’eau ou d’aliments pollués par chez nous : de nombreux articles alarmistes détectent des traces de produits dans l’eau ou les aliments, mais c’est la dose qui fait le poison ;
  • de présenter des données issues d’études scientifiques ; comprendre le principe d’une méta-analyse ;
  • de s’entraîner à manipuler les unités et les conversions.

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La théorie de l’évolution est-elle valide ?

Cette activité prend place en classe de 2nde générale et technologique.
Elle peut s’inscrire dans les programmes de SVT à la fin de la partie dédiée aux forces évolutives influençant la biodiversité : pour la mener correctement, il est donc nécessaire que les élèves aient déjà étudié les notions de mutation, de dérive génétique et de sélection naturelle.
Elle dure deux séances de 1h30.

Objectifs

Cette activité a pour buts :

  • de définir ce qu’est une théorie scientifique et de distinguer l’usage courant du mot théorie de l’application de ce terme au domaine scientifique ;
  • de comprendre les caractéristiques qui permettent d’estimer la solidité d’une théorie scientifique ; apprendre à distinguer ce qui peut ou non être remis en cause par de nouvelles découvertes et comment évolue une théorie scientifique ;
  • de consolider la compréhension de la théorie de l’évolution et revoir les forces évolutives ;
  • d’identifier qui cherche à rejeter cette théorie et comprendre que leur démarche n’est pas scientifique ;
  • de critiquer quelques arguments créationnistes.

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Esprit critique : outils et méthode pour le 2nd degré

Depuis le lancement du Cortecs en 2010, on rêvait de voir naître un livre consacré à l’esprit critique et s’adressant à tous les enseignants et personnels du collège et lycée, toutes disciplines confondues. Édité par Canopé et paru en mai 2019, on peut dire que c’est fait ! Codirigé par Gérald Attali (inspecteur d’histoire et géographie), Abdennour Bidar (Inspecteur Général de L’Éducation Nationale en philosophie, Denis Caroti (enseignant, formateur et chercheur doctorant), et Rodrigue Coutouly (personnel de direction et à l’époque Proviseur Vie Scolaire), cet ouvrage est le fruit d’un immense travail collectif, bâti entre autre par de nombreux enseignants ayant déjà contribué aux ressources du Cortecs : Vanessa August, Anne André, Marie-Hélène Hilaire, Marion Margerit, Julien Machet, Delphine Laugier, Aline Chirouze, Marie-Laurence Tinet, Guillemette Reviron et bien d’autres dont Pierre Leveau, Hélène Audard, Céline Persini et Stéphanie Bejian qui ont apporté tout leur savoir-faire pour le travail d’édition. Puisse cet ouvrage être un outil utile au service de toute personne, enseignant ou pas, désirant conduire des activités en lien avec l’éducation à l’esprit critique !

Résumé tiré de la page : http://www.pedagogie.ac-aix-marseille.fr/jcms/c_10719993/fr/ouvrage-canope-esprit-critique-outils-et-methodes

Fruit d’un travail collectif mené depuis 2016 entre Canopé et le rectorat d’Aix-Marseille, le livre « Esprit critique : outils et méthodes » publié en mai 2019 dans la collection Agir est un concentré de séquences pédagogiques pour toutes les disciplines. Plus d’une vingtaine d’auteurs ont participé à l’élaboration du contenu, basé sur des expériences de terrain et mises en œuvre au collège et au lycée. L’introduction et la première partie reviennent sur des considérations plus générales, cadres didactique et philosophique ainsi que sur le lien avec les programmes de l’enseignement secondaire. Un chapitre est entièrement consacré aux projets d’établissements.

C’est du sommaire de cet
ouvrage, et par souci de cohérence et de continuité, que les catégories
de présente dans la partie Pédagogie ont été créées. Nous ne manquerons
pas de publier les dernières actualités en lien avec les productions du
site Canopé – Développer l’esprit critique.

Voici la description qu’en donne l’éditeur :

Comment développer
l’esprit critique des élèves et l’exercer avec eux dans le cadre des
programmes du second degré ? Cet ouvrage propose, à travers plus d’une
vingtaine de séquences, des outils et des méthodes éprouvés,
transférables à différents niveaux et contextes, autour de trois
compétences principales : 

  • questionner et mettre à l’épreuve, 
  • analyser et vérifier, 
  • argumenter et débattre. 

Son ambition est de
montrer que l’ensemble des attitudes et habitudes qui constituent
l’esprit critique peut être cultivé quelles que soient les disciplines,
parce qu’il les traverse toutes. Exposant les enjeux et préconisations
liés à cette question, il prend également en compte la dimension
collective de l’esprit critique au sein de l’établissement et de ses
projets citoyens. 


Destiné aux enseignants, ainsi qu’aux équipes éducatives et de
direction des collèges et lycées, il offre des réponses concrètes et des
démarches variées pour faire apparaître les enjeux cognitifs, éthiques,
culturels et civilisationnels de l’esprit critique, à l’échelle de la
classe comme de l’établissement. Cet ouvrage existe en version
numérique.

Cours Zététique et autodéfense intellectuelle à l’Université de Nîmes

Vous connaissiez les formidables cours de Zététique et autodéfense intellectuelle de l’inénarrable Richard Monvoisin ? Depuis 2019, ce sont nos collègues Jérémy Attard et Denis Caroti qui se sont lancés dans l’aventure. S’adressant à tous les étudiants en première année de licence de Psychologie de l’Université de Nîmes, ce cours est en quelque sorte le petit frère de celui de Grenoble. En voici quelques détails.

Lorsque Jonathan Delmonte, chercheur en psychologie clinique et psychopathologie, nous a demandé si nous voulions bien dupliquer les enseignements de Richard dans son université, la réponse fut rapide : oui, bien entendu ! Dès janvier 2019, un nouveau cours est donc né : 12x2h pour presque 400 étudiants de l’université de Nîmes (L1 psychologie) et un sacré boulot pour corriger les dossiers sur lesquels ils planchent pendant plusieurs semaines… mais finalement, la satisfaction de transmettre des connaissances, des outils pratiques et méthodologiques et surtout un état d’esprit : rationalité, souci de la preuve, humilité intellectuelle, curiosité et envie d’aller toujours (se) questionner.

Le programme des cours (qui varie à la marge) :

  1. Introduction à la zététique, l’esprit critique et l’autodéfense intellectuelle
  2. Qu’est-ce qu’une ‘bonne’ preuve ? Fiabilité de nos perceptions, biais cognitifs et témoignages
  3. Quelques bases d’épistémologie pratique (1)
  4. Quelques bases d’épistémologie pratique (2)
  5. Arguments fallacieux et raisonnements
  6. Chiffres, statistiques et graphiques
  7. Langage et effets : Barnum, paillasson, impact
  8. Hasard, coïncidences et scénarios complotistes
  9. La Nature et ses dérives
  10. Médecines alternatives : le cas de l’homéopathie
  11. Les créationnismes
  12. Prison, justice et philosophie morale

Les contenus sont accessibles sur simple demande par mail : contact-at-cortecs.org

L’ouverture d’un tel cours est suffisamment rare en France pour remercier Jonathan Delmonte et toute l’équipe enseignante pour leur confiance et envie de faire naître ce cours. Et bien entendu un merci spécial à Richard Monvoisin qui a plus qu’inspiré le contenu distillé aux étudiants mais également à Henri Broch, qui lança les premiers enseignements de zététique il y a plus de 30 ans à Nice.